Astérix et Cléopâtre

Astérix et Cléopâtre est le sixième album de la série française de bande dessinée Astérix de René Goscinny (scénario) et Albert Uderzo (dessin), prépublié dans Pilote du no 215 () au no 257 (). L’album, publié en 1965, a été tiré en 100 000 exemplaires.

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Astérix et Cléopâtre
6e album de la série Astérix

Scénario René Goscinny
Dessin Albert Uderzo

Personnages principaux Astérix, Obélix,
Numérobis, Panoramix
Lieu de l’action Armorique
Égypte

Éditeur Dargaud
Collection Astérix
Première publication 1965
ISBN 2-01-210138-0

Prépublication
Albums de la série

L’album a été adapté en dessin animé en 1968 sous le même titre puis en film en 2002 sous le nom Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre.

Synopsis

Jules César nargue Cléopâtre : les Romains construisent des palais, des temples et des forums magnifiques alors que les Égyptiens ne construisent plus rien depuis les pyramides. Vexée, Cléopâtre charge son architecte Numérobis de bâtir un palais pour César en trois mois. Pour Numérobis, sa seule chance de venir au bout de cette tâche malgré l'obstruction des Romains est de demander l'aide de son vieil ami Panoramix. Le druide part donc pour l'Égypte lui prêter main-forte, accompagné d'Astérix et Obélix.

Une fois arrivés à Alexandrie, la bande découvre le chantier du palais et apprend que l'architecte Amonbofis, jaloux de ne pas avoir été choisi pour construire le palais, a l'intention de saboter le travail de son confrère, à commencer par mettre les ouvriers en grève. Mais Panoramix intervient en distribuant de la potion magique aux ouvriers ce qui augmente de façon significative l'efficacité des travaux. Puis Amonbofis demande à son assistant Tournevis de bloquer l'approvisionnement de pierres au sud du Nil. Astérix, Obélix et Panoramix partent chercher eux-mêmes une nouvelle cargaison de pierres. En chemin, après qu'Obélix casse le nez du Sphinx, les Gaulois se font piéger dans la Pyramide par Tournevis, mais réussissent à s'en sortir. Plus tard, ils reviennent au chantier avec les pierres.

Plus tard, Amonbofis a une nouvelle idée pour éliminer les Gaulois : offrir un gâteau empoisonné à la reine Cléopâtre de leur part. Ainsi, elle fait arrêter les Gaulois, mais ces derniers réussissent à la convaincre que le gâteau d'Amonbofis n'est pas empoisonné en le mangeant (grâce à un antipoison de Panoramix qu'ils ont tous trois bu). Relâchés et pardonnés, ils capturent Amonbofis et l'emmènent sur le chantier avec Tournevis.

Pendant ce temps, César, jaloux que la cadence du chantier ait accéléré, charge un espion d'aller se renseigner. Ce dernier lui confirme la présence des Gaulois et de la potion magique. César décide d'agir en envoyant ses troupes détruire le palais. Astérix part prévenir Cléopâtre qui arrive rapidement pour arrêter les actions de César. Ce dernier met fin à l'attaque et charge ses légions de réparer les dégâts.

Ainsi, le palais est fini dans les temps, César reconnait qu'il a perdu son pari. Un grand festin est organisé avant le retour des gaulois en Gaule pour le banquet final.

Quelques jours plus tard, Abraracourcix désapprouve les nouvelles influences égyptiennes sur la taille des menhirs d'Obélix (la taille obélisque).

Historique

Création

L'annonce de Pilote, magazine dans lequel l'histoire est pré-publiée dès décembre 1963, disait de la conception de cet album :

« 14 litres d'encre de Chine, 30 pinceaux, 62 crayons à mine grasse, 1 crayon à mine dure, 27 gommes à effacer, 38 kilos de papier, 16 rubans de machine à écrire, 2 machines à écrire, 67 litres de bière ont été nécessaires à la réalisation de cette aventure[1]. »

Pour parodier l'affiche de la superproduction hollywoodienne Cléopâtre, la première de couverture de l'album met elle aussi en avant ces moyens « exceptionnels ».

