Pierre-Mathieu Joubert

Pierre-Mathieu Joubert (né le à Angoulême - mort à Paris le ), est curé lorsqu'il est élu député du clergé du bailliage d'Angoulême le . Il est élu Évêque constitutionnel de la Charente le .

Pour les articles homonymes, voir Joubert.

Biographie

Enfance et formation

Pierre-Mathieu Joubert[alpha 1] est né le [3] sur la paroisse de Saint-André dans le centre-ville d'Angoulême.

Son père, Roch Joubert, est docteur en médecine et sa mère est née Louise Groleau. Il est baptisé le , en présence de son parrain Mathieu Joubert, son grand-oncle, qui est « échevin de la maison de la ville », et de sa marraine Françoise Joubert, sa tante[4]. Le jeune Pierre-Mathieu Joubert doit sans doute aller se former au séminaire d'Angoulême[alpha 2].

Prêtre, vicaire et curé

C'est Joseph-Amédée de Broglie, alors évêque d'Angoulême, qui ordonne prêtre Pierre-Mathieu Joubert. Pour sa première nomination il est envoyé comme vicaire à Saint-Yrieix, poste qu'il quitte le pour être le curé de la paroisse de Touvre. C'est un an plus tard, au mois d' qu'il devient curé de la paroisse de Saint-Martin d'Angoulême à la place de François Faunié-Duplessis qui part à Mornac. Il doit ce poste à la résignation envoyée par le titulaire au Saint-Siège à Rome[4].

Pierre-Mathieu Joubert est un abbé reconnu pour son éloquence, qui prêche avec facilité ayant l'esprit et l'assurance que donne la confiance en soi. C'est pour cela qu'il est retenu pour prêcher l'oraison funèbre de l'évêque Joseph-Amédée de Broglie mort le . Cet épisode fut remarqué par les religieux du diocèse car le chapitre, sans doute jaloux de sa faconde, oublia de le remercier[6].

Élection des députés à Angoulême

Cathédrale d'Angoulême en 1851.

Le début de l'année 1789 est marqué par la demande du roi Louis XVI d'organiser des États généraux. Pour s'y conformer, le sénéchal de l'Angoumois prend des mesures dans une ordonnance du . La réunion des délégués, des trois ordres, débute le dans la Cathédrale d'Angoulême[7]. Les trois premières journées sont passées à faire les appels des membres présents, puis les ordres jurèrent « de procéder fidèlement à la rédaction du cahier général et à la nomination de leurs députés », et enfin les lieux de réunions sont fixés par le sénéchal. Pour le clergé le choix est l'évêché, mais des voix s'inquiétant du risque de manque de liberté, c'est finalement dans la cathédrale que les religieux vont se réunir, ils débutent le [8].

Lors de la première journée a lieu la nomination d'un secrétaire et de scrutateurs[9]. Le lendemain un premier vote est effectué pour choisir des commissaires chargés de rédiger le cahier des doléances : Pierre-Mathieu Joubert est le sixième élu avec 88 voix[10]. Après un dimanche sans réunion et des travaux notamment pour amender puis voter les doléances le clergé entreprend le l'élection de ses représentants. Après un premier vote sans majorité, il faut s'y remettre le lendemain , le résultat n'apporte toujours pas d'élus mais les scrutateurs indiquent que l'évêque d'Albignac et le curé Joubert sont les plus proches du nombre de voix nécessaire. Dans la matinée du l'évêque est élu mais le vote de l'après midi ne donne rien, c'est le que les délégués élisent Pierre-Mathieu Joubert pour être l'un des deux députés pour représenter l'ordre du clergé du bailliage d'Angoulême aux États généraux[11],[3].

L'assemblé vote ensuite les défraiements alloués aux députés : 24 livres par jour pour l'évêque et 12 livres pour le curé Joubert pendant la durée des États généraux, plus 480 livres par député pour les frais de transport. Le les délégués des trois ordres se retrouvent dans la cathédrale pour entendre le serment de leurs députés à qui on remet des copies de leurs pouvoirs et des cahiers de doléances[12].

