Force vive (physique)
La force vive (ou les forces vives ou vis viva en latin) est une notion de physique qui, en histoire des sciences, fut au centre de la première théorie de l'énergie conçue comme force en action au sein la matière. Elle était mesurée par la formule m·v2 (masse du corps multipliée par le carré de sa vitesse). Du XVIIe au XIXe siècles, la force vive désignait l'énergie cinétique (quantitativement au facteur 1/2 près), c'est-à-dire l'énergie liée au mouvement des corps.
Cette théorie de la force en action dans la matière a été développée par Leibniz à partir de 1686. La même année il publiait son algorithme différentiel et intégral, théorie mathématique liée à la force vive, dont les deux notions complémentaires : la force morte et l’action, sont obtenues par, respectivement, différentiation et intégration.
Quoique encore utilisée par Poincaré et même par Max Planck au début du XXe siècle, l'expression force vive a été supplantée par celles d'énergie cinétique et de travail mécanique. D'autre part, comme théorie de la force totale (incluant force vive et force morte), elle se présente comme cause fondamentale des phénomènes physiques, considération causale jugée philosophique sinon exclue en science physique moderne.
Ces théories, que Leibniz regroupait sous le nom de « Dynamique », prolongeaient l'étude par Descartes du mouvement et de sa conservation, et ont ensuite été développées notamment par Jean Bernoulli et son fils Daniel. Mais comme elles rejetaient le principe cartésien de réduction des corps à leur étendue, qu'en outre elle incluait des considérations « métaphysiques », elle s'est heurtée à une opposition des cartésiens, puis des adeptes de la mécanique relationnelle ne considérant que les effets, et a donné lieu à la célèbre Querelle des forces vives.
Origine
L'origine de la notion de force vive est étroitement liée à la conception leibnizienne de la matière, de sa substance et de son organisation interne.
Cette conception (peut-être inspirée par Glisson[1] et des platoniciens de Cambridge) est exprimée par Jean Bernoulli lorsqu'il dit concevoir la matière comme fluide, formée de particules indépendantes qui « ont pu s'amasser en de petites molécules élémentaires » dont sont formés les corps, qu'ils soient liquides, ou mous, ou plus ou moins durs, « selon les différents concours, les différentes figures, et les divers mouvements de ces molécules élémentaires »[2].
Cette conception permettait à Leibniz de résoudre le problème au centre de sa réflexion : qu'est-ce qui fait l'unité d'un être, d'un organisme[3], quel est le principe d'individuation, « ce qui fait qu'un être possède non seulement un type spécifique, mais une existence singulière, concrète, déterminée[4] » ? Il résolvait ce problème en rejetant l'idée de corps inertes, en postulant une force interne au sein des corps[5] – ce qui pouvait déjà paraître manifeste dans l'expérience du pendule de Galilée montrant que, par la vitesse acquise, un poids peut remonter à la hauteur d’où il tombe.
Histoire
De la force vive à l'énergie
S'il ne faut interpréter qu'avec prudence les notions anciennes avec des terminologies modernes[6], du moins l'identité qualitative entre force vive et énergie cinétique est explicitement reconnue par Thomas Young lorsqu'il introduit le mot energy en 1807 :
« Le terme energy peut être appliqué au produit de la masse d'un corps par le carré de sa vélocité… Ce produit a été appelé la force vive… Leibniz, Smeaton et beaucoup d'autres estimaient la force d'un corps en mouvement par le produit de sa masse par le carré de sa vitesse[7]. »
Antérieurement, Descartes, reprenant l'idée que quelque chose se conserve dans les chocs, l'avait identifiée à la quantité de mouvement (masse multipliée par sa vitesse)[8]. Ensuite Huygens (dès 1652[9] quoique publié en 1669[10]), puis Wallis et Wren, avaient remarqué que cette quantité ne se conserve que lorsqu'on abstrait les mouvements relatifs[11] ; la règle générale étant que la vitesse intervient à la puissance deux, soit m·v2.
Telle qu'énoncée par Huygens, la conservation de cette quantité n'était regardée que comme un simple théorème de mécanique[12]. Leibniz donne un nom à cette quantité : force vive[13], et la relie au principe actif qu'il pensait être à l'œuvre au sein de la matière[14], comme étant sa réalité première[15]. Selon sa conception et celle des savants qui l'ont suivi, les corps sont animés par le jeu de forces internes[n 1] qui causent leur mouvement, leur inertie, leur unité même, et cette quantité qui se conserve en donne la mesure ; en outre cette quantité doit rester invariable dans l'univers[16].
Dès 1678, dans le De corporum concursu resté longtemps inédit, Leibniz avait adopté la mesure m·v2 pour remplacer la conservation de la quantité de mouvement cartésienne[17]. Il rend publiques ses conceptions en 1686, sous forme d'un article provocateur contre Descartes[18], l'année où est publié l'exposé de sa théorie de l'intégration (voir ci-dessous). Il les développe ensuite dans plusieurs textes et de nombreuses lettres[19], dont le second Essay de Dynamique(p.217) :
« Il y a déjà longtemps que j'ai corrigé et redressé cette doctrine de la conservation de la Quantité de Mouvement et que j'ai mis à sa place la conservation de quelque autre chose d'absolu ... la conservation de la Force absolue. Il est vrai que communément on ne paraît pas être assez entré dans mes raisons, ni avoir vu la beauté de ce que j'ai observé. Mais comme quelques-uns des plus profonds Mathématiciens se sont rendus à mon sentiment[20], je me promets avec le temps l'approbation générale. »
Cette « approbation générale » ne s'est pas manifestée immédiatement. Mais on remarque au XIXe siècle l'emploi très fréquent de l'expression force vive par les physiciens : de Lazare Carnot en 1803 et Sadi Carnot en 1824[21] à Helmholtz en 1903 et Poincaré ; de Mayer et Joule[22] à Bolztmann et même Max Planck, en passant par Clausius et Maxwell, tous utilisent la notion de force vive[23].
Helmholtz en particulier, qui est considéré comme l'un des fondateurs de la science de l'énergie en ce qu'il démontra mathématiquement en 1847 que la nature renferme une réserve de « force » inaltérable : il appelle ses deux formes : « force vive » et « force de tension » (laquelle est l'énergie potentielle[24], équivalent de la « force morte »). Nourri des ouvrages des Bernoulli, son principe de conservation de la force exprime une équivalence causale, dans la tradition de Leibniz ; il assure la jonction entre les deux voies de la dynamique[25].
Significativement, en France, le mot énergie n’apparaît pas avant 1875 dans la littérature scientifique[26].
Energetics et énergétisme
La formalisation au XVIIIe siècle et le succès du principe de moindre action, dont Leibniz fut un précurseur (voir ci-dessous), est une autre validation de sa théorie des forces vives.
Le XIXe siècle vit davantage. Suite aux travaux de Mayer (1842) et de Joule, qui étendaient la loi de conservation au rapport entre la chaleur et le travail mécanique[27], naît la thermodynamique, science des transformations de l'énergie : deux de ses pionniers, William Thomson (Lord Kelvin) et surtout William Rankine[28], tentent de développer une nouvelle dynamique, fondée non plus sur la notion de force newtonienne, mais sur l'énergie et ses transformations[29]. Rankine invente le mot energetics (1855).
Mais une ambiguïté voire une déviance en résulte. De même qu'à la fin du XVIIe siècle l'étude du galvanisme avait stimulé l'étude du vivant, mais aussi inspiré la littérature fantastique naissante, dans la seconde moitié du XIXe siècle une idéologie s'empare de l'Allemagne, de l'Autriche et, dans une moindre mesure, de la France avec Duhem : l'énergétisme. Elle faisait grand cas des travaux de Rankine et se réclamait de Leibniz[30] ; cependant lui ne privilégiait pas la différentielle par rapport à l'intégrale, alors que les tenants de cette école tendaient à privilégier unilatéralement le contenu énergétique[31] par rapport à l'intégron[32] qu'est le corps.
Cela dans un contexte où électricité et magnétisme avaient été unifiés (1821, Ampère, Faraday), et leur interaction avec la matière mise en équations (1861, Maxwell). Et où, aussi, d'autre part, l'hypnose succédait au mesmérisme, et Faraday lui-même étudiait le cas des tables tournantes[33]...
Substantifier l'énergie est une tentation qui fait quitter le strict domaine de la physique mathématique.
Prolongements modernes
Tous les importants développements de la notion d'énergie au XXe siècle ont prolongé la théorie des forces vives.
- La mise en évidence de la radioactivité (Becquerel, 1896) vérifie son affirmation fondamentale : l'activité interne de la matière, même pour ses formes les plus denses ; les centrales nucléaires l'exploitent depuis 1951.
- L'identification de la discontinuité fondamentale par Plank en 1900 avec le quantum élémentaire d'Action est un prolongement d'autant plus significatif que ce quantum est une unité universelle, un invariant relativiste ; en langage leibnizien, ce quantum agit comme l'ultime « petite différence finie » de ce que Leibniz appelait l'action motrice[34].
- La démonstration de l'équivalence de la masse inerte et de l'énergie (Einstein, 1905) confirme de deux façon le concept leibnizien de force vive : m·c2 a même dimension que la force vive : masse x vitesse au carré ; et l'équation e = m·c2 étend ses lois de conservation entre énergie et masse : c'est-à-dire au plus profond de la matière et pour ses deux aspects les plus apparemment antinomiques ; par exemple, lors d'une réaction chimique, un dégagement de chaleur, qui est une perte d'énergie, s'accompagne d'une petite perte de masse.
- La théorie de la relativité a validé le rejet par Leibniz de l'objectivité de l'espace[35], rejet qui était à l'origine de sa critique de la physique de Descartes, d'où lui vint sa conception de la force vive.
- La démonstration par Louis de Broglie en 1924 que l'électron et tous les corpuscules (pas seulement les quanta de lumière) ont un comportement ondulatoire confirme que la matière a un contenu énergétique. Sur le plan épistémologique, son exigence d'une explication causale[36] des phénomènes le rapproche de la démarche leibnizienne, contre le parti qui de D'Alembert à Heisenberg estime cette exigence non nécessaire[37].
Pour autant, au début du XXIe siècle, aucun de ces développements n'est relié à la théorie des forces vives, ni à Leibniz, sinon et assez rarement comme précurseur. Cela parce que ses textes sur la physique ont peu été publiés[38], ou tardivement, beaucoup dans la seconde moitié du XIXe siècle. De son vivant, ses apports consistaient surtout en « essais », « spécimen », « échantillons » visant à être repris et développés par des tiers, qu'il soutenait ensuite par une correspondance abondante, le plus souvent privée[39]. Enfin il exprimait ses idées plus souvent en termes philosophiques que physiques.
Surtout, un long chemin de clarification conceptuelle et d’expression mathématique restait à parcourir[40] pour passer de la force leibnizienne à la chaleur, puis de la chaleur à l’énergie, de l’impulsion à la puissance, voire de l'énergie à la masse. Ses vues souvent spéculatives paraissaient souvent lointaines ou métaphysiques, même à des auteurs continuant à utiliser l'expression force vive, même quand progressait et finissait par s'imposer l'idée que la matière est en elle-même active.
Importance des forces vives
En physique
Initialement, l'importance du concept de force vive vient de ce qu'il était au cœur des « lois du mouvement », base de toute la mécanique, au centre des recherches de Copernic (1530), Galilée (1604), Kepler (1609), Descartes (1644). Ensuite, comme théorie de « la force » (force vive et force morte), elle est à l'origine du concept d'énergie, tandis que « la loi de conservation de l'énergie domine la physique[41] » ; significativement Montgolfïer et Marc Seguin, les pionniers de la thermodynamique, militeront pour la dynamique leibnizienne[42] au début du XIXe siècle.
Avant cela la force vive considérée dans sa durée, qui est l'action, était déjà devenue une grandeur essentielle en physique, à cause du principe de moindre action. La fréquence de l'emploi de l'expression force vive par les physiciens aux XVIIIe et XIXe siècles[43] mesure le succès de ce concept (davantage sur le continent qu'en Angleterre où l'influence de Leibniz était moindre).
La théorie des forces vives met aussi en évidence la différence entre les points de vue statique et dynamique[42], le second lié à un intérêt pour des questions fondamentales, le premier plus limité : ainsi pour l'étude du mouvement des roues hydrauliques, les célèbres approches opposées de Smeaton et du Franklin Institute[44].
Finalement, comme théorie de la force intérieure aux corps — « l’idée des forces-mères[45] » — son importance vient de ce qu'elle s'est avérée correspondre à la réalité, qu'au XXe siècle la radioactivité et les centrales nucléaires ont rendu plus manifeste.
En philosophie
Au plan philosophique, la force de Leibniz diffère de la potentia des scolastiques. Celle-ci n'était que possibilité d'agir et nécessitait une excitation externe ou un stimulant pour agir. Tandis que sa force a la disposition et la tendance à agir[46] (conatus, nisus), est à mi-chemin entre la faculté d'agir et l'action elle-même : elle a pouvoir de produire un effet et passe d'elle-même à l'acte, sans nécessité d'un auxiliaire, dès qu'elle cesse d'être empêchée[47].
Cette remarque est importante pour l'histoire de la physique, car définir ainsi la force comme ontologiquement indépendante caractérise le dynamisme même, et pour cette raison Leibniz peut être considéré comme le premier initiateur, en science de la nature, de la dynamique moderne[48].
Quelle est cependant la limite ici entre physique et philosophie ? On peut s'en tenir à l'idée que seule est objet de physique mathématique la quantité m·v2 dont on observe les effets. Il faut aussi remarquer que la force vive est, comme l'énergie, différente de la notion de substance. Leibniz le reconnaît[49]. On peut adopter le concept de force de Leibniz sans pour autant admettre sa conception monadique de la substance : ainsi faisait Christian Wolff, son disciple qui fit connaître sa dynamique à l'Allemagne[50].
