Constantin XI Paléologue

Constantin XI (ou XII)[N 2] Paléologue, dit Dragasés (en grec : Κωνσταντίνος ΙΑ' Δραγάσης Παλαιολόγος, Kōnstantinos XI Dragasēs Palaiologos, en serbe : Konstantin XI Dragaš Paleolog), né le /1405 à Constantinople[2],[3], et mort le sur les murailles de la même ville, est le dernier empereur byzantin du au , et par conséquent le dernier empereur romain de l'Histoire[N 3],[N 4].

Constantin XI Paléologue
Empereur byzantin

Constantin XI
Règne
-
4 ans, 6 mois et 28 jours
Période Paléologue
Précédé par Jean VIII Paléologue
Biographie
Naissance /1405[N 1]
Constantinople
Décès
Constantinople
Père Manuel II Paléologue
Mère Hélène Dragaš
Épouse Maddalena Tocco
Catherine Gattilusi
Empereur byzantin

Il est l'un des nombreux fils de Manuel II Paléologue et un représentant de la dernière dynastie régnante, au pouvoir depuis 1261. Frère cadet de Jean VIII Paléologue, il s'illustre par sa fidélité à son frère, servant de régent à plusieurs reprises et l'aidant dans certaines de ses campagnes, notamment dans le despotat de Morée. Il gouverne celui-ci à deux reprises, avec d'autres de ses frères, et tente de renforcer cette province plus florissante que la cité impériale déclinante, mais se heurte inévitablement à la puissance de l'Empire ottoman. A la mort de Jean VIII en 1448, il s'impose comme l'héritier et se rend à Constantinople. Rapidement, il est confronté à la situation dramatique de l'Empire, considérablement affaibli. Il tente de favoriser la politique d'union entre l'église de Constantinople et la papauté, pour susciter une croisade contre les Turcs, d'autant que le nouveau sultan Mehmet II a des ambitions expansionnistes affirmées dès sa prise du pouvoir en 1451.

Biographie

Fils de Manuel II Paléologue, empereur byzantin, et d'Hélène Dragaš (patronyme serbe, bulgare ou roumain), il se marie deux fois : d'abord en 1428 avec Théodora Tocco (morte en 1429), fille de Léonard II Tocco (en), seigneur de Zante, puis le avec Catherine Gattilusi (morte en 1442), fille de Dorino Ier, seigneur de Lesbos.

Les jeunes années

Constantin XI commence à s'intégrer dans les affaires de l'Empire en 1422, quand les Ottomans mettent le siège devant Constantinople. Si l'assaut est repoussé, Manuel II, vieillissant, souffre d'une attaque et devient hémiplégique. Jusqu'en 1425, la régence est assurée par Jean VIII. Face à la situation de plus en plus précaire de l'Empire, qui doit céder Thessalonique à Venise en 1423 pour la préserver des Ottomans, Jean VIII décide de partir en Europe rechercher des renforts. En novembre 1423, il se rend à Venise et en Hongrie. C'est à Constantin qu'il cède le gouvernement de l'Empire dans l'intervalle, car c'est en lui qu'il a le plus confiance. Constantin se voit conférer la dignité de despote, la plus élevée dans l'ordre byzantin d'alors. Il négocie un traité avec le sultan Mourad II, qui préserve l'Empire d'un nouvel assaut. C'est une réussite précieuse car Jean VIII rentre en novembre 1424 sans avoir pu susciter d'intervention occidentale. Le 21 juillet 1425, Manuel s'éteint et Jean devient seul empereur. Constantin reçoit en apanage une bande de terre au nord de Constantinople, entre Messembria et Derkos, ainsi que le port de Selymbria.

Dans le même temps, la situation dans le despotat de Morée, devenue la principale province de l'Empire déclinant, est préoccupante. Théodore II Paléologue se montre insatisfait de sa position et Jean VIII réfléchit à le remplacer par Constantin. En 1423, les Ottomans ont brisé l'Hexamilion pour mettre à sac la péninsule, tandis que le seigneur de Céphalonie, Carlo Ier Tocco, a des visées sur le littoral du Péloponnèse. En réaction, en 1427, Jean VIII se rend en personne dans le despotat avec Constantin pour remédier à la situation.