États généraux à Versailles

Pierre-Mathieu Joubert
par J. Coutellier.
Pierre-Mathieu Joubert
par Perradel et Courbe

Le , Pierre-Mathieu Joubert et d'Albignac, son évêque, sont présents à Hôtel des Menus Plaisirs à Versailles pour la séance inaugurale des états généraux[4]. Passé ce préliminaire, les députés se réunissent par ordres. Début juin la chambre ecclésiastique discute du « vote par tête » et d'une réunion avec les députés du tiers état, d'Albignac et Joubert sont rapidement dans des camps opposés[6]. Le trois curés rejoigne la réunion du tiers et des défections se poursuivent les jours suivant. Le , un abbé attaque oralement en tribune la position d'un évêque partisan de la réunion des ordres, s'en est trop pour Joubert : « il me fut impossible, (...), d'entendre jusqu'à la fin le discours de l'abbé Maury, j'étais furieux, je sortis. Quatre de mes confrères me suivirent, et nous nous déterminâmes à nous rendre sur l'heure à la salle nationale... ». Comme les seize précédents arrivés en trois groupes, l'assemblée du tiers les accueils bruyamment. Après s'être présenté Pierre-Mathieu Joubert prend la parole à la tribune « j'eus le premier cet honneur, et je le fis avec tant de force dans cette salle immense, que je suis bien convaincu que personne n'a perdu un mot de ce que j'ai dit... »[13] :

« Messieurs, pénétrés de la grandeur de notre caractère, connaissant toute l'étendue des obligations qu'il nous impose, nous n'avions pas besoin d'être entraînés par l'exemple de ceux de nos confrères qui nous ont précédés dans la noble carrière du patriotisme; intimement persuadés que la force de la raison, la solidité des principes, et surtout l'intérêt de la nation exigeaient que la vérification des pouvoirs fût faite en commun, soyez persuadés, Messieurs, que l'espèce de délai que nous avons apporté à notre démarche a été le sacrifice le plus douloureux à notre cœur et n'a été motivé que par l'espérance de réunir à notre opinion tous ceux que nous avons vus avec la plus amère douleur faire les plus grands efforts pour consacrer d'iniques usages qui perpétueront les abus que nous sommes venus détruire. Pressés par les mouvements de notre conscience, altérés du bonheur public, effrayés des funestes conséquences que produiraient infailliblement les irrésolutions perpétuelles de la chambre du clergé, honorés ainsi que vous, Messieurs, du titre glorieux de députés de la nation française à ses États-Généraux, nous vous apportons nos titres, nous soumettons nos pouvoirs à votre vérification en vous priant de nous donner également connaissance des vôtres, et d'être intimement convaincus que notre seule ambition, le désir le plus cher à notre cœur, est de coopérer efficacement avec vous au grand œuvre de la félicité de la nation[14]. »

 Pierre-Mathieu Joubert

Le , il fait partie des nouveaux membres du comité des recherches, avec : Poulain de Corbion, de Pardieu, Ledéan, Voidel, Cochon de l'Apparent, Payen-Boisneuf, Verchère de Reffye, Rousselet, de Macaye, De Sillery, Babey[15].

Évêque constitutionnel

Le , Joubert fit décréter l'approvisionnement du duché de Bouillon ; le 19, il présenta un rapport sur les troubles de Tarascon. Il prêta le serment civique le 27 décembre, fit admettre () le serment des ecclésiastiques non remplacés, et demanda (21 août) l'arrestation de Fauchet, évêque du Calvados.

Pierre-Mathieu Joubert est élu évêque constitutionnel d'Angoulême (Charente) le [16]. Il est sacré le , par J-B Gobel évêque et métropolitain de la Seine[16], à Notre-Dame de Paris, il fit son entrée à Angoulême le 3 avril, présida, le 9, la Société des amis de la Constitution, où il fit un pompeux éloge de Mirabeau qui venait de mourir, et prit le lendemain possession de la cathédrale, à la porte de laquelle il fut harangué par le maire, Perrier de Gurat (ou « Périer de Gurat »).

Après avoir prêté le serment exigé par la loi du , il dit la messe, et lut un mandement qui n'était que l'apologie de la constitution civile du clergé, et qui débutait ainsi :

« P. M. Joubert, par la miséricorde divine et le choix du peuple dans la communion du Saint-Siège apostolique, évêque du département de la Charente, etc. »

Sécularisé et marié

Le il adresse une lettre de démission au Directoire du département de la Charente. Il devient conseil de l'évêque d'Orléans en tant que vicaire épiscopale. Il se marie le [16].

Mariage avec Marie Geneviève Evrard. On lui connait deux enfants :

En l'an an IV et l'an V, Pierre-Mathieu Joubert est mentionné comme membre de l'Administration centrale du département de la Seine avant d'en devenir président[16]. Puis il devient administrateur de l'octroi de Paris durant une courte période qui s'achève le 11 ventôse an VIII () avec sa nomination comme premier préfet du Nord[16]. Il reste un an à ce poste puis le 7 ventôse an IX () il l'échange contre un poste de conseiller au conseil de préfecture[18] de la Seine. Il exerce cette fonction jusqu'à son décès[16].

Pierre-Mathieu Joubert meurt le à Paris[3].

