Jean-Pierre Jaussaud

Jean-Pierre Jaussaud, né le à Caen et mort le à Hérouville-Saint-Clair[1],[2], est un pilote automobile français. Il a notamment remporté à deux reprises les 24 heures du Mans, la première fois, en 1978 avec Didier Pironi, au volant d’une Renault Alpine A442B. La seconde victoire remonte à 1980, avec Jean Rondeau et la Rondeau M379.

Jean-Pierre Jaussaud
Jean-Pierre Jaussaud lors du Caen Rétro Festival 2009.
Biographie
Surnom Papy Jaussaud
Date de naissance
Lieu de naissance Caen (Calvados)
Date de décès
Lieu de décès Hérouville-Saint-Clair
Nationalité France
Site web jean-pierre-jaussaud.com
Carrière
Qualité Pilote automobile
Parcours
AnnéesÉcurie0C.0(V.)
Matra Sports
Alpine Renault
Rondeau
Tecno
March
Brabham
Chevron
24 Heures du Mans
Nombre de courses 13
Podiums 4
Victoires 2
Championnat de France de Formule 3
Victoires 40
Champion de France 1970
Formule 2
Victoires 3
Données clés
Données clés

Biographie

« La première course que j'ai eu l'occasion de voir, c'était aux Essarts. J'étais arrivé juste limite pour voir le départ de la course des formules Junior. La course est lancée et la première monoplace qui déboule avec un peu d'avance sur ses suivants : Peter Arundell équipé d'un casque fluo rouge. Cette image est restée gravée et je me dis que si je cours un jour, j'aurai un casque de cette couleur. Et c'est ce qui s'est passé quand je suis rentré chez Matra ! Quelque temps plus tard, à Zolder, mon idole qu'était devenu Peter, vient me voir et me dit : je t'interdis de porter un casque de cette couleur. Mon idole venait de tomber de son piédestal. La petite modification que j'ai faite fût de mettre une visière blanche sur le devant du casque. »

Jean-Pierre Jaussaud à propos de l’origine de la couleur de son premier casque.

« C'était vraiment une époque extraordinaire, le pied à l’étrier dans une écurie officielle dès ma deuxième saison. en 1967, Pescarolo a dû gagner onze courses et moi sept. On dominait tellement avec Henri qu’on terminait systématiquement premier et second, alors on s’attendais pour passer les arrivés ensemble. À Monaco, j’avais gagné la première manche sous la pluie, et Henri la deuxième sur le sec, mais comme tout les chronos étaient confondus, je me suis retrouvé en milieu de grille. Le temps que je remonte en deuxième position, Henri qui avait course gagnée, roulait à l’extrême ralenti pour m’attendre, comme d’habitude, avant la ligne d’arrivée. Quand j’ai enfin déboulé du Gazomètre, hyper lancé, il m’a vu grossir avec angoisse dans ses rétros ! J’ai dû monter debout sur les freins pour qu’il l’emporte de justesse, devant des spectateurs pour le moins médusés. »

Jean-Pierre Jaussaud à propos de l’époque Matra en Formule 3.

« Là encore je suis arrivé au début de l’ère automobile pour ce jeune constructeur qui venait du karting. J’ai roulé avec eux à partir de 1968, grâce à Johnny Rives qui m’avait permis d’être contacté par la famille Arnold, qui m’a offert une Tecno F3, avec laquelle j’ai immédiatement été dans le coup : c’était un excellent châssis, tubulaire, mais très rigide et très agile. J’ai gagné Monaco avec cette voiture-là en 1968. Quelques heures plus tard, Enzo Ferrari a envoyé un émissaire à mon hôtel pour me proposer un volant en Formule 2. Comme un imbécile, j’ai dit non, car Tecno m’avais déjà promis un contrat. Huit jours plus tard, à Monza, j’arrivais à passer la « curva grande » à fond absolu avec la Tecno F2. Je venais de battre le record du tour quand j’ai été percuté à l’arrière : j’ai pris un envol si spectaculaire que j’y ai gagné de multiples photos et passages télé, mais aussi quelques fractures qui ont bousillé ma saison. Après avoir eu des propositions, hélas non concrétisées, pour aller en F1 chez BRM et McLaren, j’ai dû attendre 1970 pour être champion de France F3 avec cette fameuse Tecno... »

Jean-Pierre Jaussaud à propos de l’époque Tecno en F3 et F2.