Jean VIII parvient à repousser Carlo Tocco à l’occasion de la bataille des îles Echinades et conclut un traité de paix, par lequel est prévu le mariage de Constantin avec Maddalena, nièce de Carlo Tocco[4],[5]. L’union est conclue le 1er juillet près de Patras et inclut comme dot l’obtention pour Constantin de la cité de Clarentza et ses alentours. Dans le même temps, Constantin est nommé despote aux côtés de Théodore II Paléologue, en poste depuis 1407 et qui refuse de le quitter. Son jeune frère, Thomas, est aussi nommé despote, ce qui porte à trois les seigneurs du despotat de Morée. C’est le première fois que le gouvernement de la province est divisé entre plusieurs détenteurs. Toujours en 1428, Cosntantin, Thomas et Jean tentent de prendre Patras, alors tenu par un archevêque latin, Pandolfo Malatesta. L’assaut échoue mais Constantin obtient le paiement de 500 pièces d’or.

Pour autant, Constantin ne renonce pas à l’idée de prendre Patras. Avec l’aide de Sphrantzès, il part de Vostitza pour Clarentza, puis marche sur Patras dont il contacte les notables grecs de la ville pour les inciter à le soutenir. Le 20 mars 1429, il met le siège devant la ville et, à l’occasion des combats, son cheval est tué mais il est sauvé par son ami Sphrantzès. Au début du mois de mai, des négociations s’engagent et les assiégés promettent de livrer la ville à la fin du mois si Malatesta ne revient pas avec des renforts. Le 1er juin, Constantin se présente devant les remparts pour rappeler l’engagement pris. Finalement, le 5 juin, les chefs des assiégés acceptent de livrer la ville. Seule la citadelle reste fidèle à l’archevêque et résiste encore douze mois. Cependant, cette prise provoque la colère des Ottomans qui menacent Constantin de représailles. Il faut l’intervention diplomatique de Sphrantzès pour calmer le jeu. Dans le même temps, des mercenaires catalans engagés par Malatesta se mettent à piller la région de Clarentza et Constantin doit débourser 6 000 ducats pour les arrêter. La prise de Patras est un véritable succès pour Constantin, après 225 ans d’occupation étrangère de la cité grecque.

Le despote de Mistra


En mars 1432, Constantin obtient un nouvel accord de délimitation avec Thomas. Ce dernier accepte de céder la forteresse de Kalavryta, qui devient la capitale des possessions de Constantin, en échange de la cité d'Élis, désormais capitale du despotat de Thomas. Celui-ci continue d'entretenir une bonne relation avec Constantin, et cela même si l'absence de descendant à Jean VIII laisse planer un doute sur la succession au trône impérial. De toute évidence, il reviendra à l'un de ses frères et Constantin est clairement le favori, ce que ressent mal Théodore. Quand Constantin est convoqué à Constantinople en 1435, Théodore est persuadé qu'il va être nommé co-empereur et il se rend immédiatement dans la cité impériale pour faire part de ses objections. Les tensions demeurent fortes entre les deux frères jusqu'à la fin de l'année 1436 et la réussite d'un arbitrage par le patriarche Grégoire III Mammé. Constantin accepte de rester à Constantinople, tandis que le despotat de Morée est partagé entre Théodore et Thomas. Ce choix s'explique sûrement par la nécessité de Jean VIII s'assurer la régence car il s'apprête à embarquer pour un nouveau voyage en Europe, à la recherche de renforts et dans le but de rétablir l'union des églises. Celle-ci est de plus en plus perçue comme inévitable pour assurer à l'Empire byzantin une assistance forte du pape et des puissances occidentales, d'obédience catholique.

Quand Jean VIII embarque pour le concile de Ferrare, beaucoup dans l'Empire s'opposent à l'union des Eglises, dont Démétrios, un de ses jeunes frères qu'il emmène avec lui pour éviter tout risque de conspiration. Quant à Constantin, il est entouré de plusieurs conseillers, dont Sphrantzès, sa mère, son cousin Démétrius Paléologue Cantacuzène ou Lucas Notaras. En 1438, il est le témoin du mariage de Sphrantzès et devient ensuite le parrain de deux de ses enfants.