Discours publiés

  • Discours prononcé par le citoyen Joubert, préfet du Nord, le 30 fructidor an VIII, à la distribution des prix aux élèves de l'Ecole centrale, à Lille, an VIII, vol. Cote 26744 Bibliothèque municipale de Lille, Lille, .
  • Discours prononcé par le citoyen Joubert président de l'administration centrale du département de la Seine : dans la séance du 2 pluviose, an VI de la République, Charenton, imprimerie J.-C. Laveaux, , 6 p. (lire en ligne).

Hommage

  • À Angoulême une rue porte son nom : « rue de l'abbé Pierre-Mathieu Joubert ».

Notes et références

Notes

  1. Des auteurs indiquent également pour le même personnage le nom de « Pierre-Marie Joubert » sans donner d'explications à propos de cette différence, notamment : Eugène d'Eichthal en 1917 dans un article sur Claire Bazard : « Elle était fille de Pierre-Marie Joubert, qui fut membre de l'Assemblée constituante. Ancien curé de Sainte-Marie d'Angoulême (...) »[1] et Sophie Delvallez en 2004 également à propos de Claire Bazard « Son père Pierre Marie Joubert, est, en 1789, nommé député aux états généraux, avant d'être élu évêque constitutionnel d'Angoulême (..) »[2].
  2. Si le passage par un séminaire est le parcours naturel pour devenir prêtre, une seule source indique cela dans un article sur le curé révolutionnaire Jacques Roux : « (...) son ami du séminaire Pierre-Mathieu Joubert, qui sera bientôt institué premier évêque constitutionnel d'Angoulême (...) »[5].

Références

  1. d'Eichthal 1917, p. 490.
  2. Delvallez 2004, p. 128.
  3. Robert et Gougny 1891, p. 429.
  4. Blanchet 1898, p. 25.
  5. Markov 1963, p. 469.
  6. Blanchet 1898, p. 26.
  7. Blanchet 1898, p. 10.
  8. Blanchet 1898, p. 15.
  9. Blanchet 1898, p. 19.
  10. Blanchet 1898, p. 20.
  11. Blanchet 1898, p. 21-22.
  12. Blanchet 1898, p. 22.
  13. Blanchet 1898, p. 28-29.
  14. Blanchet 1898, p. 27-28.
  15. de Bonnay 1883, p. 295.
  16. « Annexe V : Adresse des citoyens composant la société des amis de la constitution, séante a Angoulème aux habitants des campagnes », dans Bulletin et mémoires de la Société archéologique et historique de la Charente (Note 3 attribuée à l'Abbé Blanchet et son ouvrage Le clergé charentais pendant la Révolution), Angoulême, Société archéologique et historique de la Charente, (lire en ligne), p. XCVIII.
  17. Société positiviste, La Revue occidentale philosophique, sociale et politique: organe du positivisme..., Paris, Aux bureau de la Revue, (lire en ligne)
  18. Lamarque 1988, p. 118.

Voir aussi

Bibliographie

  • Charles-François de Bonnay, « Liste des nouveaux membres du comité des recherches et du comité des rapports, lors de la séance du 26 avril 1790 », dans Jérôme Mavidal (dir.), Émile Laurent (dir.), Archives Parlementaires de 1787 à 1860, t. XV : Du 21 avril au 30 mai 1790, Paris, Librairie Administrative P. Dupont, (lire en ligne), p. 295.
  • Adolphe Robert et Gaston Cougny, « Joubert (Pierre-Mathieu) », dans Dictionnaire des parlementaires français (1789-1889), Paris, Edgar Bourloton, (lire en ligne), p. 429.
  • Abbé J.-P.-G. Blanchet, Le clergé charentais pendant la Révolution, Imprimerie M. Despujols, , 621 p. (lire en ligne).
  • Eugène d'Eichthal, « Souvenir d'une ex-saint-simonnienne », dans René Stourm (dir.), Séances et travaux de l'Académie des sciences morales et politiques : compte rendu, Paris, Maurice Gauja, (lire en ligne), p. 487-495.
  • Walter Markov, « Jacques Roux avant la Révolution », Annales historiques de la Révolution française, no 174, , p. 453-470 (présentation en ligne).
  • Pierre Lamarque, « Naissance de l'«Assemblée Nationale» », Dix-Huitième Siècle, no 20, , p. 111-118 (lire en ligne, consulté le ).
  • Sophie Delvallez, « Claire Bazard, figure emblématique du saint-simonisme ? », dans Pierre Musso (dir.), L'actualité du saint-simonisme : Colloque de Cerisy, Presses Universitaires de France, coll. « La Politique éclatée », (ISBN 9782130637011, présentation en ligne, lire en ligne), p. 126.
  • Michel Bellet, « Dossier n°1 : une découverte relative à Bazard », La lettre des études saint-simoniennes, no 24, , p. 2-5 (lire en ligne, consulté le ).

Webographie

Articles connexes

Liens externes

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