Jean-Pierre Jaussaud, fils d'un épicier caennais (directeur de l'entreprise Dumond-Jaussaud, négociant en vin et épicier en gros), a eu très vite le virus de la conduite. Il devait avoir 10 ans quand il a commencé à conduire sur la Citroën 5 CV "Trèfle" de son père, celui-ci lui apprenant à conduire très jeune sur les pistes de l'aéroport de Caen-Carpiquet. Dans les années 1950, le circuit de la Prairie à Caen avait une belle renommée. Les bolides et des pilotes prestigieux se succédaient comme Stirling Moss, son pilote fétiche. Le gamin allait donc voir ces voitures de près mais sans plus. Cependant, l'idée de piloter était tenace et Jean-Pierre Jaussaud se défoulait sur un karting, apprenant les ficelles du métier qui lui serviront plus tard. Il avait la mécanique dans la peau et obtint de son père, à 20 ans, la responsabilité du parc camions de l'entreprise[3]. Il gérait également la fabrication des bouchons pour les bouteilles de vin de retour de consigne.

Une occasion s'est présentée et a conforté sa passion naissante. On demanda, un jour, à son père un camion et une remorque pour aller chercher une voiture de course à l'aéroport de Saint-Gatien près de Deauville. C'était une AC Bristol, une monoplace de l'époque. Jean-Pierre Jaussaud se porta bien sûr volontaire. Il l'a remorquée à la sortie de l'avion mais, sur le chemin du retour vers Caen, il n'a pas pu s'empêcher de s'arrêter et de se mettre au volant. C'était une voiture du pilote Horace Gould qui, lui, courait sur une Maserati.

En 1962, Jean-Pierre Jaussaud tombe par hasard sur la toute nouvelle revue spécialisée Sport Auto, ce qui le replonge aussitôt dans ses rêves. Dans les pages du magazine, il découvre que le pilote anglais Jim Russell proposait des stages de pilotage. L'occasion était trop belle pour la manquer, alors il emprunta de l'argent à son frère et à sa secrétaire pour pouvoir s'inscrire. Jean-Pierre Jaussaud part donc en Angleterre avec son ami de karting, Jean-Claude Pallis, et découvre l'objet de ses rêves les plus fous, une monoplace Lotus 18 qu'il peut alors piloter.

Ainsi, Jean-Pierre Jaussaud commence le sport automobile à 25 ans. Il a suivi les cours de pilotage de l'école de Jim Russell sur le circuit de Snetterton, dans le Norfolk. Après une brève prise en main, il se trouve être plus rapide que les moniteurs sur le circuit anglais. À la même époque, à l’initiative de Jean Bernigaud, créateur du premier circuit de Magny-Cours dans la Nièvre, l’école de Jim Russell crée une filière française, dotée du Volant Shell. Sur ce nouveau tracé, Jean-Pierre Jaussaud est là aussi le plus rapide des 300 prétendants au Volant Shell qu'il remporte en 1963 face à sept finalistes dont Alain Serpaggi et Jean-Paul Behra, le fils de Jean. Au préalable, l’ordre de passage est tiré au sort et quand Jean-Pierre Jaussaud apprend qu’on lui attribuait le no 7, son numéro porte-bonheur, il dit aux autres : « Ce n’est même pas la peine de vous présenter, j’ai gagné ! » Parmi les membres du jury, il y avait Jo Schlesser. Le caennais part alors comme un « dératé ». On lui racontera plus tard que dès le premier virage à gauche, Schlesser a refermé son cahier en disant : « Pas la peine… c’est lui ! »[4] Avec cette victoire, le jovial Normand gagne une Formule 3 Cooper BMC, le "must" en 1964 (voiture qu'il détruira rapidement sur le circuit de Monaco), et sa place en championnat de France de Formule 3[5].

Jean-Pierre Jaussaud rejoint ensuite l'équipe Matra en 1965, et commence alors la tournée des circuits en Europe et en Amérique du sud en compagnie de Jean-Pierre Beltoise, Henri Pescarolo et Johnny Servoz-Gavin. Tous deviendront pilotes de Formule 1 sauf Jaussaud. Il en était tout à fait capable, mais était trop gentil et a laissé sa place à d'autres. Finalement, il aura eu cinq occasions d'accéder à la catégorie reine mais qui, hélas, ne se sont jamais concrétisées. Cela restera, pour Jean-Pierre Jaussaud, un regret éternel.

