François de France (1555-1584)

François de France, né au château de Fontainebleau le et mort à Château-Thierry le , duc d'Alençon, d'Anjou, de Touraine, de Brabant et de Château-Thierry, est le dernier fils d'Henri II et de Catherine de Médicis.

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François de France
Portrait du duc François d’Alençon par Jean Decourt, vers 1576.

Titre

Héritier présomptif du trône de France


(10 ans et 11 jours)

Prédécesseur Henri de France, duc d'Anjou
Successeur Henri III de Navarre
Biographie
Titulature Duc d'Alençon
Duc d'Anjou
Comte de Touraine
Duc de Brabant
Duc de Château-Thierry
Dynastie Valois-Angoulême
Naissance
Fontainebleau (France)
Décès
Château-Thierry (France)
Sépulture Nécropole de Saint-Denis
Père Henri II
Mère Catherine de Médicis
Fratrie Henri III
Religion Catholicisme

À la tête du parti des Malcontents, François joua un rôle politique particulièrement important dans la France des années 1570. Il provoqua des troubles à la cour de son frère Henri III et participa aux sixième et septième guerres de religion[1].

Dans le cadre de la guerre d'indépendance contre l'Espagne, il fut appelé à devenir le nouveau souverain des Pays-Bas. Prétendant de la reine Élisabeth Ire d'Angleterre de à sa mort, il ne se maria jamais[2].

Il meurt de la tuberculose le à Château-Thierry. Sa mort eut d'importantes répercussions politiques : le roi Henri III demeurant toujours sans descendance à cette date, la disparition du duc d'Anjou permit au protestant Henri de Navarre (futur Henri IV) de devenir l'héritier direct de la couronne de France. La perspective d'un roi huguenot favorise dès lors un renouveau du radicalisme catholique (la seconde Ligue) et finit par déclencher la huitième guerre de religion[3][4].

Le Malcontent

Portrait de François, enfant, vers 1561.

Presque nain à la naissance, François fut pourtant baptisé Hercule et reçut pour parrains le cardinal Louis de Lorraine et le connétable de France Anne de Montmorency, et pour marraine, la duchesse de Guise Anne d'Este. Il reçoit en 1565 le nom de François, aux côtés de son grand frère Henri, anciennement Alexandre-Eugène, à l'occasion de leurs confirmations, se tenant lors du tour de France royal de 1564-1566. Il est le dernier né de la famille royale et souffre des grands égards qu'on porte à son frère aîné, le duc d'Anjou (le futur Henri III).

François est un prince revêche, taciturne et ambitieux. Il jalouse à l'extrême son frère Henri, à l'ombre duquel il a grandi. Dans son enfance, François a été gravement touché par la petite vérole et son visage en demeure durement marqué. Henri de La Tour note que la petite vérole « le changea du tout au tout l’ayant rendu méconnaissable, le visage lui ayant demeuré tout creusé, le nez grossi avec difformité, les yeux rapetissés et rouges, de sorte que d'agréable et beau qu'il étoit, il devint l’un des plus laids hommes qui se voyoient et son esprit n'étoit plus si relevé qu'auparavant[5] ». Tout l'oppose à son frère : la physionomie, l'allure et le caractère. François ne reçoit pas de sa mère Catherine de Médicis autant de responsabilité que le duc d'Anjou. Mais dès , il est chargé du gouvernement de la ville de Paris en l'absence du roi. Toutefois, la reine-mère Catherine ne lui faisant guère confiance, il en conçoit du dépit.

Portrait anonyme du prince Hercule-François, duc d’Alençon anciennement attribué à François Clouet.

Tout comme son frère le roi Henri III, il s'entoure de mignons dont le plus connu est Bussy d'Amboise[6], mais contrairement au roi, il n'est pas toujours fidèle en amitié et se montre prêt à trahir certains d'entre eux si le besoin s'en fait sentir.