Adaptations

En 1968, soit 5 ans après la conception de l'album, René Goscinny et Albert Uderzo décident d'adapter leur ouvrage en un film d'animation, continuant ainsi le projet lancé une année plus tôt avec le long-métrage d'animation, Astérix le Gaulois. Pour cela, ils collaborent, tout comme donc ils l'avaient fait en 1967, avec Pierre Tchernia, cinéaste et ami des deux auteurs, et les studios Belvision, spécialisés dans l'adaptation à l'écran de bandes-dessinées franco-belges. Le film sort le 19 décembre.

En 2001, c'est l'humoriste Alain Chabat qui s'attelle à l'adaptation de l'album pour un film avec de véritables acteurs cette fois-ci. Rédigeant un scénario très librement adapté et s'entourant de multiples comédiens connus et reconnus (Jamel Debbouze, Gérard Depardieu, Christian Clavier, Monica Bellucci, Gérard Darmon, Édouard Baer...) Alain Chabat réalise le film qui deviendra « numéro 1 du box-office annuel en France » en 2002, après sa sortie le 30 janvier, mais qui est aussi un succès critique : César des meilleurs costumes pour Philippe Guillotel, Tanino Liberatore et Florence Sadaune en 2003 et nominations dans les catégories : meilleur décor pour Hoang Thanh At et meilleur acteur dans un second rôle à la fois pour Gérard Darmon et Jamel Debbouze, toujours aux Césars 2003, ainsi qu'au European Film Awards 2002, dans la catégorie meilleur acteur cette fois pour Alain Chabat qui y jouait aussi le rôle de César[2].

Les personnages

C'est dans cet album qu'apparaissent les Égyptiens. Ils se caractérisent par leurs noms en -is (telles certaines divinités égyptiennes : Isis, Osiris, Apis, Serapis...) et leurs phylactères en hiéroglyphes (plus ou moins fantaisistes).

Analyse

Références

L'album pullule de références diverses, répertoriées pour certaines dans ce chapitre et classées en fonction de leur thématique[3] :

Film Cléopâtre

Goscinny et Uderzo ont eu l'idée de l'histoire après avoir vu ensemble le film Cléopâtre, de Joseph L. Mankiewicz, une superproduction sortie en 1963 et mettant en vedette Elizabeth Taylor dans le rôle-titre. L'album fait plusieurs clins d'œil au film :

  • la couverture de l'album (illustration et graphisme) parodie l'une des affiches du film[4] et fait un inventaire du matériel utilisé pour la réalisation de l'œuvre, à l'instar de la liste des moyens colossaux nécessaires à la réalisation du film[1] ;
  • plusieurs éléments du décor du film sont reproduits dans l'album : le trône surmonté de la statue du dieu faucon Horus (p. 6), le gigantesque sphinx roulant qui sert aux déplacements « incognito » de la reine (p. 27), le trône à porteurs (p. 43) et la galère royale (p. 46-48) ;
  • la variété des tenues portées par Cléopâtre tout au long de l'album fait allusion aux très nombreux changements de costumes d'Elizabeth Taylor dans le film (pas moins de 65 robes, un record à l'époque), qui expliquent aussi l'exclamation de la reine en furie à un moment dramatique de l'album (p. 44) : « Je suis sortie du palais en courant, sans prendre le temps de me changer, quand j'ai appris ce qui se passait ! ».
Cléopâtre

On relève d'autres types de références dans cet album, essentiellement liées à l'histoire et la culture égyptienne. Une bonne partie d'entre elles se rapportent à Cléopâtre « La collation préférée de Cléopâtre : des perles dissoutes dans le vinaigre » (p. 11) fait allusion à une anecdote rapportée par les auteurs romains (notamment Pline l'Ancien dans le livre IX de son Histoire naturelle). Selon cette anecdote, Cléopâtre, pour impressionner Marc Antoine par le luxe de ses repas, avait fait dissoudre une énorme perle de très grande valeur dans du vinaigre avant de le boire[5].

Lorsque les trois Gaulois sortent de prison et vont s'expliquer auprès de la reine pour dissiper le malentendu, celle-ci croit qu'ils veulent la tuer et déclare « je vais vous montrer, par Osiris, comment meurt une reine ! ». C'est une allusion à sa mort : elle se serait suicidée en se faisant mordre par un cobra (animal associé à l'uræus).

