Charles Baudelaire
Charles Baudelaire, né le à Paris et mort dans la même ville le , est un poète français.
« Baudelaire » redirige ici. Pour les autres significations, voir Baudelaire (homonymie).
« Dante d’une époque déchue »[1] selon les mots de Barbey d’Aurevilly, « tourné vers le classicisme, nourri de romantisme »[2], à la croisée entre le Parnasse et le symbolisme, chantre de la « modernité », il occupe une place considérable parmi les poètes français pour un recueil certes bref au regard de l’œuvre de son contemporain Victor Hugo (Baudelaire s’ouvrit à son éditeur de sa crainte que son volume ne ressemblât trop à « une plaquette »), mais qu’il aura façonné sa vie durant : Les Fleurs du mal.
Au cœur des débats sur la fonction de la littérature de son époque, Baudelaire détache la poésie de la morale, la proclame tout entière destinée au Beau et non à la Vérité[3]. Comme le suggère le titre de son recueil, il a tenté de tisser des liens entre le mal et la beauté, le bonheur fugitif et l’idéal inaccessible (À une Passante), la violence et la volupté (Une martyre), mais aussi entre le poète et son lecteur (« Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère ») et même entre les artistes à travers les âges (Les Phares)[4]. Outre des poèmes graves (Semper Eadem) ou scandaleux (Delphine et Hippolyte), il a exprimé la mélancolie (Mœsta et errabunda), l’horreur (Une charogne) et l’envie d’ailleurs (L’Invitation au voyage) à travers l’exotisme.
Biographie
Jeunesse
Charles Pierre Baudelaire naît le [5] au 13 rue Hautefeuille[6] à Paris : ses parrain et marraine sont les parents « adoptifs » de sa mère, Pierre Perignon et Louise Coudougnan[7]. Celle-ci, Caroline Dufaÿs, a vingt-sept ans. Son père, Joseph-François Baudelaire, né en 1759 à La Neuville-au-Pont[8], en Champagne, est alors sexagénaire. Quand il meurt en 1827, Charles n’a que cinq ans. Cet homme lettré, épris des idéaux des Lumières et amateur de peinture, peintre lui-même, laisse à Charles un héritage dont il n’aura jamais le total usufruit. Il avait épousé en premières noces, le 7 mai 1797, Jeanne Justine Rosalie Janin, avec laquelle il avait eu un fils, Claude Alphonse Baudelaire[9], demi-frère de Charles.
Un an plus tard, sa mère se remarie avec le chef de bataillon Jacques Aupick. C’est à l’adolescence que le futur poète s’opposera à ce beau-père interposé entre sa mère et lui. « Lorsqu’il arrive à Lyon, Charles a dix ans et demi… À l’égard de son beau-père aucune hostilité n’est alors perceptible[10]. ».
Peu fait pour comprendre la vive sensibilité de l’enfant, l’officier Aupick – devenu plus tard ambassadeur – incarne à ses yeux les entraves à tout ce qu’il aime : sa mère, la poésie, le rêve et, plus généralement, la vie sans contingences.
« S'il va haïr le général Aupick, c'est sans doute que celui-ci s'opposera à sa vocation. C'est surtout parce que son beau-père lui prenait une partie de l'affection de sa mère. […] Une seule personne a réellement compté dans la vie de Charles Baudelaire : sa mère[10]. »
En 1831, le lieutenant-colonel Aupick ayant reçu une affectation à Lyon, le jeune Baudelaire est inscrit à la pension Delorme et suit les cours de sixième au collège royal de Lyon. En cinquième, il devient interne. En janvier 1836, la famille revient à Paris, où Aupick sera promu colonel en avril. Alors âgé de quatorze ans, Charles est inscrit comme pensionnaire au collège Louis-le-Grand, mais il doit redoubler sa troisième.
En seconde, il obtient le deuxième prix de vers latins au concours général.
Renvoyé du lycée Louis-le-Grand en pour ce qui a passé pour une vétille[11], mais que son condisciple au lycée, Charles Cousin (1822-1894) a expliqué comme un épisode d’amitié particulière[12], Baudelaire mène une vie en opposition aux valeurs bourgeoises incarnées par sa famille. Il passe son baccalauréat au lycée Saint-Louis en fin d’année et est reçu in extremis. Jugeant la vie de l’adolescent « scandaleuse » et désirant l’assagir, son beau-père le fait embarquer pour Calcutta. Le Paquebot des Mers du Sud quitte Bordeaux le 9 ou 10 juin 1841. Mais en septembre, un naufrage abrège le périple aux îles Mascareignes (Maurice et La Réunion). On ignore si Baudelaire poursuit son voyage jusqu’aux Indes, de même que la façon dont il est rapatrié.
Vie dissolue
De retour à Paris, Charles s’éprend de Jeanne Duval, une «jeune mulâtresse» avec laquelle il connaîtra les charmes et les amertumes de la passion. Une idylle au sujet de laquelle certains de ses contemporains, comme Nadar, se sont interrogés en s’appuyant sur les déclarations d’un amant de Jeanne Duval et de prostituées connues, qui témoignent au contraire de la chasteté surprenante de Baudelaire[14].
Dandy endetté, Baudelaire est placé sous tutelle judiciaire et mène dès 1842 une vie dissolue. Il commence alors à composer plusieurs poèmes des Fleurs du mal. Critique d’art et journaliste, il défend Delacroix comme représentant du romantisme en peinture, mais aussi Balzac lorsque l’auteur de La Comédie humaine est attaqué et caricaturé pour sa passion des chiffres[15] ou sa perversité présumée[16]. En 1843, il découvre les « paradis artificiels » dans le grenier de l’appartement familial de son ami Louis Ménard, où il goûte à la confiture verte. Même s’il contracte une colique à cette occasion, cette expérience semble décupler sa créativité (il dessine son autoportrait en pied, très démesuré) et renouvellera cette expérience occasionnellement sous contrôle médical, en participant aux réunions du « club des Haschischins ». En revanche, son usage de l’opium est plus long : il fait d’abord, dès 1847, un usage thérapeutique du laudanum[17], prescrit pour combattre des maux de tête et des douleurs intestinales consécutives à une syphilis, probablement contractée vers 1840 durant sa relation avec la prostituée Sarah la Louchette. Comme De Quincey avant lui, l’accoutumance lui dicte d'augmenter progressivement les doses. Croyant ainsi y trouver un adjuvant créatif, il en décrira les enchantements et les tortures[18].
En dandy, Baudelaire a des goûts de luxe. Ayant hérité de son père à sa majorité, il dilapide la moitié de cet héritage en 18 mois. Ses dépenses d’apparat sont jugées outrancières par ses proches, qui convoquent un conseil judiciaire[19].
Le , maître Narcisse Ancelle, notaire de la famille, est officiellement désigné comme conseil judiciaire qui lui alloue une pension mensuelle de 200 francs[20]. En outre, Baudelaire doit lui rendre compte de ses faits et gestes. Cette situation infantilisante inflige à Baudelaire une telle humiliation qu'il tente de se suicider d'un coup de couteau dans la poitrine le [21]. Outre sa réputation de débauché, Baudelaire passait pour homosexuel auprès de certains de ses amis: « C’est moi-même », écrit-il « qui ai répandu ce bruit, et l’on m’a cru »[22]…
En 1848, il participe aux barricades. La révolution de février instituant la liberté de la presse, Baudelaire fonde l’éphémère gazette Le Salut public (d’obédience résolument républicaine), qui ne va pas au-delà du deuxième numéro.
Le 15 juillet 1848 paraît, dans La Liberté de penser, un texte d’Edgar Allan Poe traduit par Baudelaire : Révélation magnétique. À partir de cette période, Baudelaire ne cessera de proclamer son admiration pour l’écrivain américain, dont il deviendra le traducteur attitré. La connaissance des œuvres de Poe et de Joseph de Maistre atténue définitivement sa « fièvre révolutionnaire »[23]. Plus tard, il partagera la haine de Gustave Flaubert et de Victor Hugo pour Napoléon III, mais sans s’engager outre mesure d’un point de vue littéraire (« L’Émeute, tempêtant vainement à ma vitre / Ne fera pas lever mon front de mon pupitre » — Paysage dans Tableaux parisiens du recueil Les Fleurs du mal)[24].
- Peint en 1844 par Émile Deroy.
- Autoportrait, 1848.
- Portrait-charge par Nadar.
- Autoportrait, 1860.
Baudelaire se voit reprocher son style d’écriture et le choix de ses sujets. Il n’est compris que par certains de ses pairs tels Armand Baschet, Édouard Thierry, Champfleury, Jules Barbey d'Aurevilly, Frédéric Dulamon[25] ou André Thomas… Cet engouement confidentiel contraste avec l’accueil hostile que lui réserve la presse. Dès la parution des Fleurs du Mal en 1857[26], Gustave Bourdin réagit avec virulence dans les colonnes du Figaro du : « Il y a des moments où l’on doute de l’état mental de M. Baudelaire, il y en a où l’on n’en doute plus ; — c’est, la plupart du temps, la répétition monotone et préméditée des mêmes choses, des mêmes pensées. L’odieux y côtoie l’ignoble ; le repoussant s’y allie à l’infect… » Cette appréciation négative deviendra le jugement dominant de l’époque [réf. nécessaire].