Autre exemple : Désiré Nolen dit qu'il faut « reconnaître partout, avec Leibniz, sous l'apparente inertie de la matière, les énergies intelligentes qui l'animent et la meuvent[51] ». Cela peut être exact, sauf que le qualificatif « intelligent » appartient au vocabulaire d'Anaxagore[52], non à celui de la physique.
Par contre il peut être difficile de ne pas inclure, dans ce que nous appelons énergie d'un corps, ce qui unit et individualise les petites parties qui le constituent[53].
Dans la culture
Dans la langue courante, le mot force a nettement davantage d'emplois connotant une énergie interne, que d'emplois au sens actuellement courant en physique, qui n'implique qu'une impulsion externe : le CNRTL en témoigne[54].
En littérature, l'expression force vive est employée pour évoquer la force créatrice de la matière, conçue comme animée d'un principe actif inné voire vitaliste – par opposition aux représentations strictement mécanistes.
On en trouve d'innombrables exemples, par exemple chez Diderot[45], Balzac, Michelet :
« Qu'est-ce qu'un animal, une plante ? Une coordination de molécules infiniment actives, un enchaînement de petites forces vives que tout concourt à séparer. »
— Diderot, Éléments de physiologie[55].
« On en viendra quelque jour à démontrer que la sensibilité ou le toucher est un sens commun à tous les êtres. Il y a déjà des phénomènes qui y conduisent. Alors la matière en général aura cinq ou six propriétés essentielles, la force morte ou vive, la longueur, la largeur, la profondeur, l'impénétrabilité et la sensibilité. »
— Diderot, Éléments de physiologie[56].
« Ce midi de la vie, où les forces vives s’équilibrent et se produisent dans tout leur éclat, est non-seulement commun aux êtres organisés, mais encore aux cités, aux nations, aux idées, aux institutions, aux commerces, aux entreprises qui, semblables aux races nobles et aux dynasties, naissent, s’élèvent et tombent. »
— Balzac, Scènes de la vie parisienne - César Birotteau[57].
« Pour lui (Louis Lambert) la Volonté, la Pensée étaient des forces vives ; aussi en parlait-il de manière à vous faire partager ses croyances. »
— Balzac, Louis Lambert[58].
« Je n’eus de maître que Vico. Son principe de la force vive, de l’humanité qui se crée, fit et mon livre et mon enseignement. »
— Michelet, Histoire de France[59].
« La France a fait la France, et l’élément fatal de race m’y semble secondaire. Elle est fille de sa liberté. Dans le progrès humain, la part essentielle est à la force vive, qu’on appelle homme. L’homme est son propre Prométhée. »
— Michelet, Histoire de France[60].
L'expression forces vives est finalement devenue si populaire qu'on en trouve les applications les plus diverses, comme en témoigne la présente encyclopédie, par exemple aux articles suivants : Chat botté, Tephillin, Le Corbusier, Guinée, Parti, France, Religion nordique ancienne, Développement personnel, Burkina Faso, Mouvement progressiste, Bénin, Conseil régional, Agriculture, Astre, Antananarivo, La Main à plume, Bénin Bulgarie, douar, Tafraout, Nymphe, Maroc, Alpha Condé, Zhang Zhizhong, Empire ottoman...
Formulations mathématiques
Comme Descartes, Leibniz admet que quelque chose doit rester invariable dans l'univers. Mais, selon Poincaré, remarquant que le carré de la vitesse d'un point est la somme des carrés des composantes de direction arbitraire, Leibniz en conclut que dans un système où les vitesses ont des directions quelconques, c'est la somme · qu'il faut considérer, la Force vive, et non la somme · qui est la Quantité de mouvement de Descartes[16].
À partir de la force accélératrice de Newton, il faut multiplier cette force par la longueur parcourue dans la direction de la force, pour obtenir le travail mécanique (Work en anglais) :
- ·.
Particularités
Force absolue, force vive, force morte
Chez Leibniz le concept central est celui de force interne aux corps, qu'il appelle « la force » ou « la force absolue » ou « la force totale » ou « la puissance motrice ». Formellement, la force vive n'en est que la partie cinétique, l'autre étant ce qu'il nomme « force morte ». Mais, par extension, l'expression "force vive" a souvent été entendue au sens global de puissance motrice, incluant la force morte en tant qu'elle peut devenir vive[21]. Avec ce sens large, l'expression "force vive" équivaut à ce que Leibniz appelle « la Force » et elle désigne alors ce qui est appelé aujourd'hui l'énergie (énergie cinétique et potentielle) – ou, si l'on répute la physique du XVIIe siècle bornée à la mécanique, le travail mesuré en unités de dimension kg⋅m2⋅s-2 (kilogrammètre, joule, etc.), soit toujours m·v2. – Poincaré : « C'est l'énergie totale, et non telle ou telle de ses parties, qui est une constante[61] ».
Voici comment Leibniz décrit la matérialité de cette Force :
« dans la nature des corps, outre la grandeur, et le changement de la grandeur et de la situation, c'est-à-dire outre les notions de la pure géométrie, il faut mettre une notion supérieure, qui est celle de la force par laquelle les corps peuvent agir et résister[62]. »
« la notion que nous avons de la matière consiste dans une force (... qui) se trouve étendue, c'est-à-dire répandue, répétée, continuée dans le corps[63]. »
« une force naturelle implantée par l'Auteur de la nature – force qui ne consiste pas seulement en la simple faculté dont les Scolastiques semblent s'être contentés, mais en outre est pourvue d'une tendance ou d'une disposition à l'effort (sed praeterea conatu sive nisu instruitur), qui produit son plein effet, sauf si elle est empêchée par une tendance contraire[64]. »
Et cela dépasse le seul domaine de la mécanique des chocs (voir ci-dessous dissipation) :
« l’opinion que je défends ici ne se fonde évidemment pas sur des expériences relatives au choc, mais sur des principes qui rendent raison de ces expériences elles-mêmes, et qui permettent de se prononcer sur des cas pour lesquels on n’a pas encore institué d’expériences ni formulé des règles[65]. »
Quant à la force morte, elle a été identifiée à l'énergie potentielle (expression introduite par Rankine en 1853 seulement : potential energy[26]), c'est-à-dire « la force d'un corps qui n'a que la tendance au mouvement, sans se mouvoir en effet[66] ». Par exemple la force de l'assiette qui, posée sur la table, est empêchée par elle de tomber. Leibniz cite aussi la force centrifuge, la gravité ou force centripète, et la force avec laquelle un ressort commence à se débander[67], toutes comprises dans cette définition :
« ...dans le cas de la Force morte, ou du Mouvement infiniment petit, que j’ai coutume d’appeler Sollicitation, qui a lieu lorsqu'un corps pesant tâche à commencer le mouvement, et n’a pas encore conçu aucune impétuosité ; et cela arrive justement quand les corps sont dans l’Équilibre, et tâchant de descendre s’empêchent mutuellement.[68] »
Détail important, ces forces en équilibre, qui ne produisent pas de mouvement, ne sont pas identifiées à de l'énergie cinétique de vitesse nulle, mais de vitesse infiniment petite[69] : « la force morte est comme le produit de la masse par la vitesse virtuelle[70], c'est-à-dire avec laquelle le corps tend à se mouvoir[66] ». Effort, disposition ou tendance au mouvement (conatus, nisus) : « degré de vitesse infiniment petit, aussitôt absorbé par la résistance de l'obstacle. Ces petits degrés de vitesse périssent en naissant.[71] »
La notion de vitesse infinitésimale ou virtuelle permet de représenter mathématiquement forces mortes et force vive en termes de différentielles et d'intégrale, la seconde comme intégration des premières (voir ci-dessous). Les forces mortes ont la dimension d'une quantité de mouvement m·v, mais quand disparaît la résistance de l'obstacle et que le mouvement s'accroît, elles deviennent force vive : l'intégration des différentielles de vitesse croissante ∫v.dv donne v2, et donc m·v devient m·v2.
« La loi de la statique s’applique ainsi aux différentielles, celle de la dynamique aux intégrales.[72] »
Quantitativement, l'énergie cinétique vaut la moitié de la force vive : ½·m·v2. Mais qualitativement, les deux expressions force vive et énergie cinétique sont synonymes, l'usage ayant remplacé la première par la seconde, à cause de l'évolution du sens du mot force en physique[n 1].
C'est au point que l'un des ingénieurs qui précisent la notion de travail mécanique, Coriolis en 1829 propose d'appeler force vive « la moitié du produit de ce qu'on a désigné jusqu'à présent par ce nom ... légère modification de l'usage ancien [qui] introduira plus de simplicité dans les énoncés[73] ». Cette « légère modification » (que Clausius opère aussi[74]) montre encore le lien étroit entre force vive et moderne notion d'énergie. On remarque que le coefficient ½ apparaît déjà en 1736 dans une étude de Daniel Bernoulli[75].
Le mot énergie est introduit par Young comme synonyme de force vive dès 1802[7]. Cependant il ne commence à prendre une forte signification que lorsque Mayer puis Joule démontrent l'équivalence de deux états différents de la matière, la chaleur et le travail mécanique ; mais Mayer et Joule parlent encore de force et non d'énergie[22].
Au XXIe siècle l'expression force vive demeure en mécanique générale dans le théorème des forces vives (dû à Lagrange, selon lequel la variation de la demi-force vive d'un système est égale à la somme des travaux accomplis par toutes les forces du système pendant le déplacement considéré[76]), et en mécanique spatiale avec l'équation de la force vive (selon laquelle la somme des énergies cinétiques et potentielles est constante en tout point de l'orbite). On peut enfin trouver l'expression employée au sens d'énergie cinétique, par exemple pour éviter la répétition du mot énergie, comme dans la phrase « le premier terme de cette relation est l'énergie due à la force vive du corps...[77] ».
Algorithme différentio-intégral et force vive
Le premier texte de Leibniz concernant la force vive date de 1686 : l'année même de la publication de sa théorie de l'intégration[78] qui complétait son article sur les différentielles paru deux ans plus tôt. Cette concomitance n'est guère un hasard, car son algorithme différentio-intégral épouse sa conception de la matière. Jean Bernoulli l'exprime ainsi :
« Tout ce que vous dites du tube et de son mouvement de rotation, de la boule qui se meut en lui, du nisus [effort, tendance], de la sollicitation, de la force vive et de la force morte, etc., ne peut manquer d'être considéré comme de la plus haute vérité par tous ceux qui ont appris, de part notre géométrie intérieure nouvelle, à comprendre comment un quantum quelconque naît de la composition d'une infinité de différentielles, et toute différentielle d'une infinité d'autres, et à leur tour chacune de celles-ci d'autres encore à l'infini, etc.[79] »
Leibniz a refait l'étude du mouvement en fonction de son nouveau calcul[80]. Il en vient à concevoir les corps comme produits par l'interaction d'éléments plus petits, eux-mêmes constitués de sous-unités, chaque niveau étant un infini (au sens d'« incomparable[n 2] ») par rapport au niveau inférieur[81].
D'autre part, reprenant cette idée de Galilée[82] que le repos peut être considéré comme une « rapidité infiniment petite ou une lenteur infinie[83] », il montre que la force vive est comme une intégration de forces mortes : « La force vive... naissant par le résultat d'une infinité de degrés de forces mortes, est à leur égard comme la superficie est à la ligne[84] ».
Finalement René Dugas commente ainsi l'affirmation de Leibniz que la loi de la statique s'applique aux différentielles, celle de la dynamique aux intégrales[72] :
« Cette loi des forces vives, véritable pont jeté entre l'énergie cinétique d'une masse en mouvement et la force statique qui lui est appliquée, que nous écrivons aujourd'hui :
constitue le grand titre de gloire de Leibniz en dynamique[67]. »
Force vive et action
« Agir caractérise les substances[85] » : cette formule pourrait servir de devise à toute sa dynamique tant la notion d'action est importante chez Leibniz. Mais son concept d'action est physique, et défini mathématiquement comme « le produit de la masse par l'espace et la vitesse, ou du temps par la force vive[86]. »[n 3] C'est-à-dire une énergie multipliée par sa durée, identique à une quantité de mouvement multipliée par la distance parcourue (1 kg⋅m2⋅s-2⋅s = 1 kg⋅m⋅s⋅m) :
« Quelques changements qui puissent arriver entre des corps concourants, de quelque nombre qu’ils soient, il faut qu'il y ait toujours dans les corps concourants entre eux seuls, la même quantité de l’Action motrice dans un même intervalle de temps[91]. »
Il appelle cette grandeur « l'action » ou « l'action motrice ». Il la conçoit comme l'exercice de la force, le résultat du déploiement de la force pendant la durée considérée[92] ; la force n'est que « puissance motrice » dont l'action est le fruit.
Sa dimension est la même que ce qui est appelé action par Max Planck. Leibniz lui conférait un rôle tout aussi universel et fondamental puisqu'il concevait qu'au fond des corps il n'y a que « principes d'action[93] ». Il disait l'action être « l’exercice naturel de la force[89]», « la nature abstraite de la force ne consistant qu'en cela[94] ».
Mis en termes prosaïques : pour manifester un effet un « travail » doit durer au moins un moment ; ou une quantité de mouvement doit avoir une « longueur de translation[95] ».