Au cours de la régence, les relations avec les Ottomans sont plutôt apaisées. En 1439, Constantin se montre malgré tout inquiet à l'idée d'une agression de la part de Mourad et il envoie une lettre à son frère pour lui demander de rappeler au pape sa promesse d'envoyer deux navires de guerre à Constantinople. Si la promesse n'est pas honorée, Mourad détourne finalement son attention contre les Serbes, s'emparant de Smederevo.

En juin 1439, le concile de Florence déclare l'union des églises et Jean peut rentrer à Constantinople le 1er février 1440. Reçu avec pompe par Constantin et Démétrios, rentré plus tôt, il ne peut échapper au rejet de l'union par une fraction notable de la population. Jean est alors perçu comme un traître à sa foi et certains pensent même que les Ottomans pourraient s'en saisir comme prétexte pour attaquer. Néanmoins, Constantin reste fidèle à son frère et partage l'idée que le salut de l'Empire passe par une croisade occidentale et, nécessairement, par l'abandon des sujets de divergence avec Rome.

En dépit du retour de Jean, Constantin reste dans la capitale, probablement pour trouver une nouvelle femme, dix ans après avoir perdu Théodora. Il jette son dévolu sur Catherine Gattilusio, la fille de Dorine Ier Gattilusio, seigneur de Lesbos. En décembre 1440, Sphrantzès est envoyé sur l'île pour organiser l'union. A la fin de l'année 1441, Constantin se rend sur Lesbos avec Sphrantzès et Lucas Notaras et il épouse Catherine en août 1442, avant de quitter l'île sans sa femme en septembre, pour rejoindre la Morée.

Quand il arrive sur place, il constate que la province a été bien gouvernée par Théodore et Thomas. Il estime donc qu'il serait plus utile à l'Empire proche de Constantinople. Dans le même temps, c'est son autre frère, Démétrius, qui gère ses anciennes possessions autour de Messembria et il envisage un échange. Il reprendrait son ancien apanage et Démétrius deviendrait despote en Morée. Sphrantzès est chargé de tâter le terrain, tant auprès de Démétrius que de Mourad II, dont l'accord est nécessaire pour un tel changement.

Seulement, Démétrius vise lui aussi le trône impérial et il s'est allié avec Mourad en se posant comme le meilleur partisan des Ottomans, du fait de son opposition à l'union des Eglises. Il se révolte ouvertement et quand Sphrantzès arrive auprès de lui, il se prépare déjà à marcher sur Constantinople. Jean VIII, conscient du danger, fait appel à Constantin pour organiser la défense de la ville. En avril 1442, Démétrios et les Ottomans lancent leur offensive et, en juillet, Constantin quitte la Morée. Sur le chemin, il se rend à Lesbos et fait voile avec sa femme sur Lemnos, où ils sont bloqués par le blocus des Turcs pendant plusieurs mois. Malgré l'aide de navires vénitiens, Catherine tombe malade et meurt dès le mois d'août. Elle est enterrée à Myrina, sur Lemnos. Finalement, Constantin parvient dans la capitale en novembre, où les Ottomans ont déjà été repoussés. Capturé, Démétrius est emprisonné, tandis que Sphrantzès devient gouverneur de Selymbria au nom de Constantin. De là, les deux hommes peuvent facilement surveiller les activités de Démétrius, rapidement libéré. En novembre 1443, Constantin cède Selymbria à Théodore, qui a cédé son poste de despote de Morée, donnant Mistra à Constantin.

Avec les départs de Démétrius et de Théodore, Constantin et Thomas espèrent renforcer le despotat de Morée. A la différence de Constantinople, soumise à un quasi-blocus, la Morée connaît une certaine prospérité culturelle. La vie intellectuelle y est vivace et des constructions sont régulièrement entreprises. Les deux frères ont pour ambition de rendre la province plus autonome, sur le modèle de Gémiste Pléthon qui entend faire de Mistra la nouvelle Sparte, capitale d’un royaume hellénique indépendant.