Condamnation des Fleurs du mal
Moins de deux mois après leur parution, Les Fleurs du mal sont poursuivies[27] pour « offense à la morale religieuse » et « outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs ». Seul ce dernier chef d’inculpation sera retenu. Baudelaire est condamné à une forte amende de trois cents francs, réduite à cinquante francs, par suite d’une intervention de l’impératrice Eugénie. L’éditeur Auguste Poulet-Malassis[28] s’acquitte, pour sa part, d’une amende de cent francs et doit retrancher six poèmes dont le procureur général Ernest Pinard a demandé l’interdiction (Les Bijoux ; Le Léthé ; À celle qui est trop gaie ; Lesbos ; Femmes damnées [Delphine et Hippolyte] ; Les métamorphoses du Vampire).
Le 30 août, Victor Hugo, à qui Baudelaire a envoyé son recueil, lui envoie de son exil à Guernesey une lettre d’encouragement : « Vos Fleurs du Mal rayonnent et éblouissent comme des étoiles. Je crie bravo de toutes mes forces à votre vigoureux esprit. Permettez-moi de finir ces quelques lignes par une félicitation. Une des rares décorations que le régime actuel peut accorder, vous venez de la recevoir. Ce qu’il appelle sa justice vous a condamné au nom de ce qu’il appelle sa morale ; c’est là une couronne de plus[29] ». Malgré la relative clémence des jurés eu égard au réquisitoire plus sévère qui vise onze poèmes, ce jugement touche profondément Baudelaire. Contraint et forcé, il fera publier une nouvelle édition en 1861, enrichie de trente-deux poèmes.
En 1862, Baudelaire est candidat au fauteuil d’Eugène Scribe à l’Académie Française. Il est parrainé par Sainte-Beuve et Vigny. Mais le 6 février 1862, il n’obtient aucune voix et se désiste. Par la suite, il renoncera à se présenter au fauteuil d’Henri Lacordaire[30]. En 1866, il réussit à faire publier à Bruxelles (c’est-à-dire hors de la juridiction française), sous le titre Les Épaves[31], les six pièces condamnées accompagnées de seize nouveaux poèmes.
Dernières années
Le 24 avril 1864, très endetté, il part pour la Belgique afin d’y entreprendre une tournée de conférences. Hélas, ses talents de critique d’art éclairé ne font plus venir grand monde… Il se fixe à Bruxelles, où il rend plusieurs visites à Victor Hugo, exilé politique volontaire. Il prépare un pamphlet contre son éphémère pays d’accueil qui représente, à ses yeux, une caricature de la France bourgeoise. Le féroce Pauvre Belgique restera inachevé. Souhaitant la mort d’un royaume qu’il juge artificiel, il en résume l’épitaphe en un mot : Enfin !
C’est en Belgique que Baudelaire rencontre Félicien Rops, qui illustre Les Fleurs du mal en 1866.
Lors d’une visite à l’église Saint-Loup de Namur, Baudelaire perd connaissance. Cet effondrement est suivi de troubles cérébraux, en particulier d’aphasie.
À partir de mars 1866, Baudelaire souffre d’hémiplégie.
En juillet 1866, on le ramène à Paris. Il est aussitôt admis dans la maison de santé du docteur Guillaume Émile Duval (1825-1899), aliéniste réputé. L’établissement se trouve 1, rue du Dôme. Le poète y occupe, au rez-de-chaussée du pavillon situé au fond du jardin, une chambre bien éclairée ornée de deux toiles d'Édouard Manet[32], dont la Maîtresse de Baudelaire, peinte en 1862, aujourd'hui au musée des Beaux-Arts de Budapest.
C’est là qu’il meurt, rongé par la syphilis, le , à onze heures du matin. Le lendemain, Narcisse Ancelle, son conseil judiciaire, et Charles Asselineau, son ami fidèle, déclarent le décès à la mairie du 16e arrondissement et signent l’acte d’état civil[33].
Le même jour, il est inhumé au cimetière du Montparnasse (6e division), dans la tombe où repose son beau-père détesté, le général Aupick, et où sa mère le rejoindra quatre ans plus tard.
Son faire-part de décès indique : « de la part de Madame Vve Aupick, sa mère, de Mme Perrée, sa grand-tante et de ses enfants, de Mme Vve Baudelaire sa belle-sœur, de M. Jean Levaillant, Général de Brigade, de M° Jean-Jacques Rousseau Levaillant, Chef de Bataillon, de M° Charles Levaillant Général de Division, ses cousins ».
Il n’a pu réaliser son souhait d’une édition définitive des Fleurs du Mal, travail de toute une vie.
Le Spleen de Paris (autrement appelé Petits poèmes en prose) est édité à titre posthume en 1869, dans une nouvelle édition remaniée par Charles Asselineau et Théodore de Banville.
À sa mort, son héritage littéraire est mis aux enchères. L’éditeur Michel Lévy l’acquiert pour 1 750 francs. Une troisième édition des Fleurs du Mal, accompagnée des onze pièces intercalaires, a disparu avec lui.
- Masque mortuaire de Baudelaire.
- Maison où est décédé Charles Baudelaire. Vue d'ensemble depuis la rue Lauriston, juillet 2017.
- Tombe du général Aupick, de Mme Aupick et de Charles Baudelaire au cimetière du Montparnasse à Paris.
Révision de la condamnation de 1857
Une première demande en révision du jugement de 1857, introduite en 1929 par Louis Barthou, alors ministre de la Justice, ne put aboutir, faute de procédure adaptée.
C’est par la loi du 25 septembre 1946[34] que fut créée une procédure de révision des condamnations pour outrage aux bonnes mœurs commis par la voie du livre, exerçable par le garde des Sceaux à la demande de la Société des gens de lettres. Celle-ci décida aussitôt, à l’unanimité moins une voix[35], de demander une révision pour Les Fleurs du Mal, accordée le par la Chambre criminelle de la Cour de cassation[36],[37],[38].
Dans ses attendus, la Cour énonce que : « les poèmes faisant l’objet de la prévention ne renferment aucun terme obscène ou même grossier et ne dépassent pas, en leur forme expressive, les libertés permises à l’artiste ; que si certaines peintures ont pu, par leur originalité, alarmer quelques esprits à l’époque de la première publication des Fleurs du Mal et apparaître aux premiers juges comme offensant les bonnes mœurs, une telle appréciation ne s’attachant qu’à l’interprétation réaliste de ces poèmes et négligeant leur sens symbolique, s’est révélée de caractère arbitraire ; qu’elle n’a été ratifiée ni par l’opinion publique, ni par le jugement des lettrés ».
Domiciles du poète
Baudelaire habita principalement à Paris où, constamment endetté et pressé de fuir ses créanciers, il occupa une quarantaine de domiciles[39] :
- 13, rue Hautefeuille, où il naît le 9 avril 1821. La maison fut détruite lors du percement du boulevard Saint-Germain. Une plaque rappelle son emplacement, à l’actuel no 17 (l’immeuble n’est pas numéroté) ;
- 50, rue Saint-André-des-Arts, à partir de la mort de son père (1827) ;
- 11, rue du Débarcadère (située à l’époque à Neuilly-sur-Seine) (1827-1828) ;
- 17, rue du Bac, à partir du remariage de sa mère (1828) et jusqu’à la promotion du colonel Aupick (1832) ;
- Lyon (1832-1836). Baudelaire est logé d’abord à la pension Delorme, puis à l’internat du collège Royal ; pendant cette période, il réside également au 4-6, rue d’Auvergne. Une plaque, marquée d’un C et d’un B au balcon du deuxième étage, y a été apposée[40] ;
- 32, rue de l’Université, au retour à Paris (1836) ;
- 123, rue Saint-Jacques, à l’internat du lycée Louis-le-Grand (mars 1836-avril 1839) ;
- rue de la Culture-Sainte-Catherine (devenue rue de Sévigné), dans le Marais, domicile de ses parents après son renvoi du collège (printemps 1839). Baudelaire reprend ses cours comme externe au lycée Saint-Louis ;
- 22, rue du Vieux-Colombier, chez son répétiteur M. Lassègue, jusqu’à passage du baccalauréat (août 1839) ;
- rue de l'Estrapade, pension L’Évêque et Bailly ;
- rue du Pot-de-Fer-St.-Sulpice (devenue rue Bonaparte), chez Mlle Théot ;
- 73, rue de Lille ;
- 50, rue de Sévigné ;
- Bordeaux, Île Maurice et Île Bourbon (actuelle île de La Réunion), lors de son voyage dans les mers du Sud (9 juin 1841-début février 1842) ;
- 10 (devenu 22), quai de Béthune, sur l’île Saint-Louis[41], au rez-de-chaussée à gauche de la porte d’entrée, avec fenêtre sur rue (mai-décembre 1842). Il y reçoit les visites de sa nouvelle maîtresse Jeanne Duval, qu’il avait rencontrée au théâtre du Panthéon sis « cloître Saint-Benoît » (bâtiment remplacé par l’actuelle Sorbonne) ;
- rue Vaneau, au rez-de-chaussée (premier semestre de 1843) ;
- 15, quai d’Anjou, sur l’île Saint-Louis (juin à septembre 1843) ;