Un running gag dans l'histoire consiste à faire allusion au nez de la souveraine. C'est une allusion à la célèbre citation des Pensées de Blaise Pascal : « le nez de Cléopâtre, s'il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé ». Il semblerait en effet qu'elle avait un nez assez proéminent, si l'on se base sur certaines pièces de monnaies la figurant.

Vie quotidienne en Égypte

Lors du voyage jusqu'en Égypte, Numérobis explique aux Gaulois que son concurrent a beaucoup de talents. Ce n'est pas qu'il est plus talentueux que lui mais qu'il est plus riche que lui, le talent étant une monnaie utilisée dans certains pays de l'Antiquité.

Cet album fait référence à la première grève répertoriée de l'Histoire, celle-ci ayant eu lieu en Égypte en l'an 29 du règne de Ramsès III (soit bien avant Astérix), à Deir el-Médineh. Les ouvriers chargés de la construction et de la décoration des monuments de la Vallée des rois protestaient contre le retard de ravitaillement[6]. Ces mêmes ouvriers prennent des pauses lentilles (parodiant les pauses cafés), mets populaire dans ce pays et encore utilisé de nos jours dans la cuisine égyptienne.

Monuments

La nuit précédant l'arrivée des Gaulois en Égypte par bateau, ceux-ci découvrent le Phare d'Alexandrie, tour illuminée guidant les bateaux de nuit et, comme le souligne Panoramix, une des Sept Merveilles du monde. Dernière d'entre elles à être construite, au IIIe siècle av. J.-C., elle se délabra progressivement pour disparaître au XIVe siècle.

La première d'entre elles à être bâtie fut la Pyramide de Khéops (-2650), la seule à encore exister de nos jours et que les héros découvrent dans l'aventure. Le druide déclare à son propos : « Du haut de ces pyramides, Obélix, vingt siècles nous contemplent ! ». Cela parodie la célèbre tirade de Napoléon Ier au pied de celles-ci : « Soldats, […] songez que du haut de ces monuments quarante siècles vous contemplent. ».

Lors de la visite du Sphinx, on découvre comment son nez fut endommagé : Obélix escalada le monument pour profiter du panorama au sommet, mais brisa ce nez en s'appuyant dessus, pour le faire tomber au pied du Sphinx. Idéfix renifla ce nez (gag visuel) avant qu'il ne soit enfoui sous le sable par Astérix et Obélix, afin qu'il ne soit pas découvert. Quand Astérix estime que personne n'aura l'idée de faire des fouilles là, c'est une allusion aux fouilles archéologiques en Égypte, dont le plateau de Gizeh est l'un des principaux sites.

Face au Temple d'Amon de Louxor, Obélix désire emporter un des deux obélisques érigé devant le monument pour orner la place du village, ce qu'Astérix trouve absurde, l'autre conclut que leurs opinions ne concordent jamais. Ce même obélisque orne la place de la Concorde à Paris depuis 1834, offerte par Méhémet Ali, vice-roi d'Égypte, au roi Charles X de France.

Après la réalisation du palais, Cléopâtre invite chez elle les Gaulois pour les remercier, offrant à Panoramix des papyrus sélectionnés dans la Bibliothèque d'Alexandrie (détruite depuis et actuellement remplacée par une version moderne).

Au moment où Cléopâtre remercie les Gaulois pour leur aide apportée, Astérix lui déclare : « Et si un jour vous avez envie de construire autre chose en Égypte, un canal entre la mer rouge et la Méditerranée par exemple... eh bien, faites appel à quelqu'un de chez nous, par Toutatis ! ». Ce sera chose faite avec la construction du Canal de Suez entre 1859 et 1869 par le français Ferdinand de Lesseps (le même qui débuta la construction du Canal de Panama).

Arts

Lorsque Panoramix pose devant le Sphinx pour un portrait souvenir, l'artiste lui demande de poser de profil avec les épaules de face. Puis, lorsque Cléopâtre découvre son nouveau portrait, elle répond qu'elle en a assez de se voir de profil. Ces deux scènes évoquent la peinture dans l'Égypte antique, où il était coutume de représenter les personnages à la fois de face et de profil, dans des positions peu réalistes. De même, dans Astérix gladiateur, alors que les Gaulois visitent Rome, on voit des Égyptiens traverser une rue dans une position évoquant ces peintures.