Le premier objectif de Constantin et Thomas est d’abord d’assurer la défense du territoire, qui passe par la restauration de l’Hexamilion, la muraille qui barre l’isthme de Corinthe et détruit en 1431. En mars 1444, les travaux sont terminés et suscitent l’enthousiasme de la population et des seigneurs vénitiens de la région, qui n’ont pourtant pas aidé à son financement. Celui-ci a d’ailleurs suscité des troubles, poussant certains propriétaires terriens à l’exil et d’autres à se révolter, sans succès. En échange, Constantin leur promet des terres et des privilèges divers pour garantir leur fidélité. Enfin, il organise des compétitions athlétiques qui dispensent des prix aux vainqueurs.

En 1444, Constantin poursuit sa politique d’expansion au détriment des seigneurs latins. Vraisemblablement encouragé par la croisade de Varna menée contre les Ottomans, il s’attaque au duché d'Athènes, vassal des Turcs. Sphrantzès joue les intermédiaires avec les chefs des Croisés, pour qui l’intervention de Constantin permet de menacer les Ottomans sur leurs arrières. Rapidement, il s’empare d’Athènes, puis de Thèbes, contraignant le duc Nerio II Acciaiuoli à lui payer un tribut plutôt qu’au sultan. Cette victoire accroît le prestige de Constantin, célébré comme le nouveau Thémistocle. Pourtant, ses alliés sont lourdement vaincus à la bataille de Varna le 10 novembre mais Constantin ne renonce pas. Grâce à l’aide de trois cents soldats envoyés par le duc bourguignon Philippe le Bon, il mène des raids au centre de la Grèce, jusqu’au massif du Pinde. Dans le même temps, un de ses lieutenants, Constantin Cantacuzène, mène ses hommes en Thessalie et s’empare de Lidoriki, où la population l’accueille en libérateur.

Cette suite de succès finit par lasser Mourad. En 1446, il marche sur la Morée avec Nerio II et une armée qui aurait compté jusqu’à 60 000 hommes. Malgré cette supériorité écrasante, Constantin est décidé à résister. S’il cède rapidement la Thessalie, il se replie sur l’Hexamilion, atteint par les Ottomans le 27 novembre. Avec l’aide de Thomas, il réunit une armée, peut-être forte de 20 000 hommes, normalement suffisante pour tenir le mur. Cependant, Mourad est doté d’une puissante artillerie et, le 10 décembre, le mur est réduit à l’état de ruines et les défenseurs sont submergés. Constantin et Thomas parviennent tout juste à s’échapper, tandis que Turahan Beg, le général turc, pille le despotat jusqu’à Mistra tandis que Mourad II se charge du nord de la péninsule. Si Mistra résiste, l’objectif ottoman est accompli. Ils ont réaffirmé leur supériorité et si la Morée n’est pas conquise, elle est laissée dans un état de grande vulnérabilité, réduite à l’état de vassal contrainte de payer un tribut au sultan. Enfin, Constantin et Thomas sont interdits de restaurer l’Hexamilion.

Souverain byzantin

La prise du pouvoir

En juin 1448, Théodore Paléologue s’éteint, bientôt suivi par Jean VIII le 31 octobre. Constantin, toujours le plus populaire des frères du défunt empereur, est encore en Morée et il est précédé à Constantinople par Démétrius et Thomas, bien que celui-ci n’a aucune prétention sur le trône. Si Démétrius jouit du soutien des anti-unionistes, sa mère assure la régence jusqu’à l’arrivée de Constantin, pour s’assurer que celui-ci obtienne la couronne sans mal. Le 6 décembre 1448, Mourad II donne son assentiment à cette succession et Hélène envoie deux messagers en Morée pour proclamer Constantin empereur et le faire revenir à Constantinople.

