Guerre de Sept Ans
La guerre de Sept Ans, qui se déroule de 1756 à 1763, est un conflit majeur de l'histoire européenne, le premier qui puisse être qualifié de « guerre mondiale »[2],[3]. Elle concerne en effet les grandes puissances européennes de cette époque, regroupées en deux systèmes d'alliance, et a lieu sur des théâtres d'opérations situés sur plusieurs continents, notamment en Europe, en Amérique du Nord et en Inde.
Date |
– Traités de paix
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Lieu | Europe, Amérique du Nord, Amérique du Sud, Afrique, Asie |
Casus belli | Attaque de Frédéric II sur la Saxe |
Issue |
Victoire anglo-prussienne
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Cobelligérants :
Colonies : |
Europe :
Amérique :
| Europe :
Amérique :
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180 000 morts 20 000 morts ou blessés | 125 000 à 145 000 morts 168 000 morts ou blessés 138 000 morts ou blessés 3 000 morts ou blessés |
700 000 au total[1]
Guerre de Sept Ans
Batailles
- Minorque (navale) (1756)
- Pirna (1756)
- Lobositz (1756)
- Reichenberg (1757)
- Prague (1757)
- Kolin (1757)
- Hastenbeck (1757)
- Gross-Jägersdorf (1757)
- Moys (1757)
- Rochefort (1757)
- Rossbach (1757)
- Breslau (1757)
- Leuthen (1757)
- Carthagène (navale) (1758)
- Olomouc (1758)
- Saint-Malo (1758)
- Rheinberg (1758)
- Krefeld (1758)
- Domstadl (1758)
- Cherbourg (1758)
- Zorndorf (1758)
- Saint-Cast (1758)
- Tornow (1758)
- Lutzelberg (1758)
- Hochkirch (1758)
- Bergen (1759)
- Kay (1759)
- Minden (1759)
- Kunersdorf (1759)
- Neuwarp (navale) (1759)
- Hoyerswerda (1759)
- Baie de Quiberon (navale) (1759)
- Maxen (1759)
- Meissen (1759)
- Glatz (1760)
- Landshut (1760)
- Corbach (1760)
- Emsdorf (1760)
- Dresde (1760)
- Warburg (1760)
- Liegnitz (1760)
- Rhadern (1760)
- Berlin (1760)
- Kloster Kampen (1760)
- Torgau (1760)
- Belle-Île (1761)
- Langensalza (1761)
- Cassel (1761)
- Grünberg (1761)
- Villinghausen (1761)
- Ölper (1761)
- Kolberg (1761)
- Wilhelmsthal (1762)
- Burkersdorf (1762)
- Lutterberg (1762)
- Almeida (1762)
- Valencia de Alcántara (1762)
- Nauheim (1762)
- Vila Velha de Ródão (1762)
- Cassel (1762)
- Freiberg (1762)
- Jumonville Glen (1754)
- Fort Necessity (1754)
- Fort Beauséjour (1755)
- 8 juin 1755
- Monongahela (1755)
- Petitcoudiac (1755)
- Lac George (1755)
- Fort Bull (1756)
- Fort Oswego (1756)
- Kittanning (1756)
- En raquettes (1757)
- Pointe du Jour du Sabbat (1757)
- Fort William Henry (1757)
- German Flatts (1757)
- Lac Saint-Sacrement (1758)
- Louisbourg (1758)
- Le Cran (1758)
- Fort Carillon (1758)
- Fort Frontenac (1758)
- Fort Duquesne (1758)
- Fort Ligonier (1758)
- Québec (1759)
- Fort Niagara (1759)
- Beauport (1759)
- Plaines d'Abraham (1759)
- Sainte-Foy (1760)
- Neuville (1760)
- Ristigouche (navale) (1760)
- Mille-Îles (1760)
- Signal Hill (1762)
- Saint-Louis (1758)
- Gorée (1758)
- Gambie
Alors que le précédent grand conflit, la guerre de Succession d'Autriche (1740 – 1748), opposait principalement l'Autriche alliée à la Grande Bretagne et la Prusse alliée au Royaume de France, la guerre de Sept Ans oppose la France alliée à l'Autriche[4] et la Grande-Bretagne alliée à la Prusse. De nombreux autres pays européens participent cependant à cette guerre, notamment l'Empire russe aux côtés de l'Autriche et le royaume d'Espagne aux côtés de la France.
Ce conflit, dont la Prusse et la Grande-Bretagne sont sorties victorieuses, a eu des conséquences importantes sur l'équilibre des puissances européennes[5]. En Amérique du Nord et en Inde, il fait presque entièrement disparaître le premier empire colonial français. En Europe, la Prusse s'affirme dans l'espace germanique du Saint-Empire grâce à ses victoires de Rossbach sur la France et de Leuthen sur l'Autriche (1757) : elle conteste désormais l'ancienne prééminence de l’Autriche.
Le début de la guerre de Sept Ans est traditionnellement daté du , jour de l'attaque de la Saxe par Frédéric II, qui fait le choix de devancer une offensive autrichienne visant à reprendre la Silésie. Cependant, l’affrontement avait débuté plus tôt dans les colonies d’Amérique du Nord.
Contexte géopolitique
Conflits entre puissances européennes
En Europe continentale, la principale zone de friction est la Silésie, une province riche, peuplée et développée conquise en 1742 par le royaume de Prusse aux dépens du royaume de Bohême lors de la guerre de succession d’Autriche. Si la toute jeune Marie-Thérèse de Habsbourg obtient bien d’être confirmée sur le trône de Vienne, avec le titre d’archiduchesse d’Autriche, de reine de Hongrie et de Bohême (son mari François de Lorraine portant le titre d’empereur romain germanique), Frédéric II réussit en revanche son coup de main sur la Silésie. En 1754, Marie-Thérèse n'est toujours pas résolue à la perte de cette province[6].
De leur côté, les Français s’inquiètent depuis longtemps des visées de la Grande-Bretagne sur leur domaine colonial (Nouvelle-France, qui allait de l'Acadie et du Canada à la Louisiane, Antilles et Inde française).
Le conflit larvé entre la France et la Grande-Bretagne tourne autour de plusieurs points :
- la possession de l’immense territoire de la Louisiane (situé entre les Grands Lacs, le golfe du Mexique, les Appalaches et le Mississippi)[7] ;
- la concurrence dans le lucratif commerce de peaux au détriment du respect des traités avec les différentes tribus amérindiennes[8] ;
- la crainte des Britanniques de voir l’influence des catholiques grandir via les colonies françaises et la présence de missionnaires jésuites en Nouvelle-France ;
- la zone de pêche au large de Terre-Neuve, très poissonneuse et ses droits de pêche contestés par les uns et les autres.
Le point le plus important est sans conteste le contrôle de la vallée de l’Ohio. Ce territoire est convoité par les Britanniques, les Français mais aussi les Iroquois. Les Français fondent leur revendication sur le traité d’Utrecht de 1713, qui stipule que les Iroquois ne sont pas des sujets de la couronne britannique. Or, comme l’Ohio est considéré comme une terre conquise par les Iroquois sur les Shawnees depuis 1742, les Britanniques s’en estiment les propriétaires légitimes. Toutefois, concrètement, cette zone, fortifiée par le Gouverneur Duquesne, est de fait placée sous le contrôle des Français.
France
La France se trouve dans une situation inconfortable en Europe et hors d'Europe. Durant la guerre de succession d’Autriche, elle n’a rien obtenu de son alliance avec la Prusse si ce n’est un statu quo, et ses finances ont été durement éprouvées par cette guerre inutile. La paix séparée conclue par les Prussiens en 1745 et leur alliance avec les Britanniques en 1756 ont fortement contrarié la France et, encouragé par sa cour (dont la marquise de Pompadour, favorite du roi), Louis XV se résigne à un renversement d’alliance pour abandonner la Prusse et s’allier avec l’Autriche. Ce traité d’alliance[9], signé en mai 1756 à Versailles, vise à contrecarrer la montée en puissance de la Prusse et met fin à plusieurs siècles d’inimitié avec Vienne[10]. Le , la France conclut une convention avec la Suède pour maintenir les résultats de la paix de Westphalie[11]. La Suède promet une armée d'hommes, subsidiée par la France. Malgré cela la France reste la première puissance militaire d'Europe. Elle possède la première armée d'Europe, soit environ 400 000 hommes et une marine de très bonne qualité quoiqu'inférieure à celle des Britanniques.