Ainsi, ils étaient quatre fines lames chez Matra. Le , lors des essais préliminaires des 24 Heures du Mans, Jean-Pierre Jaussaud est témoin de l'accident mortel de son équipier Roby Weber, qui venait de lui emprunter sa Matra 630 à moteur BRM. Jean-Pierre Jaussaud restera trois ans dans la prestigieuse écurie de Jean-Luc Lagardère avant de la quitter. En effet, Matra, qui lance son programme F1 en 1968, décide de renoncer à la F3 mais aussi de "dégraisser" ses effectifs. Dans un premier temps, Johnny Servoz Gavin, décevant en 1967 et un peu trop fantasque, est écarté de l'équipe. Henri Pescarolo rejoint Jean-Pierre Beltoise en F2, alors qu'un simple programme de mise au point du prototype 630 est proposé à Jean-Pierre Jaussaud. Frustré, il décide de quitter Matra. Ce sera le tournant de sa carrière. Entre-temps, Johnny Servoz Gavin, qui s'est racheté une conduite en assurant la mise au point du proto 630 et en remportant quelques succès à son volant, est appelé à remplacer Jackie Stewart, blessé, pour le GP de Monaco. Déjà en 1967, à l'issue d'une course de F2 à Crystal Palace au volant d'une Matra de Ken Tyrrell, le pilote grenoblois avait été approché par Bruce McLaren. Celui-ci, lui proposait le volant d'une de ses Formule 1 pour 1968 si Denny Hulme ne pouvait casser son contrat avec Brabham.

De son côté, toujours en 1968, Jean-Pierre Jaussaud remporte magistralement le Grand Prix de Monaco de Formule 3 au volant d'une Tecno, devant Peter Gethin, Ronnie Peterson et François Cevert. Injustement, et contrairement à la coutume, cette victoire ne lui a pas ouvert les portes de la Formule 1 par la suite. Quelques mois plus tard, à Monza, il est victime d'un grave accident où il est éjecté de sa Formule 2 qui part en tonneaux et s’enflamme. À noter que de 1968 à 1970, Jean-Pierre Jaussaud a remporté trois fois consécutivement la Coupe de Pâques, à Nogaro, avec sa Tecno 68-3 Ford. En 1970, il décroche enfin le titre de champion de France de Formule 3, toujours au volant d'une Tecno avec un nouveau venu dans le sport auto, le "Meubles Arnold Team", du nom d'un fabricant de meubles de Phalsbourg.

En 1971, Jean-Pierre Jaussaud effectue une saison complète en Formule 2 au sein du « Shell Arnold team » qui engageait des March. L'année suivante, il pilote une Brabham privée et se bat avec Mike Hailwood pour le titre européen de Formule 2, ce dernier finissant par l'emporter. En 1973, Jean-Pierre Jaussaud arrête les courses de monoplaces et se lance en endurance. À partir de 1976, il pilote pour Renault Sport. Après deux ans, Jean-Pierre Jaussaud et son équipier Didier Pironi remportent les 24 Heures du Mans, en ayant parcouru 5 044,530 km à une vitesse moyenne de plus de 210 km/h. Lorsque Jean-Pierre Jaussaud s'est retrouvé en tête devant la Porsche 936 de Jacky Ickx, beaucoup de responsabilités reposait sur ses épaules. Initialement, c'était Jean-Pierre Jabouille et Patrick Depailler qui devaient gagner la course. Leur Alpine Renault A443 était plus puissante. C'était une victoire d’équipe et Jean-Pierre Jaussaud ne pouvait pas casser le rêve des 300 personnes qui étaient derrière lui. Alors il écoutait son moteur et tous les bruits. Il était prévu qu'il prenne le dernier relais mais il trouvait que la boîte de vitesses craquait. Il était tellement inquiet qu'il en parla à Gérard Larrousse, le directeur de Renault Sport. Celui-ci demanda alors à Didier Pironi s’il avait entendu ces craquements. Le pilote francilien lui répondit que non et reprit le volant, ce qu'il n’aurait jamais dû faire car il était extrêmement fatigué et avait perdu 8 kg. Cela aurait pu être grave. Épuisé et déshydraté, Didier Pironi s’évanouira même avant de rejoindre le podium où l’attendait Jean-Pierre Jaussaud. Au moment où est entonnée La Marseillaise par les milliers de spectateurs présents, le champion normand fond en larmes. Cette victoire fut acquise grâce à toute une équipe et aux deux pilotes héroïques qui se retrouvèrent quelques jours tard sur les Champs-Élysées à Paris pour défiler au volant de leur bolide[6].

La Rondeau M379B avec laquelle Jean Rondeau et Jean-Pierre Jaussaud ont remporté les 24 Heures du Mans 1980.

En 1979, Jean-Pierre Jaussaud remporte le titre de champion de France des voitures de production avec une Triumph Dolomite. "Sa course préférée" reste celle de Pau en , avec la Triumph Dolomite du Team Elvia Air Inter qu'il formait avec René Metge. Course qu'il finissait seulement deuxième mais après avoir réalisé une remontée incroyable et tout en glisse, ce qui faisait se lever tous les spectateurs de la tribune Foch à chacun de ses passages. Cette même année, Jean-Pierre Jaussaud disputa à Nogaro, au volant d'une Surtees TS20, la manche française du Championnat de Grande-Bretagne de Formule 1 AFX qui mettait aux prises des Formule 1 de seconde main. Tel un lot de consolation, cette course de F1, hors championnat du monde, fut la seule à laquelle il prit part au cours de sa carrière.

