Laurus nobilis
Laurus nobilis, le Laurier vrai, Laurier-sauce ou simplement Laurier, est une espèce d'arbustes à feuillage persistant de la famille des Lauracées. Il est originaire du bassin méditerranéen. Il est parfois appelé Laurier d'Apollon ou Laurier noble .
Pour les articles homonymes, voir Laurier.
Ne pas confondre avec le Laurier-rose, très toxique.
Terminologie
Le substantif masculin[1],[2],[3] « laurier » (prononcé : [loʁje] ou [lɔʁje][2]) est dérivé, avec le suffixe -ier[2], de l'ancien français lor[2],[3], du latin laurus[1],[2],[3].
Le laurier est aussi appelé laurier commun, laurier franc, laurier noble, laurier d'Apollon ou laurier-sauce[1].
Description
Le laurier est un arbuste dioïque à feuilles persistantes mesurant de 2 à 6 m et jusqu'à 15 à 20 de haut, à tige droite et grise dans sa partie basse, verte dans le haut.
Les feuilles de forme lancéolée, alternes, coriaces, à bord ondulé, sont vert foncé sur leur face supérieure et plus claires à la face inférieure. Elles dégagent une odeur aromatique quand on les froisse.
Les fleurs, blanchâtres, groupées par 4 à 5 en petites ombelles, apparaissent en mars-avril. C'est une plante dioïque : les fleurs mâles et femelles sont sur des pieds séparés.
Le fruit est une drupe ovoïde, noir violacé et nue contenant une seule graine. Elle mesure de 10 à 15 mm et est mature en milieu d'automne.
- Inflorescences
- Fleurs femelles
- Fleurs mâles
Composition
Les feuilles du Laurier-sauce contiennent une huile essentielle représentant 1 à 3 % du poids sec. Cette huile renferme 30 à 70 % de cinéol, ainsi que plusieurs composés terpéniques : linalol, géraniol, eugénol, pinène, terpinène, phellandrène. En plus de cette huile essentielle, les feuilles du Laurier-sauce contiennent également des alcaloïdes aporphiniques, comme la cryptodorine ou l'actinodaphnine qui sont responsables d'une activité cytotoxique (in vitro), des lactones sesquiterpéniques, ainsi que 18 flavonoïdes dont certains dérivés du kaempférol.
Les fleurs du Laurier-sauce renferment également une huile essentielle contenant les composés suivants : β-caryophyllène, viridiflorène, β-élémène, germacradiénol, germacrène D.
Le fruit contient 30 % d'huile grasse et environ 1 % d'huile essentielle (terpènes, sesquiterpènes, alcools et cétones). Lorsque les fruits sont pressés et bouillis, le résultat est un mélange appelé huile de laurier. Elle est colorée en vert par la chlorophylle et ressemble à une pommade fondant à 36 °C.
De même, les racines contiennent une huile essentielle constituée de divers monoterpènes et sesquiterpènes, oxygénés ou non.
Écologie et distribution
Laurus nobilis est une relique des forêts qui couvraient à l'origine la plus grande part du bassin méditerranéen, qui connaissait un climat plus humide. Avec l'assèchement de la mer Méditerranée durant le Pliocène, les forêts de lauriers sauce ont peu à peu été remplacées par des plantes plus adaptées à des milieux secs. La plupart des dernières forêts de lauriers sauces ont visiblement disparu il y a environ 10 000 ans. Quelques-unes subsistent dans les montagnes du sud de la Turquie, au nord de la Syrie, le sud de l'Espagne, le centre-nord du Portugal, le nord du Maroc, dans les îles Canaries et à Madère[réf. nécessaire].
La FAO propose[4] que l'espèce serait native sur une partie du pourtours méditerranéen : sur les côtes de Turquie, de Grèce, des Balkans, au sud de la péninsule ibérique et au nord du Maghreb. La répartition actuelle de l'espèce est plus large incluant l'Italie (jusque dans les Alpes) et la côte méditerranéenne française. Elle s'est également implanté sur la façade atlantique, de la Bretagne à l'Algarve. Le GBIF montre une distribution[5] au nord jusque sur le pourtour de la Mer d'Irlande.
Culture
Le laurier sauce n'est que partiellement rustique. Il ne survit en région froide qu'avec une protection hivernale.
Il peut être multiplié par graines et par boutures de racines ou de rameaux (semi-aoutés). La croissance du semis est assez lente. La graine nécessite une stratification à froid et humide pendant 30 jours.
Le laurier est une plante peu exigeante sur le sol mais elle préfère les sols frais.