- 17, quai d’Anjou, à l’hôtel Pimodan (originellement hôtel de Lauzun, puis redevenu tel plus tard)[42], sur l’île Saint-Louis. Baudelaire occupe trois pièces au dernier étage sous les combles, côté cour (octobre 1843-1846). Lors de son aménagement, il loge Jeanne Duval et la mère de Jeanne au 6, rue de la Femme-sans-Tête (devenue rue Le Regrattier), également sur l’île Saint-Louis ;
- une succession d’hôtels et de chambres garnies, souvent très brièvement, à partir de 1846. Au cours de 1846-1847, il réside successivement :
- à l’hôtel Corneille (rue Corneille),
- 33, rue Coquenard (devenue rue Lamartine),
- à l’hôtel de Dunkerque (32, rue Laffitte),
- 68 (ou 36 ?), rue de Babylone,
- à l’hôtel Folkestone (rue Laffitte),
- 24, rue de Provence,
- 7, rue de Tournon,
- et encore dans de petits garnis « borgnes et introuvables »[43] ;
- 18, avenue de la République (devenue avenue de Neuilly) à Neuilly-sur-Seine (août 1848) ;
- Dijon (bref séjour) ;
- 95, avenue de la République (devenue avenue de Neuilly) à Neuilly-sur-Seine (mai 1850-juillet 1851) ;
- 25, rue des Marais-du-Temple (devenue rue Yves-Toudic) ;
- 128, rue de la Pompe, dans une chambre qui appartenait à des amis du général Aupick, son beau-père ;
- 11, boulevard de Bonne-Nouvelle (mai-juillet 1852) ;
- 60, rue Pigalle, dans un hôtel situé non loin de Mme Sabatier, qui habitait au 4 ou 16, rue Frochot (octobre 1852-mai 1854). La mère de Baudelaire et son mari, le général Aupick, habitent à cette époque au 91, rue du Cherche-Midi ;
- 61, rue Sainte-Anne, à l’hôtel d’York (actuellement hôtel Baudelaire Opéra) (février 1854) ;
- 57, rue de Seine, à l’hôtel du Maroc (mai 1854-février 1855) ;
- « balloté d’hôtel en hôtel » en mars 1855, où il déménage à six reprises. Au début de juin, il loge dans des gîtes de rencontre[44] ;
- 13, rue Neuve-des-Bons-Enfants, à l’hôtel de Normandie (juin 1855) ;
- 27, rue de Seine (juillet-août 1855) ;
- 18, rue d’Angoulême-du-Temple (devenue rue Jean-Pierre-Timbaud) (janvier-juin 1856). C’est là qu’il emménage de nouveau avec Jeanne Duval, mais les choses ne s’arrangent pas (disputes parfois violentes) et il la quitte ;
- 19, quai Voltaire, à l’hôtel Voltaire (actuellement hôtel du quai Voltaire) (juin 1856-novembre 1858). Baudelaire y achève les Fleurs du Mal. L’hôtel se trouve à deux pas de l’imprimerie du Moniteur universel, qui va publier en feuilleton un roman de Poe dans la traduction de Baudelaire — ce dernier dort souvent à l’imprimerie après avoir travaillé toute la journée ;
- Allers-retours entre le domicile de sa mère à Honfleur, et le domicile de Jeanne à Paris, 22, rue Beautreillis ; avec quelques séjours à Alençon pour rendre visite à son éditeur Poulet-Malassis (novembre 1858-juin 1859) ;
- 22, rue d’Amsterdam, à l’hôtel de Dieppe (1859-1864). Mme Sabatier habite non loin à partir de 1860, au 10 rue de la Faisanderie. À cette époque, Baudelaire loge Jeanne Duval à Neuilly-sur-Seine, au 4 rue Louis-Philippe, où il cohabite avec elle brièvement de décembre 1860 à janvier 1861) ;
- 28, rue de la Montagne à Bruxelles, lors d’un séjour en Belgique (1864-1866). Baudelaire loge principalement à l’hôtel du Grand Miroir, Lors de ses rares retours à Paris, il loge à l’hôtel du Chemin de fer du Nord, place du Nord. Jeanne Duval habite à cette époque au 17, rue Sauffroy, dans le quartier des Batignolles. C’est en Belgique que Baudelaire est atteint d’une congestion cérébrale et rapatrié vivant, mais aphasique ;
- 1, rue du Dôme, dans le quartier de Chaillot, à la clinique du docteur Duval. Baudelaire y entre en juillet 1866 et y meurt le 31 août 1867.
- 1842 : 22 (ex 10), quai de Béthune, Paris 4e.
- 1er semestre 1856 : 18, rue Jean-Pierre Timbaud (ancienne rue d'Angoulême-du-Temple), Paris 11e.
- 2e semestre 1856 : 19, quai Voltaire, Paris 7e.
- 1859 : hôtel de Dieppe, 22, rue d’Amsterdam, Paris 9e.
- 1866 : 1, rue du Dôme, Paris 16e. Lieu du décès.
Baudelaire fréquentait beaucoup les cafés. Selon un ami de jeunesse[45], il « composait dans les cafés et dans la rue ».
Dans sa jeunesse, il retrouvait ses amis Chez Duval, un marchand de vin installé place de l'Odéon. Il affectionnait aussi La Rotonde, un café du Quartier latin. Il prenait souvent ses repas à La Tour d’Argent sur le quai de la Tournelle, un restaurant qui existe toujours sous le même nom, mais dont l’intérieur n’a plus rien en commun avec son apparence à l’époque de Baudelaire. Plus tard, ce sera le café Momus de la rue des Prêtres-Saint-Germain-l'Auxerrois, le Mabille, le Prado, la Chaumière et la Closerie des Lilas[46].
Regards sur l’œuvre
Horreur et extase
« Tout enfant, j’ai senti dans mon cœur deux sentiments contradictoires : l’horreur de la vie et l’extase de la vie. » (Mon cœur mis à nu).
Toutes les grandes œuvres romantiques témoignent de ce passage de l’horreur à l’extase et de l’extase à l’horreur[48]. Ces impressions naissent chez Baudelaire du sentiment profond de la malédiction qui pèse sur la créature depuis la chute originelle. En ce sens, les Fleurs du Mal appartiennent au Génie du christianisme.
Analysant ce qu’il appelait « le vague des passions » dans la préface de 1805 à cet ouvrage, Chateaubriand écrivait : « Le chrétien se regarde toujours comme un voyageur qui passe ici-bas dans une vallée de larmes, et qui ne se repose qu’au tombeau ». Pour Baudelaire, il ne s’agit ni de littérature, ni de notions plus ou moins abstraites, mais « du spectacle vivant de (sa) triste misère ». Comme la nature, l’homme est souillé par le péché originel et, à l’instar de René ou de Werther (Goethe), Baudelaire n’éprouve le plus souvent que le dégoût pour « la multitude vile » (Recueillement). Ce qui le frappe surtout, c’est l’égoïsme et la méchanceté des créatures humaines, leur paralysie spirituelle, et l’absence en elles du sens du beau comme du bien. Le poème en prose La Corde, s’inspirant d’un fait vrai, raconte comment une mère, indifférente à l’égard de son enfant qui vient de se pendre, s’empare de la corde fatale pour en faire un fructueux commerce[49].
Baudelaire devait en souffrir plus que tout autre[48] : L’Albatros dénonce le plaisir que prend le « vulgaire » à faire le mal, et, singulièrement, à torturer le poète.
Dans L’Art romantique, Baudelaire remarque : « C’est un des privilèges prodigieux de l’Art que l’horrible, artistement exprimé, devienne beauté et que la douleur rythmée et cadencée remplisse l’esprit d’une joie calme. » Des poèmes, comme Le Mauvais Moine, L’Ennemi, Le Guignon montrent cette aspiration à transformer la douleur en beauté. Peu avant Baudelaire, Vigny et Musset avaient également chanté la douleur.
Comment Baudelaire aurait-il pu croire à la perfectibilité des civilisations ? Il n’a éprouvé que mépris pour le socialisme d’une part, le réalisme et le naturalisme d’autre part[50]. Avec une exception pour le réaliste Honoré de Balzac, chez qui il voyait bien davantage qu’un naturaliste (« Si Balzac a fait de ce genre roturier [le roman de mœurs] une chose admirable, toujours curieuse et souvent sublime, c’est parce qu’il y a jeté tout son être. J’ai maintes fois été étonné que la grande gloire de Balzac fût de passer pour un observateur ; il m’avait toujours semblé que son principal mérite était d’être visionnaire, et visionnaire passionné. »)[51].
Les sarcasmes à l’égard des théories socialistes (après 1848), réalistes ou naturalistes se multiplient dans son œuvre. Comme Poe dont il traduit les écrits, il considère « le Progrès, la grande idée moderne, comme une extase de gobe-mouches ». Pour en finir avec ce qu’il appelle « les hérésies » modernes, Baudelaire dénonce encore « l’hérésie de l’enseignement » : « La poésie, pour peu qu’on veuille descendre en soi-même, interroger son âme, rappeler ses souvenirs d’enthousiasme, n’a pas d’autre but qu’elle-même. […] Je dis que si le poète a poursuivi un but moral, il a diminué sa force poétique ; et il n’est pas imprudent de parier que son œuvre sera mauvaise »[52]. Bien que Victor Hugo et lui se rejoignent dans une même tradition française d’ « éloquence ostentatoire »[53], il exerce aussi sa verve contre l’auteur des Misérables et caresse un moment le projet d’écrire un Anti-Misérables satirique[54].