La situation en Amérique du Nord, également très tendue, inquiète le gouvernement français : l’immigration française, trop limitée, ne permet pas à la France d’assurer un contrôle réel et une défense efficace de son empire colonial. Les pertes de territoires faisant suite à la guerre de Succession d'Espagne[12] ont sérieusement amputé les possessions françaises mais l’ambition d’étendre la domination sur le continent américain demeure. En Inde, les affrontements précédents ont tourné plutôt à l’avantage des Français mais les princes indiens, prompts à changer d'alliance, modifient en permanence l’équilibre existant.
Grande-Bretagne
La Grande-Bretagne possède déjà un empire colonial très étendu, très peuplé (à l’inverse des colonies françaises) et qui rapporte beaucoup d’argent à la couronne. Elle ne possède plus d’armée puissante et, malgré la guerre civile anglaise[13] au siècle précédent et la création de la New Model Army par Oliver Cromwell et Thomas Fairfax, l’armée britannique reste de petite taille. Elle est principalement utilisée pour maintenir la paix intérieure et pour la conquête et la pacification des colonies. Le point fort des Britanniques est la déjà fameuse Royal Navy. Comme Mahan l’expliqua plus tard, elle est le fondement de la puissance britannique qui permet de maîtriser le commerce maritime, de contrôler et de conquérir les colonies et, militairement parlant, de déplacer la frontière de la Grande-Bretagne sur les côtes de ses adversaires et non sur les siennes.
Cependant, l'électorat de Hanovre est une épine stratégique dans le pied du gouvernement britannique : les électeurs de Hanovre ont accédé à la couronne britannique depuis George Ier (1714). Politiquement, les Britanniques ne peuvent donc naturellement pas l’abandonner, mais en cas de conquête du Hanovre par la France, des concessions seraient nécessaires pour le récupérer. Les Britanniques cherchent donc avant chaque conflit à trouver un allié continental pour les aider à protéger le Hanovre. Cet allié se trouve être la Prusse, suivie de certains États allemands.
Hors d’Europe, la principale zone de friction de la Grande-Bretagne avec la France est en Amérique du Nord. La guerre de succession d’Espagne lui a permis de prendre le contrôle d’une partie de l’Acadie[14], et d'être assurée de totalement contrôler la baie d’Hudson et Terre-Neuve, contrôle reconnu par le traité d'Utrecht conclu en 1713[15]. Mais le conflit n’est pas réglé définitivement. En Inde, la situation est aussi conflictuelle mais les deux puissances coloniales ne possèdent que des comptoirs et, sur un théâtre d’opérations aussi éloigné, elles doivent jouer avec les très versatiles alliés du sous-continent indien.
Autriche
L’Autriche du XVIIIe siècle s'est isolée diplomatiquement. En 1713, Charles VI, empereur du Saint-Empire, fait adopter la Pragmatique Sanction[16] afin de s’assurer la transmission du trône à l'aînée de ses filles à défaut d'un héritier mâle. En 1716, le fils de Charles VI meurt avant d'atteindre l'âge d'un an, et après la mort de Charles VI, le , Marie-Thérèse hérite de la couronne impériale. Plusieurs pays, dont la France, veulent profiter de cette entorse à la tradition salienne pour contester la puissance autrichienne.
La guerre de Succession d'Autriche qui s’ensuit se conclut par deux traités pour l’Autriche. Au traité de Breslau, elle reconnaît la perte de la Silésie au profit de la Prusse, et au traité d’Aix-la-Chapelle, elle perd les duchés de Parme, Plaisance et Guastalla. Ne pouvant se résigner à cette perte, la Silésie étant une province riche, l’Autriche veut ardemment reprendre ce territoire et, si possible, humilier la Prusse.
Prusse
La Prusse est la puissance émergente du XVIIIe siècle. Sous la houlette de Frédéric Ier, puis de Frédéric II, elle s’impose comme un acteur majeur en Europe centrale. Devant défendre des territoires morcelés, elle dispose de moyens humains et industriels limités, mais son armée est très disciplinée et bien entraînée. Frédéric II est de plus un excellent stratège et tacticien. Il a conquis la Silésie lors de la guerre de succession d’Autriche.
Frédéric II s'inquiète du rapprochement entre la Grande-Bretagne et la Russie. Redoutant un encerclement par une alliance de la Russie, de l'Autriche et de l'union saxo-polonaise, il propose ses services à la Grande-Bretagne pour protéger le Hanovre. La Prusse et la Grande-Bretagne concluent un accord sans contenu précis, la convention de Westminster, le [17]. Cet accord provoque le mécontentement de la France, jusque-là alliée de la Prusse, et accélère son rapprochement avec l'Autriche[18]. Cependant, même avec les subsides britanniques, l’armée prussienne est en infériorité numérique et en position stratégique délicate face à ses adversaires.
Russie
En Russie, la tsarine Élisabeth[19], après avoir conquis le pouvoir en 1741, confie la direction du pays au vice-chancelier Alekseï Piétrovitch Bestoujev-Rioumine, un fervent défenseur de l’alliance britannique et autrichienne. Durant la guerre de succession d’Autriche, la Russie réussit à se sortir du conflit sans dommages mais une de ses principales inquiétudes est la montée en puissance de la Prusse qu’elle souhaitait retransformer en petit État allemand impuissant. Dans cette optique, l’alliance de la Prusse avec la Grande-Bretagne est une mauvaise nouvelle et nécessite de revoir la position diplomatique de la Russie : c’est donc tout naturellement que la Russie se range dans le camp franco-autrichien, d'autant que le roi Louis XV se montre enthousiaste quant à l'aide de ce nouvel allié de poids et y envoie même le célèbre chevalier d'Éon pour finir de convaincre la Tsarine en la préservant des conseils anglophiles du vice-chancelier.
Spirale de la guerre
En comparaison avec le rapport de forces antérieur, l’année 1756 voit un changement complet d’alliances en Europe : la Grande-Bretagne et la Prusse s’allient contre la France, l’Autriche et la Russie. Une fois ce jeu de chaises musicales diplomatiques terminé, les protagonistes se mettent immédiatement en ordre de bataille pour finir ce qui a été laissé en chantier en 1748 : la possession de la Silésie pour l’Autriche et la rivalité nord-américaine pour la France et la Grande-Bretagne.
En ce qui concerne l’Amérique du Nord[20], le conflit larvé est déjà commencé depuis 1743 et ne demande pas beaucoup pour éclater totalement. Plusieurs heurts autour des forts Chouaguen (Bataille de Fort Oswego) et Carillon poussent la Grande-Bretagne à réagir en mettant en place un blocus « non officiel » (puisque sans déclaration de guerre) contre les colonies d’Amérique du Nord. En réaction, la France décide de s’en prendre à la base navale de Minorque et de menacer Hanovre. La Prusse, sentant la tension monter, et sachant par ses espions que l’Autriche et la Russie mobilisent leurs armées, décide de prendre les devants et attaque la Saxe. La guerre de Sept Ans a officiellement commencé.
Déroulement
Opérations militaires en Europe
La guerre en Europe se déroule sur deux fronts assez distincts : l’Europe centrale d’un côté avec la Silésie comme théâtre et l’Europe occidentale avec l’affrontement naval franco-britannique et la bataille pour le Hanovre.
Succès prussiens et français de 1756
En Europe centrale, Frédéric II est en position d’infériorité mais peut compter sur une armée parfaitement opérationnelle. Son idée maîtresse est de profiter de sa position centrale pour défaire les trois alliés de manière distincte et sur un terrain de son choix. La Saxe représente une première cible de choix parmi les alliés de l’Autriche : c’est un pays riche mais avec une armée faible. Une fois la décision prise, l’armée prussienne fond sur l’armée saxonne et la défait. Il bat ensuite une armée autrichienne à la bataille de Lobositz le 1er octobre mais avec de lourdes pertes[21]. La Saxe tombe sous la coupe de la Prusse, opération financièrement rentable puisqu'elle fournira environ un tiers des revenus de la monarchie prussienne pendant le conflit[18]. Mais cette brève campagne a pris plus de temps que prévu : il n’y aura pas d’autres offensives pour cette année puisque l’hiver arrive.