Le laurier supporte très bien la taille. Il est sensible aux parasites qui le peuplent habituellement. Les plus courants sont:
- Les punaises sont leur principal ennemi (90% des lauriers les portent). Au-dessus de la mélasse sécrétée par ceux-ci, un champignon noir s’installe, ce qui nuit peu à la plante mais la rend très mauvaise à consommer.
- Le psylle du laurier (Trioza alacris), une peste qui produit des symptômes frappants. Les feuilles semblent froissées à la suite des morsures de ce petit insecte suceur. Il est difficile de voir la cause du mal car il ne reste pas statique sur la feuille.
Utilisation
Alimentaire
Ses feuilles sont utilisées en cuisine pour leur arôme. En condiment, elles sont habituellement sèches et entrent dans la composition du bouquet garni, pour infusion ou cuisson dans la sauce. En Saintonge, la feuille est employée fraîche pour les courts-bouillons, matelotes ou ragoûts. Les Bédouins l'utilisent pour parfumer le café.
Les fleurs de Laurier-sauce séchées peuvent aussi être employées en infusion avec une cuillère de miel, et les baies séchées ont les mêmes propriétés culinaires que les feuilles ; elles sont préparées avec une râpe, de la même manière que la noix de muscade. Il est préférable d'en user avec modération, car la présence de lactones et d'alcaloïdes peut procurer un goût amer.
En Inde, plusieurs espèces différentes, au parfum plus ou moins proche du Laurier nobilis, sont utilisées en cuisine, sous le nom de laurier, souvent sans distinction entre elles. Il s'agit le plus souvent de Cinnamomum tamala. Le L. nobilis n'est jamais utilisé en cuisine traditionnelle, mais parfois dans des plats occidentaux ou adaptés.
Ornementale
Cet arbuste est aussi très cultivé pour l'ornementation, notamment pour l'art topiaire : la Belgique est connue pour ses pépinières spécialisées dans la culture de laurier noble. Hors des régions de climat méditerranéen, il peut être sensible au gel, et est souvent cultivé en bacs ; cependant certaines variétés, undulata notamment, se révèlent rustiques, et sont marcescentes ou repartent à partir de leur souche après une période de gel importante.
La branche de laurier-sauce était appréciée aussi comme ornement par les Romains qui confectionnaient des couronnes pour les vainqueurs : les « lauréats ».
Médicinale
La feuille de laurier-sauce s'emploie également pour traiter les crampes abdominales en infusion.
Le savon d'Alep est traditionnellement fabriqué avec de l'huile de baies ou de feuilles de laurier.
Comme répulsif
Au Maroc, en Algérie et en Tunisie, on frictionne les chevaux avec des feuilles fraîches afin d'en éloigner les mouches. On utilise également la feuille broyée en poudre pour lutter contre les fortes migraines : la poudre est alors prisée. Les feuilles du laurier-sauce contiennent du benzaldéhyde, de la pipéridine et du geraniol à une concentration de 50 ppm ; ces molécules sont toutes trois connues pour leurs qualités de répulsion des insectes[6].
Histoire et mythologie
Le laurier est le symbole d'Apollon. Selon Ovide, Daphné nymphe de la mythologie grecque, qui fut le premier amour d'Apollon, le fuyait et allait, après une longue poursuite, être attrapée, quand, au dernier moment, son père, le dieu fleuve Pénée, la métamorphosa en laurier. Dès lors, Apollon en fit son arbre et le consacra aux triomphes, aux chants et aux poèmes.
La pythie de Delphes mâchait des feuilles de laurier préalablement à ses divinations.
Chez les Grecs et les Romains anciens, l'usage était établi de couronner de laurier les poètes et les vainqueurs. Selon Pline l'Ancien, la foudre ne frappe jamais l'arbuste du laurier, il rapporte que l'empereur Tibère se couronnait de laurier pour se protéger sous le tonnerre[7].
Au Moyen Âge, on couronnait de laurier les savants distingués dans les universités. Dans les écoles de médecine, la couronne dont on entourait la tête des jeunes docteurs était faite de rameaux feuillés de laurier avec des baies, d'où le nom « baccalauréat » (bacca laurea : baie de laurier) donné encore de nos jours en France au diplôme qui sanctionne la fin des études secondaires. En Italie, la fin d'études s'appelle encore « Laurea », et les jeunes italiens participent à la cérémonie couronnés de lauriers.
Autrefois on pensait que le tubercule de l'arum tacheté enveloppé dans une feuille de laurier d'Apollon favorisait les entreprises juridiques[8]. L'Arum maculatum était considéré dans les temps reculés comme une plante magique associée à la magie blanche.
Le laurier est encore un symbole de paix.
- L'empereur Valentinien Ier sur une pièce antique
- Statue de la Victoire
- Femme au laurier par Wenceslas Hollar (XVIIe siècle)
- Blason de Boxford
- Drapeau du Paraguay
Langage des fleurs
Dans le langage des fleurs, le laurier symbolise la gloire[9].