Le poète ne s’en révolte pas moins contre la condition humaine. Il dit son admiration pour les grandes créations sataniques du romantisme comme Melmoth (roman noir — gothique — de Charles Robert Maturin). Négation de la misère humaine, la poésie ne peut être pour lui que révolte. Dans les Petits poèmes en prose, celle-ci prend une forme plus moderne et se fait même humour noir.
Art poétique
Rejetant le réalisme et le positivisme contemporains, Baudelaire sublime la sensibilité et cherche à atteindre la vérité essentielle, la vérité humaine de l’Univers, ce qui le rapproche du platonisme[réf. nécessaire]. Il écrit ainsi, en introduction à trois de ses poèmes dans le Salon de 1846 : « La première affaire d’un artiste est de substituer l’homme à la nature et de protester contre elle. Cette protestation ne se fait pas de parti pris, froidement, comme un code ou une rhétorique, elle est emportée et naïve, comme le vice, comme la passion, comme l’appétit. » et il ajoute, dans le Salon de 1859 : « L’artiste, le vrai artiste, le vrai poète, ne doit peindre que selon ce qu’il voit et ce qu’il sent. Il doit être réellement fidèle à sa propre nature. » Baudelaire énonce ainsi les principes de la sensibilité moderne : « Le beau est toujours bizarre. Je ne veux pas dire qu’il soit volontairement, froidement bizarre, car dans ce cas il serait un monstre sorti des rails de la vie. Je dis qu’il contient toujours un peu de bizarrerie, de bizarrerie non voulue, inconsciente, et que c’est cette bizarrerie qui le fait être particulièrement le Beau. »
C’est pourquoi l’imagination est pour lui « la reine des facultés ». En fait, elle substitue « une traduction légendaire de la vie extérieure » ; à l’action, le rêve. Cette conception de la poésie annonce celle de presque tous les poètes qui vont suivre. Cependant, Baudelaire n’a pas vécu son œuvre. Pour lui, vie et poésie restent dans une certaine mesure séparées (ce qu’il exprime en disant : La poésie est ce qu’il y a de plus réel, ce qui n’est complètement vrai que dans un autre monde).
Là où Baudelaire et Stéphane Mallarmé ne pensent qu’à créer une œuvre d’art, les surréalistes voudront, après Arthur Rimbaud, réaliser une œuvre de vie et essaieront de conjuguer action et écriture. Malgré cette divergence d’avec ses successeurs, Baudelaire fut l’objet de vibrants hommages, tel celui que lui rendit le jeune Rimbaud, pour qui il représente un modèle : « Baudelaire est le premier voyant, roi des poètes, un vrai Dieu. » Il suffit de comparer ces propos :
« […] qui n'a connu ces admirables heures, véritables fêtes du cerveau, où les sens plus attentifs perçoivent des sensations plus retentissantes, où le ciel d'un azur plus transparent s'enfonce dans un abîme plus infini, où les sons tintent musicalement, où les couleurs parlent, et où les parfums racontent des mondes d'idées ? Eh bien, la peinture de Delacroix me paraît la traduction de ces beaux jours de l'esprit. Elle est revêtue d'intensité et sa splendeur est privilégiée. Comme la nature perçue par des nerfs ultrasensibles, elle révèle le surnaturalisme[55]. »
à ce passage du Premier Manifeste du surréalisme :
« réduire l'imagination à l'esclavage, quand bien même il y irait de ce qu'on appelle grossièrement le bonheur, c'est se dérober à tout ce qu'on trouve, au fond de soi, de justice suprême. La seule imagination me rend compte de ce qui peut être, et c'est assez pour lever un peu le terrible interdit ; assez aussi pour que je m'abandonne à elle sans crainte de me tromper[56]. »
Ainsi, le surnaturalisme porte en germe certains aspects de l’œuvre de Lautréamont, de Rimbaud et du surréalisme même.
C’est à propos de la peinture d’Eugène Delacroix et de l’œuvre de Théophile Gautier que Baudelaire a usé de cette formule célèbre qui caractérise si justement son art : « Manier savamment une langue, c’est pratiquer une espèce de sorcellerie évocatoire. C’est alors que la couleur parle, comme une voix profonde et vibrante, que les monuments se dressent et font saillie sur l’espace profond ; que les animaux et les plantes, représentants du laid et du mal, articulent leur grimace non équivoque, que le parfum provoque la pensée et le souvenir correspondants ; que la passion murmure ou rugit son langage éternellement semblable[57]. »
Baudelaire utilise régulièrement la synesthésie pour créer une fusion des sens, notamment dans le poème Correspondances.
Avant lui, seul Gérard de Nerval avait pratiqué une poésie qui ne fût pas littérature. Libérée du joug de la raison, la poésie peut désormais exprimer la sensation.
« En faisant de Baudelaire le chef de file d'une poésie de la sensation, Barrès le montre s'épuisant à « chercher de sensations en sensations des frissons, des frissons nouveaux[58] »
Lors de l’inauguration du monument Baudelaire au cimetière du Montparnasse, Armand Dayot, inspecteur des Beaux-Arts, rappellera cette recherche de la sensation : « Ce fait même d'avoir découvert un frisson nouveau, frisson qui va jusqu'à l'extrême limite de la sensibilité, presque au délire de l'Infini, dont il sut emprisonner les manifestations les plus fugitives, fait de Baudelaire un des explorateurs les plus audacieux, mais aussi des plus triomphants de la sensation humaine »[59].
Déjà, dans ses meilleurs poèmes, Baudelaire, tout comme Mallarmé et Maurice Maeterlinck après lui, ne conserve du vers classique que la musique. Par les césures irrégulières, les rejets et les enjambements, il élude le caractère trop mécanique de l’alexandrin et pose les prémices du vers impair de Verlaine et des dissonances de Laforgue, voire du vers libre. Baudelaire jette ainsi les bases du symbolisme.
Inspiré par la lecture de Gaspard de la nuit d’Aloysius Bertrand, qui avait introduit en France le poème en prose, Baudelaire compose les Petits poèmes en prose et explique, dans sa préface : « Quel est celui de nous qui n’a pas, dans ses jours d’ambition, rêvé le miracle d’une prose poétique, musicale sans rythme et sans rime, assez souple et assez heurtée pour s’adapter aux mouvements lyriques de l’âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de la conscience[60] ? »
Jeanne Duval
Jeanne Duval est la principale muse de Baudelaire, avant Apollonie Sabatier et Marie Daubrun. Il entretint une relation tumultueuse et résolument charnelle avec cette mystérieuse quarteronne[61], proche des gens de théâtre et même comédienne secondaire au théâtre de la Porte-Sainte-Antoine. Pour fuir les créanciers, elle avait pour habitude d’emprunter diverses identités (en 1864, elle se faisait appeler « Mademoiselle Prosper »). En réalité, elle se serait appelée « Jeanne Lemer »[62]. Dans une lettre testamentaire adressée le 30 juin 1845 à son notaire, Narcisse Ancelle, où il annonce son intention de se tuer, Baudelaire affirme : « Je donne et lègue tout ce que je possède à Mlle Lemer […] Moi, je n’ai que Jeanne Lemer. Je n’ai trouvé de repos qu’en elle […] »[63]. Plus tard, Baudelaire payera même la pension de Jeanne à l’hospice. Fait de ruptures et de réconciliations, leur ménage illustrait l’union de deux caractères forts.
Jeanne Duval représente pour lui l’ignorance intacte, l’animalité pure[64].
Poèmes rendant hommage à Jeanne Duval
Ce dernier poème, détaillant le destin réservé à Jeanne après sa mort, est assez peu élogieux. Il tire le bilan amer et cruel d’une relation qui n’aura pu satisfaire Baudelaire et se sera avérée source de souffrances bien plus que de bonheur. Il se conclut ainsi : « Et le ver rongera ta peau comme un remords[65]. »
Idées politiques
Fortement influencé par Joseph de Maistre, dont il adopte en 1851 la lecture analogique de l’histoire comme signe d’une écriture providentielle[66], adepte d’un catholicisme aristocratique et mystique, dandy de surcroît, Baudelaire rejette les Lumières, la Révolution, la démocratie et la tyrannie de l’opinion publique[67]. Selon lui, « il n'y a de gouvernement raisonnable et assuré que l'aristocratique » car « monarchie ou république, basées sur la démocratie, sont également absurdes et faibles »[68].
Il évoque l'ivresse que lui a fait éprouver la révolution de 1848, mais précise : « De quelle nature était cette ivresse ? Goût de la vengeance. Plaisir naturel de la démolition. […] Goût de la destruction ». Le coup d’État mené par Louis-Napoléon dans la nuit du 1 au 2 décembre 1851 ne lui laisse plus aucune illusion : « Le 2 décembre m’a physiquement dépolitiqué » écrit-il à Narcisse Ancelle le 5 mars 1852[69]. Il écrit : « Politique. - Je n'ai pas de convictions, comme l'entendent les gens de mon siècle, parce que je n'ai pas d'ambition ».
Pessimiste, il dénonce l’absurdité de l’idée de progrès et l’hérésie moderne de la suppression du péché originel[70]. L’homme éternel n’est que « l’animal de proie le plus parfait »[71]. De là procède la violence polémique de ses textes (notamment les derniers), le sentiment de l’inéluctable décadence, la conviction de la victoire du satanisme ainsi que des affirmations comme : « Il n’existe que trois êtres respectables : le prêtre, le guerrier, le poète. Savoir, tuer et créer »[72] et il ajoute : « Les autres hommes sont taillables et corvéables, faits pour l'écurie, c'est-à-dire pour exercer ce qu'on appelle des professions ».