Pendant ce temps, la France prend l’offensive en Méditerranée. Le , un mois avant la déclaration de guerre officielle entre Versailles et Londres, 12 navires de ligne et 173 transports commandés par La Galissonnière débarquent 15 000 hommes à Minorque, second pilier, avec Gibraltar, de la défense britannique en Méditerranée. La Royal Navy, trompée par de faux préparatifs d'invasion à travers la Manche, est surprise. Les 13 vaisseaux mal fichus et mal servis qu'elle confie en hâte à l'amiral Byng ne lui portent pas bonheur : La Galissonnière le repousse mollement le , mais cela suffit. Minorque tombe le aux mains du duc de Richelieu. Byng, bouc-émissaire, est accusé de n'avoir pas « fait tout son possible ». Condamné, il est fusillé en dépit des multiples appels à la grâce royale. Au nord, l’armée française, sous les ordres de Soubise, se prépare à avancer vers le Hanovre et vers la Silésie.
Frédéric II de Prusse à son apogée (1757)
Frédéric, une fois la défaite de la Saxe consommée, se tourne vers la Bohême et part à l’assaut de Prague, défendue par l’armée autrichienne commandée par le maréchal Brown et Charles de Lorraine. L’affrontement est sanglant mais les Prussiens s’imposent et assiègent Prague (). Avec son principal corps d’armée assiégé dans Prague, l’Autriche est en difficulté mais le maréchal Daun rassemble une nouvelle armée et marche vers Prague. Frédéric va à leur rencontre mais, profitant d’une position avantageuse, les Autrichiens défont les Prussiens à la bataille de Kolin le , obligeant Frédéric à lever le siège et à battre en retraite en Silésie. La Prusse se retrouve alors dans une position délicate avec l’armée autrichienne qui avance sur elle du Sud depuis la Bohême et l’armée française arrivant de l’Ouest. L’armée russe s’impose en outre à la bataille de Gross-Jägersdorf le mais est arrêtée à Kœnigsberg et ne peut envahir la Prusse orientale[22].
Les Autrichiens, commandés par Charles de Lorraine, prennent l'avantage lors des batailles de Moys et Breslau et semblent sur le point de reconquérir la Silésie. Frédéric II décide alors de concentrer ses forces et d’attaquer ses ennemis un par un. Il se tourne d’abord vers les Français et les défait sévèrement à la bataille de Rossbach le . Ensuite, il regroupe son armée et repart vers l’est où il écrase l’armée autrichienne à la bataille de Leuthen, le .
L’offensive française vers le Hanovre, dorénavant dirigée par le maréchal d'Estrées à la tête d’une armée coalisée de 100 000 hommes, progresse bien face aux Britanno-Hanovriens. La supériorité numérique française finit par s’imposer à la bataille de Hastenbeck le , et le Hanovre capitule. En réaction, et dans le but de détourner l’armée française du Hanovre, William Pitt l’Ancien organise la stratégie britannique sur le continent autour de « descents », des expéditions navales avec débarquement de troupes et raids en territoires alliés (cette stratégie n’est pas sans rappeler celle, beaucoup plus réussie, des Anglais au début de la guerre de Cent Ans). La première de ces expéditions est organisée à l’automne et vise Rochefort, le grand arsenal français[23]. Le , John Mordaunt et Edward Hawke quittent la Grande-Bretagne et, le , prennent l’île d’Aix, mais Rochefort est imprenable et l’expédition retourne bredouille le 1er octobre.
Enlisement de la situation (1758)
Après la victoire de Leuthen, Frédéric descend vers le sud à la poursuite de l’armée autrichienne mais ne parvient pas à se débarrasser définitivement de cet adversaire. Or, pendant ce temps, les armées russe et suédoise passent à l’attaque. Frédéric est obligé de revenir sur son sol pour y faire face. Son offensive contre l’armée russe culmine à la bataille de Zorndorf le . Cette bataille sanglante arrête l'offensive ennemie et permet à Frédéric d’empêcher la jonction des Russes et des Autrichiens. Les Suédois pénètrent en Brandebourg et mettent les Prussiens en difficulté à la bataille de Tarnow, le , puis à celle de Fehrbellin (en) le 28. La situation de la Prusse passe alors de dangereuse à catastrophique : le , à la bataille de Hochkirch, Frédéric est battu nettement par les Autrichiens. Cependant, les Prussiens parviennent à repousser les Russes lors du premier siège de Kolberg. En outre, la victoire de Hochkirch n'est pas exploitée par le maréchal von Daun, dont la prudence permet à l'armée prussienne de se retirer en bon ordre et de prendre ses quartiers d'hiver.
Après Rossbach, l’armée française subit un deuxième choc. En effet, la Grande-Bretagne refuse de ratifier la capitulation du Hanovre et décide de poursuivre le combat. Une nouvelle armée se forme donc sous les ordres de Ferdinand de Brunswick-Lunebourg (sans aucune troupe britannique : des mercenaires sont stipendiés par Londres) et, en six semaines, l’armée française est repoussée du Hanovre, ce qui l'empêche de profiter des difficultés de la Prusse. Le coup est dur et montre l’incapacité de l’armée française, en supériorité numérique, à s’imposer contre un ennemi plus mobile et plus décidé. En parallèle, l’armée britannique se livre à une deuxième attaque : elle débarque dans la baie de Cancale le et progresse vers Saint-Malo[24]. L’arrivée d’une armée de secours française empêche les Britanniques de prendre la ville et ils ne peuvent que brûler les bateaux du port. L’armée britannique rembarque et rentre en Grande-Bretagne après avoir caressé brièvement l’idée de débarquer à Cherbourg (le mauvais temps a contrarié ses plans). Nullement découragé par ses deux précédents échecs, Pitt organise une troisième expédition en direction de Cherbourg. Soutenue par un bombardement naval, l’armée britannique débarque et capture Cherbourg[25]. Après avoir pillé la ville, l’armée britannique reprend la mer et débarque à nouveau le près de Saint-Malo pour essayer de prendre la ville. C’est un nouvel échec. Le mauvais temps force la flotte à chercher un port plus abrité à Saint-Cast ; l’armée doit la rejoindre à pied. L’intervention de l’armée française menace un temps l’expédition mais le sacrifice de l’arrière-garde sous les ordres du général Dury permet à l’armée britannique de rembarquer[26].
Difficultés de la France et de la Prusse (1759)
L’année 1759 est d'abord terrible pour la Prusse qui voit les défaites s’accumuler et son territoire envahi de toutes parts : à la bataille de Kay, le , Von Wedel est défait par les Russes ; à la bataille de Kunersdorf, le , Frédéric est aussi battu par une armée russo-autrichienne ; à la bataille de Maxen, le , la totalité du corps du général Von Finck se rend aux Autrichiens. La Prusse est au bord de l’effondrement et Frédéric II envisage le suicide. Néanmoins, une mauvaise entente entre les généraux russes et autrichiens les empêche de clore définitivement la guerre, tandis que Frédéric résiste toujours, aidé par des renforts amenés par son frère Henri.
Malgré la défaite de l’année précédente, l’armée française reprend l’offensive contre le Hanovre. Début juin, une armée de 80 000 hommes aux ordres de Contades et Broglie pénètre en Hanovre. L’armée de Ferdinand de Brunswick-Lüneburg ne comptant que 35 000 hommes, celui-ci cherche avant tout à esquiver l’armée française tout en menaçant ses lignes de communication. Pourtant, début juillet, Broglie parvient à prendre la ville de Minden, important centre de ravitaillement, et ainsi fournit à l’armée française un point d’appui pour reconquérir le Hanovre. Ferdinand se doit de réagir. Il rassemble alors son armée et attaque Minden le 1er août. La bataille se solde par une défaite française. En parallèle, après la défaite de Kunersdorf, Ferdinand doit envoyer des renforts pour aider Frédéric et se voit dans l’impossibilité de poursuivre offensivement la campagne contre les Français[27],[28].
