Sébastopol
Sébastopol (en russe et ukrainien : Севастополь, Sevastopol’ ; en tatar de Crimée : Aqyar) est une ville située dans le sud-ouest de la péninsule de Crimée. Elle fut fondée le [1] par l'impératrice russe Catherine II, sur un site de la baie de Kalamita particulièrement favorable à l'implantation d'un port, puisque formé de huit calanques en eau profonde, dont celle de Balaklava. La population de la municipalité de Sébastopol s'élève à 416 263 habitants en 2016.
Pour les articles homonymes, voir Sebastopol (homonymie).
Sébastopol (ru)(uk) Севастополь (crh) Aqyar | |
Héraldique |
Drapeau |
De haut en bas et de gauche à droite : cathédrale Saint-Vladimir de Chersonèse, monument aux navires coulés, cloche de Chersonèse, Institut de biologie, basilique de Chersonèse, calanque de Balaklava. | |
Administration | |
---|---|
Pays | Russie Ukraine |
Subdivision | Sébastopol |
Maire | Mikhail Razvozhaev |
Démographie | |
Population | 416 263 hab. (2016) |
Densité | 482 hab./km2 |
Géographie | |
Coordonnées | 44° 37′ nord, 33° 31′ est |
Altitude | Min. 0 m Max. 100 m |
Superficie | 86 400 ha = 864 km2 |
Fuseau horaire | UTC+03:00 |
Divers | |
Fondation | 1783 |
Localisation | |
Sources | |
La ville est située à 1 275 km au sud-sud-ouest de Moscou, à 690 km au sud-sud-est de Kiev, à soixante-et-un kilomètres au sud-ouest de Simferopol et à onze kilomètres au nord-ouest de la petite ville touristique de Balaklava. Beaucoup de touristes venant des pays de la Communauté des États indépendants s'y rendent en été. La ville comporte de nombreux bâtiments du XIXe siècle, ainsi que de nombreux monuments datant de l'ère communiste. Sébastopol est l'une des villes héros de l'Union soviétique avec Moscou, Kiev, Odessa, etc.
Le siège de cette ville en 1854 fut la principale opération de la guerre de Crimée.
Elle abrite la base navale de la flotte de la mer Noire. Cette base fut dotée d'une partie réservée aux sous-marins nucléaires d'attaque creusée sous la montagne de Balaklava, aujourd'hui abandonnée.
Depuis le , à la suite de la crise de Crimée, Sébastopol a le statut de ville d'importance fédérale de Russie. Ce statut est contesté par l'Ukraine, à qui la ville était rattachée de 1954 à 2014, et par un grand nombre de pays.
Statut politique et subdivision
Administrativement depuis son annexion de fait par la Russie, la ville de Sébastopol constitue la 3e ville d'importance fédérale de Russie (après Moscou et Saint-Pétersbourg).
La municipalité de Sébastopol comprend deux villes (Sébastopol et Inkerman), une commune urbaine (Katcha) et un certain nombre de villages. Son territoire est administrativement subdivisé en quatre raïons.
Deux raïons sont entièrement urbains : raïon de Gagarine pour la partie ouest de Sébastopol et raïon de Lénine pour le centre-ville. Le raïon de Nakhimov comprend la partie nord de Sébastopol plus le territoire situé au nord du fleuve Belbek, y compris la commune urbaine de Katcha. Enfin le raïon de Balaklava, qui est le plus étendu, comprend la partie sud-est de Sébastopol, la ville d'Inkerman et un vaste espace rural.
Histoire
La ville est fondée en 1783, après la première annexion de la Crimée par la Russie, et devient une importante base navale et un port de commerce florissant. Ce choix s'explique par sa topographie, selon Jean-François Gamba, qui en fait la description à l'occasion de son second voyage dans la partie méridionale de l'Empire russe dans les années 1820[2] :
« La baie de Sébastopol est l'une des plus belles et des plus sûres du monde ; elle se compose de plusieurs bras et bassins où l'eau est également profonde. »
L'impératrice russe Catherine II donne par décret le nom de Sébastopol (cité auguste, vénérable ou majestueuse en grec) à la ville d'Akhtiar. Durant la guerre de Crimée, Sébastopol est assiégée par les Français, les Britanniques et les Turcs et tombe après onze mois.
Pendant la guerre civile russe, Sébastopol est prise à tour de rôle par les Allemands, les bolchéviques et les armées blanches des généraux Dénikine et Wrangel. Fin 1918, début 1919, la ville est brièvement occupée par les Français venus y soutenir les Armées blanches. En , la flotte de l'Armée blanche évacue la Crimée avec à son bord les militaires et civils fuyant l'avancée de l'Armée rouge. La ville fut livrée à la terreur rouge, orchestrée par Béla Kun.
