Basilique (christianisme)

Dans l'Église catholique romaine, les basiliques sont des églises remarquables par leur valeur commémorative, consacrées à un aspect du mystère chrétien ou au culte d'un saint particulièrement vénéré. Des privilèges particuliers (indulgences) sont accordés à ceux qui viennent y prier ou y célébrer, afin d'y attirer les fidèles, ou d'y organiser des célébrations importantes (pélerinage, vénération de reliques). Le titre de basilique donne préséance sur les églises d'un diocèse, et parfois d'une région, à l'exception de la cathédrale.

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On distingue les basiliques majeures (quatre églises de Rome) et les basiliques mineures. Les basiliques majeures et certaines basiliques mineures possèdent depuis des temps très lointains le titre de basilique et les privilèges qui y sont attachés. Les autres basiliques doivent leur titre et leurs privilèges à une décision du pape.

Par extension, certaines églises remarquables sont également appelées basiliques (par exemple Sainte-Sophie à Constantinople). Cependant cette dénomination peut prêter à confusion entre le plan architectural classique de la basilique (plan basilical), le titre attribué par la papauté et cette extension.

Le responsable (curé) d'une basilique porte le titre de recteur ou de recteur-archiprêtre si la basilique est également une cathédrale. Certains recteurs ne sont pas placés sous l'autorité d'un évêque. C'est le cas notamment de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre qui dépend directement de la Conférence des évêques de France et du pape, non de l’archevêque de Paris.

Étymologie

Le mot basilique vient du grec βασιλεύς « roi », βασιλικός « royal ». Le Dictionnaire de l'Académie française[1] fait remonter le mot français au XVe siècle et le dit emprunté au latin basilica, qui vient lui-même du grec βασιλικὴ στοά (basilikê stoa), « portique royal, où siège l'archonte-roi ».

Histoire

Les débuts

À partir du IIIe siècle et surtout du IVe siècle, les sanctuaires chrétiens adoptent l'architecture des basiliques civiles romaines (on parle alors d'église à plan basilical), Ces basiliques civiles servaient à la fois de tribunal, de bourse de commerce (boutiques sous les portiques extérieurs, banquiers et changeurs dans les nefs latérales) et, dans les galeries supérieures, de lieu de promenade. Quant à l'abside elle abritait souvent la statue de l'empereur. C'est ainsi que pendant les derniers siècles de l'Empire romain coexistent des basiliques civiles et des basiliques religieuses. Seules ces dernières passeront à la postérité, les autres nous étant parvenues en général à l'état de ruines. Les chrétiens choisissent ces espaces lumineux plutôt que ceux des temples dont la cella est obscure[2]. On doit à l'architecte Leone Battista Alberti[3] la première mention, en 1465, du fait que la basilique religieuse dérive de la basilique civile romaine [4]. Beaucoup d'associations, notamment religieuses, utilisaient pour leurs réunions des basiliques, par exemple la basilique souterraine de la porte Majeure[5].

IIIe siècle

Dès le IIIe siècle, les chrétiens donnent ainsi l'aspect d'une basilique à certains de leurs lieux de réunion : de plan rectangulaire avec parfois un transept, elle présente, généralement à l'extrémité orientale[6], une abside, saillante ou non, qui abrite le sanctuaire, et à l'extrémité occidentale un narthex, quelquefois précédé par un atrium. Certaines églises chrétiennes sont issues de la transformation d'une basilique civile, comme l'ancienne église Sant'Andrea Catabarbara, sur l'Esquilin, à Rome, adaptation de la basilique de Junius Bassus. Ce type architectural religieux de la basilique latine est la règle en Occident jusqu'à l'époque carolingienne, l'autel du culte étant placé dans l'abside. Il existe cependant une diversité du cadre architectural, notamment en fonction des techniques locales : basilique cirquiforme (collatéraux prolongés en déambulatoire autour du chevet) adaptée aux pèlerinages, église-halle. Dans l'Empire byzantin, ce plan basilical est utilisé dès le VIe siècle mais il reste concurrencé par les plans centrés (mausolées[7], martyria, baptistères, mais aussi pour les cathédrales et les églises synaxaires)[8] ou plans cruciformes.

IVe siècle

À Rome, les empereurs romains construisent à partir du IVe siècle des basiliques destinées au culte chrétien hors du pomœrium de la ville. Celles-ci garderont bien souvent le qualificatif « hors-les-Murs », comme par exemple Saint-Paul-hors-les-Murs ou Saint-Laurent-hors-les-Murs. Les basiliques Saint-Pierre et Saint-Jean de Latran ont été construites et financées par Constantin d'où leur dénomination de « basiliques constantiniennes », Saint-Paul-hors-les-Murs par Honorius, alors que Sainte-Marie-Majeure l'a été par le pape Libère (basilique libérienne). Une quinzaine d'édifices portent ce titre à cette époque mais l'honorabilité autour du terme de basilique est alors peu marquée[9].