Moindre action et finalisme
À l'action, grandeur physique mesurée par m·v2·t, Leibniz attachait un principe finaliste[n 4], nommé plus tard par Maupertuis « principe que j'appelle De la moindre quantité d'action[96] », formalisé ensuite par Euler, Lagrange, Helmholtz ; lesquels tendaient à gommer l'aspect finaliste mais confirmaient ce que Leibniz, et non Maupertuis, avait vu, que c'est un principe extrémal[97],[98]. En fait il ne s'agit que d'une tendance à l'économie au sens de parcimonie[99], de « la grande loi qui régit toutes les combinaisons de la matière, le principe de la plus petite dépense d'énergie pour la plus grande somme de travail mécanique[100] ».
Cet aspect finaliste ou « architectonique » ou heuristique[101] consiste en ceci : le monde, sous son foisonnement apparent, est le produit d’un calcul régi selon le principe du meilleur ou d’optimalité du choix[102] ; lequel principe complète ou se superpose[103] à la rigueur des lois mécaniques brutes, notamment pour dépasser les cas d'impossibilité :
« Ce principe de la nature d’agir par les voies les plus déterminées que nous venons d’employer, n’est qu’architectonique en effet, cependant elle ne manque jamais de l’observer. Supposons le cas que la nature fut obligée généralement de construire un triangle, et que pour cet effet la seule périphérie ou somme des côtés fut donnée et rien de plus, elle construirait un triangle équilatéral ... Si la nature était brute, pour ainsi dire, c’est-à-dire purement matérielle ou géométrique, le cas susdit serait impossible, et à moins que d’avoir quelque chose de plus déterminant que la seule périphérie, elle ne produirait point de triangle ; mais puisque elle est gouvernée architectoniquement, des demi-déterminations géométriques lui suffisent pour achever son ouvrage, autrement elle aurait été arrêtée le plus souvent.[104] »
Tout se fait mécaniquement dans la nature mais, pour réussir, le mécanisme requiert aussi des procédures architectoniques[105] : moindre quantité d'action en mécanique, moindre temps en optique, et généralement l'optimal, le plus simple ou le mieux déterminé, et le principe de continuité[106].
Lois de conservation
Galilée avait affirmé la tendance du mouvement acquis à se conserver en l’absence de forces contraires[107]. Développant cette idée, Descartes en fait une « loi de la nature » et un fondement de sa philosophie naturelle[108], qu'il mesure par la quantité de mouvement (m·v)[109]. Et il en fait une dimension universelle, attendu « que Dieu est la première cause du mouvement, et qu'il en conserve toujours une égale quantité en l'univers[110] ».
C'était un grand progrès d'être parvenu à concevoir et à quantifier une loi de conservation. Huygens modifie son objet (m·v2 au lieu de m·v) mais retient le principe : « La somme des produits faits de la grandeur (masse) de chaque corps dur multipliée par le carré de la vitesse est toujours la même devant et après leur rencontre[111] ».
Ce théorème introduit par Huygens sera ensuite appelé principe de la conservation des forces vives par Jean Bernoulli qui – après avoir été convaincu par Leibniz, auquel ces résultats sont aussi attribués[112] – en fait une conséquence de la théorie des forces vives et une loi générale de la nature[113].
Outre la loi de conservation qu'il oppose à Descartes, Leibniz ajoute « quelques autres conservations absolues nouvelles qui en dépendent[114] », il multiplie les lois de conservation. Son deuxième Essay de Dynamique en énonce quatre : conservation de « la même vitesse respective » entre les corps qui se choquent ; conservation « de la Quantité de progrès[115] » ; « conservation de la Force absolue[116] » ; et surtout « conservation de l'action motrice », c'est-à-dire de la quantité m·v2·t.
À Helmholtz est dû en 1847 une démonstration mathématique plus rigoureuse du « principe de la conservation de la force vive[117] », appelé aujourd'hui « théorème des forces vives » ou « théorème de l'énergie cinétique »[118], dont l'« équation de la force vive » est une application en mécanique spatiale.
Cependant une partie de la force étant absorbée durant les chocs, un doute demeurait quant à la conservation. L'explication proposée par Leibniz dans une lettre à Clarke[119] ne suffisant pas, il fallut attendre la mise en évidence par Mayer et Joule de l'équivalence entre force vive mécanique et chaleur pour que le principe de conservation soit définitivement admis ; et attribué alors à Mayer, affirmé n'avoir été qu'en germe chez Leibniz, lequel est préférablement omis : « Les études historiques récentes sur la conservation de l'énergie tiennent d'ordinaire l'évocation de Leibniz pour un folklore historiographique que les universitaires sérieux préféreront oublier[120] ».
Pourtant, Alexandre Koyré : « Ce que Leibniz vise réellement à démontrer, c’est l’autarcie de l’univers, dont le mécanisme se suffit à lui-même, et il est hors de doute qu’avec la loi de conservation de la vis viva, il y parvient bien mieux que Descartes avec la loi de conservation du mouvement. Le monde newtonien – une horloge dont le mouvement s’épuise – demande que sa dotation énergétique soit constamment renouvelée par Dieu[121] ».
Conservation de la Quantité de mouvement
La quantité de mouvement se conserve aussi dans les cas suivants : quand on fait abstraction de la direction du mouvement, en statique ou à l'équilibre, et quand on analyse le mouvement par ses éléments, c'est-à-dire par ses différentielles, ce qui rapporte le mouvement à l'équilibre : c'est le principe de D'Alembert que la mécanique analytique de Lagrange a systématisé[122].
Leibniz le fait comprendre dans son deuxième Essay de Dynamique : Soit deux masses, l'une de 2 kg et de vitesse 3, l'autre de 3 kg et de vitesse 2 : leurs quantités de mouvement sont égales, mais leurs forces vives sont comme 18 et 12. Or, quand ils se choquent, ils s'arrêtent l'un l'autre, quoique la Force du premier soit nettement plus grande :
« [...] la raison est que les corps ne s’empêchent que selon les lois de la force morte ou de (la) statique. Car étant élastiques comme on le suppose, ils n'agissent entre eux qu'en forces mortes ou selon l’équilibre dans le concours (choc), c’est-à-dire par des changements inassignables, parce qu’en se pressant, se résistant et s'affaiblissant continuellement de plus en plus jusqu'au repos, ils ne s’entre-détruisent l’un l’autre à chaque moment que du mouvement infiniment petit, ou de la force morte, égale de part et d’autre ; or la quantité de la force morte s’estime selon les lois de l’équilibre par la quantité de mouvement, infiniment petite à la vérité, mais dont la répétition continuelle épuise enfin toute la quantité du mouvement des deux corps[123]. »
Cette annulation lors de leur choc de quantités de mouvement égales et opposées quoique leurs forces vives sont différentes, est remarquable et a beaucoup contribué à la concurrence entre les deux notions. Ensuite les progrès dans l'usage de l'analyse infinitésimale ont permis de s'en tenir aux concepts newtoniens basés sur la quantité de mouvement (en anglais momentum), jusqu'à ce que l'émergence de la thermodynamique prouve définitivement que la conservation fondamentale, entre divers états de la matière, est celle de l'énergie (voir aussi ci-dessous, Florian Cajori, théorème de Noeher).
Élasticité, dissipation de la force
Tant pour Descartes que pour Leibniz, le principe de conservation ne peut se concevoir que si les corps qui se choquent ont une élasticité[124]. Mais Leibniz pousse cette conception jusqu'à soutenir une théorie de l'universelle élasticité des corps[125], issue de sa représentation de la matière comme divisée et subdivisée et qu'au fond il n'y a que « principes d'action[93] ».
Cependant, tant pour les corps durs qu'élastiques, le choc s'accompagne d’une perte de la force, « totalement comme lorsque deux morceaux de terre grasse ou d'argile se choquent, ou partiellement comme lorsque deux boules de bois se rencontrent[126] ». Le principe de conservation s'en trouve remis en cause. Du moins en apparence, car la force absorbée l'est par les « petites parties » qui sont « agitées intérieurement par la force du concours ou du choc[119] ».
C'était supposer, comme le dit Couturat, que « la force vive qui disparaît se retrouve sous forme de mouvements moléculaires, en quoi il anticipait la théorie mécanique de la chaleur[119] ». Et Poincaré dit qu'il avait « l'intuition de nos idées actuelles[16] ».
« Ne soupçonnant pas la théorie mécanique de la chaleur, Leibniz ne pouvait se rendre un compte exact du sens et de la portée de la loi qu'il avait découverte. Toutefois il énonçait cette loi [de la conservation de l'énergie] aussi clairement et aussi complètement qu'on pouvait le faire de son temps[61]. »
On remarque que John Locke avait des idées semblables, puisqu'il estimait la chaleur être « une très vive agitation des parties imperceptibles des corps[127] » et que Huygens les partageait, y compris pour tenter d'expliquer pourquoi les gouttes sont rondes[128].
Mouvement perpétuel
Une des raisons données par Leibniz pour justifier la substitution des Forces vives à la Quantité de mouvement est sa démonstration que cette dernière implique le mouvement perpétuel[129], lequel était exclu depuis Stevin et Galilée :
« L'impossibilité du mouvement perpétuel devient dans la suite, pour Leibniz, un argument favori dans sa lutte avec les Cartésiens. Il est l'axiome fondamental sur lequel se fonde la seconde démonstration de la conservation de la force vive, dans la Dynamica de potentia.[130] »
C'était l'une de ses « considérations métaphysiques » justifiant son rejet de la conservation cartésienne : Poincaré la confirme par l'argument inverse, disant que pour les phénomènes réversibles, l'impossibilité du mouvement perpétuel entraîne la conservation de l'énergie[131]. Helmholtz aussi, puisque sa démonstration mathématique de la conservation de la force vive venait de cette impossibilité du mouvement perpétuel qui lui avait fait antérieurement rejeter la notion de force vitale de Stahl[132].
« Dynamique »
Le mot « Dynamique » est un néologisme de Leibniz[133] pour désigner la science des forces vives et mortes, ou science de la puissance et de l'action (la puissance étant la force, l'action le résultat). Ce n'est pas la même science que cette qu'on désigne aujourd'hui sous le même nom.
Leibniz introduit cette expression en 1690 dans son volumineux manuscrit de la Dynamica de potentia[134], puis en français dans une lettre à Pellisson de juin 1691[135]. Il en donne ensuite divers aperçus, notamment dans ses deux Essay de Dynamique (1692-1699), et le Specimen dynamicum (1695) où il précise la relation fondamentale entre forces mortes et force vive[136]. Cependant, en dépit des efforts de Pellisson[15], l'Académie de Paris reste réticente.
Les textes de Leibniz sur la Dynamique n'ont été pour la plupart imprimés qu'à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, et lui-même déclare s'être abstenu : « Je voulais traiter de ces choses entre autres dans la seconde partie de ma Dynamique, que j’ai supprimée, le mauvais accueil, que le préjugé a fait à la première, m’ayant dégoutté.[86] » Cette seconde partie devait traiter de l'action qui « devient ordinairement un Maximum ou un Minimum », avec un échantillon des « propositions de grande conséquence » qu'on en peut tirer[86] ; on en trouve trace dans ses manuscrits[137] et dans sa correspondance[138].
La transmission de cet enseignement sera assurée par Christian Wolff, qui influencera durablement l'Allemagne[139], et par Jean et Daniel Bernoulli, qui depuis la Suisse tenteront sans beaucoup de succès de convaincre l'Académie de Paris. Pourtant encore en 1771 le Dictionnaire de Trévoux cite Leibniz en définissant le mot Dynamique comme la « Science des forces ou puissances »[140], et l'objet de cette science, loin de disparaître, réapparaîtra sous d'autres formes au fur et à mesure que l'évidence de la force intérieur ou énergie s'imposera, particulièrement avec le développement des machines à vapeur.
Deux dynamiques ?
Aujourd'hui dynamique réfère, non à la théorie de Leibniz, mais à une subdivision de la mécanique classique, basée sur la seconde loi du mouvement de Newton (lequel ne parle ni de dynamique, ni de la grandeur m·v2, ni de sa conservation[141]) ; elle conçoit le mouvement comme une « mécanique relationnelle » de forces extérieures, proportionnées à l'accélération et identifiées géométriquement à des vecteurs. Tandis que la dynamique initiale, celle de Leibniz, pense le mouvement comme conséquence d'une cause, la dynamique actuelle, d'origine newtonienne, renonce à tout essai d'explication causale, et cette « renonciation renforce la tendance à la géométrisation, donc à la spatialisation[142] ».
En Angleterre le mot dynamics, au sens de théorie physique, apparaît en 1752 dans la traduction de la Préface de l'Encyclopédie en sa partie rédigée par d'Alembert. Puis peu après dans un dictionnaire qui en donne une définition ambiguë et cite d'Alembert ; puis dans un traité de mécanique qui dit le mot « source d'une multitude de théories, trop fastidieuses à énumérer »[143].
La publication par d'Alembert de son Traité de dynamique en 1743 est l'occasion du passage en Angleterre du néologisme de Leibniz, 27 ans après sa mort. Sauf que d'Alembert lui donne un sens différent. D'accord avec le fameux Hypotheses non fingo de Newton, il va jusqu'à récuser la notion même de force, jugée trop spécieuse, et sa dynamique devient une science du mouvement des corps qui subissent des impulsions externes[144]. C'était la conception newtonienne, et elle a prédominé.
Cependant d'Alembert valide le « principe de la conservation des forces vives[145] », adopte une attitude de conciliation, cherche une voie moyenne[146]. Il refuse de traiter de l’essence des choses et de développer une physique causale[147], est newtonien dans sa conception du temps[148], mais emploie les forces vives. Même approche en Allemagne, plus leibnizienne encore à cause de la grande influence de Wolff[139].