Durant cette même période, un plan est élaboré par les Français pour tenter d’envahir la Grande-Bretagne. À cette fin, une armée est rassemblée à l’embouchure de la Loire et les flottes de Brest et Toulon doivent assurer la maîtrise des mers. Malheureusement pour les Français, la flotte de Toulon est battue par la flotte britannique de Boscawen à la bataille de Lagos () et, à la bataille de Quiberon (), l’amiral Edward Hawke défait la flotte de Brest.
Le « miracle de la maison de Brandebourg » (1760 à 1762)
Après une année 1759 catastrophique, la Prusse continue donc à résister. Contre les Autrichiens et en l'absence de son roi, elle subit une nette défaite à Landshut () et un échec à Meissen. En outre, la prise de Marbourg ainsi que la perte de Glatz en Silésie ne sont que partiellement compensées par les deux victoires de Liegnitz () et Torgau (), cette dernière étant extrêmement coûteuse et peu décisive[22]. Les armées russe et autrichienne ont même occupé Berlin le . Heureusement pour la Prusse, les Russes subissent un nouvel échec devant Kolberg en septembre, qui les bloque effectivement, tandis que les Autrichiens échouent devant Breslau, en Silésie.
En Saxe, les Autrichiens libèrent Dresde et y repoussent une tentative d'assaut du roi de Prusse. À l’ouest, le scénario de l’année précédente se répète : l’armée française, supérieure en nombre, lance l’offensive mais se voit déjouée par la mobilité des alliés et l’année s’achève sans avancée notable.
En 1761, étant donné la situation stratégique et l’épuisement de son armée (qui s'est réduite à 100 000 hommes), Frédéric II est contraint de passer à une stratégie purement défensive : c’en est fini des victoires de Rossbach, Leuthen ou même Liegnitz où l’armée prussienne avait su montrer ses formidables capacités manœuvrières. Cependant, il tient encore la majeure partie de la Saxe et de la Silésie qu'il doit à présent défendre, tandis qu'il lance ses unités dans des raids derrière les lignes russes afin de détruire certains de leurs entrepôts et de capturer des prisonniers.
En août-, il remporte un succès défensif au camp de Bunzelwitz : les Autrichiens et Russes encerclent la position mais se querellent entre eux et se séparent sans avoir donné l'assaut. En revanche, la forteresse prussienne de Schweidnitz est prise par Laudon le 1er octobre. Après cette victoire, les Autrichiens ne poussent pas leur avantage. Quant aux Russes, ils se désintéressent de la Silésie mais reprennent le siège de Kolberg qui capitule le . Cette victoire importante est toutefois trop tardive pour leur permettre de lancer une nouvelle offensive avant le printemps de l'année suivante. Ainsi, l'année 1761 a été marquée par des opérations limitées et par la passivité des ennemis de Frédéric, ce qui lui a permis de limiter ses pertes.
1762 devait être l’année de l'effondrement pour la Prusse, ses adversaires tenant désormais la Poméranie et une large partie de la Silésie. Néanmoins, ils sont également épuisés et l'Autriche est au bord d'une crise financière qui la contraint à réduire la taille de son armée[22]. Mais, le , la tsarine Élisabeth meurt. C’est un événement important car le successeur de la tsarine, Pierre III de Russie, est prussophile : il signe immédiatement un traité de paix et laisse l’Autriche isolée. Revigoré par ce retournement de fortune inespéré, Frédéric remporte une dernière victoire contre le maréchal Daun à Burkersdorf (), puis la ville de Schweidnitz est reprise le et, sous le commandement de son frère Henri, l'armée prussienne repousse l’armée autrichienne de Silésie lors de la bataille de Freiberg (). Ces succès, bien que limités, convainquent les Autrichiens que la victoire est devenue impossible. De leur côté, les Français sont dans une impasse stratégique face aux Anglo-Hanovriens et doivent évacuer la Hesse-Cassel à l'issue du siège de Cassel. Pour la Prusse, exsangue, c’est un dénouement inespéré de la guerre.
Le terme « miracle de la maison de Brandebourg » fut appliqué par les historiens pour qualifier la mort de la tsarine et le revirement de la Russie. En réalité, ces termes furent employés originairement par Frédéric II de Prusse dans une lettre du premier septembre 1759 adressée à son frère. Il y qualifiait de miracle l'inaction de ses adversaires après la bataille de Kunersdorf. « Dans un moment où nos ennemis avaient passé l'Oder, et où ils auraient pu tenter une nouvelle bataille et terminer la guerre, ils marchèrent de Müllrose à Lieberose. » Au lieu de profiter de la victoire pour marcher sur Berlin et prendre la capitale des Prussiens, ils déplacèrent donc leurs armées de 37 km.
Opérations militaires aux Amériques
Au Canada, cette partie du conflit porte le nom de Guerre de la Conquête. En 1754, la France possédait un vaste empire en forme de croissant qui s’étendait de la région du Canada et des Grands Lacs jusqu’aux rives du golfe du Mexique. Elle avait réussi à s’allier avec de nombreuses et puissantes tribus algonquines, huronnes et montagnaises qui l'aidèrent dans son établissement, avec l'exception notable des Iroquois qui demeurèrent la plupart du temps fidèles alliés des Britanniques.
Un chapelet de fortins et de postes réunissait le Canada aux possessions du sud encerclant les Treize Colonies britanniques de la côte atlantique. Les possessions britanniques se trouvaient donc isolées à l’est des Appalaches et les colons américains ne pouvaient pas progresser vers l’ouest.
La partie nord-américaine du conflit opposa la Grande-Bretagne et ses colonies d’Amérique aux Français et à leurs alliés amérindiens[29]. Il s'agissait notamment d'une lutte pour dominer les territoires les plus intéressants pour le piégeage (Trappeur) des castors, lièvres, lynx, loups dont les fourrures étaient à l'époque source d'importants bénéfices commerciaux (la ressource s'étant épuisée en Europe par suite de la surexploitation). Pour les Américains, cette guerre ne s’appelle pas « guerre de Sept Ans » mais « French and Indian War », indiquant bien qu’elle concerne aussi les Amérindiens, même si c’est avant tout un conflit entre puissances coloniales européennes.
Dans les Antilles, les Français possèdent un certain nombre d’îles qui sont d’une grande importance économique car elles fournissent beaucoup de sucre, d’épices et de vanille ; les Britanniques possèdent aussi des îles, mais la principale puissance (déclinante) de la région est l’Espagne.
Début du conflit en Amérique du Nord (1754-1755)
Les premières escarmouches du conflit ont lieu dans la région de l’actuel emplacement de Pittsburgh. Les Virginiens, sous les ordres de William Trent (en), y élèvent tout d’abord un fort, le Fort Prince George (en) en . Les Français les délogent le et bâtissent à la place Fort Duquesne. George Washington attaque 31 soldats canadiens aux petites heures du matin le à la bataille de Jumonville Glen. Il en tue 10, incluant le commandant, Joseph Coulon de Jumonville. Ensuite, Washington construit Fort Necessity le . Cependant, face à un grand nombre de Canadiens et de Français sous le commandement du frère de Jumonville, il capitule le à la bataille de Fort Necessity[30]. Les tentatives britanniques pour reprendre le fort seront des échecs. En réaction, la Grande-Bretagne décide d’envoyer deux régiments en renfort ainsi que 10 000 £ et 2 000 mousquets pour lever des troupes coloniales. En parallèle, du au , à Albany, les représentants des colonies britanniques se réunissent pour discuter d’une alliance avec les tribus amérindiennes mais aussi décider de l’organisation des colonies. Un traité de non-agression sera conclu avec les tribus iroquoises mais il aura peu de conséquences sur le conflit qui va suivre.
L’année 1755 voit les escarmouches entre les Français et les Britanniques se multiplier. La principale zone d’affrontement est, comme prévu, la vallée de l'Ohio, revendiquée par les deux protagonistes. La principale action est l’attaque du fort Niagara par les Britanniques, qui se solde par un échec. Dans la région de Fort Duquesne, un affrontement oppose 2 000 soldats britanniques (dont 450 colons) à 900 Français et Amérindiens[31]. Combattant avec des tactiques « à l’européenne » (ordre serré, colonne de bataille…), les Britanniques sont vaincus par les Français qui utilisent des méthodes locales proches de la guérilla (ordre dispersé, tir et repli). Dans la région du lac Champlain, Jean-Armand Dieskau, commandant des troupes régulières françaises arrivées en 1755, tente de capturer le Fort Edward, doit renoncer, est défait à la bataille du lac George par William Johnson ; blessé et fait prisonnier par les Britanniques, Dieskau sera remplacé par Louis-Joseph de Montcalm l'année suivante.
