Harry Baur

Henri Marie Rodolphe Baur, dit Harry Baur[2], né le dans le 11e arrondissement de Paris[3], ville où il est mort le en son domicile dans le 9e arrondissement[4], est un comédien français, considéré comme l'un des plus grands de la première moitié du XXe siècle.

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Harry Baur
Harry Baur en 1940[1].
Nom de naissance Henri Marie Rodolphe Baur
Naissance
Paris
Nationalité  Français
Décès (à 62 ans)
Paris
Profession acteur
Films notables Poil de carotte
Les Misérables
Le Golem
Un grand amour de Beethoven
Volpone

Biographie

Il naît à Paris au 171 boulevard Voltaire, fils de Meinrad Baur, un horloger alsacien originaire de Heimsbrunn, et de Marie Imblon[5], d'origine lorraine, native de Bitche. Harry Baur part très jeune pour Marseille où il intègre la section de rugby à XV de l'Olympique de Marseille[6], club dont il se sentira toujours proche et dont il restera une figure emblématique, et entame des études d'hydrographie, puis se dirige vers le théâtre. Refusé au Conservatoire d'art dramatique de Paris, il suit des cours privés. Sa carrière théâtrale démarre avant la Première Guerre mondiale.

Il commence une carrière au cinéma dès la fin des années 1900, dans des films de Victorin-Hippolyte Jasset, Michel Carré, Albert Capellani, Georges Denola, Gérard Bourgeois, Jacques de Baroncelli, Maurice Tourneur ou Abel Gance, alors à ses débuts.

De tous les grands acteurs dramatiques du cinéma français d'avant la Seconde Guerre mondiale, Harry Baur est peut-être celui dont on se souvient le moins[réf. nécessaire]. Monstre sacré des années 1930 et 1940, il impose sa personnalité puissante et son jeu tout en finesse. Sa carrière décolle en 1930 avec la rencontre de Julien Duvivier : cette année-là il incarne dans le premier film parlant du réalisateur David Golder, le personnage de David Golder, héros éponyme du roman d'Irène Némirovsky dont il est tiré[7].

Harry Baur tourne quarante films en douze ans. Il est notamment, en 1934, l'un des interprètes les plus marquants de Jean Valjean dans la version des Misérables signée par Raymond Bernard, où il donne la réplique à Charles Vanel, alias Javert. Il est un Hérode d'une perversité grossière[réf. nécessaire] dans Golgotha face à Robert Le Vigan qui interprète un émouvant Jésus en 1935. En 1936, il est un Beethoven saisissant dans le film d'Abel Gance, Un grand amour de Beethoven. Parmi ses nombreuses compositions, on peut citer Volpone pour le film de Maurice Tourneur (1941), aux côtés de Louis Jouvet incarnant Mosca et de Charles Dullin, qui joue Corbaccio, l'usurier. À cette date il est au sommet de sa carrière[réf. nécessaire].

Au théâtre, il reprend en 1931 le rôle de César, créé par Raimu, dans Fanny, la deuxième pièce de la trilogie de Pagnol.

Pendant la guerre

L'Occupation allemande n'interrompt pas sa carrière. En 1941, il incarne le père Cornusse dans L'Assassinat du Père Noël de Christian-Jaque, le premier film de la compagnie à capitaux allemands d'Alfred Greven, la Continental-Films. Néanmoins, depuis les débuts de l'Occupation, des journaux français antisémites l'accusent d'être juif. L'acteur s'en défend en faisant publier un certificat « d'aryanité » et écrit à l'hebdomadaire Je suis partout une lettre que le journal publie : « Actuellement à l'étranger. Je viens d'apprendre que M. Alain Laubreaux m'a qualifié de « néo-aryen ». Cette expression pouvant prêter à équivoque, je tiens à préciser, de la manière la plus catégorique, que je ne suis pas aryen de fraîche date, mais aussi vieux aryen que quiconque. Je veux espérer que l'incident est clos[8]. » C'est alors que Joseph Goebbels, très préoccupé par la prééminence du cinéma français sur une production « germanique » qui a effectivement été anéantie par la politique antisémite des nazis, le fait venir à Berlin pour tenir le rôle masculin principal dans Symphonie d'une vie (Symphonie eines Lebens) d'Hans Bertram aux côtés d'Henny Porten et de Gisela Uhlen.