En dépit de l'opposition apparente entre ces deux dynamiques, une articulation des deux pensées, leibnizienne et newtonienne, se construit au XVIIIe siècle, une sorte de leibnizo-newtonianisme[149] au sein de la dynamique. L'emploi du concept de force vive par des physiciens plutôt newtoniens en est un signe. La Théorie de la philosophie naturelle de Roger Boscovich en est un exemple[150]. Les physiciens y sont conduit par l'importance du concept d'action au centre du principe de moindre action, et l'importance de la grandeur m·v2 rendue de plus en plus manifeste par les machines à vapeur.
Quoique la science newtonienne soit réputée plus expérimentale, et celle de Leibniz plus spéculative, ce furent essentiellement des praticiens comme ingénieurs, chimistes ou médecins qui objectèrent que la seule conservation de la quantité de mouvement ne menait pas aux résultats attendus, et qui firent usage du principe formulé par Leibniz. Tant en France (Montgolfier, L. Carnot, Seguin, Hirn[151]) qu'en Angleterre (Smeaton, Rumford, Ewart, Wollaston[152]). Leibniz lui-même avait été ingénieur aux mines du Hartz de 1680 à 1686.
Les ingénieurs qui introduisent les notion et unité de travail mécanique, le font d'ailleurs comme Huygens et Leibniz faisaient : ils identifient le travail à la force élevant un poids sur une certaine hauteur[153] ; d'où l'unité kilogrammètre, très courante en France jusqu'à l'adoption en 1961 du Système international d'unités[n 5].
Finalement Mayer démontre en 1842 l'équivalence entre deux formes physiques aussi différentes que le travail mécanique et la chaleur[154] et la conservation des forces vives, bientôt appelée conservation de l'énergie, devient une loi universellement admise. La Thermodynamique qui émerge alors met en son centre le concept dynamique initial[29] parce qu'elle traite des transformations de la quantité m·v2. Mieux, Poincaré dit ne pas douter qu'on parviendra à « élever sur la Thermodynamique seule l’édifice tout entier de la physique mathématique[155] », ce que L. de Broglie croit avoir avancé dans ses derniers travaux[156].
Ainsi la conception leibnizienne s'est bien acquise « avec le temps l'approbation générale », sauf que, conformément à ce que d'Alembert voulait, la science moderne tend en physique à éliminer la notion même de force de son schéma conceptuel[157] et que, sur le plan épistémologique, le pragmatisme anglo-saxon s'est imposé pour la raison que Poincaré résumait ainsi :
« Les Anglais enseignent la mécanique comme une science expérimentale ; sur le continent, on l'expose toujours plus ou moins comme une science déductive et à priori. Ce sont les Anglais qui ont raison, cela va sans dire[158]. »
Querelle des forces vives
La querelle des forces vives, ou controverse sur la mesure de la force des corps en mouvement, est l'une des plus célèbres et durables querelles scientifiques. Commencée dès 1686[18],[159], elle se poursuit vivement jusque vers 1750, quand d'Alembert parvient à l'apaiser quelque peu par des vues conciliatrices[160].
Alors que la critique et la correction de la formule m·v de Descartes par Huygens, Wrenn et Wallis n'avaient pas fait débat, l'interprétation de leur formule m·v2 par Leibniz déclencha de vives réactions. Ses arguments et sa démonstration reprenaient ceux de Huygens[161], mais la vivacité de sa critique de Descartes – ne serait-ce que par son titre provocateur : « démonstration de l'erreur mémorable de Descartes... » – déclencha l'opposition de savants qui, encore sous la forte influence de Descartes, étaient peu disposés à accueillir des idées divergentes[162].
D'autant plus que la théorie de Leibniz récusait leur principe central de stricte réduction des corps à l'étendue[163]. Elle ébranlait cet apport de Descartes (majeur et vraiment révolutionnaire selon Alexandre Koyré) qui consistait à substituer au cosmos concret l'espace mathématique infini, et aux corps matériels des points géométriques, des « idées claires (qui) sont avant tout les idées mathématiques »[164]. Or Leibniz introduisait une force interne aux corps, qu'il disait plus essentielle que l'étendue[165].
Une question de fond était donc : l'essence des corps consiste-t-elle en leur extension spatiale (Descartes) ou dans leur force interne (Leibniz) ?[166]
En outre cette force, dont on ne savait rien, était justifiée par des considérations « métaphysiques[167] », dans un temps où les savants se défiaient des procédés scolastiques[168]. À la recherche des causes cachées, ils substituaient la mesure des effets[169], ils envisageaient « plutôt la Mécanique comme la Science des effets, que comme celle des causes[170] ». Pour les cartésiens, les forces vives réintroduisaient de ces « idées obscures et confuses, qui font naître le doute », comme Descartes les désignait, et que sa Méthode prétendait chasser. Une partie de l'Église, qui plaçait les causes en Dieu selon l'influente doctrine de l'occasionnalisme soutenue par Malebranche, générait aussi du scepticisme quant à la possibilité de développer une mécanique autrement que comme une science des effets[171].
Enfin la quantité de mouvement m·v se conserve effectivement dans certains cas : notamment à l'équilibre[172], et particulièrement en mécanique relationnelle où, de plus, les questions de fond chères à Leibniz n'ont pas à être posées[173]. C'est ainsi que d'Alembert put commencer à apaiser la querelle. Posant d'abord que « si on veut ne raisonner que d'après des idées claires, on doit n'entendre par le mot de force que l'effet produit[174] », il propose d'utiliser l'un ou l'autre mode de calcul[160], la quantité de mouvement pour les cas d'équilibre, les forces vives pour « le Mouvement retardé » etc. Cajori adoptera plus tard la même démarche, selon que l'on considère la durée ou l'étendue parcourue[175] ; de même le théorème de Noether ; (voir aussi ci-dessus).
Cause ou effet
Au XXe siècle la différence entre m·v et m·v2 a cessé d'être débattue. L'une et l'autre quantité sont utilisées comme d'Alembert le proposait, et pour les différents aspects de la matière (mécanique, thermique, chimique, nucléaire) la seule conservation de m·v2 n'est plus contestée.
Par contre la possibilité d'évoquer une cause fondamentale reste discutée. Ceux qui s'en tiennent au domaine expérimental entendent ne considérer que l'effet produit : à d'Alembert[176] et aux newtoniens correspond ainsi l'école de Heisenberg qui rejette la possibilité même de rechercher, sous ses abstraites matrices quantiques et ondes ou amplitudes de probabilité, une ou des causes permettant d'expliquer les aléas qu'elles mathématisent efficacement[37].
L'Allemagne vers 1840 n'avait pas cette réticence, à en croire Helmholtz selon qui la partie théorique, non expérimentale, des sciences « cherche à trouver les causes inconnues des processus à partir de leurs effets sensibles ; elle cherche à les saisir selon la loi de la causalité.[177] »
Pour autant, d'accord avec Euler qui disait « qu'il est toujours extrêmement difficile de raisonner sur les premiers principes de nos connaissances[178] », Leibniz lui-même reconnaissait l'aspect métaphysique[167] de cette démarche : « Car la force est du nombre des choses inaccessibles à l'imagination et accessible à l'intelligence[179] ». Poincaré l'exprime autrement : dans « chaque cas particulier on voit bien ce que c'est que l'énergie et on en peut donner une définition au moins provisoire ; mais il est impossible d'en trouver une définition générale. Si l'on veut énoncer le principe (de conservation) dans toute sa généralité et en l'appliquant à l'univers, on le voit pour ainsi dire s'évanouir et il ne reste plus que ceci : Il y a quelque chose qui demeure constant[180] ».
Jugement équivalant chez Mayer, sauf que lui se satisfait de l'identité entre l'effet et sa cause : « le mot force connote principalement l'idée de quelque chose inconnue, impénétrable et hypothétique ... Les Forces sont des causes : en conséquence, à leur égard, on peut recourir pleinement au principe causa aequat effectum. Si la cause c a l'effet e, alors c = e »[181]. Carnot disait aussi « ne pas distinguer la cause de l'effet (pour) éviter la notion métaphysique des forces[182] ».
On peut aussi, pour mieux distinguer les deux notions, appeler "force" la cause fondamentale, et "énergie" la quantité m·v2 observée dans ses effets. C'est ce que fait Robert d'Haëne[154], qui reprend le même mot que Leibniz et dans le même sens, prouvant que le mot force, encore dans la seconde moitié du XXe siècle, n'a pas que le sens vectoriel introduit par Newton.
Einstein ne s'embarrasse pas de ces subtilités, il assimile tout corpuscule à une immense concentration d'énergie : « La théorie de la relativité nous a appris que la matière représente d'immenses réservoirs d'énergie et que l'énergie représente de la matière ... L'énergie a une masse et la masse représente de l'énergie ... nous devons regarder le champ magnétique comme un réservoir d'énergie ... les quanta de lumière, que nous appelons photons, sont de petites portions d'énergie »[183].
De même et plus catégoriquement, Louis de Broglie : « Par corpuscule, on entend une manifestation d'énergie[184] ». Mais quand il propose des constructions mathématiques figurant le corpuscule comme singularité d'une onde matérielle afin de dissoudre l'antinomie onde-corpuscule et assigner une cause aux aléas quantiques[185], il n'est guère suivi.
Le plus souvent les physiciens préfèrent laisser aux philosophes la question des causes. En dépit du naturel besoin de rationalité (« en effet nous ne pensons avoir saisi une chose que lorsque nous en avons pénétré les causes[186] »), la notion même de force tend à être éliminée complètement de la physique, remplacée par « le concept de fonctionnelle dépendance[187] » ou conçue, selon Hertz, « comme un moyen terme entre deux mouvements[188] », en une sorte d'achèvement du principe même de la mécanique relationnelle. Est privilégiée « l'ignorance des causes, dont se satisfait le pragmatisme de la conduite technicienne[189] ».
Savants ayant publié sur la Force vive
Bibliographie
Leibniz
- Premier Essay de dynamique, manuscrit de 1692[228] communiqué à l'Académie de Paris mais publié en 1859 seulement (en ligne : édition de Foucher Careil, édition de Costabel, p. 108).
- Système nouveau de la nature et de la communication des substances, aussi bien que de l’union qu’il y a entre l’âme et le corps, Paris, Journal des Savants, (lire sur Wikisource).
- Essai anagogique dans la recherche des causes, 1697[229] (sur Wikisource).* Deuxième Essay de Dynamique, 1698 ou 1699, publié en 1860 par Gerhardt, Math 6, p. 215 (lire en ligne sur Wikisource ou sur Archive.org).
- De ipsa natura (1698) : De la nature en elle-même, ou de la force inhérente aux choses créées et de leurs actions, dans P. Schrecker, Opuscules philosophiques choisis traduits du latin, pp. 193-237, Paris, Vrin, (présentation en ligne). – Texte original en latin : Gerhardt, Phi 4, p. 504..
- Principes physiques fondamentaux[230] : Traduit du latin par Joseph Moreau (1971), (lire en ligne).
- Lettre sur la Continuité et la Dynamique : à Varignon[231], (sur Wikisource).
Compilations
- La naissance du calcul différentiel : 26 articles des "Acta Eruditorum", Paris, Vrin, (présentation en ligne).
Présentation et traduction du latin en français par Marc Parmentier, préface de Michel Serres. - Œuvres complètes de Leibniz : publiées par C.I Gerhardt, 1850-1890. Mathematische et Philosophische Schriften sur Archive :
Math 1, Math 2, Math 3, Math 4, Math 5, Math 6, Math 7,
Phi 1, Phi 2, Phi 3, Phi 4, Phi 5, Phi 6, Phi 7 ;
correspondance avec l'éd. Akademie-Ausgabe : Math, Philo.
Autres
- D'Alembert, Traité de dynamique dans lequel les lois de l'équilibre et du Mouvement des Corps sont réduites au plus petit nombre possible, etc., (lire en ligne).
- D'Alembert, Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, Paris (sur Wikisource : art. Dynamique, 1751, art. Force vive, 1757).
- Roger Balian, La longue élaboration du concept d’énergie, Paris, Académie des sciences, (lire en ligne).
- Yvon Belaval, Leibniz : Initiation à sa philosophie, Paris, Vrin, (présentation en ligne).
- Jean Bernoulli, Discours sur les lois de la communication du mouvement, vol. 3, Lausanne, Opera Omnia, 1742 (1724) (lire en ligne).
- Louis de Broglie, Recherches d'un demi-siècle, Paris, Albin Michel, (présentation en ligne).
- Lazare Carnot, Rapport sur le Traité des machines : Avant-propos au Traité de Jean Nicolas Pierre Hachette, Paris, (lire en ligne).
- Pierre Costabel, Leibniz et la dynamique - les textes de 1692, Paris, Hermann, (lire en ligne) ; contient le texte du premier Essay de Dynamique.
- Louis Couturat, La logique de Leibniz d'après des documents inédits, Paris, Alcan, (lire en ligne).
- (en) Olivier Darrigol, « God, waterwheels, and molecules: Saint-Venant's anticipation of energy conservation », Historical Studies in the Physical and Biological Sciences, vol. 31, no 2, (lire en ligne).
- René Dugas, La Mécanique au XVIIe siècle : Des antécédents scolastiques à la pensée classique, Neuchatel, Editions du Griffon, . Préface de Louis de Broglie.
Voir surtout le ch. 14 : La pensée mécanique de Leibniz. - Martial Gueroult, Leibniz - Dynamique et métaphysique suivi d'une Note sur le principe de la moindre Action chez Maupertuis, Paris, Aubier-Montaigne, (réédition de Dynamique et métaphysique leibniziennes, Bulletin de la Faculté des Lettres de Strasbourg, 1935).