En 1980, Jean-Pierre Jaussaud est pilote d'essais pour Renault en Formule 1. Cette année-là, faisant équipe avec le pilote-constructeur manceau Jean Rondeau, il a gagne de nouveau les 24 Heures du Mans.

La version civile de la replique du Mitsubishi PX 33, basée sur le Pajero, que pilotait Papy Jaussaud au Dakar 1989.

En 1982, il prendra part au rallye Paris-Dakar à bord d'une Mercedes Classe G et finira sur le podium dès sa première participation. Ce n’est cependant pas son premier engagement en rallye-raid puisqu’il avait piloté une Renault Rodéo 4x4 en 1979, puis une Classe G en 1982, déjà. Par la suite, il continue à participer à la fameuse course créée par Thierry Sabine avec Mercedes de 1984 à 1987, puis avec une Lada Niva du Team Poch en 1988, et un Mitsubishi PX 33 en 1989. En 1991 et 1992, c’est au volant d’un camion du constructeur japonais Hino, qu’il se présente sur la ligne de départ à Paris. Par ailleurs, il a participé à des rallyes tout-terrain avec un buggy en 1989.

Durant sa carrière, en plus de la Formule 3 et de l’endurance, Jean-Pierre Jaussaud aura piloté en Formule 2 pour Matra de 1966 à 1968, Brabham en 1970 et 1972, March en 1971, 1975, 1976, 1978 et 1979, Motul-Rondel Racing (l’écurie de Ron Dennis) en 1973 et 1974, et Chevron en 1976 et 1978. En Formule 5000, il couru pour Brabham et McLaren. Pour finir avec la monoplace, il effectue en 1986 une saison de Formule Ford au volant d’une Rondeau M585. Il a également écumé les circuits en championnat de France des voitures de production durant plusieurs années, au cours desquelles il a piloté la fameuse Triumph Dolomite avec laquelle il fut sacré en 1979. Mais il a aussi piloté une Ford et une Audi 80 en 1980 où il termine 3e, une Ford en 1981 et en 1982, année durant laquelle il se retrouve également au volant d’une Alfa Romeo. En 1983, c’est avec une R5 Alpine puis une BMW 635 qu’il participe à ce championnat de France de voitures de Production, appelé aussi championnat de voitures de Tourisme. Il avait déjà piloté pour le constructeur Munichois en 1973. En 1986, 1987 et 1989, il continue la ronde des circuits français avec la marque à l’hélice, au volant de BMW 635 et de BMW M3. En 1986, il a également couru dans le baquet d’une Mercedes 190, et en 1987 et 1988 dans celui d’une Ford Sierra.

Par la suite, Papy Jaussaud s’est engagé en coupes monotypes : en Trophée Peugeot 505 en 1983, 1985 et 1987, en Turbo Cup Porsche en 1987, 1988, 1989, 1990 et 1991 avec une 944, en Trophée Peugeot 309 en 1988, 1989 et 1990, en Trophée Citroën AX des Circuits en 1988 et 1989, et enfin en Formule France en 2003.

En plus des courses sur circuits et ses participations au Paris-Dakar, il s’est par ailleurs engagé en rallye, avec une Matra en 1965 et 1966, et avec des Porsche 911 en 1969, 1974, 1979 et 1980. Jean-Pierre Jaussaud a aussi fait quelques courses de côte en 1965 sur Matra, 1969 sur Tecno, 1971 sur Alpine A110, en 1973 sur March et en 1983 sur Porsche 911. Il a également couru en rallycross, en 1978 avec une Volkswagen Golf, une Alpine A110 et une Renault 5, en 1979 avec une Alpine A110, en 1980 avec une Matra Murena et une Alpine A310, en 1982 avec une Matra Murena, une VW Golf et une Porsche 911, en 1985 avec Citroën et enfin en 2008, en Logan Cup. Il a aussi fait de l’autocross en 1975, 1978 et 1979 avec Punch notamment.

Les courses sur glace n’ont pas non plus échappées à la boulimie de l’as du volant normand. Sur cette surface si particulière, il a piloté une Alpine A110 en 1973, 1974 et 1977, une Porsche 911 en 1974 puis en 1984, une Alfasud en 1974 et 1976, une Renault 30 en 1980, une Fiat Panda en 1985, une Citroën Visa en 1985, 1986 et 1989, une Peugeot 205 Turbo 16 en 1986 et 1987, une R5 Turbo en 1987 et 1991.