Psychologie
Plus tard, le mythe a été repris par Freud, qui a associé l'image du laurier à celle de la mère, interprétant ce mythe comme une version plus ancienne du complexe d'Œdipe.
Symbolique
Cet organisme végétal possède une caractéristique commune avec le sapin, l'épicéa, ou le houx : il demeure vert en hiver. Cette caractéristique a été prise en compte pour faire de cette plante un symbole d'immortalité ; la Lune, selon les Chinois, contiendrait un laurier et un immortel.
En Grèce, cet arbuste dédié à Apollon représentait l'immortalité acquise par la victoire, ainsi que les conditions mêmes de la victoire : la sagesse unie à l'héroïsme. D'où l'origine de la couronne de laurier qui ceignait la tête des héros, des génies et des sages. Toujours en rapport avec Apollon, la Pythie et les devins mâchaient ou brûlaient du laurier pour Apollon, afin d'attirer ses facultés divinatoires, et ceux qui recevaient de la Pythie une divination favorable retournaient chez eux avec une couronne de laurier.
Calendrier républicain
- Dans le calendrier républicain, le Laurier était le nom attribué au 13e jour du mois de pluviôse[10].
Les autres lauriers
Il serait dangereux de confondre le laurier rose avec le Laurier. Quand on parle de laurier à fleurs, il s'agit en fait de laurier rose. Celui-ci n'est pas utilisé en cuisine, car il est toxique. Beaucoup d'autres plantes sont également appelées lauriers, mais n'appartiennent ni au genre Laurus, ni même, pour la plupart, à la famille des Lauracées. On peut citer :
- le laurier rose (Nerium oleander), de la famille des Apocynacées, extrêmement toxique
- le laurier-tin (Viburnum tinus), de la famille des Caprifoliacées
- le laurier du Portugal (Prunus lusitanica) qui est une rosacée
- le laurier-cerise (Prunus laurocerasus) également une rosacée.
Parmi tous les lauriers, le laurier rose est une des plantes les plus dangereuses et toutes ses parties sont toxiques. L'ingestion d'une simple feuille peut s'avérer mortelle pour un adulte, en raison des troubles cardiaques provoqués. Cet arbre vivace possède d'élégantes fleurs parfumées qui peuvent être blanches, rouge-rose, jaune, orangées ou rouge-orangé.
Références taxinomiques et base de données
- (fr) Référence Belles fleurs de France : Laurus nobilis
- (en) Référence Catalogue of Life : Laurus nobilis L. (consulté le )
- (fr+en) Référence ITIS : Laurus nobilis L.
- (en) Référence NCBI : Laurus nobilis (taxons inclus)
- (en) Référence GRIN : espèce Laurus nobilis L.
- (en) Référence BioLib : {{{3}}}
- (fr) Référence Tela Botanica (France métro) : Laurus nobilis L.
- (fr) Référence Tela Botanica (Antilles) : Laurus nobilis L.
- (fr) Référence INPN : Laurus nobilis L., 1753
Liens externes
Notes et références
- « Laurier », dans le Dictionnaire de l'Académie française, sur Centre national de ressources textuelles et lexicales [consulté le 3 novembre 2016].
- Définitions lexicographiques et étymologiques de « laurier » dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales [consulté le 3 novembre 2016].
- Entrée « laurier », sur Dictionnaires de français en ligne, Larousse [consulté le 3 novembre 2016].
- (en) Nadine Wazen et Bruno Fady, Geographic distribution of 24 major tree species in the Mediterranean and their genetic ressources, FAO, , 56 p. (ISBN 978-92-5-109469-3, lire en ligne), p. 36
- (en) « Laurus nobilis L. », sur www.gbif.org (consulté le )
- Compounds from leaves of bay (Laurus nobilis L.) as repellents for Tribolium castaneum (Herbst) when added to wheat flour - Nora Saim, Clifton E. Meloan - Department of Chemistry, Kansas State University, Manhattan, KS 66506, U.S.A.
- Pline l'Ancien, Histoire naturelle, livre II, chapitre 51, et livre XV, chapitre 40.
- guide de visite, les plantes magiques, du jardin des neuf carrés de l'abbaye de Royaumont
- Anne Dumas, Les plantes et leurs symboles, Éditions du Chêne, coll. « Les carnets du jardin », , 128 p. (ISBN 2-84277-174-5, notice BnF no FRBNF37189295).
- Ph. Fr. Na. Fabre d'Églantine, Rapport fait à la Convention nationale dans la séance du 3 du second mois de la seconde année de la République Française, p. 23.
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