- (en) Max Jammer, Concepts of Force : A Study in the Foundations of Dynamics, Harper Torchbook, (présentation en ligne)
- Joseph-Louis Lagrange, Mécanique analytique, Paris, (lire en ligne).
- (en) Leroy Loemker, Philosophical Papers and Letters, vol. 2, Dordrecht, Springer, (présentation en ligne).
- Jacqueline Lubet, « Le principe de la conservation de la force d'Helmoltz et les avatars de l'équation de la conservation de la force vive », Colloques des IREM, (présentation en ligne, lire en ligne, consulté le ).
- Henri Poincaré, Thermodynamique : Henri Poincaré, Paris, Gauthier-Villars, (lire en ligne).
- Henri Poincaré, La Science et l'Hypothèse, Paris, Flammarion, (lire en ligne).
- Bernard Pourprix et Jacqueline Lubet, L'aube de la physique de l'énergie : Helmholtz, rénovateur de la dynamique, Vuibert, (présentation en ligne)
- Anne-Lise Rey, « Diffusion et réception de la Dynamique. La Correspondance entre Leibniz et Wolf », Revue de synthèse, vol. 128 (3-4), 2007-09, pp.279-294 (lire en ligne).
- Christian Wolff, « La vie de monsieur Gottfried Wilhelm von Leibniz », Philosophique, (lire en ligne, consulté le ), traduit de l'allemand par Jean-Marc Rohrbasser.
Notes et références
Notes
- Le mot "force" désigne chez Leibniz une ou des forces internes aux corps, par opposition au sens devenu commun depuis Newton, qui identifie "force" à une impulsion externe modifiant le mouvement d'un objet (dimension : masse x accélération, kg⋅m⋅s-2, énergie x distance). Même glissement pour le sens du mot "dynamique" (voir plus bas). Finalement, le sens newtonien du mot "force" s'étant imposé, Young en trouva un autre pour le premier sens : le mot énergie (« force en action », du grec ancien ἐνέργεια / energeia).
- De même les différentielles de Leibniz ne sont pas des évanouissantes mais des « petites différences finies », de même son infini n'est pas métaphysique. Lettre à Varignon du 2 février 1702 : « ... il suffisait d'expliquer ici l'infini par l'incomparable ... puisque ce qui est incomparablement plus petit entre inutilement en ligne de compte à l'égard de celui qui est incomparablement plus grand que lui. C'est ainsi qu'une parcelle de la matière magnétique qui passe à travers du verre n'est pas comparable avec un grain de sable, ni ce grain avec le globe de la terre, ni ce globe avec le firmament. » — Voir aussi l'humour de sa lettre au même, du 20 juin 1702 : « Entre nous je crois que Fontenelle, qui a l'esprit galant et beau, en a voulu railler, quand il a dit qu'il voulait faire des éléments métaphysiques de notre calcul... » (Gerhardt, Math 4, p. 91). — Voir encore son Mémoire sur le calcul différentiel (journal de Trévoux, 1701 ; Gerhardt, Math 5, p. 350) : « on n'a pas besoin de prendre l'infini ici à la rigueur, mais seulement comme lorsqu’on dit dans l’optique, que les rayons du soleil viennent d'un point infiniment éloigné, et ainsi sont estimés parallèles. »
- La définition de la quantité d'action (qui n'a rien à voir avec le principe d'action-réaction) est parfois attribuée à Wolff ou à Maupertuis, du fait de la publication tardive des textes de Leibniz, mais Wolff et Maupertuis reconnaissaient la tenir de Leibniz[87]. La première définition de l'Action est, en 1690, répétée trois fois dans la Dynamica de Potentia, en latin [88]. En français, à Denis Papin : « la quantité de cette action ou de l’exercice naturel de la force, n’est autre chose que le produit de la force multipliée par le temps durant lequel elle a été exercée[89] » (1698) ; à Varignon : « Mais l'Action n'est point ce que vous pensez : la considération du temps y entre ; elle est comme le produit de la masse par l'espace et la vitesse, ou du temps par la force vive. J'ai remarqué que, dans les modifications de mouvements, elle devient ordinairement un Maximum ou un Minimum[90] » (1707).
- Ce finalisme se réduit à un principe d'économie ou parcimonie, que Fermat formulait ainsi : il n'y a « rien de si probable ni de si apparent que cette supposition, que la nature agit toujours par les moyens les plus aisés... afin d'accourcir son travail et de venir plus tôt à bout de son opération » (lettre à M. de la Chambre, 1 janvier 1662, en ligne). Ce principe d'économie est fréquent au XVIIe siècle. Malebranche en fait un attribut de Dieu, Leibniz le place dans l'emploi d'une quantité physique : l'action. — À noter également la thèse de Couturat, « que la métaphysique de Leibniz repose tout entière sur sa logique ». Et qu'en dépit de son usage des causes finales pour leur utilité, Leibniz reconnait que « tout se peut expliquer mécaniquement par les causes efficientes, lorsque nous en pénétrons assez l'intérieur » (Essai anagogique).
- Le Système international d'unités n'a donné à l'unité de Force le nom de Newton qu'en 1946, et pour désigner une unité purement métrique : 1 kg⋅m⋅s-2 (Décisions de la Conférence générale des poids et mesures et du Comité international des poids et mesures, p. 49). D'autre part, Newton n'avait pas une définition de la force mais traitait « des forces de la nature », dont la force gravitationnelle est la plus célèbre (préface à la première édition de ses Principes mathématiques : « I offer this work ... to investigate the forces of nature, and then from these forces to demonstrate the other phenomena » ; cité par The concepts of Force, p. 119).
Références
- Francis Glisson, Tractatus de natura substantiae energetica (Traité de la nature énergétique de la matière), Londres, 1672 (lire en ligne).
- Bernoulli, Discours, p. 7.
- Organisme : mot inventé par Leibniz. Voir lettre à Mme Masham, mai 1704 (Gerhardt, Phi 3, p. 340) : « l'Organisme, c'est-à-dire l'ordre et l'artifice, est quelque chose d'essentiel à la matière… Cela me fait juger aussi qu'il n'y a point d'Esprits séparés entièrement de la matière ».
- Leibniz, Disputatio metaphysica de principio individui, 1663 (sa thèse universitaire, à 17 ans).
- Éclaircissement du nouveau système de la communication des substances, 1696 : « Je ne connais point ces masses vaines, inutiles et dans l’inaction, dont on parle. Il y a de l’action partout, et je l’établis plus que la Philosophie reçue, parce que je crois qu’il n’y a point de corps sans mouvement, ni de substance sans effort » (sur Wikisource, p. 651).
- Concepts of Force, p. 166.
- (en) Thomas Young, A Course of Lectures on Natural Philosophy and the Mechanical Arts, 1807. Lecture VIII, p. 78 (lire en ligne).
- À noter que Leibniz emploie aussi ce mot, en grec, notamment dans De la nature en elle-même, §2, p. 195 : « deuxièmement si, dans les choses créées, réside quelque énergie (ἐνέργεια)... » (original en latin dans Gerhardt, Phi 4, p. 504).
- Jean Bernoulli l'utilise aussi en 1717 (Varignon, Nouvelle mécanique ou Statique, t. 2, 1725, p. 174 ; lire en ligne). - Descartes, Principes de philosophie, II, § 36.
- Fabien Chareix, La découverte des lois du choc par Christiaan Huygens, Revue d'histoire des sciences, t. 56, n° 1, 2003, pp. 15-58 (lire en ligne).
- Gueroult, 1967, p. 85.
- Huygens à Schooten, 29 oct. 1654 : « Si toutes les règles de Descartes ne sont pas fausses, à l'exception de la première, c'est que je ne sais pas distinguer le vrai du faux » (cité par René Dugas, Sur le cartésianisme de Huygens, lire en ligne).
- Pour 1652, voir Aperçu de la genèse du traité De motu corporum ex percussione, p. 6. - Mémoire à la Royal Society qui ne fut pas rendu public : De motu corporum ex mutuo impulsu hypothesis.
- Règles du mouvement dans la rencontre des corps, Journal des savants, , p. 19-24 : « La somme des produits faits de la grandeur de chaque corps dur, multiplié par le quarré de sa vitesse, est toujours la même devant et après leur rencontre ». - Poincaré, 1908, p. 5 et 6 : « tel que l'entendait Descartes, ce principe est faux... (sa formule) est vraie dans le mouvement absolu, elle cesse de l'être dans le mouvement relatif lorsque les axes sont animés d'un mouvement de translation... Descartes s'est bien aperçu que son principe n'est pas confirmé par l'expérience ; on peut s'en assurer en lisant une remarque qui vient à la suite de sa théorie du choc des corps ; mais il croyait que l'accord serait rétabli si l'on tenait compte de la quantité de mouvement de l'éther. »
- Gueroult, 1967, p. 155 : « Pour poser la quantité de mouvement comme l'absolu qui se conserve, Descartes avait dû arbitrairement dépouiller la vitesse de son élément relatif, en la séparant de sa direction. » - Lagrange, Mécanique analytique, p. 183 (en ligne)
- Lubet, 2004, p. 123 et L'aube de la physique de l'énergie, p. 51 : « La somme des produits mv² pour les différents corps (ayant) même valeur avant et après la collision est nommée force vive (lebendige Kraft), en 1692, par Leibniz », dans le premier Essay de dynamique.
- Voir aussi Œuvres complètes de Huygens, note 4 de la p. 341. - De la nature en elle-même, p. 207 : « il y a, inhérente aux corps, une force d'agir ».
- Pierre Costabel, Contribution à l'étude de l'offensive de Leibniz contre la philosophie cartésienne en 1691-1692, dans Revue internationale de philosophie, 1966, no 76-77, p. 265 (lire en ligne) : « cette “science toute nouvelle” que Leibniz appelle la “dynamique” et qui, en introduisant comme réalité première dans la matière un principe actif… »
- Poincaré, 1908, p. 7.
- Michel Fichant, La réforme de la dynamique, Paris, Vrin, 1994 (aperçu en ligne).
- Leibniz, Démonstration courte de l'erreur mémorable de Descartes et d'autres sur une loi naturelle selon laquelle ils soutiennent que Dieu conserve toujours une même quantité de mouvement, traduction parue dans les Nouvelles de la république des lettres (septembre 1686, lire en ligne) de l'original latin publié dans les Acta Eruditorum (mars 1686, lire en ligne).
- Leibniz, Discours de Métaphysique, paru la même année, 1686, § 12 et surtout § 17 (lire sur Wikisource). - Selon Gueroult, 1967, p. 22 : lettres à Malebranche de 1674 à 1679, puis de 1692 à 1711 ; lettres à Bayle de 1687 à 1702, spécialement celles de 1687 ; Dynamica de Potentia et legibus naturae corporeae (1690) ; Specimen Dynamicum (1695) et le Système nouveau de la nature qui précise les fondements dit métaphysiques.
- Lettre de Malebranche à Leibniz du 13 décembre 1698 (sur Wikisource) : « j’ai reconnu qu’il n’était pas possible d’accorder l’expérience avec ce principe de Descartes ».
- Malebranche le rend public dans son traité Des lois générales de la communication du mouvement joint à sa réédition en 1700 De la recherche de la vérité.
- François Duchesneau, La Dynamique de Leibniz, Vrin, 1994, p. 244-247 (aperçu en ligne). - Réflexions sur la puissance motrice du feu, p. 94 : Sadi Carnot parle « de force vive ou, ce qui est la même chose, de puissance motrice », qui n'est que « mouvement qui a changé de forme. C'est un mouvement dans les particules des corps. » « On peut donc poser en thèse générale que la puissance motrice est en quantité invariable dans la nature, qu'elle n'est jamais, à proprement dire, ni produite, ni détruite. A la vérité, elle change de forme, c'est-à-dire qu'elle produit tantôt un genre de mouvement, tantôt un autre ; mais elle n'est jamais anéantie. »
- Julius Robert von Mayer, Die Mechanik der Wärme (en allemand : lebendige Kraft, lire en ligne).
- Joule, On the mechanical equivalent of heat, 1849, où le mot force est défini m·v2 par citation de Leibniz en exergue (lire en ligne). - Lazare Carnot, Principes fondamentaux de l'équilibre et du mouvement, 1803 (lire en ligne).
- Maxwwell, Matter and motion (en latin : vis viva, lire en ligne).
- Rudolf Clausius, Mechanische Wärmetheorie (en allemand : lebendige Kraft, lire en ligne).
- Helmholtz, Über die Erhaltung der Kraft, précédé d'un exposé élémentaire
De la Transformation des forces naturelles, 1847 (en français sur Gallica).
Histoire du principe de la moindre Action (en allemand), 1887.
Cours sur la théorie de la chaleur (en allemand), 1903.
- Bolztmann, Gesammelte Abhandlungen (en allemand : lebendige Kraft, lire en ligne).
- Max Planck , Das Prinzip der Erhaltung der Energie (en allemand : lebendige Kraft, lire en ligne).
- Poincaré, dans une série de travaux édités récemment (L’opportunisme scientifique, 2002), utilise 31 fois l'expression "force vive" (contre 34 fois le mot "énergie"). - Lubet, 2004, p. 117.
- Lubet, 2004, p. 132-133.
- L'aube de la physique de l'énergie, p. 57. - Balian, 2003, p. 4.
- Dugas, 1959, p. 84 : « Mayer parvient à l'équivalence suivante : à la chute d’un poids d'une hauteur de 369 m environ correspond la quantité de chaleur nécessaire pour élever de 0° à 1° la température d’un même poids d'eau ».
- Maria Tsakiri, Rankine et la science de l'énergétique, 1997 (lire en ligne).