Dans Pauvre Belgique, il rapporte : « On me dit qu’à Paris 30 000 pétitionnent pour l’abolition de la peine de mort. 30 000 personnes qui la méritent ». Dans Mon cœur mis à nu, il explique que la peine de mort « a pour but de sauver (spirituellement) la société et le coupable » et précise : « Pour que le sacrifice soit parfait, il faut qu'il y ait assentiment et joie, de la part de la victime. Donner du chloroforme à un condamné à mort serait une impiété, car ce serait lui enlever la conscience de sa grandeur comme victime et lui supprimer les chances de gagner le Paradis ».
Dans « Entre Bainville et Baudelaire », Maurras saluait en Baudelaire l’admirateur de Maistre qui, « dans la faible mesure de l’attention donnée à la vie civique, [avait pris parti] contre tout ce qui ressemblait à la voix du peuple et au suffrage universel. Chrétien bizarre, tourmenté, dissident, il n’en professait pas moins les dogmes les plus opposés à ceux du Vicaire savoyard, tels que la bonté naturelle de l’homme ou l’utilité publique d’une volonté générale »[73].
Baudelaire jugé par quelques contemporains
Le 13 juillet 1857, Gustave Flaubert remercie Baudelaire en ces termes pour l’envoi d’un exemplaire des Fleurs du mal : « … depuis huit jours, je le relis, vers à vers, mot à mot et, franchement, cela me plaît et m’enchante. — Vous avez trouvé le moyen de rajeunir le romantisme. Vous ne ressemblez à personne (ce qui est la première de toutes les qualités). L’originalité du style découle de la conception. La phrase est toute bourrée par l’idée, à en craquer. — J’aime votre âpreté, avec ses délicatesses de langage qui la font valoir, comme des damasquinures sur une lame fine. […] Ah ! vous comprenez l’embêtement de l’existence, vous ! […] Ce qui me plaît avant tout dans votre livre, c’est que l’art y prédomine. Et puis vous chantez la chair sans l’aimer, d’une façon triste et détachée qui m’est sympathique. Vous êtes résistant comme le marbre et pénétrant comme un brouillard d’Angleterre »[74].
Barbey d’Aurevilly souligna dans les Fleurs du mal « la réussite des détails, […] la fortune de la pensée, […] le luxe et l’efflorescence de la couleur », mais surtout « l’architecture secrète, un plan calculé », concluant que Baudelaire n’avait que deux voies à suivre après l’écriture d’un tel recueil : « Se brûler la cervelle… ou se faire chrétien ! » Il lui écrivit une lettre dithyrambique et drolatique, où il le qualifiait d’ « ivrogne d’ennui, d’opium et de blasphèmes ».
Victor Hugo lui écrit en octobre 1859 qu’il ne partage pas sa vision de l’art pour l’art, lui préférant « l’art pour le progrès », mais reconnaît qu’il donne à la poésie une force neuve : « Vous dotez le ciel de l’art d’on ne sait quel rayon macabre. Vous créez un frisson nouveau ».
Leconte de Lisle, le 1er décembre 1861, s’émerveille de voir comment, dans la poésie des Fleurs du mal, « tout concorde à l’effet produit, laissant à la fois dans l’esprit la vision de choses effrayantes et mystérieuses, dans l’oreille exercée comme une vibration multiple et savamment combinée de métaux sonores et précieux, et dans les yeux de splendides couleurs ». Comme d’autres, il est sensible à l’originalité de l’œuvre « marquée du sceau énergique d’une longue méditation ».
Sainte-Beuve situe l’œuvre de Baudelaire « à la pointe extrême du Kamtchatka romantique » et voit en l’auteur le représentant parfait de ces cercles littéraires « où l’on récite des sonnets exquis, où l’on s’enivre avec le haschisch pour en raisonner après, où l’on prend de l’opium et mille drogues abominables dans des tasses d’une porcelaine achevée ».
Théodore de Banville parle de la publication des Fleurs du mal et de leurs « courts chefs-d’œuvre » comme d’un « véritable événement littéraire ».
Paul Verlaine juge les poèmes des Fleurs du mal comme « la quintessence, […], la concentration extrême » de ce qui fait « l’homme moderne, avec ses sens aiguisés et vibrants, son esprit douloureusement subtil, son cerveau saturé de tabac, son sang brûlé d’alcool, bref cet échantillon d’humanité qu’il appelle « le bilio-nerveux par excellence » ».
Théophile Gautier dit de lui, en 1868, que « ce poète que l’on cherche à faire passer pour une nature satanique éprise du Mal et de la dépravation […] avait l’amour du Bien et du Beau au plus haut degré ».
D'autres, en revanche, jettent sur l'œuvre et l’homme des commentaires au vitriol.
Ainsi, pour les Goncourt, Baudelaire appartient au cercle des « épaffeurs cyniques », proférant en public d'énormes obscénités. Ils le croisent, deux mois après le procès d’août 1857, et en laissent le portrait suivant : « […] Sans cravate, le col nu, la tête rasée, en vraie toilette de guillotiné. Une seule recherche : de petites mains lavées, écurées, mégissées. La tête d’un fou, la voix nette comme une lame. Une élocution pédantesque ». Ils ajoutent qu’il « se défend, assez obstinément […] d’avoir outragé les mœurs dans ses vers »[75].
Louis Edmond Duranty qualifie le poète de « croque-mitaine littéraire » au talent surfait « qui emploie les niaiseries du mystère et de l’horreur pour étonner le public ».
Jules Vallès n’a vu en Baudelaire « qu’un fou », « un fanfaron d’immoralité » créateur d’un monde où « les anges avaient des ailes de chauve-souris avec des faces de catins ».
Un certain Louis Goudall s’étonne, dans Le Figaro du 4 novembre 1855, que « Baudelaire [ait] réussi à se faire passer dans le monde des lettres pour un poète de génie » quand on voit comment, à la publication de ses poèmes, sa « réputation et [son] talent […] se brisèrent en mille pièces », ajoutant : « Je défie bien la postérité d’en retrouver un morceau ». Comment pourrait-il en être autrement, explique-t-il, devant l’« inspiration puérilement prétentieuse », l’« entassement d’allégories ambitieuses pour dissimuler l’absence d’idées », la « langue ignorante, glaciale, sans couleur » et le goût partout affiché pour l’immonde et le scabreux. Non, décidément Baudelaire « ne sera plus cité désormais que parmi les fruits secs de la poésie contemporaine »[76].
Principaux ouvrages
- Salon de 1845 (1845) ;
- Salon de 1846 (1846), illustré par Raymond Pelez ;
- La Fanfarlo (1847), nouvelle ;
- Du vin et du haschisch (1851) ;
- Fusées (1851), journal intime ;
- L’Art romantique (1852) ;
- Morale du joujou (1853, réécrit en 1869) ;
- Exposition universelle (1855) ;
- Les Fleurs du mal (1857) ;
- Le Poème du haschisch (1858) ;
- Salon de 1859 (1859) ;
- Les Paradis artificiels (1860) ;
- La Chevelure (1861) ;
- Réflexions sur quelques-uns de mes contemporains (1861) ;
- Richard Wagner et Tannhäuser à Paris (1861) ;
- Petits poèmes en prose ou Le Spleen de Paris (1869), poème en prose (posthume) ;
- Le Peintre de la vie moderne (1863) ;
- L’œuvre et la vie d’Eugène Delacroix (1863) ;
- Mon cœur mis à nu (1864), journal intime ;
- Curiosités esthétiques (1868) ;
- Lettres ;
- L’Art romantique (1869) ;
- Journaux intimes (1851-1862) ;
- Pauvre Belgique (inachevé)[77],[78]
Baudelaire fut également parmi les premiers traducteurs d’Edgar Allan Poe, qu’il contribua à faire connaître en France. Il réunit ses traductions dans plusieurs recueils, notamment les Histoires extraordinaires.
Hommages
Musique
Henri Duparc, deux poèmes de Baudelaire, pour chant et piano :
- L'Invitation au voyage (1870), orchestration du compositeur
- La Vie antérieure (1884), orchestration du compositeur
Claude Debussy, Cinq poèmes de Charles Baudelaire, pour chant et piano :
- Le Balcon (1888), orchestration John Adams (1994)
- Harmonie du soir (1889), orchestration John Adams (1994)
- Le jet d'eau (1889), orchestration John Adams (1994)
- Recueillement (non datée), orchestration John Adams (1994)
- La mort des amants (1887)
Louis Vierne, Cinq poèmes de Baudelaire (1919) pour chant et piano :
- Recueillement, orchestration du compositeur
- Réversibilité, orchestration du compositeur
- Le Flambeau vivant, orchestration du compositeur
- La cloche fêlée, orchestration du compositeur
- Les Hiboux, orchestration du compositeur
André Caplet, deux poèmes de Baudelaire (1922) pour chant et piano :
- La Cloche fêlée
- La Mort des pauvres
Cénotaphe
Le cénotaphe de Baudelaire est situé entre les 26e et 27e divisions du cimetière parisien du Montparnasse. Ce monument ne doit pas être confondu avec sa tombe située dans le même cimetière, dans la 6e division[79].