En 1921, la ville est rattachée à la république socialiste soviétique autonome de Crimée, qui devient l'oblast de Crimée, au sein de la RSFS de Russie, en 1945. À partir de 1948, la ville ne dépend plus de l'oblast de Crimée mais directement de la RSFS de Russie[3].
Durant la Seconde Guerre mondiale, les troupes allemandes assistées par la flotte roumaine avancèrent dans les environs de Sébastopol, ville puissamment fortifiée, et dans la baie de Kalamita, lançant une attaque de faible envergure le . Celle-ci ayant échoué, les forces de l'Axe de la 11. Armee commencèrent le siège de Sébastopol soumettant la ville à de violents bombardements d'artillerie. Une deuxième offensive terrestre, bien plus puissante, commença le , mais finit par s'essouffler. Les Allemands et la flotte roumaine se replièrent à la fin de l'année. Le , débuta une nouvelle attaque de très grande ampleur avec la plus forte concentration allemande d'artillerie très lourde de toute la guerre, avec également d'intenses bombardements par la Luftwaffe. Après plus de 250 jours de siège, la ville fut prise au cours des deux premiers jours de juillet.
Pratiquement rasée, occupée par les Allemands de l'été 1942 jusqu'au printemps 1944, la ville dut pendant cette époque subir le massacre de sa population juive au stade de la Tchaïka. La ville fut libérée par des combats meurtriers en et Sébastopol reçut le titre de « ville héros » en 1945. La médaille de l'étoile d'or du titre se retrouve sur le blason de la ville. Un monument a été inauguré en plein centre-ville, lors de la célébration du 60e anniversaire de la victoire des forces alliées sur l'Allemagne nazie, en mémoire de la résistance héroïque de la ville ainsi que des onze autres villes de l'Union soviétique qui possèdent le statut de « ville-héros ».
En 1954, sur l'initiative de Nikita Khrouchtchev, en l'honneur du tricentenaire de l'union de la Russie et de l'Ukraine, l'oblast de Crimée fut transférée à la république socialiste soviétique d'Ukraine. À la suite de ce transfert, l'oblast de Crimée fut subordonnée de jure au pouvoir de Kiev, mais Sébastopol, ville militaire, resta de facto sous administration de la RSFSR jusqu’à la dislocation de l'Union soviétique en 1991.
En 1957, la ville de Balaklava fut rattachée à Sébastopol.
En 1992, une République autonome de Crimée est instaurée au sein de l'Ukraine indépendante, mais Sébastopol n'en fait pas partie et devient une ville à statut spécial de l'État ukrainien, dont la base militaire est concédée par bail à la Russie, qui reste le principal employeur des Sébastopolitains, dont beaucoup réclament le retour de la ville et de la péninsule dans le giron de Moscou.
En 2010 l'Ukraine prolonge jusqu'en 2042 le bail de la Russie sur le port de Sébastopol. Moscou conserve donc cette base militaire stratégique, où sa flotte de la mer Noire stationne depuis le XVIIIe siècle.
À la suite de la révolte ukrainienne de 2014, le Parlement de Crimée proclame le , l'indépendance de la péninsule vis-à-vis de l'Ukraine, y compris Sébastopol[4] et prévoit l'organisation d'un référendum le [5] non reconnu par la communauté internationale. La population de Crimée s'étant prononcée pour un rattachement à la Russie, le président russe Vladimir Poutine signe le un décret reconnaissant formellement l'indépendance de la république de Crimée vis-à-vis de l'Ukraine.
Le , lendemain de cette reconnaissance par Moscou, la république de Crimée et la Russie signent un traité confirmant le rattachement officiel de l'État criméen à cette dernière[6],[7]. La république de Crimée avec la ville de Sébastopol deviennent en vertu de cet accord deux sujets de la fédération de Russie, ayant respectivement les statuts de république autonome et de ville d'importance fédérale[8]. Du point de vue international, la Crimée et Sébastopol sont ukrainiens de jure et russes de facto.
Description de la ville
Architecture religieuse
- cathédrale de l'Intercession (orthodoxe) ;
- cathédrale Saint-Vladimir de Sébastopol (orthodoxe) ;
- cathédrale Saint-Vladimir de Chersonèse (orthodoxe) ;
- église Saint-Nicolas (orthodoxe) : un des symboles de la ville avec sa forme pyramidale ;
- église de Tous-les-Saints (orthodoxe) ;
- église Saint-Mitrophane (orthodoxe) ;
- église Saints-Pierre-et-Paul (orthodoxe) ;
- église du Christ-Sauveur (luthérienne).