Un deuxième acte d'agression est commis par l'amiral Edward Boscawen, qui établit un blocus à l'entrée du golfe du Saint-Laurent avec 11 vaisseaux de guerre et l'ordre d'intercepter et de détruire tout navire français[32]. Le vice-amiral Dubois de La Motte partit de Brest le et commanda une escadre de 22 vaisseaux avec des troupes régulières en renfort pour la Nouvelle-France[33]. Au large du cap Race, pointe sud de Terre-Neuve, trois navires français tombèrent dans une embuscade ; le combat du 8 juin 1755 éclata, plusieurs navires anglais prirent en chasse et firent feu sur deux navires français, l'Alcide et le Lys, qui furent capturés, pendant que le Dauphin Royal réussit à échapper à deux navires anglais qui le poursuivaient. Le harcèlement par les Britanniques durant l'année 1755, ainsi que la saisie de ses navires et ses marins, contribua à la déclaration de guerre par les deux belligérants au printemps de 1756[34].
Pendant ce temps-là, en Nouvelle-Écosse, territoire britannique depuis le traité d’Utrecht en 1713, le gouverneur Charles Lawrence veut régler le problème des Acadiens, colons d’origine française et donc suspects à ses yeux en cas de conflit avec la France[35]. Il décide alors d’obliger les Acadiens à se soumettre à la couronne, ce qui implique de pouvoir servir dans l’armée britannique. Après leur refus, les Acadiens furent déportés par l’armée britannique, se réfugièrent au Québec pour certains, et en France pour d'autres. Mais la majeure partie fut disséminée de force dans les différentes colonies britanniques de l’époque. Une majorité de leurs descendants allèrent par la suite s’installer sur les terres de Louisiane pour donner naissance à la communauté des Cadiens[36],[37]. Cet épisode particulièrement tragique de l’histoire américaine porte le nom du Grand Dérangement. L’affrontement prend de l’ampleur aussi au niveau maritime entre la marine française, qui veut protéger l’accès à la Nouvelle-France et ravitailler ses colons, et la Royal Navy britannique qui veut instaurer un blocus.
Succès français (1756-1757)
Dans l’escalade en cours, les deux camps décident de nommer un commandant en chef en prévision de l’affrontement à venir : pour les Britanniques, c'est le général John Campbell, comte de Loudon, et pour les Français Louis-Joseph de Montcalm[38]. Le , la Grande-Bretagne déclare formellement la guerre à la France à la suite de l’attaque prussienne contre la Saxe : c’est le début officiel de la guerre de Sept Ans. Alors que la France se concentre avant tout sur sa stratégie européenne, la Grande-Bretagne veut profiter de ce conflit pour régler définitivement le conflit nord-américain et affirmer sa mainmise sur tout le continent, de la baie d’Hudson jusqu’aux Antilles.
Dès son arrivée, Montcalm réalise que son premier souci est de conserver la communication entre le Canada, centre névralgique de la Nouvelle-France et l’Ohio, objet du conflit territorial. Or cette communication est menacée par la présence du fort britannique d’Oswego, sur la rive du lac Ontario. Rapidement menée avant que les Britanniques ne puissent s’organiser, l’expédition sur Oswego est un succès et le fort est complètement rasé[39], les Français faisant 1 700 prisonniers.
En 1757, les renforts britanniques commencent à affluer avec instruction de partir à l’offensive, avec comme objectif stratégique la prise de la forteresse de Louisbourg. Cette forteresse, située à l’embouchure du Saint-Laurent, commande aussi bien l’accès au Québec que les zones de pêche très riches au large de la côte. Loudon dirige alors son armée vers Halifax en Nouvelle-Écosse et attend là l’intervention de la marine. Mais la flotte britannique ayant pris du retard, trois escadres françaises se regroupent à Louisbourg et bloquent l’intervention de la marine. L’armée britannique hésite et, la saison avançant, ne peut plus espérer mener une campagne : Loudon décide alors de battre en retraite vers New York.
Pendant ce temps, Montcalm, profitant de l’immobilisation de l’armée britannique dans sa campagne vers Louisbourg, continue de renforcer la frontière franco-britannique au niveau des Grands Lacs. Après Fort Oswego, il attaqua le fort William Henry à la pointe sud du lac George, (Bataille du lac George)[40] (anciennement lac du Saint-Sacrement). La résistance du colonel Monro fut héroïque, mais, sans espoir de renforts, la place fut prise et brûlée, les Français réussissant à faire 2 300 prisonniers.
L’année 1757 se finit encore à l’avantage des Français. William Pitt l'Ancien, Premier ministre britannique, décide alors de nommer Abercrombie commandant des forces britanniques.
Renversement britannique (1758)
Les renforts continuent d’arriver côté britannique et la Navy parvient à mettre en place un blocus efficace qui interdit tout renfort côté français. L’offensive britannique s’effectue selon trois axes : Louisbourg, Fort Carillon, et Fort Duquesne.
En juillet, le général Abercrombie, nouveau général en chef des armées britanniques, se met en marche avec une armée de 7 000 réguliers et 9 000 coloniaux en direction du lac Champlain avec la ferme intention de s’en prendre à Fort Carillon. Montcalm fait alors converger sa petite armée de 3 000 hommes vers le fort pour les arrêter. La bataille de Fort Carillon voit les troupes britanniques avancer en ordre serré vers les troupes françaises qui les déciment par leur feu. Cette bataille se solde par une nette victoire des Français, qui étrillent leur adversaire à 1 contre 5 et l’avance britannique dans cette direction est stoppée. Néanmoins, les dirigeants britanniques, conscients de leur supériorité numérique et de la longueur de la frontière, ont lancé en parallèle une offensive vers l’Ohio et une autre vers Louisbourg. Le , ne disposant que de 100 hommes de garnison face aux 2 000 hommes du capitaine Bradstreet, Fort Frontenac est pris. C’est un coup dur car ce fort est un centre de ravitaillement important des Français dans cette zone. Fin octobre, les Britanniques s’en prennent au Fort Duquesne et le prennent facilement (il sera renommé Fort Pitt en l'honneur de William Pitt l'Ancien, actuelle Pittsburgh).
Sur la côte atlantique, une action combinée de l’armée et de la marine permet aux Britanniques de débarquer une armée de 14 600 soldats au sud de Louisbourg. Après une campagne de six semaines, la garnison de Louisbourg se rend aux Britanniques le . L’année se termine donc nettement en faveur des Britanniques : s’ils n’ont pas progressé dans leur conquête du Canada, ils ont néanmoins pris possession de la frontière et surtout complètement isolé la Nouvelle-France avec la prise de Louisbourg. Ils ont donc en main toutes les cartes pour se lancer à l’assaut l’année suivante.
Prise de Québec et de Montréal (1759-1760)
Les offensives britanniques se multiplient pour clarifier les zones abandonnées par les Français : les forts de la vallée de l’Ohio sont pris les uns après les autres, dont le fameux Fort Carillon le et le lac George devient une base britannique en prévision des futures offensives sur le Canada. Dans la foulée, le lac Champlain est conquis, mais la saison est trop avancée pour pousser encore plus vers le nord et vers Montréal.
Le long du Saint-Laurent, après la prise de Louisbourg, les Britanniques disposent d’une base d’attaque formidable et ne vont pas tarder à l’utiliser. Le , la flotte britannique arrive en vue de Québec avec une armée imposante. Le siège commence le mais la forteresse est solidement défendue par 15 000 hommes et résiste farouchement. Dans la nuit du 12 au , les Britanniques réussissent à débarquer une armée dans une zone non défendue et forcent Montcalm à livrer bataille. Le , le Britannique Wolfe, le Français Montcalm et leurs 4 800 soldats respectifs se font face dans les plaines d'Abraham, sous la ville de Québec. Tous deux y périssent, mais le premier en vainqueur. Vaudreuil dirige la retraite des troupes[41]. La garnison de Québec se rend aux Britanniques, par la capitulation de Québec, le . L’armée française n’est pas encore anéantie.