Odonymie
- Honfleur
À Honfleur, où il séjourna chez sa mère Caroline en 1859 puis brièvement en 1860 et en 1865, une rue porte son nom. Le poète surnommait la demeure de celle-ci la « maison joujou ». Acquise ensuite par le principal du collège de la ville, elle est louée par Alphonse Allais de 1898 à 1900 puis détruite, remplacée par un bâtiment hospitalier puis, en 1977, par un pavillon privé. La voie qui la borde est d'ailleurs la rue Alphonse-Allais, la rue Baudelaire, plus petite, inaugurée en 1923, étant située à l'une de ses intersections. Au croisement, une plaque commémorative présente une photo de la « maison joujou ». Baudelaire y envoya Le Voyage à son éditeur, y commença son étude sur Théophile Gautier et acheva la deuxième édition des Fleurs du mal. Toujours à Honfleur, l'auditorium de la médiathèque porte son nom, tandis que sa phrase « Honfleur a toujours été le plus cher de mes rêves » est gravée sur la paroi vitrée de la salle de lecture inaugurée en 2010. Enfin, son buste trône parmi d'autres dans le jardins des personnalités inauguré en 2004[80].
Annexes
Éditions de référence
- Œuvres complètes, édition de Claude Pichois, 2 tomes, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1975-1976.
- Œuvres complètes, préface de Claude Roy, notes et notices de Michel Jamet, Éd. Éditions Robert Laffont, 1980 (collection Bouquins, Robert Laffont, 2011).
- Correspondance, édition de Claude Pichois, 2 tomes, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1973.
- L’Atelier de Baudelaire : Les Fleurs du Mal, Édition diplomatique en 4 tomes, Claude Pichois et Jacques Dupont, Paris, Honoré Champion (ISBN 2-7453-1078-X).
- Lettres à sa mère, correspondance établie, présentée et annotée par Catherine Delons, éditions Manucius, 2017.
- La Passion des images. Œuvres choisies, édition présentée et annotée par Henri Scepi, collection Quarto, Gallimard, 2021, 1824 p.
Ouvrages consacrés à Charles Baudelaire
- Étienne Charavay, C. Baudelaire et A. de Vigny candidats à l’Académie, Paris, Charavay frères Éd., 1879.
- Féli Gautier, Charles Baudelaire, carnets 1821-1867, Bruxelles, E. Deman, .
- Eugène Crépet, Charles Baudelaire, Étude biographique d’Eugène Crépet, revue et mise à jour par Jacques Crépet, suivi des Baudelairiana d’Asselineau, éditions Léon Vanier, Paris, 1906[81].
- Royère Étienne, « L'érotologie de Baudelaire », Revue Mensuelle, Paris, Mercure de France, t. CXLI, , p. 618 à 637.
- Augustin Cabanès, « Baudelaire », dans Grands névropathes, tome 1, Paris, Albin Michel, 1930 (texte en ligne sur Wikisource).
- Pierre Guillain de Bénouville, Baudelaire le trop chrétien, préface de Charles du Bos, Paris, Grasset, 1936.
- Georges Blin, Baudelaire, Paris, Gallimard, 1939.
- Pierre Jean Jouve, Tombeau de Baudelaire. Première version, Neuchâtel, La Baconnière, 1942 (réédition dans Défense et Illustration, Neuchâtel, Ides et Calendes, 1943, puis Paris, Charlot, 1946). Seconde version, Paris, Éditions du Seuil, 1958 (réédition, Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 2006).
- Benjamin Fondane, Baudelaire et l’expérience du gouffre, Paris, Seghers, 1947.
- Jean-Paul Sartre, Baudelaire, Paris, Gallimard, 1947 (réédition Folio Essais, 1988 (ISBN 978-2070324934)).
- Georges Blin, Le Sadisme de Baudelaire, Paris, éd. José Corti, 1948.
- Jacques Crépet, Les plus belles pages de Charles Baudelaire : poésie et prose. Choix de J.Crepet, éditions Messein, Paris, 1950.
- Claude Pichois et W. T. Bandy, Baudelaire devant ses contemporains, Monaco, éditions du Rocher, .
- Max Milner, Baudelaire. Enfer ou ciel qu’importe !, Paris, Plon, 1967.
- Robert Kopp et Claude Pichois, Les Années Baudelaire, Neuchâtel, La Baconnière, 1969.
- Jean-Claude Mathieu, « Les Fleurs du mal » de Baudelaire, Paris, Hachette, 1972.
- Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un poète lyrique à l’apogée du capitalisme, trad. par Jean Lacoste, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1979.
- Georges Poulet, La poésie éclatée : Baudelaire / Rimbaud, Paris, Presses universitaires de France, 1980.
- John E. Jackson, La Mort Baudelaire, Neuchâtel, La Baconnière, 1982 (ISBN 978-2825203767).
- Giovanni Macchia, Baudelaire, Milano, Rizzoli, 1986.
- Claude Pichois et Jean Ziegler, Charles Baudelaire, Paris, Julliard, 1987 (réédition Paris, éd. Fayard 1996 et 2005).
- Jean Starobinski, La Mélancolie au miroir. Trois Études sur Baudelaire, Paris, Julliard, 1989.
- Giovanni Macchia, Baudelaire e la poetica della malinconia, 1946 ; Milano, Rizzoli, 1992.
- Jérôme Thélot, Baudelaire. Violence et poésie, Paris, Gallimard, Bibliothèque des idées, 1993.
- Pierre Brunel, « Les Fleurs du mal » : entre fleurir et défleurir, Paris, Éditions du temps, coll. « Lectures d'une œuvre », 1998.
- Patrick Labarthe, Baudelaire et la tradition de l’allégorie, Genève, Droz, 1999.
- Yves Bonnefoy, Baudelaire : la tentation de l’oubli, Paris, Bibliothèque nationale de France, 2000.
- John E. Jackson, Baudelaire, Paris, Le Livre de poche, coll. « Références », 2001.
- Michel Covin, L'Homme de la rue. Essai sur la poétique baudelairienne, Paris, L'Harmattan, coll. « Ouverture philosophique », 2001.
- Catherine Delons, Narcisse Ancelle, persécuteur ou protecteur de Baudelaire, Tusson, Du Lérot, 2002.
- Claude Pichois et Jean-Paul Avice, Dictionnaire Baudelaire, Tusson, Du Lérot éd., 2002.
- Pierre Brunel, Baudelaire et le « puits des magies ». Six essais sur Baudelaire et la poésie moderne, Paris, José Corti, 2002.
- Antoine Compagnon, Baudelaire devant l’innombrable, Paris, Presses de l'Université de Paris-Sorbonne, 2003.
- Robert Kopp, Baudelaire, le soleil noir de la modernité, Paris, Gallimard, coll. « Découvertes Gallimard » (no 456), 2004.
- Yves Bonnefoy, Goya, Baudelaire et la Poésie, entretien avec Jean Starobinski, Genève, La Dogana, 2004.
- Édition audio de l’intégrale Baudelaire, lue par Éric Caravaca, Isabelle Carré, Guillaume Gallienne, Denis Lavant, Michel Piccoli, Denis Podalydès, Paris, Éditions Thélème.
- Isabelle Viéville-Degeorges, Baudelaire clandestin de lui-même, Paris, Éditions Page après Page, 2004 (ISBN 978-2-84764-014-4) (réédition Paris, Éditions Léo Scheer, 2011 (ISBN 9782756103549)).
- John E. Jackson, Baudelaire sans fin, Paris, éd. José Corti, 2005.
- Roland Biétry, Baudelaire : le Parnasse, Le Mont-sur-Lausanne, Éditions Loisirs et Pédagogie, , 54 p. (ISBN 978-2-606-01235-9).
- Pierre Brunel, Baudelaire antique et moderne, Paris, Presses Universitaires Paris Sorbonne, 2007.
- Ernest Raynaud, Baudelaire et la religion du dandysme, Saint-Loup-de-Naud, Éditions du Sandre, 2007.
- Madeleine Lazard, Un homme singulier, Charles Baudelaire, Paris, Arléa, 2010 (ISBN 978-2-86959-870-6).
- Bernard Lechevalier, Le Cerveau mélomane de Baudelaire : musique et neuropsychologie, Paris, Éditions Odile Jacob, 2010 (ISBN 2-7381-2382-1).
- Jean-Claude Mathieu, « Les Fleurs du Mal », la résonance de la vie, Paris, Corti, coll. « Les Essais », 2010.
- Sergio Cigada, Études sur le Symbolisme, éditées par Giuseppe Bernardelli et Marisa Verna, Milano, EduCatt, 2011 (ISBN 978-88-8311-847-0).
- Catherine Delons, L’Idée si douce d’une mère, Charles Baudelaire et Caroline Aupick, Paris, Les Belles Lettres, 2011.
- Yves Bonnefoy, Le Siècle de Baudelaire, Paris, Seuil, coll. « La librairie du XXIe siècle », 2014.
- Antoine Compagnon, Baudelaire l'irréductible, Paris, Flammarion, 2014.
- Antoine Compagnon, Un été avec Baudelaire, France Inter / Éditions des Équateurs, 2015.
- Federica Locatelli, Une figure de l’expansion: la périphrase chez Charles Baudelaire, Berne, Peter Lang, 2015 (ISBN 978-3-0343-1589-0).