C’est à Mistra, probablement dans l’une des églises ou dans le palais, que Constantin est couronné le 6 janvier 1449, à l’occasion d’une petite cérémonie. Il se voit conférer la dignité de basileus des Romains mais ne reçoit pas la couronne. Celle-ci est remplacée par un pilon, un couvre-chef qu’il revêt de ses propres mains. Ce n’est pas la première fois que l’empereur est consacré en-dehors de la basilique Sainte-Sophie. Ainsi, Manuel Ier Comnène est nommé à la dignité impériale par son père agonisant Jean II Comnène en Cilicie, de même que Jean VI Cantacuzène a été proclamé empereur à Didymotique. Toutefois, les deux souverains ont tenu à confirmer leur nomination à Constantinople, ce qui n’est pas le cas de Constantin XI, peut-être par crainte d’un soulèvement des anti-unionistes. Malgré tout, sa parenté avec Jean VIII et l’absence de véritable alternative lui assurent une certaine assise de son pouvoir. Il se rend à Constantinople le 12 mars 1449, à bord d’un navire catalan.

Dans l’ensemble, Constantin dispose d’une grande expérience du pouvoir, qui facilite son accession au trône. Il a parcouru les derniers fiefs d’un Empire déclinant, dont il connaît toutes les difficultés. La ville de Constantinople est alors profondément dépeuplée et appauvrie, nombre de ces bâtiments qu’ils soient administratifs ou religieux étant à l’abandon. Le Grand Palais a depuis longtemps été délaissé au profit du palais des Blachernes, bien plus proche des murailles de la cité.

Le 23 mars 1450, Hélène Dragas s'éteint, ce qui provoque une grande affliction parmi la cour byzantine. Gemiste Pléthon et Gennadios Scholarios livrent tous deux des oraisons funèbres en son honneur. Pléthon loue sa force et son intelligence, la comparant à Pénélope. Pour Constantin, c'est une grande perte car elle faisait partie de son cercle de proches conseillers. Il est désormais entouré de plusieurs courtisans dont il n'est pas toujours certain de la fiabilité. Ainsi, Andronic Paléologue Cantacuzène, le Grand domestique (chef de l'armée), est souvent en désaccord avec lui, notamment sur l'opportunité de se marier avec une princesse géorgienne plutôt qu'avec une princesse de Trébizonde. Dans l'ensemble, c'est Lucas Notaras qui occupe la place prééminente. S'il a des relations délétères avec Sphrantzès, il s'entend bien avec Constantin, dont il est de facto le premier ministre. En tant que mégaduc, il est censé commander la marine byzantine mais celle-ci a quasiment disparu et le poste a surtout une nature honorifique. Il est persuadé que les défenses de la ville sont suffisantes pour tenir un siège longtemps et s'assurer de l'arrivée de renforts occidentaux, ce que en quoi Constantin semble avoir été convaincu. Enfin, Sphrantzès demeure un proche ami de l'empereur. Il a un accès presque absolu à l'ensemble du palais. Il défend une position prudente dans les rapports avec les Ottomans, s'opposant en cela à l'optimisme de Notaras. S'il est d'accord pour requérir l'aide de l'Occident, il estime que toute ambassade doit être le plus discrète possible pour ne pas provoquer l'ire du sultan.

Une paix fragile avec les Ottomans

Dès la mort de Mourad II, Constantin s'empresse de manifester ses intentions pacifiques à Mehmet II, pour négocier une nouvelle trêve. Si le sultan reçoit respectueusement les ambassadeurs et leur assure de vouloir cohabiter pacifiquement avec les Byzantins, Constantin reste prudent et craint que le nouveau dirigeant ne change d'avis. Par conséquent, il se met en quête de soutiens extérieurs pour s'assurer d'alliances solides, en particulier en Occident[6]. Venise fait rapidement figure d'allié principal, en raison de l'importance commerciale de son quartier à Constantinople. Toutefois, les relations sont complexes car Constantin a augmenté les taxes sur les biens importés de Venise, pour tenter de trouver des ressources financières. En août 1450, les Vénitiens menacent de faire transiter leur commerce par un autre port, potentiellement ottoman. En dépit d'une lettre envoyée par Constantin au doge, ce dernier signe un traité avec Mehmet II en 1451[7]. Constantin tente bien de jouer de la rivalité de Venise avec Raguse en proposant à ces derniers de s'installer dans la cité impériale avec des facilités fiscales mais l'aide militaire de la république dalmate est bien moins intéressante.