Quand il rentre en France au printemps 1942, la rumeur sur ses origines reprend de plus belle et est une nouvelle fois dénoncée. Theodor Dannecker demande alors à Charles Laville, ingénieur biologiste, chef des services scientifiques d'études aux questions juives de faire le portrait morphologique du visage d'Harry Baur. Dans le rapport qu'il lui transmet, il conclut « que le grand acteur présente à un degré fortement accusé toutes les caractéristiques sémitiques ». En avril 1947, Charles Laville sera inculpé pour intelligence avec l'ennemi et écroué à la prison de Fresnes[9]. Harry Baur est arrêté avec sa femme le . Dannecker est furieux qu'un Juif ait pu tenir le premier rôle d'un film allemand. Emprisonné à la section IV J de la Gestapo pendant quatre mois dans des conditions très rudes, Harry Baur subit plusieurs séances de coups, dont une de douze heures. Au cours de l'une d'elles, il se relève et déclare au SS Hauptsturmführer :

« Il sera plus digne pour vous de frapper un homme debout. »

Il reçoit du prêtre Franz Stock[10],[11] un réconfort spirituel.

Tombe de Harry Baur au cimetière Saint-Vincent à Montmartre.

Il est libéré le , ses tortionnaires lui signifiant : « nous avons toujours su que vous n'êtes pas juif ». Reinhard Heydrich, le supérieur de Dannecker, était, par ambition, en conflit avec Joseph Goebbels. L'artiste n'était que la victime de la rivalité des deux dignitaires nazis. Âgé de 62 ans, Harry Baur ne se remettra cependant jamais des séances de torture subies et meurt à peine moins de six mois plus tard, le au 3 rue du Helder (sa femme y habitait encore en 1978 - annuaire par rues). Les autorités allemandes, pour ne pas être accusées d'avoir causé sa mort, interdirent aux journaux de l'annoncer[12].

À la Libération, l'opinion publique française ne retiendra de lui que sa collaboration avec l'industrie cinématographique allemande[13].

Il repose au cimetière Saint-Vincent, à Montmartre, où sa tombe est encore parfois fleurie.

Vie privée

Il épouse à Paris 8e arrondissement le l'actrice Rose Cremer[14], connue sous le nom de Rose Grane, avec laquelle il a trois enfants. Elle mourra lors d'un voyage en Algérie en 1931.

Il se remarie le , à Paris 16e arrondissement, avec Rika Radifé[14](1902-1983), elle-même actrice puis directrice de théâtre.

Décorations françaises

Décoration étrangère

Filmographie

Théâtre

Comédien

Metteur en scène

Notes et références

  1. Photo studio Harcourt.
  2. Fiche biographique sur le site Les gens du cinéma.
  3. Archives de Paris 11e, acte de naissance no 1733, année 1880.
  4. Archives de Paris 9e, acte de décès no 423, année 1943
  5. Acte de naissance no 1733 dans le registre des actes de naissance de l'année 1880 de la mairie de Paris 11e arrondissement, cote V4E 4019.
  6. Alain Pécheral, La Grande Histoire de l'OM, 2007, Éditions L'Équipe, p. 124.
  7. J. Weiss, Irène Némirovsky, Paris, Félin poche 2005, p. 85.
  8. Robert Klein Je suis partout, les Juifs, 1941, édité par Amazon, 2018, p. 103.
  9. France-Soir, 12 avril 1947, p. 1 : "Le biologiste Charles Laville arrêté pour intelligences avec l'ennemi. Il avait, par un rapport "scientifique" contribué à l'arrestation d'Harry Baur."
  10. Alexandre Najjar, Harry et Frantz, Plon, 2018 (ISBN 2259264999).
  11. Jean-Pierre Guerend, Franz Stock: Wegbereiter der Versöhnung. Tagebücher und Schriften, Freiburg, (ISBN 978-3-451-37893-5, lire en ligne), p. 76.
  12. Robert Klein, op. cit., p. 108.
  13. « Le tragique destin d’Harry Baur », sur Télérama.fr (consulté le )
  14. Mention en marge de son acte de naissance no 1733 dans le registre des actes de naissance de l'année 1880 de la mairie de Paris 11e arrondissement, cote V4E 4019.

Voir aussi

Bibliographie

  • Guy Dornand, « Harry Baur », en couverture un portrait de Harry Baur par Bernard Bécan, Les Hommes du jour no 5, Éditions Henri Fabre, 1935
  • Emmanuel Burdeau, « Le plus grand Valjean. De tous les acteurs qui ont joué le rôle, Harry Baur est sans doute celui qui en a donné la version la plus singulière », Le Nouveau Magazine Littéraire no 5, Sophia Publications, Paris, , p. 97 (ISSN 2606-1368)
  • Alexandre Najjar, Harry et Franz, Plon, 2018 Livre qui perce le mystère entourant l'incarcération et la mort d’Harry Baur et évoque sa rencontre en prison avec l'aumônier allemand Franz Stock.

Liens externes

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