Agrume

Agrumes est un terme collectif désignant d’une part les arbres qui portent des fruits tels que les oranges, les mandarines, les citrons, les pomelos, les kumquats, c’est-à-dire essentiellement les arbres appartenant au genre Citrus, et d’autre part les fruits de ces mêmes arbres.

Photo de tranches d'agrumes en section transversale

Les agrumes sont les fruits (des baies de type hespéride) et par extension les plantes des genres Citrus (incluant Eremocitrus et Microcitrus), Fortunella, et Poncirus de la famille des Rutaceae, sous famille des Aurantioideae, tribu des Citreae, sous-tribu Citrinae. Les agrumes se caractérisent et distinguent de la plupart des autres fruits par leur structure en quartiers, issus des carpelles[1].

Agrume est un mot relativement récent en français. Agrume renvoie aux fruitiers et aux fruits domestiqués les plus cultivés dans le monde[2] dont la particularité est la forte diversité : bergamote, cédrat, citron, combava et citron caviar, kumquat, lime[3], chinotto, limette, mandarine, orange douce[4] et bigarade, pamplemousse, pomelo, papeda (yuzu, hassaku, kabosu, sudachi, main de bouddha, kalamansi) et autres variétés hybrides (clémentine, tangerine, tangelo[5], tangor, clemenvilla, limequat, citron Meyer (en) ...).

Dénomination

Le terme « citrus » quitte les textes latins après son utilisation par Carl von Linné, mais reste circonscrit au vocabulaire des botanistes, des jardins ou de la pharmacie. En 1811, Giorgio Gallesio, pomologiste italien qui écrit en français, dans son Traité des citrus, constate l'absence de traduction française du latin citrus (le latin n'a pas bonne presse après la révolution). Il propose de reproduire l'italien et de nommer les citrus « agrumes » (italien agrume[6], du latin acrumen (substance à saveur aigre) qui donne aigruns, egrum[7], agrum «fruits aigres»), proposition qui ne sera pas retenue[8].

Le mot citrus est utilisé dans la littérature jusqu'après 1920 ; en 1917, André Guillaumin publie Les Citrus Cultivés et Sauvages, Pierre Guitet-Vauquelin La culture des citrus, ouvrages qui n'utilisent jamais le mot « agrume ». Dix ans plus tard, Désiré Bois, en 1928, écrit du genre citrus qu'on « le désigne couramment dans le commerce sous le nom global d'agrumes » et il emploie ce mot dans tout son livre.

Agrume entre dans le dictionnaire de l'Académie Française en septembre 1939[9]. En 1942, l'État français crée l'Institut des fruits et agrumes coloniaux. Par la suite, les livres sur la culture des citrus seront tous intitulés culture des agrumes. Alain Rey écrit « ce mot est devenu usuel à la suite de la commercialisation accrue d'orange et de citrons dans les régions qui n'en produisent pas »[10]. De nos jours le mot agrume se substitue souvent à citrus, par exemple l'IPGRI[11] emploie agrume au lieu de citrus et l'INRA emploie les deux[12].

Structure des fruits

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La peau des agrumes est constituée à l'extérieur d'un épicarpe dur et contenant des glandes à huiles essentielles donnant le zeste et, à l'intérieur, d'une couche blanchâtre et spongieuse correspondant au mésocarpe.

Le cœur est constitué de quartiers, issus chacun de la transformation d'un carpelle, entourés d'une fine peau correspondant à l'endocarpe. La partie charnue à l'intérieur de chaque quartier, généralement comestible, a une structure de poils succulents qui remplissent les loges carpellaires.

Quatre espèces ancestrales à l’origine des grands groupes d’agrumes modernes

Quatre de ces dix espèces vraies, C. reticulata, C. maxima, C. medica et C. micrantha, correspondent à quatre groupes d’agrumes modernes, qui sont respectivement : les mandariniers, les pamplemoussiers, les cédratiers et un papeda (en) connu sous le nom de Biasong dans les Iles du Sud des Philippines dont il est originaire. Ces quatre espèces ancestrales ont ensuite généré par hybridations interspécifiques naturelles la plupart des variétés cultivées dont les orangers, les pomelos, les citronniers et les limettiers[13].