- La Science et l'Hypothèse, p. 148 : « Les difficultés soulevées par la mécanique classique ont conduit certains esprits à lui préférer un système nouveau qu'ils appellent énergétique (basée sur) d'une part, l'énergie cinétique ou force vive ; d'autre part, l'énergie potentielle. »
- René Dugas, La théorie physique au sens de Boltzmann et ses prolongement modernes, Neuchâtel, Griffon, (lire en ligne), p. 82 (ch. VI, Bref rappel des thèses de l'énergétique).
- Dugas, 1959, p. 85.
- Au sens no 2 de l'Enc. Universalis, art. Intégron.
- Expression due à François Jacob dans La logique du vivant : une histoire de l'hérédité (Gallimard, 1970, présentation en ligne) où au dernier chapitre et conclusion il confirme pour la biologie la conception leibnizienne de la matière, sa construction sur le principe des poupées russes et son principe d'économie. - L'Illustration, 23 juillet 1853, p. 59 (lire en ligne).
- Jean-Paul Auffray, Poincaré et « l’atome de mouvement », in Henri Poincaré et la Physique, p. 33 : « ...l’équation δp=h qui relie l’invention de Leibniz et celle de Planck » (lire en ligne).
- Lettre à Clark, 25 fév. 1716 : « j'ai marqué plus d'une fois que je tenais l'espace pour quelque chose de purement relatif, comme le temps ; pour un ordre de coexistences comme le temps est un ordre de successions » (Gerhardt, Phi 7, p. 363).
- Dugas, 1959, p. 21.
- Heisenblerg : « se laisser aller à supposer que derrière l’univers statistique perçu se dissimule un autre univers où le principe causal serait valable ... de telles spéculations nous apparaissent, nous l’affirmons expressément, stériles et dénuées de sens. La physique doit se borner à décrire de manière formelle ce qui est perçu » expérimentalement (cité par Emile Meyerson, Réel et déterminisme dans la physique quantique, Hermann, 1933, p. 37).
- Wolff, Vie de Leibniz, p. 48 : « Il est regrettable qu’il n’ait pas publié l’autre partie de la démonstration de la force, qu’il avait promise. Et l’on doit encore davantage déplorer que, pris par de nombreuses autres affaires, il n’ait pas mené à son terme cette nouvelle science de la force à laquelle il avait tout d’abord songé et qu’il aurait pu achever de la meilleure façon » (voir ci-dessous).
- Sur l'intention de ses essais, voir ses Remarques aux Nouvelles de la république des lettres, 1706, où il décrit sa collaboration avec Jacques Bernoulli (Gerhardt, Math 5, p. 389).
- Sur l'efficacité de la courte publication de 1684 sur les différentielles, voir Jean Bernoulli in Gerhardt, Math 3, p. 5 en note.
- Sur ses démonstrations mathématiques parfois trop rapides, voir Maximilien Marie, Histoire des sciences mathématiques et physiques, t. VI, p. 194 (lire en ligne).
- Sur ses théories hésitantes, voir ses opinions sur la réfraction (Gueroult, 1967, p. 218). - Balian, 2003, p. 2.
- Encyclopedie Universalis, art. Énergie (lire en ligne).
- Bernard Pourprix, La fécondité des erreurs - Histoire des idées dynamiques en physique au XIXe siècle, Septentrion, 2003 (§ Le lent déclin du paradigme statique en France, lire en ligne).
- Voir Histoire, ci-dessus
-Voir aussi NGram:force vive. - Voir Jennifer Karns Alexander, « Static and dynamic efficiency : The waterwheels of Smeaton and the Franklin institute », dans The mantra of efficiency: From waterwheel to social control, JHU Press, 2008, p. 15 et 18 (ISBN 0801886937 et 9780801886935). Extraits en ligne, Google Livres.
- Fernand Papillon, Leibniz et la science contemporaine, 1871, p. 338 : Diderot « seul a développé un système précis et arrêté où les idées de Leibniz ont une grande place, et où domine le principe du dynamisme, l’idée des forces-mères » (lire sur Wikisource).
- Leibniz, Principes fondamentaux, p. 60 : « un effort ou une tendance à l’action, de sorte qu’à moins d’empêchement extérieur l’action s’ensuive ».
- Concepts of force, p. 160, citant le De primæ philosophiæ emendatione et de notione substantiæ (1694, sur Wikisource, p. 633).
- Concepts of force, p. 159-160.
- Voir notamment son Entretien de Philarète et d’Ariste (Gerhardt, Phi 6, p. 582).
- Anne-Lise Rey, L'ambivalence de la notion d'action dans la Dynamique de Leibniz, Studia Leibnitiana, 2009, n° 41/1, 2009, pp. 47-66 (lire en ligne). - Rey, Diffusion de la Dynamique.
- Désiré Nolen, Le monisme en Allemagne, Revue philosophique de la France et de l'étranger, t. 13, janv-juin 1882, p. 146-179 (lire en ligne).
- Paul Tannery, Pour l'histoire de la science Hellène, Gauthiers-Villars, Paris, 1930 : « Anaxagore, comme cause du mouvement et de la genèse, posa l'intelligence, grâce à laquelle la séparation engendra les mondes et la nature des divers êtres » (lire en ligne) — argument loué par Socrate lors de son dernier entretien (dans le Phédon) dont Leibniz faisait grand cas).
- Belaval, 1969, p. 106. - Leibniz, Principes fondamentaux, p. 60 : ce qui, joint à la masse, « achève de constituer la substance corporelle, qui, comme on sait, est unum per se (individualisé par lui-même) et non pas un agrégat d’une pluralité ».
- CNRTL et TLFi, art. force (lire en ligne).
- p. 255, lire en ligne.
- p. 269, lire en ligne.
- Lire en ligne.
- Lire en ligne, p. 148.
- Préface, lire en ligne.
- Préface, lire en ligne.
- Poincaré, Note sur les principes de la mécanique dans Descartes et dans Leibniz, postface de la Monadologie éditée par Émile Boutroux, Paris, Delagrave, 1892 (lire en ligne sur Wikisource ou sur Gallica).
- Lettre à Pellisson, juin 1691 (lire en ligne).
- Lettre à Pellisson, 19 novembre 1691 (lire en ligne).
- Gerhardt, Math 6, p. 235 (traduit du latin) ; en anglais, Leroy Loemker, p. 435 traduit par « but which is provided besides with a striving or effort ».
- Lettre au marquis de l'Hospital, 15 janvier 1696 (Gerhardt, Math 2, p. 305 ; italiques ajoutées).
- D'Alembert, Encyclopédie, Encyclopédie, art. Force.
- Dugas, 1954, p. 490.
- Deuxième Essay de Dynamique, p. 218.
Sollicitation est sa traduction en français de conatus, le fait que la Force interne tend d'elle-même au mouvement, est prédisposée à passer à l'action. - Leibniz à Varignon, 2 fév. 1702 : « ma loi de la continuité, en vertu de laquelle il est permis de considérer le repos comme un mouvement infiniment petit (c'est-à-dire comme équivalent à une espèce de son contradictoire), et la coïncidence comme une distance infiniment petite, et l’égalité comme la dernière des inégalités, etc. ».
- Bernoulli, Discours, p. 19 : « La vitesse virtuelle est l'élément de vitesse que chaque corps gagne ou perd d'une vitesse déjà acquise, dans un temps infiniment petit ».
- Bernoulli, Discours, p. 32.
- Gueroult, 1967, p. 33-34.
- Leibniz à de Volder : « dans le cas d'un grave qui reçoit à chaque instant de sa chute un accroissement égal et infiniment petit de vitesse, on peut estimer à la fois la force morte et la force vive : la vitesse s'accroît comme le temps, la force absolue comme le carré des temps ; selon l'analogie de notre géométrie ou de notre analyse, les sollicitations sont comme dx, la vitesse comme x et les forces comme xx ou ∫xdx » (1698 ou 1699, Gerhardt, Phi 2, p. 156). - Coriolis, Du calcul des effets des machines, Paris, 1829, p. III (lire en ligne) et pp. 16-17 sur les raisons qui l'ont conduit à diviser par deux.
- Sur la division par deux, voir aussi Lubet, 2004, p. 127. - Clausius, De la fonction potentielle et du potentiel, Gauthier-Villars, 1870 (orriginal en allemand : 1859), p. 117 : « nous appelons 1/2 mv² la force vive » (en ligne).
- (la) Daniel Bernoulli, « De legibus quibusdam mechanicis quas natura constanter affectat … », Commentarii Academiae scientiarum imperialis Petropolitanae, vol. 8 (ad annum 1736), , p. 99–127 (lire en ligne).
- Poincaré, Thermodynamique, p. 9.
- Théorème des forces vives, Encyclopédie Universalis. - Poincaré, Thermodynamique, p. 5.
- De Geometria recondita et Analysis Indivibilium atque infinitorum (De la géométrie intérieure et analyse des indivisibles comme des infinis), Acta Eruditorum, juin 1686 (Gerhardt, Math 5, p. 225).
- Traduction en français dans 26 articles des Acta Eruditorum, p. 126. - Gueroult, 1967, p. 98 (italiques ajoutées).
- Gueroult, 1967, p. 34.
- Sur le rapport entre intégration et matière organisée comme des poupées russes :
- Carnot : « Il n'est aucune découverte qui ait produit dans les sciences mathématiques, une révolution aussi heureuse et aussi prompte que celle de l'analyse infinitésimale... En décomposant, pour ainsi dire, les corps jusque dans leurs éléments, elle semble en avoir indiqué la structure intérieure et l'organisation » (Réflexions sur la métaphysique du Calcul infinitésimal, 1797 (lire en ligne).
- François Jacob, La logique du vivant, qui titre sa conclusion « L'intégron » : « Une fois encore on a affaire à des intégrations d’éléments eux-mêmes intégrés (p. 342) ... C’est par l’intégration que change la qualité des choses (p. 344) ... Il n’y a pas une organisation du vivant, mais une série d’organisations emboîtées les unes dans les autres comme des poupées russes. Derrière chacune s’en cache une autre. Au-delà de chaque structure accessible à l’analyse finit par se révéler une nouvelle structure, d’ordre supérieur, qui intègre la première et lui confère ses propriétés (p. 24) ». - Gueroult, 1967, p. 33.
- Principe utile non seulement en mathématique mais aussi en physique (en latin, Gerhardt, Math 6, p. 130).
- Lettre au marquis de L'Hospital, 4/14 décembre 1696 (Gerhardt, Math 2, p. 319).
- En latin : « Agere est character substantiarum » (Specimen dynamicum, 1695, Gerhardt, Math 6, p. 235). – « toute substance individuelle agit sans interruption, et je n’en excepte même pas le corps, car on n’y remarque jamais de repos absolu » (De la nature en elle-même, p. 213).
- Concepts of Force, p. 170. - Lettre sur la Continuité et la Dynamique, p. 47.
- Gueroult, 1967, p. 122.
- Suzanne Bachelard, Maupertuis et le principe de la moindre action, Thalès, 1958, pp. 14 (lire en ligne).
- Maupertuis : « Ayant trouvé ce mot (action) tout établi par Leibniz et par Wolff, pour exprimer la même idée et trouvant qu'il y répondait bien, je n'ai pas voulu changer les termes » (Mémoires de l'Académie des sciences, 1744). - Guerardt, Math 6, pp. 354, 356, 366.
- Cité par Anne-Lyse Rey, L'ambivalence de la notion d'action dans la Dynamique de Leibniz. La correspondance entre Leibniz et De Volder (2e partie), Studia Leibnitiana, vol. 41-2, 2009, pp. 158 (lire en ligne).
- Lettre sur la Continuité et la Dynamique.
- Leibniz, deuxième Essay de Dynamique, p. 220
- André Robinet, Architectonique disjonctive, automates systémiques et idéalité, Vrin, 1986, p. 279 (aperçu en ligne).
- Leibniz à Varignon, 20 juin 1702 : « Il n'est que les substances simples [qui ne sont pas des êtres par agrégation] qui sont véritablement indivisibles, mais elles sont immatérielles, et ne sont que principes d'action. »
- Leibniz, deuxième Essay de Dynamique, p. 220 : « ...parce que dans le fonds l’exercice de la force ou la force menée dans le temps est l’action, la nature abstraite de la force ne consistant qu’en cela. »
- Lettre à Pellisson, juin 1691 : « La notion de la force ... c'est ce dont l'action s'ensuit, lorsque rien ne l'empêche » (lire en ligne). - Leibniz, deuxième Essay de Dynamique, p. 221.
- Maupertuis, Essay de Cosmologie, 1750 (lire en ligne).
- Leibniz : Essai anagogique ; Lettre sur la continuité et la Dynamique ; De l'origine radicale des choses (1697, en latin, Gerhardt, Phi 7, p. 303) : « Il y a toujours … dans les choses un principe de détermination qu’il faut chercher dans le Maximum ou le Minimum, à savoir que le plus grand effet soit obtenu, pour ainsi, dire avec la moindre dépense ».
- Couturat, La logique de Leibniz, p. 231 et 577 ; Couturat va jusqu'à dire que ce principe de moindre Action « est dû à Leibniz, et non à Maupertuis, à qui on l'attribue d'ordinaire ».
- Max Planck, 1915 : Le principe leibnizien « n’est rien d’autre qu’un principe de variation et, plus précisément, un principe qui est déjà tout à fait de la forme du principe de moindre action qui est apparu plus tard » (cité par Bouveresse, Dans le labyrinthe : Nécessité, contingence et liberté chez Leibniz, p. 34, lire en ligne § 18).. - Couturat, La logique de Leibniz, p. 229 sq..
- Désiré Nolen, op. cité, p. 150.