La même année, une expédition britannique prend possession de l’île de la Guadeloupe dans les Caraïbes.
L’hiver a été rude pour la garnison britannique de Québec et une offensive française, menée par Lévis, fait reprendre brièvement espoir au camp français après la victoire de Sainte-Foy (aux portes de Québec) le . Mais l’offensive britannique en direction de Montréal et l’arrivée de la flotte britannique le long du Saint-Laurent forcent les Français à se retirer. Le , les Britanniques font une offensive sur Montréal et la ville est occupée. S'ensuit la prise du Fort Pontchartrain du Détroit (Détroit), encore aux mains des Français.
Attaques britanniques dans les Caraïbes (1761–1762)
Après la défaite des Français en Amérique du Nord, l'attention des Britanniques se porte désormais sur les Caraïbes. La conquête de la Guadeloupe en 1759 leur donne une base d’attaque solide. Le fait nouveau dans cette région est l’entrée en guerre, le aux côtés de la France de l'Espagne. Si, à elles deux, ces deux puissances eussent pu rivaliser avec la Grande-Bretagne aussi bien sur mer que sur terre au début de la guerre, la France ne dispose plus de forces terrestres ou navales suffisantes. Les Anglais prennent l’île de la Dominique tout en préparant une grande offensive pour l’année 1762.
Remontant les Caraïbes, la flotte britannique prend possession de la Martinique et de nombreuses îles françaises pour arriver en vue de La Havane le [42],[43]. Le siège est mis sur l’une des plus grandes villes espagnoles du Nouveau Monde qui capitule le . L’ensemble des Caraïbes est maintenant entre les mains britanniques avec des pertes plus dues à la maladie qu’aux combats. Profitant de ces offensives en Amérique centrale, la France tente de reprendre possession de certaines parties du Canada en vue des négociations de paix, mais cette expédition ne débouche sur rien si ce n’est la défaite de Signal Hill à Terre-Neuve le et les Britanniques restent maîtres du continent.
Aux Indes
En Inde, l’affrontement entre Britanniques et Français s'effectue à travers leurs deux monopoles d’État : la Compagnie française des Indes orientales et la Compagnie britannique des Indes orientales. Leur puissance est avant tout économique et elles ne possèdent que quelques comptoirs le long de la côte est de l’Inde. Les hostilités éclatent dès 1756 alors que les deux camps se préparent à une guerre imminente. L’un des puissants princes indiens, le nawab Siradj al-Dawla, intime l’ordre aux Français et aux Britanniques d'arrêter leurs préparatifs sinon il considérera la situation comme un casus belli. Si les Français cèdent, les Britanniques poursuivent. En conséquence, les armées de Siradj al-Dawla attaquent et prennent possession de tous les comptoirs britanniques du Bengale, y compris Calcutta, le . En réponse, les Britanniques montent une expédition à partir de Madras qui leur permet de reprendre possession de leurs comptoirs et de faire plier le nawab. Dans la foulée, l’armée britannique prend le comptoir de Chandernagor aux Français le . Le nawab cherche alors à se rapprocher des Français en vue de chasser les Britanniques. La victoire britannique de Plassey sur les troupes franco-indiennes et la trahison de l’oncle de Siradj al-Dawla, Mir Jafar, défont les alliances et permettent aux Britanniques de s’assurer le contrôle du Nord-Est de l’Inde[44],[45].
En 1758, le conflit se porte alors dans le Sud-Est de l’Inde autour des comptoirs de Madras et Pondichéry. La campagne est dirigée par les Français pour prendre Madras. Versailles envoie une division navale avec 4 000 hommes de renfort commandé par Lally-Tollendal qui arrive au début de 1758. Après une série de victoires mineures, l’armée française et ses alliés locaux mettent le siège à Madras en décembre mais, avec l’arrivée de renforts britanniques par la mer, le siège est levé en .
Profitant de renforts en provenance d’Europe, le nouveau général en chef britannique, le colonel Eyre Coote, reprend un certain nombre de possessions autour de Madras. La bataille décisive a lieu au Fort Wandiwash : le , l’armée britannique y défait les troupes françaises. Poussant son avantage tout au long de l’année, Coote parvient à assiéger et prendre Pondichéry le , le général français Thomas Arthur de Lally-Tollendal capitule. La ville est ravagée de fond en comble par les troupes anglaises.
Aux Philippines
Avec l’entrée en guerre de l’Espagne en 1762, les Britanniques décident de mener une attaque contre les Philippines, possessions espagnoles. Utilisant des troupes indiennes, les forces britanniques débarquent aux Philippines sans opposition et mettent le siège à Manille le . Le , une brèche est faite dans les murs et la ville est conquise ainsi que le port de Cavite dans la foulée. La présence anglaise, qui reste confinée aux alentours de Manille, les colons espagnols et leurs alliés locaux maintenant leur contrôle sur le reste de la colonie, prend fin en , quelques mois après la fin de la guerre, selon les termes du traité de Paris[46],[47].
Conclusion du conflit et conséquences
Traités de paix
Après des premiers pourparlers de paix en 1761, interrompus par l’entrée en guerre de l’Espagne aux côtés de la France, il faut attendre 1762 et l’épuisement militaire et économique des protagonistes pour voir de vraies négociations s’engager.
La Suède, au bord de la banqueroute, perd tout espoir de victoire après le revirement de la Russie. Elle conclut avec la Prusse l'armistice de Ribnitz le 7 avril 1762, bientôt suivi du traité de Hambourg le 22 mai, qui ramène les deux puissances à leurs frontières des traités de Stockholm de 1719-1720.
La paix générale sera signée en deux fois[48],[49]. Le premier traité, le traité de Paris, concerne la Grande-Bretagne, la France et l’Espagne. Il est signé le et la Grande-Bretagne, étant en position de force, obtient d’énormes gains. En Amérique du Nord, la France se voit perdre le Canada et toutes les îles au large (sauf Saint-Pierre-et-Miquelon), ainsi que tous les territoires à l’est du Mississippi[50]. Dans les Caraïbes, la France ne peut récupérer que la Martinique, la Guadeloupe, Marie-Galante et Sainte-Lucie. Toutes ses autres îles deviennent britanniques. Cuba et les Philippines sont rendues aux Espagnols en échange de la Floride et de l’évacuation du Portugal en Europe. Les Britanniques s'assurent d'une position dominante en Inde. Les cinq comptoirs de Pondichéry, Karikal, Yanaon, Mahé et Chandernagor sont certes rendus aux Français, mais avec interdiction de les fortifier ou d’y stationner une armée. En Europe, Belle-Île, occupée par les Britanniques est rendue aux Français en échange de Minorque. La France accepte d’évacuer tous les territoires appartenant au roi de Grande-Bretagne et ses alliés. En Afrique, Gorée est rendue aux Français en échange du Sénégal.
Les Autrichiens et les Prussiens signent de leur côté le traité de Hubertsbourg le de la même année[51]. Ce traité valide les frontières de 1756 et l’évacuation de la Silésie par l’Autriche en échange de l’abandon par la Prusse de la Saxe.
Front commun amérindien en Amérique
La prise de contrôle de la Nouvelle-France par les Britanniques a mené à une alliance entre 14 nations amérindiennes : les Outaouais, les Ojibwés, les Potéouatamis, les Hurons-Wendats, les Miamis, les Weas, les Kickapous, les Mascoutins, les Piankashaw, les Delawares, les Shawnees, les Mingos et les Sénécas. Dix de celles-ci avaient été alliées de la France lors des conflits précédents, incluant la guerre de Sept Ans. D'autres tribus, comme les Sénécas, qui avaient jusque-là été du côté britannique se rebellèrent contre leur ancien allié. La rébellion de Pontiac commença ainsi le en tant que prolongement immédiat de la guerre de Sept Ans, dans le but de chasser les Britanniques hors de l'ex-Nouvelle-France. Malgré la Proclamation royale de mai 1763 qui accordait une réserve indienne, la guerre se poursuivit encore durant trois ans et mena à une impasse militaire pour les deux camps. Le traité de paix fut signé le [52].