Si Constantin multiplie les initiatives diplomatiques, il se heurte généralement à des fins de non-recevoir. Les royaumes chrétiens d'Europe ont tous leurs préoccupations propres et le désastre de Varna en 1444 a grandement dissuadé les projets de nouvelle croisade. En outre, Mehmet II n'est pas encore pris au sérieux par les dirigeants européens, tandis que la papauté se préoccupe avant tout de l'union des Églises. En août 1451, l'ambassadeur byzantin Andronic Bryenne Léontaris arrive à Rome où il dépose une lettre au pape Nicolas V, contenant les conclusions d'opposants à l'union. Pour Constantin XI, c'est une occasion de faire comprendre à la papauté les difficultés qu'il rencontre car l'union est largement rejetée dans l'opinion et dans le clergé, à tel point que des offices s'abstiennent de mentionner l'empereur dans leurs prières[8]. Constantin propose la tenue d'un nouveau concile à Constantinople, avec autant de représentants de l'église orthodoxe que de l'église catholique. Le 27 septembre, Nicolas V envoie sa réponse, après avoir appris la démission de Grégoire III Mammé, fragilisé par sa position unioniste. Il demande à Constantin de redoubler d'efforts, rappelant que l'union est nécessaire pour espérer l'assistance de l'Occident chrétien. Il insiste pour que le nom du pape soit commémoré dans les églises grecques et que Grégoire III soit rétabli comme patriarche. Pour Constantin, c'est un échec car il souhaite éviter les dissensions parmi les Byzantins. Or, la papauté ne change rien à sa position et Nicolas V envoie un légat, Isidore de Kiev, pour aider à la mise en oeuvre de l'union. Il arrive à Constantinople en octobre 1452, quelques mois avant le siège de la cité.

La rupture

Avec Mehmet II, un contentieux latent existe en la personne d'Orkhan, un descendant du sultan Bayezid Ier, qui réside à Constantinople. Seul représentant masculin de la dynastie ottomane en-dehors de Mehmed, il est un concurrence potentiel. Le sultan a accepté de payer la rente annuelle assurant le train de vie d'Orkhan et, en échange, ce dernier reste dans la cité byzantine sans essayer de fomenter de rébellion. Toutefois, en 1451, Constantin envoie un message à Mehmet pour se plaindre de l'insuffisance de la rente et de la possibilité de laisser partir Orkhan. C'est une stratégie déjà éprouvée par les Byzantins que de jouer des rivalités internes à la famille régnante mais elle est risquée car Mehmet pourrait y voir un prétexte pour réduire à néant l'Empire byzantin. C'est ce que relève le grand vizir Çandarlı Halil Hayreddin Pacha qui reçoit l'ambassade et les met en garde. S'il se pose lui-même en protecteur des Byzantins, son influence sur le nouveau sultan est limitée et il ne peut espérer le dissuader de toute velléité agressive[9]. Sa réponse, retranscrite ci-dessous, est sans ambiguïté :

« Je connais depuis longtemps, Grecs stupides, vos manières sournoises. Le sultan défunt était pour vous un ami débonnaire et attentionné. Le sultan Mahomet ne voit pas les choses de la même façon. S'il ne parvenait pas avec sa fougue habituelle à s'emparer de Constantinople, ce serait uniquement parce que Dieu continue à fermer les yeux sur vos procédés sordides. Vous êtes bien niais si vous croyez pouvoir nous effrayer avec vos puérilités, alors que l'encre de notre dernier traité n'est pas encore sèche. Nous ne sommes pas des enfants sans force ni raison. Si vous croyez pouvoir tenter quelque chose, allez-y. Si vous voulez amener les Hongrois de ce côté du Danube, faites-les venir. Si vous voulez reprendre les places que vous avez perdues depuis longtemps, essayez donc. Mais sachez ceci : ni là ni ailleurs, vous n'irez bien loin. Tout ce que vous risquez, c'est de perdre ce qui vous reste[10] »