La « situation accroupie » du scribe Misenplis (p. 12) fait référence au scribe accroupi, célèbre sculpture égyptienne exposée au Musée du Louvre.

Quand Amonbofis a capturé Numérobis, il l'a momifié vivant et enfermé dans un beau sarcophage. C'est une manière humoristique d'évoquer la momification, célèbre rituel funéraire en Égypte antique pour préserver les cadavres de la décomposition.

Quand Idéfix apporte un message à Cléopâtre, celle-ci est entourée de deux musiciennes. Celle de droite joue du ney, flûte souvent jouée en position oblique, employée dans la musique égyptienne.

Autres références

Certaines références n'ont rien à voir avec l'Égypte, elles sont de l'ordre de l'anecdotique. Par exemple, c'est sous les traits du scénariste Goscinny que le dessinateur Uderzo a représenté le personnage du scribe, Misenplis[réf. nécessaire]. Celui-ci explique qu'il a appris les hiéroglyphes grâce aux cours par correspondance, d'une école qui proclame avec raison que « si vous savez dessiner, vous savez écrire ! ». C'est une inversion du slogan de l'École universelle : « Si vous savez écrire, vous savez dessiner »[7], évoquant le fait que l'écriture hiéroglyphique se fait par dessins.

Lorsque Numérobis retrouve son ami Panoramix au début de l'aventure, il lui déclare : « Je suis mon cher ami, très heureux de te voir ». Et celui-ci s'adresse à des villageois en disant : « C'est un alexandrin. ». C'est un jeu de mot entre l'Alexandrin, habitant d'Alexandrie, et l'alexandrin, vers composé de 12 syllabes (comme la phrase de Numérobis).

Quand Astérix et Obélix se présentent pour délivrer Numérobis chez Amonbofis, celui-ci lit le journal Pharaon-Soir (allusion au journal France-Soir) publiant des strips de bandes dessinées telles que Chéri-Bibis (allusion à Chéri-Bibi, adaptation BD du roman de Gaston Leroux, alors parue dans ce même journal) et Isis de mon cœur (allusion à la BD américaine Juliette de mon cœur).

Afin d'attaquer le chantier, les légionnaires utilisent la tactique dite de la « tortue ». Mais repoussés par les Gaulois, ils battent en retraite, les légionnaires adoptant l'efficace tactique dite du « lièvre », une allusion à la fable de La Fontaine Le Lièvre et la Tortue.

Avant d'aborder le Napadélis, le capitaine des pirates dit qu'ils ne s'attaqueront plus aux navires phéniciens, en référence à leur première rencontre avec les gaulois dans Astérix gladiateur, qui a eu lieu à l'abordage d'un navire phénicien qui transportait Astérix et Obélix. Dans le même passage, la séquence se termine avec une allusion au tableau Le Radeau de La Méduse. Cette référence est aussi présente dans le film de 2002.

Divinités

Dans la série, les personnages évoquent fréquemment des dieux de leur culture. Dans cet épisode, les évocations religieuses sont prétextes à plusieurs gags :

Lorsque Chorus menace les Gaulois, chaque personnage qui intervient ponctue sa prise de parole en évoquant une divinité de sa culture :

Cette séquence se termine quand Amonbofis demande : « Est-ce qu'on ne pourrait pas s'en aller, par hasard ? »

Au moment de l'inauguration du palais, les habitants acclament leur dieu , comme s'ils criaient « Hourra ! ».

Il est aussi à noter que lorsque Cléopâtre apprend l'attaque menée par César, elle s’exclame « par Ammon et par Hélios ! ». Il s'agit de deux dieux grecs (le premier ne doit pas être confondu avec l'égyptien Amon). Or, cela pourrait faire référence au fait que la véritable Cléopâtre n'était pas qu'égyptienne mais en partie de souche grecque. Ce détail est également mentionné dans le film de 2002.

Villes et lieux traversés

Citations latines

  • Alea jacta est !  : Le sort en est jeté
  • Ita diis placuit : Ainsi il a plu aux dieux

Éditions

Adaptations cinématographiques

Notes et références

Voir aussi

Article connexe

Liens externes

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