Population
Évolution démographique
En 2011, la population de la municipalité de Sébastopol s'élevait à 380 821 habitants, dont 340 297 pour la ville de Sébastopol.
Recensements (*) ou estimations de la population[9] :
Indice de fécondité et nombre de naissances
Année | Fécondité | Naissances | Natalité | Année | Fécondité | Naissances | Natalité | Année | Fécondité | Naissances | Natalité |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
1990 | 1,97 | 5 093 | 12,5 % | 2000 | 1,00 | 2 696 | 7,0 % | 2010 | 1,45 | 4 184 | 11,0 % |
1991 | 1,80 | 4 567 | 11,2 % | 2001 | 1,02 | 2 777 | 7,3 % | 2011 | 1,47 | 4 252 | 11,2 % |
1992 | 1,59 | 3 976 | 9,6% | 2002 | 1,07 | 3 058 | 8,1 % | 2012 | 1,62 | 4 584 | 12,0 % |
1993 | 1,29 | 3 395 | 8,2 % | 2003 | 1,15 | 3 279 | 8,7 % | 2013 | 4 463 | 11,6 % | |
1994 | 1,16 | 3 138 | 7,6 % | 2004 | 1,24 | 3 681 | 9,7 % | ||||
1995 | 1,10 | 2 975 | 7,3 % | 2005 | 1,29 | 3 641 | 9,6 % | ||||
1996 | 1,02 | 2 776 | 6,9 % | 2006 | 1,30 | 3 840 | 10,1 % | ||||
1997 | 1,02 | 2 764 | 6,9 % | 2007 | 1,36 | 3 994 | 10,5 % | ||||
1998 | 0,94 | 2 513 | 6,4 % | 2008 | 1,41 | 4 170 | 11,0 % | ||||
1999 | 0,95 | 2 551 | 6,6 % | 2009 | 1,45 | 4 257 | 11,2 % |
Structure par âge
- 0-14 ans : 14.3 % (homme 27.856/femme 26,532)
- 15-64 ans : 70.3 % (homme 126,918/femme 141,304)
- 65 ans et plus : 15.4 % (homme 19,038/femme 39,826) (2013 officiel)
Âge médian
- total : 40.2 ans
- homme : 36.0 ans
- femme : 44.6 ans (2013 officiel)
Composition ethnique
Selon le recensement de 2001, la répartition ethnique de la population était la suivante : 71,6 % de Russes, 22,4 % d'Ukrainiens, 1,6 % de Biélorusses, 0,7 % de Tatars, 0,5 % de Tatars de Crimée, 0,3 % d'Arméniens, 0,3 % de Juifs, 0,2 % de Moldaves/Roumains et 0,2 % d'Azerbaïdjanais. Quelle que soit leur origine, ils sont presque exclusivement russophones.
Base navale russe
La première implantation d’un base navale date de 1783, année de rattachement de la Crimée à l’Empire russe. Par la suite la base se développa et durant la période soviétique fut l’une des principales bases de la marine soviétique.
Lors de la dislocation de l’URSS et de l’indépendance de l’Ukraine, le statut de la base fit l’objet d’intenses discussions. Selon le traité de 1997, la base navale de la Marine russe située à Sébastopol, était louée grâce à un bail signé entre la Russie et l'Ukraine. Ce traité suivait une longue dispute politique et diplomatique entre la Russie et la nouvelle nation indépendante d'Ukraine. Au tout début, Moscou refusait de reconnaître la souveraineté ukrainienne sur Sébastopol ainsi que sur toute la région environnante de Crimée, prétextant que la ville n'avait pratiquement jamais intégré la République socialiste soviétique ukrainienne du fait qu'elle avait un statut spécial de base militaire. C'est par la suite, grâce aux clauses bilatérales du traité d'amitié russo-ukrainien que l'appartenance de Sébastopol à l'Ukraine fut confirmée. Cependant les autorités qui se succédèrent au pouvoir à Kiev menaçaient régulièrement d'annuler le bail ou de ne plus le reconduire. Finalement la révolution de Maïdan (2013-2014) débouche sur la crise de Crimée en et au rattachement de la Crimée et de la ville-territoire de Sébastopol à la fédération de Russie par référendum (96 % des voix se prononcent en faveur de ce rattachement).