- AA.VV., sous la direction de F. Locatelli, Le Sens dans tous les sens. Voir, toucher, goûter, écouter, respirer les Fleurs du Mal, Milano, EduCatt, 2015 (ISBN 978-88-6780-819-9).
- Xavier d’Hérouville, L’Idéal moderne selon Charles Baudelaire & Théodore Chassériau, Paris, L’Harmattan, 2016.
- Marie-Christine Natta, Baudelaire, Paris, Éditions Perrin, 2017 (ISBN 9782262037314).
- Nathalie Quintane, Une lecture de Proust, Baudelaire, Nerval, Paris, La Fabrique, 2018 (ISBN 978-2-35872-161-5).
- Ainsi parlait Charles Baudelaire, dits et maximes de vie choisis et présentés par Yves Leclair, Orbey, Arfuyen, 2018.
- Andrea Schellino, La pensée de la décadence de Baudelaire à Nietzsche, Paris, Classiques Garnier, 2020 (ISBN 978-2-406-10072-0).
- Christoph Groß, Agonie et extase. Baudelaire et l'esthétique de la douleur, Paris, Classiques Garnier, coll. « Baudelaire », 2021.
- André Suarès, Vues sur Baudelaire, préface de Stéphane Barsacq, Paris, Éditions des instants, 2021.
Charles Baudelaire dans la fiction
- Bernard-Henri Lévy, Les derniers jours de Charles Baudelaire, Paris, Grasset, 1988.
- Allen S Weiss, Le livre bouffon – Baudelaire à l’Académie, Paris, Seuil, 2009.
- Felipe Polleri, Baudelaire, Paris, Christophe Lucquin Éditeur, 2014.
- Jean Teulé, Crénom, Baudelaire !, Paris, Mialet-Barrault éditeurs, 2020, 432 p. (ISBN 978-2-08-020884-2)
Charles Baudelaire dans la musique
- C.F.F. e il Nomade Venerabile, Un jour noir, chanson extraite de l'album Lucidinervi (2009) et disponible sur YouTube.
- Le groupe de Black Metal grec Rotting Christ a mis en musique Les Litanies de Satan sur l'album Rituals (2016), avec Michel Locher (alias Vorphalac, chanteur suisse francophone du groupe Samael) aux vocaux.
Articles ou chapitres consacrés à Charles Baudelaire
- Jean-Pierre Richard, « Profondeur de Baudelaire », dans Poésie et profondeur, Le Seuil, coll. « Pierres vives », 1955 ; réédition, coll. « Points Essais », 1976.
- Yves Bonnefoy, « Les Fleurs du mal », dans L’Improbable et autres essais, Mercure de France, 1959.
- Yves Bonnefoy, « Baudelaire contre Rubens », dans Le Nuage rouge et autres essais, Mercure de France, 1977.
- Yves Bonnefoy, « Baudelaire », dans Lieux et destins de l’image, Seuil, La librairie du XXe siècle, 1999.
- Hugo Friedrich, « Baudelaire, le poète de la modernité », dans Structure de la poésie moderne, trad. par Michel-François Demet, Livre de Poche, 1999.
- Yves Bonnefoy, « La Tentation de l’oubli », dans Sous l’horizon du langage, Mercure de France, 2002.
- Xavier de Harlay, « L’Idéal moderne selon Charles Baudelaire & Théodore Chassériau », revue Art et Poésie de Touraine no 180, 2005.
- Max Milner, « Le Diable dans la littérature française, de Cazotte à Baudelaire », éd. José Corti, 1960 et 2007, chapitre « Baudelaire ».
- Jean-Luc Steinmetz, « Baudelaire et Hetzel », dans Revue Jules Verne no 37, Hetzel éditeur par excellence, 2013.
Articles connexes
- La Géante, de Charles Baudelaire ;
- Spleen baudelairien ;
- Baudelaire de Jean-Paul Sartre ;
- Représentation de la femme dans Les Fleurs du mal ;
- Club des Hashischins ;
- Vers libre ;
- Mise en musique des poèmes de Charles Baudelaire ;
- Chronologie des poèmes de Baudelaire ;
- Les poètes chantés par Léo Ferré ;
- Le Port (Baudelaire).
- Les Fleurs du Mal & Le Spleen de Paris sur Lyres
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- Documents sur le procès des Fleurs du mal.
- Baudelaire Critique d’art [PDF] – fiche du musée d’Orsay.
- Magazine d’information des actualités baudelairiennes.
- Vie et œuvre de Charles Baudelaire, le dossier multimédia de francetv éducation.
Notes et références
- « Il y a du Dante dans l'auteur des Fleurs du Mal, mais c'est du Dante d'une époque déchue, c'est du Dante athée et moderne, du Dante venu après Voltaire, dans un temps qui n'aura pas de saint Thomas ». Les Œuvres et les hommes (1re série) – III. Les Poètes, Paris, Amyot, 1862, p. 380.
- Michel Décaudin, « Notices », Anthologie de la poésie française du XIXe siècle - De Baudelaire à Saint-Pol-Roux, Paris, Gallimard, 1992, coll. « Poésie », p. 402.
- « La poésie ne peut pas, sous peine de mort ou de défaillance, s'assimiler à la science ou à la morale ; elle n'a pas la Vérité pour objet, elle n'a qu'Elle-même ». - C. Baudelaire, Notice sur Edgar Poe.
- http://users.telenet.be/gaston.d.haese/baudelaire_les_phares.html.
- Archives de Paris. Acte de naissance du 09/04/1821. Vues 32 à 34/51.
- 11e arrondissement ancien - 6e actuel. « ([…] à l’angle du boulevard Saint-Germain (maison détruite […]) » – Baudelaire, Bibliothèque de la Pléiade, 1975, « Chronologie », p. xxv.
- Eugène Crépet, Charles Baudelaire, Étude biographique d’Eugène Crépet, revue et mise à jour par Jacques Crépet, suivie des Baudelairiana d’Asselineau, Paris, Librairie Léon Vanier, 1906, p. 7. Ouvrage numérisé.
- Baudelaire, Correspondance, La Pléiade Gallimard.
- Né à Paris (11e arrondissement ancien - 6e actuel) le 18 janvier 1805 (28 nivôse an XIII). Marié à Paris le 30 avril 1829 avec Anne Félicité Ducessois. Décédé à Fontainebleau (Seine-et-Marne) le 14 avril 1862. Bourgeois respectable de par sa profession de juge, Claude Alphonse Baudelaire et son frère Charles, psychologiquement dissemblables, n'auront aucune proximité affective et n'entretiendront même aucune relation. Comme Charles, Claude Alphonse mourra paralysé.
- Claude Pichois et Jean Ziegler, Baudelaire : biographie, éditions Julliard, Paris, 1987, p. 74 (ISBN 978-2-260-00453-0).
- « Monsieur, ce matin votre fils, sommé par le sous-Directeur de remettre un billet qu'un de ses camarades venait de lui glisser, refusa de le donner, le mit en morceaux et l'avala. Mandé chez moi, il me déclare qu'il aime mieux toute punition que de livrer le secret de son camarade et pressé de s'expliquer dans l'intérêt même de cet ami, […] il me répond par des ricanements dont je ne dois pas souffrir l'impertinence. Je vous renvoie donc ce jeune homme qui était doué de moyens assez remarquables, mais qui a tout gâché par un mauvais esprit, dont le bon ordre du Collège a eu plus d'une fois à souffrir. » Proviseur J. Pierot. Cité sur le site ladissertation.com.
- Charles Cousin, Voyage dans un grenier… par Charles C*** de la Société des Amis des Livres., Paris, Damascène Morgand & Charles Fatout, , p. 11
- Jacques Hillairet, Dictionnaire historique des rues de Paris, T. 2, 1997, p. 40.
- Félix Tournachon dit Nadar, Charles Baudelaire intime. Le poète vierge., Paris, Obsidiane, (lire en ligne), p. 92.
- Voir l'article : « Comment on paie ses dettes quand on a du génie » paru dans le Corsaire Satan du 24 novembre 1845.
- « Les Drames et les romans honnêtes », La Semaine théâtrale, novembre 1857.
- Il l'appelle sa « vieille et terrible amie » (« Chambre double » en 1861 tirée du Spleen de Paris).
- « Le spleen de Paris : Baudelaire, pas si drogué qu'on le croit », Rue89 en partenariat avec le magazine Standard, 29 janvier 2011.
- Sorte de curatelle à l'époque.
- Marie-Christine Natta, Baudelaire, Perrin, , p. 133.
- Véronique Bartoli-Anglard, Les Fleurs du mal, Éditions Bréal, , p. 17.
- Charles Baudelaire, Correspondance, p. Lettre à Mme Paul Meurice du mardi 3 janvier 1865.
- Robert Kopp, Baudelaire, le soleil noir de la modernité, Éd. Découvertes Gallimard, Collection Littératures, p. 60.
- Paysage (Baudelaire).
- Eugène Crépet, Charles Baudelaire.
- Le recueil est tiré à 1 100 exemplaires et mis en vente le (cf. J.-P. Avice et Claude Pichois, Passion Baudelaire, Éd. Textuel, 2003, p. 98).
- Baudelaire est condamné le 20 août 1857 par la sixième Chambre correctionnelle du Tribunal de la Seine.