Jean-Pierre Jaussaud a continué la compétition jusqu'en 1992, pour devenir ensuite instructeur de course. Il est resté cependant actif en rallye ou en démonstration jusqu'en 2005. Au début de sa carrière, il a donc collectionné les premières places aux Championnats de France de Formule 3 dans les années 1960. Il a notamment gagné le Grand Prix de Monaco de Formule 3 en 1968. Ses heures de gloire sont bien sûr ses deux victoires aux 24 Heures du Mans en 1978 avec Didier Pironi sur Renault Alpine A442 et en 1980, avec Jean Rondeau sur Rondeau-Ford.

En dehors de toute compétition, Jean-Pierre Jaussaud a testé une Norma "Coupe Alfa 3 litres" en 1989. De même, en 1997, à l’occasion d’une grande fête organisée par son fils Éric et sa belle-fille Laurence sur le circuit Bugatti, pour son soixantième anniversaire et ses trente ans de carrière, son ami et confrère calvadosien Michel Ferté est venu avec sa Ferrari 333 SP qu’il pilotait à l’époque au sein de sa propre équipe, le Team Pilot Racing, en International Sport Racing Series. Papy Jaussaud a pu alors piloter une Ferrari de course pour la première fois de sa vie, accomplissant ainsi un vieux rêve sous les yeux de ses amis Henri Pescarolo, Johnny Servoz-Gavin et Jim Russell, son professeur d’école de pilotage en 1963.

Ensuite, le nom de Jean-Pierre Jaussaud reste toujours associé à la course automobile. En effet, sa March 712M de F2 du Team Arnold (1971) continue de gagner aux mains du pilote Robert Simac, plusieurs fois champion d'Europe de Formule 2 historique (titré quatre fois de suite, de 2013 à 2016), plus de 45 ans après sa construction. Jean-Pierre Jaussaud reste néanmoins présent lors de manifestations automobiles, comme les 24 Heures du Mans, Le Mans Classic, et Les Grandes Heures automobiles sur l'Autodrome de Linas-Montlhéry, par exemple.

Jean-Pierre Jaussaud est le parrain du Caen Rétro Festival depuis la première édition de cette manifestation consacrée aux véhicules anciens sur l’Hippodrome de la prairie à Caen[7], à laquelle il a participé à plusieurs reprises.

Son fils, Éric Jaussaud, est organisateur d'événements karting et de courses de prototypes Fun'Boost, avec sa société Jaussaud Events, sur le circuit de Mer [8].

Mort et hommages

Jean-Pierre Jaussaud meurt à Hérouville-Saint-Clair dans la nuit du au [9],[10]. Ses obsèque ont lieu le vendredi en l'église Saint-Gilles de Caen en présence de ses vieux amis pilotes, Henri Pescarolo, Jean Ragnotti et Michel Ferté, mais aussi de Patrice Moinet, l’auteur du beau-livre biographique Jean-Pierre Jaussaud, ma vie de pilote sorti le , et des caennais Pierre Ragues, pilote, Joël Bruneau, maire de la ville, et Michel Leneveu, le créateur du Caen Rétro Festival. Pour l’occasion, le premier karting de Jean-Pierre Jaussaud et l’Alpine A442B, avec laquelle le pilote normand a remporté sa première victoire aux 24 Heures du Mans en 1978, ont été apportés et disposés sur le parvis de l’église afin de rendre hommage au champion disparu figurant sur une photo géante posée sur les pavés[11].

Peu de temps avant sa mort, à une époque où l'automobile telle qu'on la connaît n'est pas en odeur de sainteté, Jean-Pierre Jaussaud, qui a fait honneur à la Normandie durant toute sa carrière, est récompensé de la médaille d'honneur de la ville de Caen des mains du maire Joël Bruneau. Celui-ci s'est déplacé au domicile de l'ancien pilote pour lui remettre directement la médaille [12].

† Hommages de personnalités †

43 ans après la victoire de Jean-Pierre Jaussaud aux 24 Heures du Mans 1978, son fils Éric en a encore des frissons. Le lundi , le lycéen caennais s’attendait à prendre une « soufflante » en retournant en cours avec plusieurs heures de retard. Il fut cependant bien surpris en ouvrant la porte : « Quand je suis entré dans la classe, tout le monde s’est levé pour m’applaudir. » La veille, son père, avait réalisé un authentique exploit en décrochant sa première victoire aux 24 Heures du Mans. « Vous n’avez pas de prénom parce que vous êtes le « fils de » ou la « femme de », mais vous ne pouvez être que fier. »

Éric Jaussaud, éternellement fier de son père[13].