Le commandement de la base navale et les organisations russes en fait ont toujours été prédominants à Sébastopol, et le commerce et la vie culturelle ont toujours été orientés vers la Russie. En effet, le transfert de Sébastopol à l'Ukraine n'avait jamais vraiment été accepté par la société locale et la société russe (ainsi que certains hommes d'État). Le tissu social a toujours bénéficié d'appuis et de subsides de la part de la Russie, ainsi que de la collaboration économique de différentes villes russes, comme Moscou. L'éducation (écoles, universités) et les activités culturelles de Sébastopol (particulièrement celles en faveur des employés de la Marine russe et de leurs familles) sont depuis l'origine liées à la Russie. Les autorités ukrainiennes ne contrôlaient en fait que les impôts et la police.
L'ancienne Flotte soviétique de la mer Noire ainsi que toutes les installations étaient divisées (de 1995 à 2014) entre la Flotte russe de la mer Noire et la Marine ukrainienne. Les navires ukrainiens ont quitté Sébastopol en et un grand nombre de ses marins se sont engagés du côté russe. Désormais le port est entièrement sous drapeau russe, comme le reste de la Crimée. Après l'intermède d'Alexeï Tchaly, pendant le transfert de souveraineté, le gouverneur de la ville d'importance fédérale depuis le était le vice-amiral (ER) Sergueï Méniaïlo, à qui a succédé Dmitri Ovsiannikov le (par intérim).
Festivités
Chaque année le dernier dimanche de juillet, à l'occasion du jour de la marine russe, les touristes affluent dans la cité portuaire de Sébastopol. Avec sa base navale, la ville symbolise les liens qui unissent la Russie à la Crimée depuis le XVIIIe siècle.
Voir aussi
Articles connexes
- Le PFC Sébastopol, ancien club de football de la ville ayant évolué en 1re division ukrainienne
- Trolleybus de Sébastopol
- Boulevard de Sébastopol
Bibliographie
- (en) Karl D. Qualls, From ruins to reconstruction: urban identity in Soviet Sevastopol after World War II, Cornell University Press, Ithaca, N.Y. ; Londres, 2009, 214 p. (ISBN 978-0-8014-4762-4).
- Léon Tolstoï, Récits de Sébastopol, Climats, Castelnau-le-Lez, 1996, 217 p. (ISBN 2-84158-042-3) (fiction).
Filmographie
- (fr) Sur les quais de Sébastopol, film documentaire d'Andrei Schwartz, Allemagne, 2008, 85 min.
Liens externes
- « Sébastopol, citadelle russe en Ukraine », Le Monde, [lire en ligne].
- Alexandre Khramtchikhine, « Quel avenir pour la flotte russe en Crimée? », RIA Novosti, [lire en ligne].
- Thierry Portes, « Sébastopol, sanctuaire russe en Ukraine », Le Figaro, [lire en ligne].
- (ru) Sebastopol Ville Héros.
- Kevin Limonier, La flotte russe de mer Noire à Sébastopol : une « forteresse impériale » au sud ?, Hérodote, revue de géographie et de géopolitique no 138, 2010.
- Cartes topographiques Carte routière.
- Photos de Sébastopol.
Notes et références
- Izvestia, « Pourquoi Sébastopol s'appelle Sébastopol », sur fr.sputniknews.com, (consulté le )
- Jean-François Gamba, « Voyage dans la Russie méridionale et particulièrement dans les provinces situées au-delà du Caucase, fait depuis 1820 jusqu'en 1824, par le chevalier Gamba », C.-J. Trouvé (Paris), 1826, p. 30.
- « La Crimée est-elle vraiment ukrainienne ? », article de lereporter.ma du 8 mars 2014.
- « La Crimée déclare son indépendance de l'Ukraine », Le Point du 11 mars 2014.
- « Crimée : un pas supplémentaire vers la partition de l'Ukraine », Le Monde, 6 mars 2014 à 20h00 (consulté le ).
- RIA Novosti.
- « Le Kremlin annonce le rattachement de la Crimée », Yahoo!
- RIA Novosti.
- (en) World Gazetteer [lire en ligne] — (uk) Comité d'État de statistiques d'Ukraine : Статистичний збірник « Чисельність наявного населення України на 1 січня 2008 року » [Manuel statistique « Nombre d'habitants de l'Ukraine au 1er janvier 2008 »] [lire en ligne] ; « Статистичний збірник "Чисельність наявного населення України на 1 січня 2010 року » [Manuel statistique « Nombre d'habitants de l'Ukraine au 1er janvier 2010 »] [lire en ligne] — Статистичний збірник « Чисельність наявного населення України на 1 січня 2011 року » [Manuel statistique « Nombre d'habitants de l'Ukraine au 1er janvier 2011 »] [lire en ligne].
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