Manifeste des 363

Le manifeste des 363 est une déclaration adressée le par les députés républicains au président de la République Patrice de Mac Mahon, qui lui exprime leur opposition à la politique qu'il mène et à l'instauration du monarchiste duc de Broglie à la présidence du Conseil, alors même que la majorité de la Chambre est républicaine.

Ne doit pas être confondu avec Manifeste des 343.
Le texte du manifeste des 363 députés républicains.

Contexte historique

Les 363 députés républicains en mai 1877.

Les élections législatives de 1876 donnent les républicains vainqueurs avec 363 députés face à l'opposition monarchiste.

Malgré cela, le , Mac Mahon décide de renvoyer le chef du gouvernement, Jules Simon, un « gambettiste ». Les républicains s'opposent catégoriquement à ce renvoi sans raisons réelles. Le soir même, plus de 300 députés républicains se réunissent au Grand Hôtel de Paris afin de condamner la politique de Mac Mahon et appellent à voter une motion proclamant « la prépondérance du pouvoir parlementaire s'exerçant par la responsabilité ministérielle ». Le lendemain, Gambetta prononce un réquisitoire contre Mac Mahon ce qui l'agace au point que le , il réplique à cette tirade en nommant une seconde fois comme chef du gouvernement le duc de Broglie, un fervent monarchiste qui avait appliqué sans concessions la politique de l'ordre moral. Face à cet ultime affront, les républicains rédigent et signent ensemble ce que l'on appellera plus tard le « manifeste des 363 »[1],[2].

Le manifeste des 363 et les signataires

La crise du 16 mai 1877 : Léon Gambetta jaillit d'une boîte à surprise tel un diable à ressort devant le président de la République Patrice de Mac Mahon, maréchal dont les opinions monarchistes sont symbolisées par la fleur de lys.
Surmonté d'un bonnet phrygien et du chiffre évoquant les 363 députés républicains, un nuage darde des éclairs sur le président tandis que le représentant de la majorité républicaine à la Chambre des députés prononce la péroraison de son discours lillois du  : « Se soumettre ou se démettre ».
Caricature de Jean Robert, carte postale d'époque.

Le camp républicain, pour contrer le pouvoir présidentiel, choisit de rédiger un manifeste, le , contre le président Mac-Mahon, un peu comme les parlementaires libéraux avait écrit leur Adresse des 221 pour dénoncer les abus de pouvoirs de Charles X. Les républicains prônent un gouvernement responsable devant les chambres ce qui va à l'encontre de la politique de Mac-Mahon, ce dernier se définissant lui-même « au-dessus des partis » c'est-à-dire, que le président nomme ses ministres comme bon lui entend[4]. Le manifeste invite les électeurs à ne pas approuver cette « politique de réaction et d'aventure » que semble prendre le gouvernement de Broglie, il s'agit en fait, d'une véritable motion de défiance de la part des républicains envers le gouvernement en place. Le manifeste est rédigé de la main d'Eugène Spuller, proche de Léon Gambetta[5].

Les suites du manifeste

Foulard commémoratif de l'« union de tous les groupes républicains », le 26 juin 1877. Portraits de Thiers et Gambetta en médaillons.

Mac-Mahon décide alors, avec l'accord du Sénat[6], de dissoudre la chambre des députés. Une intense campagne s'ouvre mais alors que les monarchistes, favorables au maréchal, font une mauvaise campagne, les républicains apparaissent indissolubles et unis à l'image de Thiers et de Gambetta qui déjeunent ensemble le . La mort de Thiers début septembre est une grande manifestation de joie républicaine[1]. Gambetta, pendant ce temps, joue pour la deuxième fois son rôle de commis voyageur de la république et parcourt la France pour convaincre les Français ; il s'illustrera par sa verve notamment dans un discours à Lille resté célèbre « Il faudra se soumettre ou se démettre ».

Les élections législatives ont lieu et elles déçoivent les espoirs monarchistes car les républicains ont, malgré leur perte de 39 sièges, toujours la majorité. Mac-Mahon, après quelques réticences, finit par appeler Jules Dufaure à former un gouvernement le .

Mac-Mahon, après la perte du Sénat par les monarchistes un an plus tard, sera finalement mis en minorité et contraint à la démission en pour faire place à un républicain, Jules Grévy. Les derniers espoirs de restauration monarchique sont anéantis et la république est établie pour de bon.

Ce manifeste consacre également le principe d'union des républicains des diverses tendances[7] quand un danger menace la République comme entité politique. La coalition contre Mac-Mahon concrétise une véritable union des gauches parlementaires, soudées par un fort anticléricalisme[4].

Notes et références

  1. Garrigues 2007
  2. Le Temps, 20 mai 1877. Initialement les signataires sont au nombre de 348.
  3. Manifeste des 363 (consulté le ).
  4. Julliard et Franconie 2012
  5. Bayon 2006
  6. Le Temps, 24 juin 1877. Le Sénat vote, le 22 juin 1877, la dissolution par 149 voix, contre 130.
  7. Les « 363 », vus par la Revue des Deux Mondes.

Bibliographie

  • Nathalie Bayon, Eugène Spuller (1835-1896) : itinéraire d'un républicain entre Gambetta et le ralliement, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Histoire et civilisations », , 314 p. (ISBN 2-85939-857-0).
  • Jean Garrigues, Histoire du Parlement : De 1789 à nos jours, Armand Colin, , 520 p. (ISBN 978-2-200-25685-2 et 2-200-25685-X).
  • Jean-Marc Guslin (dir.), Le Seize-mai revisité, Lille, Publications de l’Institut de recherches historiques du Septentrion, coll. « Histoire et littérature du Septentrion (IRHiS) » (no 42), , 155 p. (ISBN 978-2-90563-758-1, lire en ligne).
  • Jacques Julliard et Grégoire Franconie, La Gauche par les textes : 1762-2012, Flammarion, , 461 p. (ISBN 978-2-08-129180-5 et 2-08-129180-0).
  • Jean-Marie Mayeur, La vie politique sous la Troisième République, 1870-1940, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points. Histoire » (no 73), , 445 p. (ISBN 2-02-006777-3, présentation en ligne).

Lien externe

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