« J’ai plein de souvenirs de Jean-Pierre, mais je garderai surtout de lui l’image d’un combattant car depuis ces dernières années il s’est battu avec courage. C’était un être fabuleux dans la vie et un concurrent à l’esprit sportif extraordinaire sur la piste. Nous avons été longtemps rivaux sur les circuits mais je dois dire qu’il a toujours fait preuve d’une droiture absolue. C’était quelqu’un de fidèle et humble[14]. » [...]

« Tous les deux, on a souvent eu des emmerdes. En 1966, lors de notre première participation (aux 24 Heures du Mans), une portière de la voiture s’est ouverte, puis au final nous avons abandonné. Idem en 1967 et en 1982 sur la Rondeau. Fort heureusement, deux ans plus tôt avec Jean Rondeau il avait réussi quelque chose de fantastique, tout comme avec Didier Pironi sur Renault (1978) où il avait fait le gros du boulot[14]. » [...]

« C’était un très bon pilote, un styliste absolu, l’un des plus beaux à voir passer. On le comparait à Jim Clark car il avait toujours la bonne trajectoire, il n’était jamais en dérive… Il a manqué de chance dans sa carrière car son accident à Monza l’a sans doute privé d’un volant en Formule 1. Il méritait pourtant d’avoir sa place parmi l’élite. En endurance, il était également réputé pour ménager la mécanique[14]. » [...]

« Aussi bizarre que cela puisse paraître on a couru à deux pilotes le Monte-Carlo, en 1965 je crois. Je me souviens que lorsqu’on arrivait sur la neige c’est moi qui prenais le volant car il n’était pas très à l’aise. Bref, on s’amusait à changer les rôles…[14] »

Henri Pescarolo, ancien équipier chez Matra et ami fidèle de Jean-Pierre Jaussaud.

« Avec la disparition de Jean-Pierre Jaussaud, c’est une légende des 24 Heures du Mans qui s’éteint. Jean-Pierre était non seulement un pilote d’un grand talent, mais également une personne particulièrement appréciée dans le paddock. Papy Jaussaud nous a quittés, mais les souvenirs resteront intacts. Son émotion lors du podium en 1978 a marqué une génération de passionnés. Sa victoire en 1980 avec son coéquipier et ami Jean Rondeau restera à jamais comme l’un des plus grands exploits du sport automobile. Au nom de l’ensemble de l’ACO, je tiens à présenter mes sincères condoléances à sa famille et à ses proches.[2],[15]. »

Pierre Fillon, président de l’ACO.

« J’avais beaucoup d’estime pour lui. À chaque fois que nous avions l’occasion de nous voir, il me racontait ses vieilles anecdotes de course. C’était toujours des discussions agréables, se remémore celui qui compte également treize participations à l’épreuve sarthoise. Nous partageons le fait d’avoir disputé les 24 heures du Mans sur une Alpine. Mais il restera le seul pilote caennais à avoir remporté la course. Ce n’est pas rien[9]. »

Pierre Ragues, pilote automobile caennais.

« Ces dernières années, il officiait comme Président du Volant Euro Formula du circuit de La Châtre dans l’Indre au sud de Châteauroux, où nous faisions en son agréable compagnie, annuellement partie du jury qui a récompensé successivement les Simon Gachet, Paul-Loup Chatin, Enzo Guibbert, Amaury Bonduel sans oublier Anthoine Hubert, trop tôt emporté par sa passion, lors du drame survenu en Formule 2 à Spa, le . À titre personnel, je perd un réel ami, lui, qui avec son épouse Fanchon, nous recevait régulièrement en séjour chez lui d’abord à Caen, puis ces dernières années à Hérouville.

Cet homme était un amour, d’une simplicité et délicatesse hors norme pour le milieu. Inoubliable sa phrase rituelle " prends soin de toi mon lapin ! "

Adieu l’ami on ne t’oubliera pas … »[16]

Gilles Gaignault, journaliste sportif, spécialiste du sport automobile et fondateur de l’écurie GDBA Motorsports

« Jean-Pierre Jaussaud était une figure du sport qui a porté haut les couleurs de notre territoire tout au long de sa carrière. J’adresse mes plus sincères condoléances à son épouse ainsi qu’à ses proches dans cette épreuve[17]. »

Joël Bruneau, maire de Caen

« La France perd un immense champion du sport automobile en la personne de Jean-Pierre Jaussaud. Je pense si fort à sa famille et en particulier à toi Éric Jaussaud. Il était si touchant de te voir renvoyer en permanence tout l’amour, toute la fierté et toute l’admiration d’un fils pour son papa. Je te présente, ainsi qu’à toute ta famille, mes plus sincères condoléances. »