Basiliques majeures et mineures

Certaines basiliques en Italie, en Espagne, en France, au Portugal, en Pologne et en Terre sainte portent le titre de basilique depuis fort longtemps. Elles conservent ce titre après le Moyen Âge car elles peuvent se prévaloir d'une longue histoire, de vastes dimensions, ou d'une notoriété importante. Ce n'est qu'à partir du XVIe siècle que cette distinction honorifique devient une prérogative papale, les souverains pontifes pouvant ainsi donner le titre de basiliques à d’autres églises parce qu'elles sont liées à un vocable ou à un saint qu'ils souhaitent honorer, à un pèlerinage qu'ils veulent promouvoir[10]. La distinction entre basiliques majeures (basiliques constantiniennes qui sont les plus anciennes et passent pour être fondées par Constantin) et mineures, appellation du pape Pie VII, ne s'impose qu'à la fin du XVIIIe siècle[11].

Désormais, le Vatican attribue ce titre honorifique avec parcimonie afin de ne pas galvauder l'appellation. Ce n'est qu'à la fin d'une longue procédure, initiée par la postulation de l'évêque du diocèse de l'église, que le pape promulgue une bulle attribuant le titre de basilique à cette église. Le manuel de droit canonique se base sur le canon 1180 du Code de droit canonique qui donne comme critères d'attribution de ce titre des « églises remarquables par leur antiquité, leur célébrité, leur grandeur ou leur beauté »[12].

L'intérêt du titre basilical, outre la distinction honorifique, est de faciliter l'obtention de plus nombreuses célébrations, rendues possibles par l'adjonction d'officiants, et l'attribution d'indulgences[13].

Insignes des basiliques

Toutes les basiliques ont comme insignes spécifiques le pavillon  également appelé ombrellino  et le tintinnabule, qui sont placés dans le chœur ou portés devant le clergé lors des processions. Le pavillon est également le timbre héraldique de ces églises.

Si le pape se rend dans une basilique, une réception privilégiée est organisée.

Basiliques majeures

À Rome seulement

À Rome, les basiliques majeures sont au nombre de quatre :

Ces basiliques sont également des basiliques patriarcales (it), terme attribué officiellement et nominativement par les conciles au Ve et VIe siècles pour désigner les basiliques destinées à recevoir les évêques des principales régions de l'Empire romain, les patriarcats. La basilique Saint-Laurent-hors-les-Murs et la basilique Saint-François d'Assise sont par la suite élevées au rang de basilique patriarcale[14].

Caractéristiques

Ornements extérieurs de l'écu des basiliques majeures.
  • Ces basiliques ont à leur tête un cardinal-archiprêtre qui représente le pape, y compris Saint-Paul-hors-les-Murs, confiée à l'abbé des bénédictins jusqu'en 2005[15].
  • Outre le collège de chanoines, elles ont un collège de pénitenciers qui à Saint-Paul-hors-les-Murs est confié aux bénédictins.
  • Elles sont ouvertes toute la journée sans interruption.
  • Elles sont toutes à cinq nefs, ouvrant vers l'extérieur par cinq portails dont la porte Sainte, à gauche en entrant, ornée d'une grande croix de cuivre, qui est ouverte uniquement durant l'Année sainte ou Jubilé. À certaines conditions, il est possible, y compris en dehors des Jubilés, d'obtenir l'indulgence plénière dans ces basiliques.
  • Leur pavillon n'est pas seulement de soie rouge et jaune, comme celui des basiliques mineures, mais de lamé d'or et de velours cramoisi avec des franges d'or.
  • En héraldique, les clefs pontificales sont ajoutées en sautoir sous le pavillon.
  • Leur chapitre a, comme corps, les privilèges des protonotaires apostoliques (surnuméraires) et en porte les insignes.
  • L'autel principal, est appelé « autel papal » et seul le pape, ou un cardinal nommément désigné par lui par indult spécial renouvelé à chaque fois pour le remplacer, peut y célébrer la messe.
  • L'anniversaire de leur dédicace est célébré dans toute l'Église romaine.

Basiliques mineures

Sanctuaires

Ornements extérieurs de l'écu des basiliques mineures.

De nombreuses églises dans le monde, dont onze à Rome, portent le titre, depuis des temps immémoriaux ou attribué par le pape, de basilique mineure. Ce sont, en général, des sanctuaires constituant le but visible d'un pèlerinage important ou très ancien.

Cet honneur dépend uniquement de la volonté du pape qui l'accorde en fonction de certaines considérations :

  • ancienneté de l'église ;
  • demande de l'évêque diocésain ;
  • absence d'opposition des chapitres cathédraux ou collégiaux qui pourraient se trouver lésés dans leurs droits et privilèges.

