Art moderne
L'appellation d'art moderne désigne une période de l'histoire de l'art qui est initiée par Édouard Manet et les peintres impressionnistes dans les années 1870 et s'achève au milieu des années 1950, notamment avec la naissance du pop art[1].
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Précédant l'art contemporain qui commença en temps d'après-guerre, l'art moderne naquit lorsque des mouvements tels que le réalisme, le symbolisme et l'art nouveau devinrent populaires.
L'art moderne se caractérise par une rupture avec les canons de la figuration de l'art classique[2].
La notion d'« art moderne »
La notion de modernité (à ne pas confondre avec l'avant-garde) envahit l'art et les institutions au XXe siècle, mais elle émerge vers 1850 pour désigner les grands changements survenus au XIXe siècle provenant des révolutions techniques et industrielles. La « modernité » est un mode de pensée, de vie et de création qui se veut résolument nouveau, fondé sur le changement et en réaction (comme c'est toujours le cas lors d'évolutions majeures) aux temps qui l'ont précédé.
Dans Le Peintre de la vie moderne, Baudelaire trouve la beauté dans la rue et il la voit changeante, mobile ; chez l'artiste moderne, il salue l'aptitude à dégager du transitoire du quotidien l'éternel de la beauté. Chez Walt Whitman, on s'attache à observer l'impressionnant quotidien en perpétuel mouvement. La beauté n'est plus désormais l'apanage de l'Antique. La culture de masse et le divertissement populaire écrasent et signent la fin de l'exaltation de la morale officielle. On trouve de nouveaux sujets à traiter empreints d'une modernité toute nouvelle, notamment ceux issus de la Révolution industrielle. Ainsi La Gare Saint-Lazare de Monet, où l'on ne trouve guère de regard nostalgique ; c'est là la modernité véritable.
D'un point de vue institutionnel, l'émergence de la modernité ébranle l'Académie dans son pouvoir d'autoriser ou non l'entrée d'une œuvre au Salon. Les jurys des salons commencent à perdre leur crédibilité absolue pour les peintres, l'État et le public.
En 1863, lors du Salon des Refusés, Napoléon III décide de « laisser le public seul juge », et c'est un déchaînement de rires et de sarcasmes qui s'abat sur Le Déjeuner sur l'herbe de Manet ; cela met très nettement en évidence quelle influence le jury exerce sur l'opinion du public. En 1884, l'Académie ne dirige plus les Beaux-arts et perd ainsi en légitimité aux yeux des artistes ; cette perte d'autorité favorise l'émergence de la création dite « bohème », ainsi qu'un renouveau du marché de l'art dans lequel les galeries deviennent des acteurs de tout premier plan.
Les peintres « hors-académie » refuseront finalement d'être exposés à côté des peintres académiques. C'est la raison de la création en 1885 du Salon des indépendants, en 1890 du Salon de la Société nationale des Beaux-arts ainsi que du Salon d'automne en 1903.
Naissance de l'« art moderne »
Les premiers pas vers l'art moderne sont accomplis par les peintres impressionnistes, très influencés par Édouard Manet dans les années 1870. En plus de rejeter les normes dictées par l'Académie (ce qu'avaient déjà entrepris les peintres réalistes et paysagistes), ils commencent à peindre d'une manière véritablement nouvelle. L'utilisation de couleurs non-mélangées et la peinture par touches juxtaposées en sont des exemples. Ce rejet de la peinture classique ouvrira la voie à des peintres tels que Cézanne, Gauguin et Van Gogh, puis au cubisme, mouvement qui canalisera tout l'art du XXe siècle[3].
Notons également qu'en 1881, Octave Maus, Edmond Picard et Eugène Robert fondent à Bruxelles la revue L’Art Moderne (1881-1914) dont la volonté est véritablement de valoriser un art dit « moderne »[4].
L'art moderne se caractérise aussi par la naissance de la critique d'art. En effet, au même moment, l'art devient sujet d'écriture : la critique est souvent un discours engagé sur l'œuvre. Baudelaire et Zola, écrivent des critiques engagées en faveur des peintres modernes[5]. Goethe et Matisse écrivent sur la couleur. De nombreux artistes publient des textes ou des manifestes (dadaïsme, futurisme, surréalisme, etc.[6]).