En , l'échec des négociations pour marier le duc d'Anjou avec la reine d'Angleterre Élisabeth pousse Catherine de Médicis à proposer son autre fils, François, bien que celui-ci, âgé de 16 ans, soit de 22 ans le cadet de la souveraine britannique. C'est à cette époque que commence la carrière politique de François[7].

Après le massacre de la Saint-Barthélemy en , François devient le point de ralliement des Malcontents qui s'élèvent à la cour contre le renforcement de l'autorité royale[1]. Il prend peu à peu conscience du rôle qu’il peut jouer dans la politique du royaume. Lors du siège de la Rochelle, âgé de 18 ans, il marque son opposition au duc d'Anjou, 22 ans, qui conduit le siège, et se lie d'amitié avec son beau-frère, le roi Henri III de Navarre (le futur Henri IV), époux de sa sœur Marguerite, 21 ans. On observe en effet lors de ce siège un mouvement de rassemblement autour du jeune duc, assemblant des nobles modérés catholiques mais aussi des réformés : ce sont les prodromes du mouvement des Malcontents.

Après le départ de son frère Henri pour la Pologne où il avait été élu roi, François espère succéder comme roi de France à Charles IX, 23 ans, dont la santé se détériore de jour en jour et qui n'a qu'une fille de son mariage avec Élisabeth d'Autriche. Il est nommé début 1574, grâce à l'influence de François de Montmorency, chef du Conseil du roi, garde du sceau privé, et commandant des armées. Avec Henri de Navarre, il met en place le complot dit des Malcontents, pour s'imposer comme successeur à la place de son frère Henri[1]. Catherine de Médicis parvient à déjouer la conspiration et François est arrêté. Henri, devenu roi, lui pardonne, mais son jeune frère demeurera retenu à la cour sous surveillance.

Le frère rebelle

En , François continue d'être à la cour le chef du parti d'opposition[8]. Il subit les brimades et les moqueries dont il fait l'objet de la part des mignons de son frère. Catherine de Médicis tente de calmer le jeu mais en vain car un soir de bal, François se fait directement insulter et prend la résolution de s'enfuir. Il s'échappe à travers un trou creusé dans les remparts de Paris[9].

Sa fuite crée la stupeur. Les mécontents de la politique royale et les protestants s'unissent derrière lui. En septembre, il est rejoint par le roi de Navarre qui est parvenu, lui aussi, à s'enfuir.

La guerre qui s'ouvre est prometteuse pour François. Henri III doit baisser les armes. Le , est proclamé l'édit de Beaulieu[10], surnommé « paix de Monsieur », qui permet la liberté de culte pour les réformés dans tout le royaume de France[11]. Dans chaque parlement provincial sont créées des chambres mi-parties. Enfin les victimes du massacre de la Saint-Barthélemy sont réhabilitées[12].

François reçoit l'Anjou en apanage et une indemnité extraordinaire. Il se réconcilie avec le roi et reprend triomphalement sa place à la Cour sous le titre de « Monsieur ».

Le prince des Pays-Bas

Après avoir rompu avec Philippe II d'Espagne, les Pays-Bas se cherchent un nouveau prince. Leur regard se porte sur François d'Anjou. En , il est invité par Guillaume d'Orange à devenir le souverain des provinces des Pays-Bas. Le , les provinces (à l'exception de la Zélande et de la Hollande) signent le traité de Plessis-lès-Tours avec François qui prend le titre de protecteur de la liberté des Pays-Bas[13].

En , les négociations continuent pour le mariage de François avec Élisabeth Ire d'Angleterre. Il a vingt-six ans et elle en a quarante-sept. Élisabeth le surnomme affectueusement le prince grenouille[14]. Leur rencontre est de bon augure mais nul ne sait ce qu'en pense réellement la reine[2]. Le peuple anglais est particulièrement opposé à ce mariage parce que François est un prince français et aussi de religion catholique[15]. Les négociations échouent finalement en février 1582 et François obtient un dédommagement qui laisse son honneur intact[16].