- Jacques Bouveresse, op. cité, p. 254 : « Leibniz insiste sur la valeur heuristique de l’utilisation des causes finales » (lire en ligne) ; p. 36 : exemples de problèmes (isopérimètre, brachistochrone, surface minimale) pouvant être expliqués mécaniquement, qui constituent une « application du principe du meilleur par la nature elle-même, en ce sens que tout se passe comme si elle choisissait spontanément la solution qui permet d’obtenir le maximum de résultat avec le minimum d’effort » (en ligne, §20).
- Lorenzo Peña, Le choix de Dieu et le principe du meilleur, Institut de philosophie du Conseil supérieur de la recherche scientifique, Madrid (lire en ligne).
- Couturat, La logique de Leibniz, p. 238.
- Essai anagogique.
- Essai anagogique, « pour ainsi dire, deux règnes dans la nature corporelle même qui se pénètrent sans se confondre et sans s'empêcher ».
- François Duchesneau, Le principe de finalité et la science leibnizienne, Revue philosophique de Louvain, 1996, n° 94-3, pp. 387-414 (lire en ligne).
- Alexandre Koyré, Études galiléennes, Hermann, Paris, 1966, p. 273.
- Maurice Clavelin, Galilée et Descartes sur la conservation du mouvement acquis, Dix-septième siècle, 2009/1, n° 242, p. 31.
- Descartes, Principes de la philopsophie, II, § 36 : « lorsqu'une partie de la matière se meut deux fois plus vite qu'une autre, et que cette autre est deux fois plus grande que la première, nous devons penser qu'il y a tout autant de mouvement dans la plus petite que dans la plus grande ».
- Descartes, Principe de la philosophie, II, § 36.
- Gueroult, 1967, p. 84.
Journal des Savants, 18 mars 1669 (p. 22 lire en ligne).
- Poincaré le formule ainsi : « La somme de l’énergie cinétique et de l’énergie potentielle est une constante »(La science et l'hypothèse, p. 113). - Gueroult, p. 98 : « En universalisant le théorème des forces vives pour en faire le principe suprême de la science de la nature, Leibniz en effet est conduit à soutenir la théorie de l'universelle élasticité des corps ».
- Lagrange, 1788, p. 183-184.
- Deuxième Essay de dynamique.
- Dugas, 1954, p. 482 : « Cette quantité de progrès ne diffère pas de la somme des quantités de mouvement orientées ... Elle est également proportionnelle à la vitesse du centre de gravité »..
- Dugas, 1954, p. 481 : « Il faut se garder de confondre l'absolu au sens de Leibniz qui, dans sa pensée, se réfère à ce qu'il doit y avoir d'intrinsèque dans les corps, avec les absolus newtoniens : temps et espace. ».
- Lubet, 2004, p. 122. Voir p. 124 l'apport de ses prédécesseurs, notamment de Daniel Bernoulli qui emploie l'expression « principii conservationis virium vivarum (principe de conservation des forces vives) »..
- Poincaré, 1908, p. 7-9, l'énonce ainsi : « La variation de la demi-force vive d'un système est égale à la somme des travaux accomplis par toutes les forces du système pendant le déplacement considéré ».
- Sur la dissipation de la force :
- Louis Couturat, Le système de Leibniz d'aprés M. Cassirer, Revue de Métaphysique et de Morale, t. 11, janvier 1903, p. 89 (lire en ligne).
- Concepts of Force, p. 167 sq.
- Leibniz, Cinquième lettre à Clarke, § 99 : Gerhardt, Philo 7, p. 414. - Darrigol, 2001, p. 287.
- Alexandre Koyré, Du monde clos à l’univers infini, 1962, , PUF, p. 265.
- D'Alembert, Encyclopédie, p. 175 de l'art. Dynamique : « Il me semble que ce principe réduit en effet tous les problèmes du mouvement des corps à la considération la plus simple, à celle de l’équilibre. » (lire sur Wikisource). — Voir aussi art. Force : « j’ai donné le premier dans mon traité de Dynamique une méthode générale et directe pour résoudre toutes les questions imaginables de ce genre, sans y employer le principe de la conservation des forces vives » (lire sur Wikisource, p. 115).
- Leibniz, deuxième Essay de Dynamique, p. 219.
- À comparer avec D'Alembert, Encyclopédie, art. Dynamique : « Le principe général de la Dynamique prise en ce sens (au sens du principe de D'Alembert), est que le produit de la force accélératrice ou retardatrice par le temps est égal à l'élément de la vitesse ; la raison qu'on en donne est que la vitesse croît ou décroît à chaque instant, en vertu de la somme des petits coups réitérés que la force motrice donne au corps » (lire sur Wikisource, p. 174). - Pierre Sagaut, Introduction à la pensée scientifique moderne, p. 203 (lire en ligne).
- Gueroult, 1967, p. 98.
- Leibniz, deuxième Essay de Dynamique, p. 230.
- John Locke, Essay Concerning Human Understanding : « Heat is a very brisk agitation of the insensible parts of the object, which produces in us that sensation from whence we denominate the object hot; so what in our sensation is heat, in the object is nothing but motion » (lire en ligne ; en français).
- Lettres de Huygens à Leibniz : 4 février et 11 juillet 1692.
Réponse de Leibniz (26 septembre 1692, lire en ligne) : « Je crois qu'on peut dire en général, que la matière est agitée d'une infinité de façons de tous côtés avec une difformité uniforme, en sorte qu'il y en a peut-être également en tout sens. Ce mouvement doit servir tant à former des corps, qu'à les placer ; car les corps prennent la situation par laquelle leurs mouvements sont moins empêchés, et s'accommodent en quelque façon les uns avec les autres, ainsi cela peut faire qu'ils se joignent, quand ils sont séparés, et qu'on a de la peine à les séparer quand ils sont unis ... un corps rond est moins exposé aux coups du fluide environnant, à cause que c'est ainsi que sa surface est la moindre qui est possible ». - Gerhardt : Math 6, p. 123, 125, 199. - Phi 2, p. 153 sq. ; 3 pp. 43-51 ; 4 pp. 164, 254.
- (en) Gideon Freudenthal, Perpetuum mobile : The Leibniz-Papin controversy, Studies in history and philosophy of science, 33, 2002, pp. 581 sq. (lire en ligne). - Gueroult, 1967, p. 96, note 1, donne les références au Journal des Savants, à Huygens et à Lagrange, qui utilisent le même argument.
- La Science et l'Hypothèse, p. 157.
- Lubet, 2004, p. 120, commentant la rédaction de son mémoire Sur la conservation de la force, 1847.
- TLFi, art. Dynamique, étymologie : « 1692 mécan. science dynamique “science des forces ou puissances qui meuvent les corps” » (citation de Leibniz dans sa lettre à Pellisson).
- Michel Fichant, De la puissance à l'action : la singularité stylistique de la Dynamique, Revue de métaphysique et de morale, janvier-mars 1995, pp. 50 (lire en ligne). - Gerhardt, Math 6, p. 281.
- Andrea Costa, Enrico Pasini, L’édition critique de la Dynamica de potentia seu de legibus naturæ corporeæ de G. W. Leibniz, Revue d'histoire des sciences, 2019-1, t. 72, pp. 137-161 (lire en ligne). - Lettre à Pellisson : « j'établis une nouvelle science que j'appelle la dynamique... » (lire en ligne).
- Specimen dynamicum : Gerhardt, Math 6, pp. 234 sq. ((en) Leroy Loemker, p. 435)
- Dugas, 1954, p. 489, avec un commentaire complet sur le Specimen dynamicum.
- Christophe Schmit, Mécanique, Statique, Dynamique : Répartition du savoir et définitions dans l’Encyclopédie, Société Diderot, 2014, p. 235 (lire en ligne). - Notamment l'Essai anagogique dans la recherche des causes.
- À Johann Bernoulli, Denis Papin, Burcher de Volder et Christian Wolff (Rey, Diffusion de la Dynamique).
- Dugas, 1954, p. 490. - Christian Wolf, Principia dynamica (Académie des sciences de Saint-Petersboug, 1728) ; Cosmologia generalis, II, ch. 4 (Francfort et Leipzig, 1731).
- Rey, Diffusion de la Dynamique.
- Jean Ecole, Cosmologie wolffienne et dynamique leibnizienne : Essai sur les rapports de Wolff avec Leibniz, Études philosophiques, janvier 1964 (en ligne). - Dictionnaire de Trévoux, 1771, art. Dynamique.
- Christophe Schmit, Mécanique, Statique, Dynamique, op. cité, p. 235. - Encore en 1748 le traité de Maclaurin nie la conservation de m·v2.
- Sur l'exagération de la traduction des Principia de Newton par l'énergétiste Tait en 1867, et la difficulté de trouver un énoncé du principe de conservation de l'énergie dans les Principia (livre 1, propositions 39 et 40, pp. 129 et 132 de la traduction de la marquise du Châtelet), voir Cohen & Whitman, A new translation of Newton's Principia, Univ. of California Press, 1999, pp. 80, 119, 520 et 528 (aperçu en ligne). - Alexandre Koyré, Études galiléennes, Hermann, Paris, 1966, p. 103.
- The Plan of the French Encyclopaedia, Londres, 1752 (lire en ligne).
- 'Dictionary of arts and sciences, 1763 (lire en ligne).
- Samuel Clark (professeur de mathématiques), An Easy Introduction to the Theory and Practice of Mechanics, 1764 (lire en ligne). - D'Alembert, Traité de dynamique, p. xxiij : le mot Dynamique signifie « la Science du Mouvement des Corps, qui agissent les uns sur les autres d’une manière quelconque ».
- D'Alembert, Traité de dynamique ch. 4, § 154, p. 169.
- Pierre Costabel, De quelques embarras dans le Traité de dynamique, Dix-huitième Siècle, n° 16, 1984, p. 46 (lire en ligne).
- Christophe Schmit, D’Alembert et la dynamique : Contexte et originalité, Revue de métaphysique et de morale, 2017/1, n° 93, pp. 19-30 (lire en ligne)
- Dugas, Histoire de la mécanique, Éditions du Griffon, , p. 238 sq..
- Anne-Lise Rey - Le leibnizo-newtonianisme : la construction d'une philosophie naturelle complexe dans la première moitié du 18e siècle, Dix-huitième Siècle, 2013/1, n° 45, pp. 115-129 (lire en ligne).
- Théorie de la philosophie naturelle pour une unification des forces de la nature, Vienne, 1758 (en latin) : « un système à mi-chemin entre celui de Leibniz et celui de Newton » (cité par Concepts of Force, p. 178).
- Lazare Carnot, Essai sur les machine en général, 1783 (lire en ligne) ; p. 39 Carnot choisit le principe de la conservation des forces vives comme point de départ à partir duquel les propositions de la science des machines peuvent se déduire de la façon la plus naturelle (Gillispie).
- Joseph Montgolfier, Mémoire sur la possibilité de substituer le bélier hydraulique à l'ancienne machine de Marly, 1802, pp. 296, 290 : « La Force a un prix » (lire en ligne).
- Marc Seguin, De l'influence des chemins de fer, 1839 (lire en ligne).
- Pierre Costabel, La Corrélation des forces physiques en France et en Angleterre, et la réclamation de Marc Seguin en 1847, History and Technology, août 1988.
- Gustave-Adolphe Hirn, Recherches sur l'équivalent mécanique de la chaleur, Colmar, 1858 (lire en ligne). - John Smeaton, voir ci-dessous.
- Rumford, An Experimental Enquiry Concerning the Source of the Heat which is Excited by Friction, 1798 (en).
- William Hyde Wollaston, On the Force of Percussion, 1805.
- Peter Ewart, On the measure of moving force, 1813. - Jean-Victor Poncelet, Cours de mécanique appliquée aux machines, 1826 (p. 4-5 de l'édition publiée par M. X. Kretz, lire en ligne).
Avant de définir le kilogrammètre (« prendre pour unité de travail 1 kilogramme, élevé à 1 mètre de hauteur ») Poncelet nomme, comme ayant utilisé la force « PH » (masse multipliée par hauteur), et réfère à Smeaton, Carnot, Monge, Montgolfier, Hachette, Navier, Coriolis, Dupin. - Robert d'Haëne, La notion scientifique de l'énergie, son origine et ses limites, Revue de Métaphysique et de Morale, 1967, n° 1, pp. 35-67 (lire en ligne).
- La science et l'hypothèse, p. 118.
- de Broglie, Recherches, p. 81.
- Concepts of Force, p. viii et 241 sq.
- La Science et l'Hypothèse, p. 110 (ch. 6).
- Dans la République des Lettres : septembre 1686, après un résumé par Leibniz, l'abbé Catelan dénonce un paralogisme ; février 1687, réplique de Leibniz ; juin 1687, contre-attaque de Catelan ; septembre 1687, réponse de Leibniz (Dugas, 1954, p. 477 ; Gueroult, 1967, p. 237).
- Christophe Schmit, D’Alembert et la dynamique : Contexte et originalité, Revue de métaphysique et de morale, 2017/1, n° 93, pp. 19-30 : « D’Alembert privilégie une tout autre conception où cette science s’appuierait sur “aucune métaphysique mauvaise ou obscure” et ne ferait usage “ni des actions ni des forces” ... une analyse de la dynamique fondée sur les liaisons des systèmes ... D’Alembert ne voit pas d'inconvénient à la coexistence de ces deux mesures » (lire en ligne).
- Gueroult, 1967, p. 96.
- Geneviève Guitel, Pierre Costabel, Leibniz et la dynamique : les textes de 1690, Annales, 1963, vol 18, no 2, p. 393-395 (lire en ligne).