Arnaud Tsamère, humoriste, amateur de sport automobile

Le dimanche , lors du Grand Prix de Hongrie 2021 de Formule 1 sur l’Hungaroring, le commentateur Julien Fébreau rend hommage à Jean-Pierre Jaussaud à trois reprises en direct sur Canal +. Une première fois entre les deux départs, pendant l’interruption de la course au drapeau rouge : « Je profite également de cette interruption pour saluer la mémoire de Jean-Pierre Jaussaud qui nous a quitté il y a quelques jours. Un des grands noms du pilotage français, vainqueur à deux reprises des 24 Heures du Mans, avec deux marques différentes. On a évidemment une grande pensée pour lui, pour sa famille et toute la communauté du sport automobile qui savait apprécier, ô combien, ce jovial et grand pilote français qu’était Jean-Pierre Jaussaud.  »

Il ajoute ensuite, lors du 29e tour, alors que le pilote originaire d’Évreux, Esteban Ocon, menait la course depuis le 5e tour au volant de son Alpine A521 : « On saluait tout-à-l’heure la mémoire de Jean-Pierre Jaussaud, ce serait tellement bien qu’aujourd’hui, ce soit une Alpine, rien que pour ça, qui s’impose ! »

Enfin, il salue une dernière fois Jean-Pierre Jaussaud juste après la victoire surprenante du pilote ébroïcien : « [...] Elle est historique cette voiture ! Elle est historique cette victoire ! Il est historique ce pilote ! Victoire d’un Français en Hongrie ! Il l’a fait, lui aussi, il l’a fait ! Il rejoint la liste des Français victorieux d’un Grand Prix de Formule 1 ! Ocon vainqueur ! Oui ! Vainqueur au volant de l’Alpine, mais oui mon garçon ! Mais oui elle est pour toi celle là ! Elle est pour Alpine ! Elle est pour Jean-Pierre Jaussaud aussi ! [...]  »

Julien Fébreau, commentateur officiel de la Formule 1[18] sur Canal+ aux côtés du Canadien Jacques Villeneuve, champion du monde de Formule 1 1997

Une semaine avant les 24 Heures du Mans 2021, le dimanche lors de la journée test, l’Alpine A480 n°36 à moteur Gibson du team Alpine Elf Matmut, engagée en catégorie Hypercar, pilotée par les Français Nicolas Lapierre et Matthieu Vaxiviere et le Brésilien André Negrão, porte sur sa carrosserie le nom de Jean-Pierre Jaussaud aux côtés de ceux des pilotes engagés. Sur son compte Twitter, l’écurie commente avec la photo montrant l’hommage en question : « Nos pilotes sont en bonne compagnie... »[19]. Le dimanche , sur le podium à l’issue de la course (l’Alpine a terminé 3e), après la cérémonie des trophées et du champagne, Philippe Sinault, le patron de l’équipe Alpine Elf Matmut termine son interview diffusée par haut-parleurs sur la pit-lane par « [...] Et une grosse pensée pour Jean-Pierre Jaussaud ! ».

Carrière en F1

L’Alpine A442B exposée lors de la 4e édition du Le Mans Classic en juillet 2008.

Palmarès

Jean-Pierre Jaussaud compte à son palmarès 40 victoires en Championnat de France de Formule 3 dont un Grand-Prix de Monaco, 3 victoires en Formule 2, une victoire en Championnat du monde des voitures de tourisme, 3 victoires en Championnat du monde des voitures de Supertourisme, une victoire aux 6 Heures du Mans, et surtout 2 victoires aux célèbres 24 Heures du Mans. Il totalise 51 victoires.

Résultats aux 24 Heures du Mans

En endurance, Jean-Pierre Jaussaud a participé à 13 reprises à la course automobile la plus célèbre du monde sur le circuit sarthois. Il a cependant également participé à d’autres grandes épreuves de ce championnat du monde. Il a ainsi piloté pour Matra de 1965 à 1968, une Alfa Romeo Tipo 33 en 1969, pour Chevron en 1971 et 1972, de nouveau pour Matra en 1973 et 1974 (année au cours de laquelle il a aussi piloté une Ligier JS2), pour Lola en 1975 et 1976, pour Mirage en 1975, de nouveau pour Chevron en 1976 et 1977, pour Inaltera en 1976, pour Alpine en 1977 et 1978, encore pour Mirage-Ford en 1979, pour Rondeau en 1980 et 1983, pour Cheetah en 1981 et 1983, et enfin pour Sauber (Del Bellos) en classe 2 litres en 1987[20],[21].