Puis François retourne aux Pays-Bas où il est officiellement intronisé. Il reçoit le titre de duc de Brabant en , mais il commet l'erreur de lancer, sur un coup de tête, l'attaque d'Anvers, le , où seront tués environ 1 500 soldats français[17], et 500 autres faits prisonniers[18], alors que les pertes parmi les habitants sont estimées à un peu plus de 100[19].

Cet échec ne l'empêche pas de reprendre les négociations avec les provinces des Pays-Bas, mais il meurt de la tuberculose et de la malaria[20] en et il est inhumé en l'église de l'abbaye royale de Saint-Denis[21].

Notes et références

  1. Arlette Jouanna, Le Devoir de révolte : la noblesse française et la gestation de l’État moderne (1559-1661), Paris, Fayard, 506 p. (ISBN 978-2-21365-204-7, lire en ligne), p. 190.
  2. David Loades, Elizabeth I : The Golden Reign of Gloriana, Londres, The National Archives, (ISBN 978-1-903365-43-4), p. 39.
  3. Péronnet, p. 292.
  4. Delumeau (Larousse), p. 478.
  5. Pierre Darmon, La Variole, les nobles et les princes, t. 4, Paris, Complexe, coll. « Mémoire des siècles », 171 p. (ISBN 978-2-87027-301-2, lire en ligne), p. 38,
  6. André Joubert (ill. Pierre Vidal), Un mignon de la cour de Henri III Louis de Clermont sieur de Bussy d'Amboise, gouverneur d'Anjou par André Joubert, Angers, Germain et Grassin, , 280 p. (OCLC 162605191, lire en ligne), p. 130.
  7. Jules Michelet, Histoire de France au XVIe siècle, t. IX : Guerres de religion, Paris, Chamerot, , 507 p. (lire en ligne), p. 371-372.
  8. Boucher 1992, p. 121.
  9. Janine Garrisson, Marguerite de Valois, Fayard, coll. « Biographies Historiques », , 386 p. (ISBN 978-2-21364-817-0, lire en ligne), p. 63.
  10. « Paix de Monsieur. Édit de Paris dit de Beaulieu », sur elec.enc.sorbonne.
  11. (en) « Edict of Beaulieu », Catholic Encyclopedia, .
  12. (en) Robert Jean, The French Wars of Religion, 1559-1598, Harlow, Longman, , 3e éd., 163 p., 25 cm (ISBN 978-1-40822-819-7, OCLC 501404324, lire en ligne), p. 64.
  13. Henri Vast, Histoire de l’Europe et de la France de 1270 à 1610, Paris, Garnier, , 835 p. (ISBN 978-2-21364-817-0, lire en ligne), p. 745.
  14. Madeleine Lazard, Pierre de Bourdeille, seigneur de Brantôme, Fayard, coll. « Biographies Littéraires », , 416 p. (ISBN 978-2-21365-090-6, lire en ligne), p. 112.
  15. (en) Retha Warnicke, « Why Elizabeth I Never Married », History Review, no 67, , p. 15-20.
  16. « Discours et harangue des ambassadeurs du Roy avec ceulx d’Angleterre touchant le pourparler du mariaige d'entre monseigneur le duc d’Anjou et d’Alençon avec la Royne d’Angleterre », sur Paleography Library, Londres, .
  17. (en) George Edmunson, « History of Holland »
  18. Jean Bodin, Lettre à Jean Bautru des Matras, Paris, Édouard Champion, , 564 p., in-8° (lire en ligne sur Gallica), p. 524.
  19. (en) John Lothrop Motley, The Rise of the Dutch Republic, t. VI 1560-61 (lire en ligne).
  20. (en) Kristen Bennett, « Francis, Duke of Anjou », sur The Kit Marlowe Project, (consulté le )
  21. Jean Abel Hugo, Les Tombeaux de Saint-Denis, ou description historique de cette abbaye célèbre, Paris, Maurice, , 276 p. (OCLC 886365332, lire en ligne), p. 166.