Historique

Phylogénie des agrumes.
Carte sur l'origine des agrumes.

Les agrumes sont originaires du Sud-Est asiatique (Chine, Nord-Est de l'Inde, Malaisie, Océanie). À partir de cette zone, la dispersion se serait effectuée vers l'Est de l'Inde, l'archipel malais, la Chine du Sud.

On invoque souvent la mythologie grecque pour appeler les agrumes hespérides, du nom de l’un des travaux d’Hercule : cueillir les pommes d'or du jardin des Hespérides, gardées par le titan Atlas. Cette interprétation de la Renaissance est un anachronisme car aucun pépin ni pollen fossile d’agrume n'a jamais été trouvé dans les sites de Antiquité précoce. Par ailleurs, en grec antique χρυσόμηλον (pomme d'or) désigne le coing (source : Bailly) et non un agrume. C’est probablement par le « périple de la mer Érythrée » (route commerciale reliant l’Égypte antique à l’Inde) que les agrumes, déjà cultivés en Asie méridionale, sont arrivés en Méditerranée. Le cédratier (Citrus medica), fut la première espèce connue en Europe (300 ans av. J.-C. d’après Webber, 1967, rapporté de Mésopotamie par les armées d’Alexandre le Grand). Le citronnier (C. limon) était connu des Romains au Ier siècle de notre ère. Le bigaradier (C. aurantium), et l’oranger (C. sinensis) ont été introduits dans le bassin méditerranéen entre le Xe et le XIIe siècle. En Occident, les Arabes les cultivent en Espagne vers le Xe siècle. Le mandarinier (C. reticulata) a suivi au XIXe siècle[14].

Les agrumes ont de tous temps été appréciés pour leurs qualités décoratives, leurs parfums, leurs vertus médicinales, leurs goûts. Ils sont devenus les fruits les plus cultivés du monde en deux étapes : la maîtrise des techniques du sucre et de la distillation par les Arabes andalous au Moyen Âge (agrumes confits, eau de fleur d’oranger), ce qui permet la diffusion en Occident ; puis la systématisation de l’usage de la vitamine C aux États-Unis pendant les années 1920, qui les diffuse dans le nouveau monde et en premier lieu en Floride (jus d’orange du matin).

La diffusion vers le continent américain est postérieure au second voyage de Christophe Colomb. Le Citrus ×paradisi (pomélo), originaire de la zone antillaise est sans doute issu d'une hybridation spontanée entre les agrumes introduits dans la région[réf. nécessaire].

Des travaux de phylogénie par séquençage complet du génome de variétés et formes sauvages remettent en cause en 2018 les systèmes taxonomiques élaborés pour les agrumes dans les années 60, expliquant encore la coexistence de trois classifications botaniques différentes pour les agrumes[15]. Elles montrent deux grandes étapes de diversification évolutive : la première en Asie à la fin du Miocène, entre 6 et 8 millions d’années (peut-être liée à un affaiblissement dramatique des moussons en Asie à cette période), conduit à la séparation en huit embranchements dont quatre espèces ancestrales (Citrus reticulata, Citrus maxima, Citrus medica et Citrus micrantha (en)) à l’origine de la variété des agrumes cultivés actuels, générés par hybridations interspécifiques naturelles (orangers, pomelos, citronniers, limettiers) ; la seconde en Australie au début du Pliocène, il y a environ 4 millions d’années, est à l’origine de trois espèces de lime australienne[16].

Biologie

Fille portant des citrons
(peinture de William Bouguereau - XIXe siècle)

La peau du fruit est une écorce (péricarpe) composée de deux couches concentriques. La couche superficielle, rugueuse et résistante, de couleur vive souvent jaune orangé sous l’action des flavonoïdes, est nommée épicarpe ou flavedo ou encore zeste en cuisine. La couche interne, blanche et spongieuse, est le mésocarpe ou albédo (parfois appelé ziste).

La pulpe est composée de quartiers juteux contenant les pépins. Elle est riche en vitamine C.