Le Royaume-Uni : une puissance mondiale
D’un point de vue diplomatique, la Grande-Bretagne s’impose comme la grande puissance mondiale dominante. Non seulement son territoire national n’a jamais été inquiété, mais sa flotte et son armée coloniale lui permettent de contrôler maintenant une grande partie de l’Amérique du Nord, de l’Inde et surtout de dominer les autres puissances sur les mers du globe.
Les armées britanniques prouvent leur grande faculté d'adaptation, surtout dans les colonies, où elles ont su passer d’une stratégie européenne (ordre linéaire, attaque en formation) à une stratégie locale, qui passe par l'appui des populations (natifs et colons). Ce sont ces mêmes capacités d'adaptation qui feront défaut aux Britanniques pendant la guerre d'indépendance des États-Unis.
La Prusse : un demi-vainqueur
Autre vainqueur du conflit, la Prusse[53] est passée tout près du désastre mais a survécu et, mieux, a acquis un prestige important : elle s’impose comme un acteur majeur de l’équilibre politique des États allemands. Elle a dû renoncer à ses conquêtes en Saxe et Pologne, son territoire est dévasté et ses pertes lourdes, mais elle conserve la Silésie. Grâce aux subsides anglais et au retrait imprévu de la Russie, elle a réussi à résister suffisamment longtemps pour que ses ennemis, eux-mêmes épuisés, sortent du conflit[54].
Militairement, la Prusse sort grandie de ce conflit, s’étant imposée contre des armées bien plus nombreuses et réputées meilleures. Lors de la guerre de Succession de Bavière (1778-1779), les Autrichiens éviteront les grandes batailles contre un adversaire jugé redoutable[55]. La méthode prussienne influence alors très fortement les autres pays européens qui cherchent à la copier. Mais cette réputation finira par être trompeuse : le niveau de l’armée prussienne, d'abord forte de ses victoires passées, se dégradera petit à petit jusqu’à l’humiliation que lui infligera Napoléon lors de la campagne de Prusse de 1806 à 1807.
Échec relatif de l'Autriche
L'Autriche est aussi perdante, mais dans une moindre mesure. Son armée s'est battue plus vaillamment et efficacement que les Prussiens ne s’y attendaient, et a permis la libération de la Saxe. En outre, Frédéric semble reconnaître la prééminence de la maison d'Autriche, en promettant de voter pour l'archiduc Joseph aux prochaines élections impériales, promesse qu'il tiendra. En revanche, la perte définitive de la Silésie est un coup dur, et les Autrichiens ont compris que la Prusse ne pourrait pas être abattue. L'impératrice et reine Marie-Thérèse va utiliser l'alliance française[56] et sa politique matrimoniale pour gommer la perte de la Silésie. Grâce à son action, l'Autriche va s'affirmer comme puissance dominante en Italie et en Europe centrale.
Au niveau territorial, l'Autriche se voit interdire toute nouvelle expansion en Allemagne, ce que confirmera la guerre de Succession de Bavière en 1778-1779. Elle trouvera encore à s’agrandir du côté de l'Empire ottoman (avec la Bucovine dans les années 1770 et quelques très maigres gains en 1791) et surtout vers la Pologne.
Basculement en Europe de l'Est : Russie et Pologne
Pour la première fois, la Russie a joué un rôle d'arbitre dans un conflit ouest-européen. Seul son retrait imprévu, dû à la mort de la tsarine Élisabeth, a sauvé la Prusse de l'écrasement. Elle devient un acteur à part entière du concert européen, ce qui se confirmera sous le règne de Catherine II de Russie[57].
Au contraire, le conflit a montré la faiblesse de l'union personnelle saxo-polonaise sous Auguste III de Pologne. La noblesse polonaise, uniquement soucieuse du maintien de ses privilèges, refuse tout renforcement du pouvoir royal et contemple presque avec indifférence les marches et contre-marches des belligérants à travers son territoire[58]. L'Électorat de Saxe et la République des Deux Nations (Pologne-Lituanie) ne sont sauvées que par la protection diplomatique autrichienne et française : les adversaires de la veille, Russie et Autriche d'un côté, Prusse de l'autre, ne vont pas tarder à en tirer les conséquences lors des prochains partages de la Pologne.
Baisse de l'influence française
Du côté des perdants, la France sort du conflit extrêmement affaiblie. En Amérique du Nord, une grande partie de son influence est perdue au profit de la Grande-Bretagne, même si les Canadiens français resteront toujours attachés à leur culture (preuve en est du Québec encore francophone aujourd'hui). C'est en partie pour prendre sa revanche que la France, quinze ans plus tard, soutiendra les colons américains dans leur guerre d’indépendance.
Les Français n'ont pas conscience immédiatement, dans une Europe à ce moment conquise par la culture française, de l'importance de la victoire de la Grande-Bretagne à l'issue de cette guerre, qui non seulement consolide et agrandit son empire colonial britannique, mais qui renforce également la domination de la culture anglo-saxonne en Amérique du Nord (domination toujours d'actualité et qui s'est étendue au XXe siècle à l'échelle mondiale grâce à la superpuissance américaine).
L’armée et la marine française sortent affaiblies de cette guerre[59]. En effet, la marine est décimée, et si l'armée a pu tenir le front en Europe, elle a subi plusieurs défaites graves, alors qu'elle était en supériorité numérique, et n'a pu défendre efficacement les colonies (où elle était néanmoins en infériorité numérique). La réforme de l'armée est difficile, quoique certaines améliorations anticipent déjà l’armée napoléonienne (réorganisation de l’artillerie par Gribeauval, organisation de l’armée en divisions pseudo-autonomes, utilisation plus importante des tirailleurs). La marine est aussi réformée, grâce à l'action de Choiseul, qui s'appuie sur le sursaut patriotique des Français et leur volonté de revanche. Cette marine rénovée prouvera son efficacité lors de la guerre d’indépendance américaine, où elle battra son homologue britannique en Amérique du Nord[60],[61].
Économiques
D’un point de vue économique, le bilan est catastrophique pour tous les pays, principalement pour la France et la Grande-Bretagne. La guerre totale et mondiale que se sont livrées les deux puissances a coûté extrêmement cher et a fait grimper de façon vertigineuse leur dette[62].
La Grande-Bretagne, sortant victorieuse du conflit, tire profit de son empire colonial élargi pour essayer de rembourser au mieux ses dettes (passées de 75 millions de livres en 1754 à 133 en 1763[63]) par des taxes nombreuses, et une bureaucratie plus efficace. Ces augmentations (comme le Stamp Act sur les timbres ou le Tea Act sur le commerce du thé)[64] feront partie des étincelles déclenchant la guerre d’indépendance américaine.
La France de son côté, décide de ne pas augmenter dans un premier temps les taxes, mais de financer sa dette par des emprunts. Or, avec une dette passée de 1,36 milliard de livres en 1753 à 2,35 milliards en 1764, et des revenus diminués par la perte des colonies, les taux d’intérêts vont grimper en flèche et finir par vider les caisses. Le gouvernement se voit bientôt contraint de modifier sa politique, de nouvelles levées d'impôts vont être décidées afin de régler au plus vite l'endettement et de rebâtir une marine en perdition ; ces mesures seront très mal perçues par la population.
La Prusse a aussi beaucoup souffert économiquement de ce conflit car elle a dû à la fois maintenir une armée énorme comparée à ses ressources en population, et mener la guerre sur son sol ou sur ses frontières, une partie de son territoire étant occupé. Le fardeau financier de la guerre est à peine allégé par le pillage en règle des finances de la Saxe et par l'aide financière britannique. Pour couvrir ses dettes et se reconstruire, la Prusse recourt à l'augmentation des taxes, mais surtout valorise son territoire par la mise en culture des marais de la Nouvelle-Marche, et par de nouvelles cultures comme la pomme de terre.
L’Autriche, quant à elle, connaît les mêmes problèmes de finances mais baisse volontairement les effectifs de son armée pour diminuer de manière drastique ses dépenses militaires.