Bibliographie

  • Jacqueline Boucher, « Autour de François, duc d'Alençon et d'Anjou, un parti d'opposition à Charles IX et Henri III », dans Robert Sauzet (dir.), Henri III et son temps : actes du Colloque international du Centre de la Renaissance de Tours, octobre 1989, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, coll. « De Pétrarque à Descartes » (no 56), , 332 p. (ISBN 2-7116-1065-9), p. 121-131.
  • Laurent Bourquin, Les nobles, la ville et le roi : l'autorité nobiliaire en Anjou pendant les Guerres de religion, 1560-1598, Paris, Belin, coll. « Essais d'histoire moderne », , 314 p. (ISBN 2-7011-2976-1, présentation en ligne), chap. 4 (« François d'Anjou, un autre roi René ? (1576-1584) »), p. 103-136, [présentation en ligne], [présentation en ligne].
  • Ivan Cloulas, « La diplomatie pontificale médiatrice entre la France et l'Espagne : la mission de l'archevêque de Nazareth auprès de François d'Anjou (1578) », Mélanges de la Casa de Velázquez, t. V, , p. 451-459 (lire en ligne).
  • Francis de Crue, Le Parti des Politiques au lendemain de la Saint-Barthélemy : La Molle et Coconat, Paris, Librairie Plon, Nourrit et Cie, , VII-365 p. (lire en ligne).
  • Frédéric Duquenne (préf. Jean-François Labourdette), L'entreprise du duc d'Anjou aux Pays-Bas de 1580 à 1584 : les responsabilités d'un échec à partager, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Histoire et civilisation », , 289 p. (ISBN 2-85939-518-0, présentation en ligne), [présentation en ligne].
  • (en) Mack P. Holt, The Duke of Anjou and the Politique Struggle during the Wars of Religion, Londres / New York / Melbourne, Cambridge University Press, coll. « Cambridge Studies in Early Modern History », , XIII-242 p. (ISBN 0-521-32232-4, présentation en ligne).
  • Arlette Jouanna, Jacqueline Boucher, Dominique Biloghi et Guy Thiec, Histoire et dictionnaire des guerres de religion, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1526 p. (ISBN 2-221-07425-4, présentation en ligne).
  • Nicolas Le Roux, « Associations nobiliaires et processus de recomposition : les avatars de l’entourage de François, duc d'Anjou », dans David Bates et Véronique Gazeau (dir.), Liens personnels, réseaux, solidarités en France et dans les îles britanniques (XIe et XXe siècles) : actes de la table ronde, 10-11 mai 2002 / organisée par le Groupe de recherche 2136 et l'Université de Glasgow, Paris, Publications de la Sorbonne, coll. « Hommes et société » (no 30), , 352 p. (ISBN 2-85944-534-X), p. 169-197.
  • Nicolas Le Roux, La faveur du Roi : mignons et courtisans au temps des derniers Valois, Seyssel, Champ Vallon, coll. « Époques », , 805 p. (ISBN 2-87673-311-0, présentation en ligne), [présentation en ligne]
    Réédition : Nicolas Le Roux, La faveur du Roi : mignons et courtisans au temps des derniers Valois, Seyssel, Champ Vallon, coll. « Les classiques de Champ Vallon », , 2e éd. (1re éd. 2001), 805 p. (ISBN 978-2-87673-907-9, présentation en ligne).
  • Jean-François Maillard, « Monsieur, frère du roi, mécène », dans Isabelle de Conihout, Jean-François Maillard et Guy Poirier (dir.), Henri III mécène des arts, des sciences et des lettres, Paris, Presses de l'Université Paris-Sorbonne (PUPS), , 342 p. (ISBN 2-84050-431-6), p. 263-272.

Littérature

François d'Alençon par Nicholas Hilliard.

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