- Baudelaire l'avait malicieusement surnommé « Coco mal perché ».
- Alexandre Najjar, Le censeur de Baudelaire : Ernest Pinard (1822-1909), Paris, La Table Ronde, , 360 p. (ISBN 978-2-7103-6703-1), p. 102.
- Étienne Charavay, A. de Vigny et Charles Baudelaire candidats à l'Académie française, Charavay Frères éditeurs, 1879.
- Yvan Leclerc, « L'Opération chirurgicale des Fleurs du mal », dans Crimes écrits : la littérature en procès au XIXe siècle, Plon, 1991, p. 223-281.
- D'après le panneau explicatif érigé devant l'entrée de l'immeuble.
- Archives de Paris. 16e arrondissement. Acte de décès no 578 du 01/09/1867. Vue 9/31.
- Loi no 46-2064 du 25 septembre 1946 ouvrant un recours en révision contre les condamnations prononcées pour outrages aux bonnes mœurs commis par la voie du livre.
- Baudelaire, Les Fleurs du Mal, Le Livre de poche, page 326.
- Crim., 31 mai 1949.
- Yvan Leclerc, op. cit., p. 337-339 où l'on trouve les textes des jugements de 1857 et de 1949.
- Nicolas Corato (dir. de pub.), « Grandes plaidoiries et grands procès », PRAT, 2005, p. 447-468 : réquisitoire de Pinard, plaidoirie de Chaix d'Est-Ange, jugement du tribunal correctionnel, arrêt de la Cour de cassation avec rapport Falco.
- Claude Pichois et Jean Ziegler, Baudelaire (Fayard, 2005 ; édition originale 1987) ; Claude Delarue, Baudelaire, l'enfant idiot (Belfond, 1997) et François Porché, La vie douloureuse de Charles Baudelaire (Plon, 1926).
- Isabelle Viéville Degeorges, Baudelaire, clandestin de lui-même, Page après Page, 2004, p. 38.
- « L’île n'appartenait pas seulement aux rentiers et aux petits bourgeois. Elle leur était disputée par les artistes qui recherchaient des espaces bon marché et la liberté. », C. Pichois et J. Ziegler, Baudelaire, Fayard, 2005.
- L'hôtel Pimodan fut bâti au XVIIe siècle par le duc de Lauzun, un esthète et « dandy » avant la lettre (v. Barbey D'Aurevilly, « Un dandy d’avant les dandys », dans Du dandysme et de George Brummell). À l’époque de Baudelaire, cet hôtel abrite une quantité d'artistes et sera le lieu de réunion du Club des haschichins, immortalisé par Théophile Gautier dans le conte du même nom.
- Porché, op. cit., p. 114.
- Pichois et Ziegler, Baudelaire, op. cit., p. 426-430.
- Pichois et Ziegler, Baudlaire (op. cit.), p. 317..
- C. Pichois et J. Ziegler, Baudelaire (op. cit.).
- Charles Baudelaire, « Charles Baudelaire ou le rêve d'un curieux, enquête sur le jugement d'un poète envers la photographie », Nicéphore, cahier de photographies (n°2), , p. 118 (lire en ligne)
- Le temps baudelairien et la fuyance de l’art romantique : entre tempus et æternitas, Judith Spencer, Neophilogogus juillet 2009.
- « Manet [auquel le texte est dédié] avait pour modèle, au moment où Baudelaire commença de fréquenter son atelier, un gamin nommé Alexandre. […] Le sujet du poème est directement emprunté à ce qui se passa dans l'atelier de Manet le jour de 1861 où Alexandre fut trouvé pendu, un sucre d'orge entre les dents. Quant à l'épisode de la mère et des voisins, rien ne permet de savoir s'il est authentique ou s'il a été inventé par Baudelaire ». Petits poèmes en prose, éd. Henri Lemaitre, Garnier, coll. « Classiques Garnier », 1997, p. 148.
- Alain Trouvé, « Aragon lecteur de Baudelaire », revue d'histoire littéraire de la France, no 101, 2001.
- L'Art romantique, Éditions Garnier, coll. « Classiques Garnier », 1965, p. 678.
- « Notes nouvelles sur Edgar Poe », dans Critique littéraire, Gallimard, coll. « Pléiade », 1976, p. 333.
- Selon les termes de Joseph Brodsky (cité dans (en) Solomon Volkov, Conversations with Joseph Brodsky, New York, Free Press, , p. 87), qui va jusqu'à conclure : « Hugo, Baudelaire – pour moi c'est un seul et même poète sous deux noms différents. » (Simon Leys, Protée et autres essais, Paris, Gallimard, , 150 p. (ISBN 978-2-07-076283-5), « Victor Hugo », p. 50).
- Simon Leys, Protée et autres essais, Paris, Gallimard, , 150 p. (ISBN 978-2-07-076283-5), « Victor Hugo », p. 49. L'ouvrage reprend, à la suite d'Henri Troyat, Baudelaire, Paris, Flammarion, , p. 324, les propos de Baudelaire notés par Charles Asselineau : « J'en ferai moi un roman où je mettrai en scène un scélérat, assassin, voleur, incendiaire et corsaire, et qui finira par cette phrase : « Et sous ces ombrages que j'ai plantés, entouré d'une famille qui me vénère, d'enfants qui me chérissent et d'une femme qui m'adore, je jouis en paix du fruit de mes crimes » ».
- « Exposition universelle (1855). III. Eugène Delacroix. », dans Œuvres complètes, t. 2, Gallimard, coll. « La Pléiade », 1976, p. 596.
- Manifestes du surréalisme, Gallimard, coll. « Folio essais », 2005, p. 14.
- Curiosités esthétiques. L'Art romantique, éd. Henri Lemaitre, Garnier, coll. « Classiques Garnier », 1986, p. 676.
- André Guyaux, Baudelaire : Un demi-siècle de lecture des Fleurs du mal, Presses Universitaires de paris-Sorbonne, 2007, p. 70 (ISBN 978-2-84050-496-2).
- André Guyaux, 2007, p. 71..
- Petits poèmes en prose, éd. Henri Lemaitre, Garnier, coll. « Classiques Garnier », 1997, p. 7.
- D'après le témoignage de Théodore Duret, recueilli dans le Baudelaire d'Ernest Raynaud, cité dans Lecture de Baudelaire de Louis Aguettant (Les cahiers bleus du Club national du Disque, 1957, p. 13), elle était davantage « quarteronne » que « mulâtresse ».
- Pascal Pia, Baudelaire, Seuil, Collection Écrivains de toujours, 1952 et 1995, p. 50.
- Correspondance, volume I, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1973, p. 124-125.
- « Il vivait alors en concubinage avec Jeanne Duval, et depuis cinq ans qu'il la connaissait avait sondé jusque dans leur profondeur l'animalité de cette sang mêlé. […] Seuls restaient, malgré l'envoûtement qu'exerçait encore sur lui son « vampire », avec un curieux besoin d'expiation, la honte de cette liaison, le remords de la dégradation où le maintenait sa passion avilissante. » Albert Feuillerat, Baudelaire et la belle aux cheveux d'or, José Corti, 1941, p. 21.
- Pour un point de vue moins misogyne, voir : Angela Carter, Vénus noire, C. Bourgois, 2000. L'auteur y présente la liaison vue par Jeanne Duval.
- Charles Baudelaire, Hygiène, 1887, « De Maistre m'a appris à raisonner ».
- Sous la direction de Jean-Clément Martin, Dictionnaire de la Contre-Révolution, Gérard Gengembre, « Ballanche, Pierre Simon », éd. Perrin, 2011, p. 86-87.
- Charles Baudelaire, Œuvres complètes, Paris, Editions du Seuil, , 759 p., pp. 631, 632, 682.
- « Page:Baudelaire - Lettres 1841-1866.djvu/34 - Wikisource », sur fr.wikisource.org (consulté le ).
- Charles Baudelaire, Lettre à Alphonse Toussenel, 21 janvier 1856.
- Charles Baudelaire, Fusées, 1851.
- Charles Baudelaire, Mon cœur mis à nu, 1864.
- Charles Maurras, Poésie et vérité, 1944.
- Gustave Flaubert, Correspondance, t. II, Gallimard (Pléiade), 1980, Lettre à Charles Baudelaire du 13 juillet 1857, p. 744-748.
- Edmond et Jules de Goncourt, Journal, Tome 1, Paris, Robert Laffont, , 1218 p. (ISBN 978-2-221-05527-4), pp. 301, 955.
- Charles Baudelaire, Œuvres complètes, Paris, Éditions du Seuil, , 759 p., p. 33, 35-36.
- Jacques Crépet et Claude Pichois publièrent, en 1952, l'œuvre inachevée de Baudelaire, Pauvre Belgique, un essai pathétique et pamphlétaire contre les Belges, écrit lors de son voyage qu'il effectua à Bruxelles en 1864. L'œuvre, dont les premiers extraits furent publiés à titre posthume en 1887, sera intégralement publiée en 1952 aux éditions Conard.
- Charles Baudelaire, Pauvre Belgique.
- Site paristoric.com, "la tombe de Charles Baudelaire", consulté le 1er avril 2020
- Éric Biétry-Rivierre, « À Honfleur, Baudelaire dans les nuages », Le Figaro, encart « Le Figaro et vous », , p. 28-29 (lire en ligne).
- Charles Baudelaire, Études biographique.
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