Les Byzantins se rendent rapidement compte de leur erreur d'appréciation car Mehmet II est déterminé à mener une politique expansionniste d'envergure. De fait, Constantin et ses conseillers échouent à trouver le bon équilibre dans leurs relations avec les Ottomans. C'est d'ailleurs une gageure pour la diplomatie impériale étant donné la disproportion des forces. Oscillant entre volontés d'indépendance voire provocations et actes de soumission, l'Empire byzantin tente tant bien que mal d'assurer sa survie. Ces incertitudes et les méconnaissances sur le fonctionnement de la cour du sultan conduisent progressivement à des erreurs de stratégie aux conséquences funestes.

Quand il apprend les exigences à propos de la rente d'Orkhan, Mehmet réagit promptement. Il estime que le traité de 1449 est rompu et révoque toutes les concessions accordées aux Byzantins. Désormais, la prise de Constantinople devient l'objectif affiché de Mehmet. Il la voit comme indispensable à la stabilité de l'Empire ottoman car la cité byzantine reste une épine à cheval entre ses parties européenne et asiatique, toujours capable d'être un vecteur d'agitation. En outre, la prise de la ville mettrait un terme aux velléités de croisades occidentales. Enfin, la conquête de Constantinople est une ambition régulièrement mise en avant par les dirigeants musulmans depuis l'émergence de l'islam.

Constantin face à un siège imminent

Mehmet agit promptement mais avec méthode. Dès le printemps 1452, il renforce l'isolement de Constantinople en faisant construire le château de Rumeli Hisarı sur la rive européenne du Bosphore. Avec l'Anadolu Hisarı, bâtit cinquante ans plus tôt de l'autre côté, les Ottomans peuvent contrôler tout le trafic maritime. Constantin comprend vite l'impact de cette forteresse et il proteste en vain auprès du sultan, lui rappelant que son aïeul, Mehmet Ier, avait demandé l'autorisation de Manuel II pour ériger Anadolu Hisarı. Mehmet II répond que la rive européenne du Bosphore est inhabitée et que l'empereur de Constantinople n'a aucun pouvoir en-dehors des murailles de la ville. En outre, il n'hésite pas à détruire plusieurs habitations et églises qui parsèment la zone autour de la forteresse, tout en faisant paître du bétail sur des terres appartenant à des paysans grecs. Face à leurs protestations, il en fait exécuter plusieurs et Constantin, au pied du mur, finit par déclarer la guerre aux Ottomans[11]. Il fait fermer les portes de Constantinople et arrêter tous les Turcs s'y trouvant, avant de les libérer trois jours plus tard.

Dans le Bosphore, c'est un navire vénitien qui est le premier à faire les frais du blocus ottoman en novembre 1452. Alors qu'il tente de passer en force, il est coulé et son équipage massacrer. Constantin réagit en faisant exécuter les Turcs encore présents à Constantinople. Il prépare ensuite la ville à un siège, inévitable. Il rassemble des vivres et demande à Manuel Paléologue Iagros de faire restaurer les remparts. Surtout, conscient de la faiblesse de ce qu'il reste de l'armée byzantine, il envoie des messagers en Occident, pour tenter de solliciter des renforts. Si Venise a d'abord répondu qu'elle ne pouvait distraire des forces en Orient alors qu'elle doit combattre en Italie, la perte de son navire coulé dans le Bosphore l'oblige à s'engager plus franchement aux côtés des Byzantins et à envisager l'envoi d'une aide importante. Par ailleurs, Constantin sollicite le soutien du régent hongrois Jean Hunyadi en échange des cités de Messembria et de Selymbria ou encore d'Alphonse V, à qui il promet l'île de Lemnos. Néanmoins, ses appels à l'aide restent sans réponses[12].

Une politique religieuse guidée par la recherche de l'unité avec Rome

Tout comme sous le règne de Jean VIII, Constantin XI est un partisan de l'unité des églises, parce qu'elle constitue la seule chance d'une aide massive de la part de l'Occident.