Bien qu'elle n'ait pas mené autant de campagnes, la Russie sort également épuisée par un conflit qui a obligé ses troupes à se projeter loin de leurs bases. Lors de la campagne de Prusse-Orientale, notamment, la maladie a provoqué de nombreuses pertes dans ses rangs.
Humaines
Humainement enfin, le conflit a été destructeur. Les nombreuses campagnes menées en Europe centrale ont beaucoup touché les civils (pillage, famines, taxes supplémentaires). Beaucoup d’armées en campagne n’avaient pas assez de ravitaillement, voire des problèmes de paie, et ne se privaient pas de piller les territoires traversés. On note entre autres le manque de scrupule des armées françaises dans les États allemands (alors que ce sont des États alliés qui fournissent le financement à la France pour cette campagne).
En outre, les pertes militaires sont très importantes de chaque côté, du fait de la longueur même du conflit et de la multiplication de batailles sanglantes ne donnant aucun camp vainqueur, et contraignant les belligérants à poursuivre toujours plus avant leurs confrontations, jusqu'à ce que se dessine la bataille décisive. Par ailleurs, la guerre a parfois laissé place à des actes barbares. Les méthodes britanniques en Amérique du Nord ont été parfois extrêmes, allant du cruel ravage des campagnes de la Nouvelle-France et ce juste avant l’hiver, au pur et simple « nettoyage ethnique » pratiqué à l’encontre des Acadiens (déportation)[65]. En cela, même le théâtre secondaire de l’Inde n'a pas été épargné, les exactions sur la population ont été courantes, les soldats n’étant pas souvent payés.
En parallèle, il faut considérer les nombreux cas de typhus et particulièrement de scorbut constatés sur les navires européens à cause du manque de vitamine C des vivres embarquées du XVe au XVIIIe siècle, pour des raisons liées à la conservation des aliments[66],[67],[68]. Les manifestations cliniques du scorbut entraînant une incapacité de manœuvrer des équipages de la marine à voile, de nombreux naufrages furent la conséquence d'un scorbut marin[69].
La mortalité est encore plus élevée à bord des navires de guerre (entassement de marins et de soldats, navigation interminable, séjours en rade, croisière de blocus...). À l'époque élizabéthaine, la marine britannique enregistre des hécatombes (les 10 000 morts par scorbut, indiqués par le navigateur anglais Hawkins, seraient en dessous de la vérité). Le siècle le plus tragique est bien le XVIIIe siècle, les guerres navales ayant pris une ampleur mondiale : la Royal Navy perd, à elle seule, 75 000 hommes par maladie (scorbut, typhus...) au cours de la guerre[70].
Théâtre européen
Théâtre américain
Théâtre des Indes orientales
Nom | Date | Protagonistes | Bilan |
---|---|---|---|
Bataille de Plassey | Grande-Bretagne / France | Victoire britannique décisive | |
Bataille de Gondelour | Grande-Bretagne / France | Victoire britannique (navale) | |
Bataille de Négapatam | Grande-Bretagne / France | Bataille indécise (navale) | |
Bataille de Pondichéry | Grande-Bretagne / France | Bataille indécise (navale) | |
Bataille de Wandiwash | Grande-Bretagne / France | Victoire britannique décisive | |
Bataille de Manille | Grande-Bretagne / Espagne | Victoire britannique décisive |
Notes et références
- (en) « Statistics of Wars, Oppressions and Atrocities of the Eighteenth Century », sur http://necrometrics.com (consulté le ).
- « La guerre de Sept Ans, 1er conflit mondial », sur Guerres & Histoires no 21.
- Winston Churchill en parle en ces termes dans War and British Society 1688-1815 de H.-V. Bowen en 1998 publié chez Cambridge University Press (ISBN 0-521-57645-8), p. 7.
- Ce terme désigne de façon simple l'ensemble des possessions patrimoniales de la maison des Habsbourg d'Autriche, c'est-à-dire, outre les territoires autrichiens, le royaume de Hongrie, le royaume de Bohême, le royaume de Croatie, les Pays-Bas autrichiens, etc. ; le chef de cet ensemble est généralement empereur d'Allemagne (dignité élective)
- Vision mondiale du conflit sur le site du musée de la guerre canadien.
- Chronologie : guerres de Silésie [lire en ligne].
- « La guerre dite de Sept Ans, précédée dès 1754 de graves incidents dans la vallée de l’Ohio où les troupes britanniques attaquèrent, sans déclaration de guerre, les postes français, ne pouvait être que désastreuse. » sur le site du ministère de la Culture.
- Indiens d'Amérique du Nord, ethnologie [lire en ligne].
- Edmond Dziembowski, La guerre de Sept ans, Perrin, 2015, p. 117-121.
- Voir la célébration du traité de Versailles et le renversement des alliances sur le site du ministère de la Culture.
- Jean Bérenger, Histoire de l'empire des Habsbourg, Fayard, 1990, rééd. Tallandier 2012 T.I p. 457.
- Jean-Christian Petitfils, Louis XIV, éd. Perrin, 2014 (ISBN 978-2262048235).
- Bernard Cottret, Cromwell, Paris, Fayard, , 542 p. (ISBN 978-2-213-02951-1).
- Nicolas Landry et Nicole Lang, Histoire de l'Acadie, Sillery, Les éditions du Septentrion, , 335 p. (ISBN 2-89448-177-2), p. 9.
- Guy Frégault, Le Grand marquis : Pierre de Rigaud de Vaudreuil et la Louisiane, 1952, Montréal, éd. Fides, 481 pages (ASIN B00183F5N0).
- Albert Malet et Jules Isaac, XVIIe et XVIIIe siècles, librairie Hachette, 1923, p. 387.
- Jean-Pierre Bois, De la paix des rois à l'ordre des empereurs, éditions du Seuil 2003, p. 185.
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Voir aussi
Roman
- Ce conflit sert de cadre au roman Le Dernier des Mohicans de James Fenimore Cooper et aux bandes dessinées Oumpah-Pah de René Goscinny et les Pionniers du Nouveau Monde de Jean-François Charles (pour les 6 premiers tomes)
Jeux de guerre
- Batailles pour la Nouvelle-France par Luc Olivier & Benoît Larose, revue Væ Victis no 44, .
- La Guerre de Sept Ans : 1756-1763 par Jean-Claude Bésida, revue Væ Victis no 65, novembre-.
Jeux vidéo
- La série Assassin's Creed traite de la Guerre de Sept Ans. Si Assassin's Creed III survole l'événement, Assassin's Creed Rogue le traite de façon approfondie.
Filmographie
- 1925 : Fanfan-la-Tulipe de René Leprince.
- 1952 : Fanfan la Tulipe de Christian-Jaque.
- 1958 : La Tour, prends garde ! de Georges Lampin.
- 1978 : Barry Lyndon de Stanley Kubrick.
- 1988 : Pourvu qu'elles soient douces (Libertine II) de Laurent Boutonnat.
- 1992 : Le dernier des Mohicans de Michael Mann (ASIN B00005OSRM).
- 2002 : Entre l'amour et le devoir (Trenck - Zwei Herzen gegen die Krone) de Gernot Roll.
- 2003 : Fanfan la Tulipe de Gérard Krawczyk (ASIN B0000CGESI).
- 2006 : La guerre qui a fait l'Amérique (The War That Made America: The Story of the French and Indian War) de TV à Canal Savoir (ASIN B000E1MXZ0).
- 2009 : Montcalm, Wolfe et les autres… Vaugeois raconte, de Denis Vaugeois.
- Nouvelle-France, par Jean Beaudin, Studio 7, 2006 (ASIN B000EOVWGM).
Articles connexes
- Révolution diplomatique : sur le renversement des alliances.
- Guerre de la Conquête : plus d’informations sur le conflit en Amérique du Nord, France/Grande-Bretagne.
- La marine française pendant la Guerre de Sept Ans
- France pendant la guerre de Sept Ans
- Présence française dans la vallée de l'Ohio
- Traité de Versailles (1756)
Liens externes
- Les rivalités franco-britanniques en Amérique du Nord
- La guerre de la Conquête (1756-1760)
- La colonisation européenne et les autochtones
- La bataille des Plaines d’Abraham (exposition virtuelle)
- Commission des champs de bataille nationaux. Les plaines d'Abraham. Québec, Canada
- Les pertes
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