Une basilique n'est pas forcément une cathédrale (et réciproquement). Ainsi la basilique de Saint-Nicolas-de-Port est une basilique, mais en dépit de ses dimensions considérables, n'est pas cathédrale (c'est-à-dire qu'elle n'est pas le siège de l'évêque diocésain). A contrario, la cathédrale Saint-Pierre de Rennes n'est pas basilique, alors que la basilique Saint-Sauveur de Rennes voisine est de taille plus modeste. Une basilique peut être également cathédrale, comme la basilique de Saint-Denis.

Au , elles sont au nombre de 1 728 dans le monde, dont 567 en Italie, 171 en France, 142 en Pologne, 115 en Espagne[16].

Privilèges des basiliques mineures

Le pavillon et le tintinnabulum de la cathédrale Saint-Tugdual de Tréguier qui est aussi une basilique.

Les privilèges des basiliques mineures résultent des deux décrets de la Congrégation des rites du et du qui précisent qu'elles ont rang de préséance avant toute autre église (à l'exception de la cathédrale de leur diocèse) et le droit d'arborer trois insignes[17].

Ces trois insignes sont :

Exemples de basiliques mineures

L'Afrique, l'Europe et le Moyen-Orient rassemblent nombre des 1 759 basiliques recensées dans le monde[16] au .

Afrique

Amérique

Europe

Moyen-Orient

L'exemple de l'élévation au rang de basilique mineure de l'église de Sées (1902)

« Rome, , Cher et Vénéré Seigneur,

Je suis heureux de vous annoncer que le Saint Père, dans mon audience de ce matin, a daigné accorder à l’Église de l’Immaculée-Conception, située dans la ville de Séez, le titre de Basilique mineure, selon votre demande. La concession pontificale sera expédiée par bref. Il me semble que la date du 1er mai est très belle et très indiquée pour apporter à l’Église de Marie cette nouvelle et précieuse dignité de Basilique. J’écris en toute hâte et très laconiquement ; mais je n’ai pas voulu tarder un instant à vous communiquer une nouvelle qui sera très douce, je le sais, à votre cœur.

Veuillez agréer, cher et vénéré Seigneur, l’assurance bien cordiale de mes respectueux et invariablement dévoués sentiments. »

 D. Cardinal Ferrata[18]

Notes et références

  1. http://atilf.atilf.fr/academie9.htm.
  2. Christine Le Goff, Gary Glassman, documentaire Les cathédrales dévoilées, 2011.
  3. Leone Battista Alberti, De Te aedificatoria, 1465.
  4. René Aigrain, Archéologie chrétienne, Bloud & Gay, , p. 150.
  5. Jérôme Carcopino, La Basilique pythagoricienne de la Porte majeure, 1926, notice, Bibliothèque de l’école des Chartes, année 1927, vol. 88, p. 315-316.
  6. Église orientée : tournée vers l'Est ; église occidentée (la majorité au IVe siècle puis plus rare par la suite) : tournée vers l'Ouest.
  7. Mausolée Santa Costanza, de Galla Placidia.
  8. Noël Duval, « Les installations liturgiques dans les églises paléochrétiennes », Hortus Artium Medievalium, no 5, , p. 7-30 (DOI 10.1484/J.HAM.2.305151).
  9. Jean-Claude Tarrin, Les basiliques aujourd'hui : l'histoire, le titre, l'honneur, Letouzey & Ané, , p. 120.
  10. Jean-Claude Tarrin, Les basiliques aujourd'hui : l'histoire, le titre, l'honneur, Letouzey & Ané, , p. 27.
  11. Jean-Claude Tarrin, Les basiliques aujourd'hui : l'histoire, le titre, l'honneur, Letouzey & Ané, , p. 122.
  12. Jean-Claude Tarrin, Les basiliques aujourd'hui : l'histoire, le titre, l'honneur, Letouzey & Ané, , p. 59.
  13. Jean-Claude Tarrin, Les basiliques aujourd'hui : l'histoire, le titre, l'honneur, Letouzey & Ané, , p. 65.
  14. Jean-Claude Tarrin, Les basiliques aujourd'hui : l'histoire, le titre, l'honneur, Letouzey & Ané, , p. 126.
  15. Motu proprio L'antique et vénérable basilique, Benoît XVI, 31 mai 2005.
  16. (en) Basilicas in the World, sur gcatholic.org.
  17. Jean-Claude Tarrin, Les basiliques aujourd'hui : l'histoire, le titre, l'honneur, Letouzey & Ané, , p. 49.
  18. http://diocesedeseez.cef.fr/Basilique-de-l-Immaculee.html.

Voir aussi

Bibliographie

  • Dictionnaire de droit canonique, sous la direction de R. Naz, article « Basilique », A. Molien ; Paris, 1937.
  • Jean-Claude Tarrin, Les basiliques aujourd'hui: l'histoire, le titre, l'honneur, Letouzey & Ané, 1998 (ISBN 2-7063-0211-9).
  • Louis Bréhier, Les origines de la basilique chrétienne, Bulletin monumental, 1927, tome 86, p. 221-249 [lire en ligne].

Articles connexes

Liens externes

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