- Pour le détail de cette Querelle, Montucla, Histoire des mathématiques, t. 3, p. 629 (lire en ligne). - Lettre à Pellisson, juin 1691 : « dans la nature des corps, outre la grandeur et le changement de la grandeur et de la situation, c'est à- dire outre les notions de la pure géométrie, il faut mettre une notion supérieure, qui est celle de la force par laquelle les corps peuvent agir et résister » (lire en ligne).
- Lettres au Journal des savants : Sur la question si l’essence du corps consiste dans l’étendue (sur Wikisource : 18 juin 1691 et 5 janvier 1693).
- Anne-Lise Rey, La dynamique de Leibniz : Un autre visage de la science (lire en ligne) : « Descartes considérait en effet que le mouvement d’un corps ne pouvait résulter que de l’action mécanique d’un autre corps exercé sur le premier, privilégiant ainsi le recours à une causalité strictement externe et définissant le corps par la seule étendue. » - Alexandre Koyré : la science de Descartes, le « Cosmos, elle le brise, le détruit, l'annihile en ouvrant à sa place l'immensité sans bornes de l’espace infini (p. 29) ... cet espace infini (qui) n'est justement qu'un espace irréel, qui n'existe que dans notre esprit (p. 99) » (Entretiens sur Descartes, Brentanos, 1944, p. 29 et p. 99 ; réédité par Gallimard, 1962, à la suite de Introduction à la lecture de Platon).
- Anne-Lise Rey, op. cité : Leibniz « propose corrélativement de redéfinir le corps comme une entité douée d’une force interne. »
- Lettre sur la question Si l'essence du corps consiste dans l'étendue (Journal des Savants, 18 juin 1691 ; sur Wikisource).
- Joseph Moreau, Examen de la philosophie de Descartes, 1971, traduction en français d'un exposé particulièrement net de Leibniz datant de 1702 (lire en ligne). - « Ayant tâché d’approfondir les principes mêmes de la mécanique, pour rendre raison des lois de la nature que l’expérience faisait connaître, je m’aperçus que la seule considération d’une masse étendue ne suffisait pas, et qu’il fallait employer encore la notion de la force, qui est très intelligible, quoiqu’elle soit du ressort de la métaphysique » (Système nouveau de la nature, p. 636, lire sur Wikisource).
- D'Alembert dans l'Encyclopédie, art. Action : « c’est embrouiller cette idée que d’y joindre celle de je ne sais quel être métaphysique, qu’on imagine résider dans le corps, et dont personne ne saurait avoir de notion claire et distincte. C’est à ce même malentendu qu’on doit la fameuse question des forces vives. »
- D'Alembert, Traité de dynamique, p. XXI : « comme nous n’avons d’idée précise et distincte du mot de force, qu’en restreignant ce terme à exprimer un effet, je crois qu’on doit laisser chacun le maître de se décider comme il voudra là-dessus ; et toute la question (des forces vives) ne peut plus consister, que dans une discussion Métaphysique très futile, ou dans une dispute de mots plus indigne encore d’occuper des Philosophes ».
- D'Alembert, cité par Christophe Schmit, Le Traité de dynamique de D'Alembert, § 2.1.
- Christophe Schmit, Le Traité de dynamique de D'Alembert, § 2.1.
- Véronique Le Ru, La Crise de la substance et de la causalité. Des petits écarts cartésiens au grand écart occasionaliste, Paris, CNRS, 2003, p. 183. - Leibniz : « Ce qui a contribué le plus à confondre la force vive avec la quantité de mouvement, est l'abus de la doctrine de la Statique (Gerhardt, Math 6, p. 218]) ».
- Lagrange, 1788, p. 179 : Le principe de D'Alembert « réduit toutes les lois du mouvement des corps à celles de leur équilibre, et ramène ainsi la Dynamique à la Statique. » - Pierre Costabel, En relisant “les Principes mathématiques de la philosophie naturelle” : « La Mechanica rationalis est ainsi bien différente de la Dynamique au sens de Leibniz, car dans cette perspective la question de savoir si la force est réelle ou non, si elle est une notion première ou non, n'a pas à être posée » (Revue de Métaphysique et de Morale, oct-déc. 1968, n° 4, p. 487, lire en ligne).
- D'Alembert, Traité de dynamique, p. xx/xx du Discours préliminaire.
- (en) Florian Cajori, A history of physics in its elementary branches, New York, 1899 : « Si nous considérons le temps, l'efficacité d'un corps en mouvement varie en raison de sa vitesse. Un corps lancé verticalement vers le haut avec une vitesse double s'élève deux fois plus longtemps. Si on considère la distance, l'efficacité varie en raison du carré de la vitesse. Un corps lancé verticalement vers le haut avec une vitesse double s'élève quatre fois plus haut » (lire en ligne, p. 52).
- D'Alembert, Encyclopédie, p. 903 de l'art. Flux et reflux : « La meilleure façon de philosopher en Physique, c'est d'expliquer les faits les uns par les autres... Il ne nous est guère permis d'aller plus loin, les causes des premiers faits nous étant inconnues » (lire sur Wikisource).
- Lubet, 2004, p. 121.
- Cité par Lazare Carnot, Principes fondamentaux de l'équilibre et du mouvement, Paris, 1803, p. xiii (lire en ligne).
- Leibniz, De la nature en elle-même, p. 207.
Voir aussi son essai De la réforme de la philosophie première, et de la notion de substance qui souligne la difficulté de la métaphysique comparée aux mathématiques. - La Science et l'Hypothèse, p. 158.
- Robert Mayer, Bemerkungen über die Kräfte der unbelebten Natur (Remarques sur la Force de la nature inanimée), Annalen der Chemie und Pharmacie, juillet-décembre 1862, n°42-2, pp. 233–240 (lire en ligne).
- Principes fondamentaux de l'équilibre et du mouvement, p. xvj.
- Albert Einstein et Leopold Infeld, L'évolution des idées en physique, traduit de l'anglais par Maurice Solovine, Flammarion, 1983, pp. 228, 186, 133, 243.
- De Broglie, Recherches, p. 22.
- De Broglie, Recherches, p. 15, et passim : « singularité ».
- Aristote, Physique, I, 1.
- Concepts of force, p. 241.
- Concepts of force, p. 242 ; tous ses ch. 11 et 12 traitent de la critique moderne du concept de Force.
- Michel Fichant, Mécanisme et métaphysique : le rétablissement des formes substantielles (1679), § 5 (lire en ligne).
- Dieu « conserve maintenant en l'univers par son concours ordinaire, autant de mouvement et de repos qu'il y en a mis en le créant. »
- Date de l'article Brevis demonstratio.
- De legibus naturae et vera aestimatione virium motricium, Acta eruditorum (en), 1691, p. 439-447 (Gerhardt, Math 6, p. 204).
- Specimen dynamicum, Acta eruditorum, 1695 (Gerhardt, Math 6, p. 234 ; (en) Leroy Loemker, p. 435).
- Gerhardt, Phi 1, pp. 321-361. – D'abord cartésien, Malebranche finit par reconnaître que la règle de Descartes est fautive.
- Débats dans le Journal des savants suite à l'article Brevis demonstratio.
- Ernst Gerland (dir.), Leibnizens und Huygens' Briefwechsel mit Papin, 1881.
- Dans Acta eruditorum, 1691. La réponse de Leibniz est dans le même volume : De legibus natura et vera a[e]stimatione virium motricium, contra cartesianos. Responsio ad rationes a Domino P[apino] mense januarii proxima in Actis hisce p. 6 propositae.
- Christophe Schimt, Sur l’origine du « Principe général » de Jean Le Rond D’Alembert, p. 24 (lire en ligne).
- O. Bruneau, I. Passeron, Dortous de Mairan, un physicien distingué, Revue d’Histoire des Sciences, 2015, t. 68, pp.259-279.
- « De Mairan lut le résultat de ses travaux dès 1719, mais les publia ultérieurement en deux parties sous le titre Recherches physico-mathématiques sur la réflexion des corps, le premier mémoire à l’année 1722, le deuxième à l’année 1723. Seul ce dernier discute de la position de Leibniz : Histoire de l’Académie royale des sciences, Paris, Durand, année 1723, p. 381-384 (Christian Leduc 2016 en ligne).
- (en) Andrea Rusnock, Correspondence of James Jurin, 1684-1750, Rodopi, coll. « Clio Medica Series », 1996, p. 41 (ISBN 9042000473 et 9789042000476) : « Cramer, convaincu de la justesse du concept de vis viva, chercha à modifier l'opinion de Jurin. »
- Pierre Costabel, s' Gravesande et les forces vives, dans Mélanges Alexandre Koyré, vol. I, 1961, p. 117.
- Dans Jean Nicolas Sébastien Allamand (dir.), Œuvres philosophiques et mathématiques de M. G. J.'s Gravesande, 1774, p. 251.
- Date de la parution dans le Journal littéraire de La Haye, vol. 13, p. 196.
- (en) Ruth Hagengruber, Emilie du Châtelet between Leibniz and Newton : The transformation of metaphysics, Springer, 2011, p. 1–59 (ISBN 978-94-007-2074-9 et 978-94-007-2093-0).
- Réponse de Mme la Marquise Du Chastelet à la lettre que M. de Mairan, secrétaire perpétuel de l'Académie royale des sciences, lui a écrite, le , sur la question des forces vives.
- Citation tirée du Traité de dynamique, Paris, David, 1743, p. xxi.
- Sur cette expression, on peut lire : Françoise Balibar, Les mots et les lettres de la physique dans Dominique Rousseau (dir.) et Michel Morvan (dir.), Le temps des savoirs, no 1, (La dénomination), Paris, Odile Jacob, 2000, p. 94 : « [L]a controverse porte sur la question de savoir si la force motrice (vis motrix), qui est censée être conservée, est la quantité de mouvement (définie comme le produit de la masse par la vitesse) ou bien ce que Leibniz appelle vis viva, produit de la masse par le carré de la vitesse. Ce que certains (D'Alembert, par exemple) ont décrit comme une querelle de mots est en fait une querelle d'invariants — ou encore de mesures, comme l'indique clairement la littérature de l'époque où la question de savoir comment mesurer la force est au centre des discussions. » Rappelons le sous-titre de l'ouvrage de P. Costabel cité dans ces notes : « De la vertu des querelles de mots ».
- Christian Leduc, Maupertuis entre moindre action et force vive, 2016 (lire en ligne).
- Un article des Phil. Trans., 1740, 41, p. 607-610 s'intitule A short account of Dr. Jurin's ninth and last dissertation De vi motrice (Bref compte rendu de la neuvième et dernière dissertation du Dr Jurin au sujet de la force motrice).
- A Letter from James Jurin, M. D., F. R. S. & Coll. Med. Lond. to Martin Folkes, Esq ; President of the Royal Society, concerning the action of springs, dans Phil. Trans., 1744, vol. 43, p. 46-71 DOI:10.1098/rstl.1744.0015.
- An inquiry into the measure of the force of bodies in motion : With a proposal of an experimentum crucis, to decide the controversy about it, dans Phil. Trans., 1744, vol. 43, p. 423-440 DOI:10.1098/rstl.1744.00861745.
- Principia dynamica, sive Principia mechanices metaphysica, dans Phil. Trans., 1746, vol. 44, p. 103-124 DOI:10.1098/rstl.1746.0025.
- Dans Histoire de l'Académie Royale des Sciences et des Belles-Lettres de Berlin, 1745, p. 21 (en ligne).
- Sur les forces vives, Rome, 1745.
- Pierre Costabel, Le De viribus vivis de R. Boscovich ou De la vertu des querelles de mots, dans 'Archives internationales d'histoire des sciences', vol. 14, 1961, p. 3-12.
- Ruder Boscovich, Theoria philosophiae naturalis, 1763, p. 137 : « nihil inde posse deduci pro viribus vivis » (« on ne peut donc rien déduire en faveur des forces vives ».
- « Nouvelle estimation des forces vives comme véritable mesure de la force que la nature présente. »
- Histoire de l'Académie royale des sciences et des belles lettres de Berlin, vol. 4, 1750, p. 356. Voir aussi la correspondance avec Leibniz : Montucla, p. 631.
- Voir pp. 123 sq. de cette 3e édition anglaise ; ou pp. 125 sq. de la traduction française sous les hospices de de Mairan : Exposition des découvertes philosophiques de M. le chevalier Newton, Paris, 1749 (lire en ligne).
- Voir Sect. IX. On the momentum of bodies in motion, p. 356.
- Dans Phil. Trans., vol. 66 (1776), p. 450-475.
- Date de la lecture à la Royal Society.
- Charles C. Gillispie et Adolf P. Youschkevitch, Lazare Carnot savant et sa contribution à la théorie de l'infini mathématique, Paris, Vrin, 1979, 324 p. (ISBN 2711602745 et 9782711602742) Extraits en ligne.
- (en) Memoirs of the literary and philosophical society of Manchester, 2e série, vol. 2, p. 105–258.
- Gauthier-Villars, 1824.
- E. A. Davis (dir.), Science In The Making : Scientific Development As Chronicled Historic Papers In The Philosophical Magazine, vol. 1, p. 275.
- Costabel, 1960 précise les dates, notamment en réfutant celle de Gerhardt, 1691, pour le deuxième essai, car le texte évoque la conversion de Malebranche aux forces vives qui a lieu en 1698.
- Belaval, 1969, p. 177.
- Gerhardt (Phi 4, p. iii) dit : « Sans titre, contenant le début d'un traité de Leibniz sur la philosophie de Descartes ». Le traducteur titre : « Examen de la philosophie de Descartes », ce qui est réducteur.
- Selon Gerhardt : Cette « lettre est écrite par Leibniz. Il est également prouvé, avec une probabilité proche de la certitude, qu’elle était adressée à Varignon » et non à Jakob Hermann (source).
Voir aussi
Articles connexes
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