L'apparition de la photographie exerce une influence sur de nombreux artistes du XIXe siècle, puis du XXe siècle, depuis Degas jusqu'à Picasso, Matisse, Miró, et bien d'autres qui deviendront les figures éminentes de l'art moderne. De ce fait, les artistes se réclamant de l'art moderne s'exprimeront à travers une multiplicité de médiums : dessin, peinture et sculpture, mais aussi photographie, cinéma, céramique, architecture, arts décoratifs ou arts de la scène. Ainsi, Picasso s'intéressait à tout ce qui relève des arts visuels ; Dalí fit du cinéma avec Luis Buñuel ; Le Corbusier était également peintre ; etc.[réf. nécessaire]
Chronologie des mouvements et artistes de l'art moderne
Avant 1914
- Impressionnisme : Claude Monet, Auguste Renoir, Alfred Sisley,Vincent Van Gogh
- Postimpressionnisme : Paul Gauguin, Georges Seurat, Henri de Toulouse-Lautrec
- Symbolisme : Pierre Puvis de Chavannes, Gustave Moreau, Fernand Khnopff, Max Klinger
- Art nouveau : Gustav Klimt, Alfons Mucha, Victor Horta
- Fauvisme : André Derain, Henri Matisse, Maurice de Vlaminck
- Cubisme : Georges Braque, Juan Gris, Fernand Léger, Pablo Picasso
- Futurisme : Giacomo Balla, Umberto Boccioni, Carlo Carrà
- Expressionnisme : Ernst Ludwig Kirchner, James Ensor, Oskar Kokoschka, Edvard Munch, August Macke
- Abstraction : Vassily Kandinsky, Kasimir Malevitch
- De Stijl (début en 1917) : Piet Mondrian, Theo van Doesburg
L'entre-deux-guerres
- Bauhaus : Vassily Kandinsky, Paul Klee
- Constructivisme : Naum Gabo, László Moholy-Nagy
- Dada : Jean Arp, Serge Charchoune, Marcel Duchamp, Max Ernst, Francis Picabia, Kurt Schwitters
- Expressionnisme : Georges Gimel
- Surréalisme : Salvador Dalí, Max Ernst, René Magritte, André Masson, Joan Miró
- Nouvelle Objectivité (« Neue Sachlichkeit ») : Max Beckmann, Otto Dix, George Grosz
- Figuratifs : Bernard Buffet, Jean Carzou, Yves Brayer, Maurice Boitel, Serge Fiorio, Pierre-Henry, Daniel du Janerand, Antoine Martinez, Alice Martinez-Richter Jean Monneret, Gaston Sébire, Louis Vuillermoz
- Non figuration : Jean Bazaine, Maurice Estève, Jean Le Moal, Alfred Manessier
- Art brut : Jean Dubuffet, Gaston Chaissac
L'après-guerre
- Art figuratif : Jeune peinture de l'École de Paris, Bernard Buffet, Jean Carzou, Yves Brayer, Maurice Boitel, Pierre-Henry, Daniel du Janerand, Jean-Pierre Alaux, Jean Monneret, Gaston Sébire, Louis Vuillermoz, André Hambourg, Paul Collomb, Émile Frandsen
- Nouvelle figuration (figuration européenne) : Francis Bacon, Alberto Giacometti, René Iché, Marino Marini, Henry Moore, Louis Soutter
- École de Londres : Lucian Freud, Francis Bacon, Frank Auerbach, Kossof, Andrews
- L'expressionnisme abstrait ou l'Action Painting : Mark Rothko, Willem de Kooning, Jackson Pollock
- Expressionnisme abstrait américain : Willem de Kooning, Jackson Pollock
- Spatialisme: Lucio Fontana, Roberto Crippa, Gianni Dova
- Arte Povera : Michelangelo Pistoletto, Piero Manzoni, Giuseppe Penone, Yannis Kounellis
- Non figuration - Abstraction (dite « lyrique ») : Georges Mathieu, Pierre Wemaëre, François Baron-Renouard, Jean Bazaine, Roger Bissière, Jean-Michel Coulon, Nicolas de Staël, Jean Dubuffet, Joseph Lacasse, Maurice Estève, Jean Le Moal, Alfred Manessier
- Matiérisme : Jean Dubuffet, Jean Fautrier
- Happening : Allan Kaprow, Nam June Paik, Wolf Vostell, Joseph Beuys, Charlotte Moorman
L'art moderne est suivi de l'art contemporain après la Seconde Guerre mondiale :
- Fluxus : George Maciunas, Joseph Beuys, Wolf Vostell, Nam June Paik, Yoko Ono, Charlotte Moorman, Dick Higgins
- Art video : Nam June Paik, Wolf Vostell, Bill Viola
- Pop Art : Andy Warhol, Tom Wesselmann, Jasper Johns
- Nouveau Réalisme : Yves Klein, Martial Raysse, Arman, Daniel Spoerri
- Trans-avant-garde: Mimmo Paladino, Nicola De Maria, Francesco Clemente
Notes et références
- Joseph-Émile Muller & Frank Elgar, La peinture moderne, Paris, Fernand Hazan, 1979, p. 7-9
- Joseph-Émile Muller & Frank Elgar, La peinture moderne, Paris, Fernand Hazan, 1979, p. 7
- Karl Ruhrberg, L'art au XXe siècle, Cologne, Taschen, 2012
- L'Art moderne, Vol. 1, en ligne sur Internet Archive.
- Leo H. Hoek, Titres, toiles et critique d'art, Rodopi, 2001
- Voir Mouvements en peinture
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