Ce sont des fruits non-climactériques qui doivent être récoltés à maturité. Ils sont résistants au transport et à la conservation.

Si les fruits sont assez aisés à différencier sur le plan culinaire, la distinction des espèces botaniques est en revanche complexe, car les différentes espèces s'hybrident très facilement et sont difficiles à fixer. Le genre Citrus ne contiendrait finalement pas plus de onze espèces.

La biologie et la génétique de ces fruits est notamment étudiée au Centre de San-Giuliano en Haute-Corse où l’Inra et le Cirad ont installé en 1957 une des cinq plus importantes collections d'agrumes du monde, avec plus de 5 000 plantes, arbres ou arbustes et 1100 variétés d'agrumes sur 13 hectares[17].

Culture et transport d'agrumes

Les agrumes représentent la première production fruitière mondiale (80 millions de tonnes en 1995-96). La superficie totale plantée en agrumes est évaluée à plus de 3 millions d'hectares[18] répartie sur une aire très large située approximativement entre les 40° de latitudes Nord et Sud tout autour du monde. Les agrumes sont sensibles à l'alternance biennale qui est le sujet de nombreuses recherches et publications.

Pays producteurs

Les principaux pays producteurs sont le Brésil (15 millions de tonnes), les États-Unis (9 Mt) et la Chine (4 Mt). En Europe, les agrumes sont cultivés dans les pays méditerranéens, l'Italie possède une tradition historique et un savoir-faire particulier (Bergamote de Calabre, Limoncello de Sorrente, agrumes décoratifs des jardins florentins, etc.).

Répartition de la production par espèces :

  • oranges 71 %
  • citrons et limes 13 %
  • mandarines, clémentines, tangerines 10 %
  • pomelos et pamplemousses 6 %

Exigences phytosanitaires

Pour protéger les différentes zones d'agrumiculture, des mesures ont été prises pour limiter le risque d'introduction de maladies graves comme le Huanglongbing (maladie du dragon jaune) ou le chancre citrique, ou de créer un nouveau foyer d'infection de phytovirus tel que le virus de la tristeza des agrumes.[réf. nécessaire]

La circulation d'agrumes sur le territoire européen doit se faire avec un passeport phytosanitaire et l'importation de plants en provenance d'un autre continent est totalement interdite.[réf. nécessaire] Même aux États-Unis, il existe des restrictions sur la circulation d'agrumes entre certains États.[réf. nécessaire]

Transports

Les agrumes sont souvent transportés sur de longues distances par voie maritime en navires ou conteneurs reefers. Une technique intéressante pour maintenir et accentuer le goût de l'agrume consiste à mélanger des pommes et des agrumes en fixant durant le trajet avec une grande rigueur une température qui est choisie entre 5 et 6 °C. Ainsi les citrons et oranges de Floride qui sont conditionnés avec des pommes à 5,1 °C, ceux d'Uruguay à 6,1 °C développent leurs goûts spécifiques.

D'une manière générale, les températures soigneusement ajustées et contrôlées durant le transport d'une seule espèce permettent d'éviter le développement des germes parasites spécifiques. L'art du transport a fait mieux connaître les qualités de conservation des agrumes.

Pays importateurs

La Belgique, pays non producteur, est le premier pays importateur d'agrumes. Anvers, premier port fruitier mondial en 2007/2008, manutentionne 3,2 millions de tonnes d'agrumes. Il est suivi en Europe par Rotterdam (1,8 Mt), Skerness ou Hambourg (de l'ordre de 1 Mt), Zeebrugge (0,8 Mt), Marseille (0,6 Mt), Dunkerque (0,3 Mt), Port-Vendres près de Perpignan (0,2 Mt), Dieppe (0,1 Mt), Le Havre (0,1 Mt).

Utilisation

Ils sont comestibles et souvent utilisés dans la fabrication des parfums, où ils forment la famille des hespéridés, utilisés notamment dans les eaux de Cologne.