Années Équipes Équipiers Voitures Classes Tours Pos. Class
Pos.
1966 Matra Sports Henri Pescarolo Matra MS630-BRM P 2.0 38 Abd. Abd.
1967 Matra Sports Henri Pescarolo Matra MS630-BRM P 2.0 55 Abd. Abd.
1973 Équipe Matra Simca Shell Jean-Pierre Jabouille Matra-Simca MS670B S 3.0 331 3e 3e
1974 Équipe Matra Simca Gitanes Bob Wollek
José Dolhem
Matra-Simca MS670B S 3.0 Abd. Abd.
1975 Gulf Research Racing Co. Vern Schuppan Mirage GR8-Ford S 3.0 330 3e 3e
1976 Inaltera Christine Beckers
Jean Rondeau
Inaltera LM76-Ford GTP 264 21e 3e
1977 Renault Elf Patrick Tambay Renault Alpine A442 S 3.0 158 Abd. Abd.
1978 Renault Elf Didier Pironi Renault Alpine A442B S 3.0 369 1er 1er
1979 Grand Touring Cars Ltd.
Ford Concessionaires France
Vern Schuppan
David Hobbs
Mirage M10 S 3.0 121 Nc. Nc.
1980 Le Point Jean Rondeau Jean Rondeau Rondeau M379 S 3.0 338 1er 1er
1981 Otis Jean Rondeau Jean Rondeau Rondeau M379 S 3.0 58 Abd. Abd.
1982 Otis Jean Rondeau Jean Rondeau Rondeau M382 C 111 Abd. Abd.
1983 Otis Jean Rondeau Philippe Streiff Rondeau M482 C 12 Abd. Abd.

Notes et références

  1. « matchID - Moteur de recherche des décès », sur deces.matchid.io (consulté le )
  2. Marie-France Estenave, « L’ACO salue la mémoire de Jean-Pierre Jaussaud », sur mfe-live.com, (consulté le ).
  3. « Jean-Pierre Jaussaud est décédé », sur News d'anciennes, (consulté le ).
  4. François Hurel, « Jean-Pierre Jaussaud : « Je n’étais pas fait pour les courses de 24 heures » », sur www.autohebdo.fr, (consulté le ).
  5. « Jean-Pierre Jaussaud : Et courir de plaisir... », sur Caradisiac (consulté le ).
  6. Grégory Fortune, « Sport automobile : décès de Jean-Pierre Jaussaud à l'âge de 84 ans - Né à Caen le 3 juin 1937, le pilote français avait signé deux victoires aux 24 Heures du Mans, en 1978 et 1980. », sur www.rtl.fr, (consulté le )
  7. « Le pilote caennais Jean-Pierre Jaussaud, double vainqueur des 24 heures du Mans, est décédé », sur www.paris-normandie.fr, (consulté le ).
  8. https://jaussaud-events.com/.
  9. « Automobile. Âgé de 84 ans, Jean-Pierre Jaussaud, double vainqueur des 24 heures du Mans, est décédé », sur www.ouest-france.fr, (consulté le )
  10. Éric Jaussaud, « Les obsèques de Jean-Pierre Jaussaud ce vendredi 30 juillet 2021 à Caen », sur www.autonewsinfo.com, (consulté le )
  11. Gilles Gaignault, « Les obsèques de Jean-Pierre Jaussaud ce vendredi 30 juillet 2021 à Caen », sur www.autonewsinfo.com, (consulté le )
  12. « Jean-Pierre Jaussaud reçoit la médaille d'honneur de la ville de Caen », sur www.endurance-info.com, (consulté le )
  13. Aline Chatel, « Mort de Jean-Pierre Jaussaud, vainqueur des 24 Heures du Mans : retour sur une vie de champion », sur actu.fr/normandie/caen, (consulté le )
  14. Bruno PALMET, « Auto. Décès de Jean-Pierre Jaussaud : « Un styliste absolu » pour le pilote Henri Pescarolo », sur www.ouest-france.fr, (consulté le )
  15. « Jean-Pierre Jaussaud : une légende du sport auto est décédée… », sur lemagsportauto.ouest-france.fr, (consulté le )
  16. Gilles Gaignault, « Décès de Jean-Pierre Jaussaud », sur www.autonewsinfo.com, (consulté le )
  17. Antoine Couillaud, « Joël Bruneau rend hommage à Jean-Pierre Jaussaud », sur www.ouest-france.fr, (consulté le )
  18. Julien Saliou, « Julien Fébreau. Ce Quimpérois est le commentateur vedette de la Formule 1 », sur cotequimper.fr, (consulté le )
  19. Vincent Daheron, « 24 Heures du Mans : Alpine entre dans la cour des grands », sur www.lemonde.fr, (consulté le )
  20. « Engagements et classements de Jean-Pierre Jaussaud aux 24 heures du Mans », sur les24heures.fr (consulté le ).
  21. « Pilote des 24 heures du Mans: Jean-Pierre Jaussaud », sur .24h-en-piste.com (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Pierre Jaussaud, Ma Vie de Pilote, écrit par Patrice Moinet aux Éditions l’Autodrome et sorti le .

Vidéos

Liens externes

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