Les agrumes sont riches en flavonoïdes d'où sont extraites les fractions flavonoïques purifiées micronisées censées retarder les complications de l'insuffisance veineuse en augmentant le tonus veineux (résistance des vaisseaux sanguins) et le drainage lymphatique. Elles sont proposées pour réduire les phénomènes inflammatoires, préserver la microcirculation et favoriser la cicatrisation des ulcères de jambes.

Notes et références

  1. Éditions Larousse, « Archive Larousse : Grande Encyclopédie Larousse - agrumes - Aguesseau (Henri François d’) », sur www.larousse.fr (consulté le )
  2. Fruit (alimentation humaine)
  3. Citron vert.
  4. Dont les Navel et Naveline, la Valencia Late, la Maltaise et la Sanguine.
  5. Appelé également Ugli ou Mineola.
  6. (it) Vocabolario, grammatica, et orthographia de la lingua volgare d'Alberto Acharisio da Cento, con ispositioni di molti luoghi di Dante, del Petrarca, et del Boccaccio, (lire en ligne)
  7. Antoine Oudin et Farnese, Recherches italiennes et françoises, ou Dictionnaire, contenant outre les mots ordinaires, vne quantité de prouerbes & de phrases, pour l'intelligence de l'vne & l'autre langue ... Par Antoine Oudin, ..: 2 :Seconde partie des recherches italiennes et françoises, contenant les mots françois expliquez par l'Italien, chez Antoine de Sommaville, au Palais, en la Salle des Merciers, à l'Escu de France, (lire en ligne)
  8. Ange de Saint-Priest, Encyclopédie du dix-neuvième siècle: répertoire universel des sciences, des lettres et des arts avec la biographie de tous les hommes célèbres, Impr. Beaulé, Lacour, Renoud et Maulde, (lire en ligne)
  9. Revue des études historiques, (lire en ligne)
  10. Alain Rey, Dictionnaire Historique de la langue française, NATHAN, (ISBN 9782321000136, lire en ligne)
  11. International Plant Genetic Resources Institute Staff, Agrumes (Citrus Spp.), Bioversity International, (ISBN 9789290434337, lire en ligne)
  12. http://www.corse.inra.fr/Outils-et-Ressources/Conservatoire-Agrumes
  13. « L’évolution des agrumes revisitée », sur INRA, (consulté le )
  14. Devenir pâtissier, Éditions Sotal. ISBN 2 - 9512852 - 2 - 1.
  15. « L’évolution des agrumes revisitée », sur inra.fr, .
  16. (en) Guohong Albert Wu, Javier Terol, Victoria Ibanez, Antonio López-García, Estela Pérez-Román, Carles Borredá, Concha Domingo, Francisco R. Tadeo, Jose Carbonell-Caballero, Roberto Alonso, Franck Curk, Dongliang Du, Patrick Ollitrault, Mikeal L. Roose, Joaquin Dopazo J, Frederick G. Gmitter Jr.Daniel S. Rokhsar and Manuel Talon, « Genomics and phylogenetic analyses of Citrus origins and evolution », Nature, vol. 554, , p. 311–316 (DOI 10.1038/nature25447).
  17. Nicole Tonelli, François Gallouin, Des fruits et des graines comestibles du monde entier, Lavoisier, , p. 48.
  18. Rouse. 1988

Voir aussi

Bibliographie

  • Benedicte Baches , Michel Baches, Agrumes - Comment les choisir et les cultiver facilement, (ISBN 2841384446).
  • Anne-Sophie Pic, Agrumes, La Maison, (ISBN 2370850124).
  • Camille Jacquemond, Franck Curk, Marion Heuzet, Les clémentiniers et autres petits agrumes, (ISBN 9782759220670).
  • (it) Francesco Calabrese, La favolosa storia degli agrumi : The facsinating history of the Citrus fruit, L'Epos, , 211 p. (ISBN 9788883022593).
  • Jean-Paul Collaert, « Voyage autour de la planète Agrume », Hommes et plantes, no 91, octobre-novembre-décembre 2014.
  • Fabrice et Valérie Le Bellec, Le verger tropical : Cultiver les arbres fruitiers, Orphie, , 266 p. (ISBN 978-2-87763-384-0)

Articles connexes

Liens externes

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