Constantin XI périt lors des ultimes combats, mais les conditions exactes de sa mort sont inconnues et son cadavre ne fut jamais retrouvé. Il n'est pas exclu qu'il ait été identifié et inhumé par les habitants chrétiens demeurés à Constantinople après la conquête (et regroupés dans le quartier du Phanar), ou même par les soldats ottomans lors du décompte des morts. Toutefois la version la plus probable est que son corps ne fut pas identifié et fut enterré dans une fosse commune parmi ceux de ses soldats. Une légende répandue est qu'il serait inhumé dans ce qui est aujourd'hui l'hagiasma (en grec moderne αγίασμα, source d'eau sacrée) de Aydabir dans le quartier d'Unkapani.

Constantin lors du siège

Les derniers préparatifs

A partir de l'automne 1452 jusqu'au début du siège en avril 1453, Constantin XI dirige une cité sous blocus et confrontée à l'imminence d'un siège où la disproportion des forces s'annonce dramatique pour les Byzantins. Pourtant, ces derniers reçoivent progressivement quelques renforts, en plus des deux cents hommes amenés par Isidore de Kiev. Les étrangers présents dans la ville se mettent pour la plupart au service de Constantin, dont les Vénitiens dirigés par Girolamo Minotto, mais aussi les Catalans, ainsi que la petite suite d'Orkhan. Surtout, de l'aide arrive par la mer, en ordre dispersé et souvent de faible ampleur, mais suffisants pour accroître les chances de succès. Le soutien le plus important vient de Giovanni Giustiniani, noble génois qui dirige un corps de 700 condottiere. Pour les forces byzantines en tant que tel, Constantin peut s'appuyer sur un peu moins de 5 000, plus 2 à 3 000 soldats étrangers, soit moins de 10 000 soldats, parfois seulement des habitants armés pour la défense des remparts. En face, il est difficile d'estimer avec précision l'armée ottomane mais les évaluations raisonnables tournent autour de 80 000 hommes, peut-être 100 000, renforcés d'une artillerie alors en pleine émergence. Elle constitue un réel péril pour les murailles de Constantinople. Si Constantin a fait restaurer ce formidable ouvrage défensif, il reste fragile face aux armes à poudre à canon. Enfin, sur mer, Constantin ne peut espérer grand-chose des vestiges de la marine byzantine, réduite à moins d'une trentaine de navires en comptant les embarcations étrangères qui se sont mises à son service, quand elles ne sont pas parvenues à s'enfuir. Néanmoins, grâce à une chaîne tendue à travers la Corne d'Or, cette flottille reste en mesure de protéger la façade nord des remparts de la ville et d'empêcher l'armada ottomane, forte de plus d'une centaine de navires mais aux équipages peu expérimentés, de prendre d'assaut la cité par son flanc le plus fragile.

La mort de Constantin XI

La question du sort de Constantin XI, lors de la chute de Constantinople, le 29 mai 1453, a été l'objet de nombreuses controverses et a nourri l'imaginaire populaire. L'idée la plus couramment admise est qu'il périt en combattant, parmi ses fidèles soldats, au moment de l'écroulement de la défense byzantine, près de la porte Saint-Romain. La légende affirme que, s'étant débarrassé d'une partie de son armure impériale décorée, il se lança avec eux dans une ultime charge héroïque. Cela expliquerait que son corps n'ait pas été reconnu. Mais il n'existe aucun chroniqueur du siège ayant assisté à la mort de l'empereur et aucun témoin direct ayant laissé de récit détaillé. Son conseiller et ami, Georges Sphrantzès, présent au moment du siège, n'en livre qu'un récit laconique. Il indique que l'empereur périt lors de l'assaut final. Toutefois, lui-même ne se trouvait pas à proximité des lieux, et ne peut dire de quelle façon l'empereur est mort. Cet aveu d'ignorance, de la part d'un proche de l'empereur, laisse supposer qu'aucun des camarades de combat de Constantin XI ne survécut pour livrer un récit sur la façon dont le souverain perdit la vie[13]. Selon Nicolò Barbaro, nul ne sut vraiment ce qu'il advint de l'empereur, ni de sa dépouille… Marco Barbaro complète ce récit, plus tardivement, en indiquant qu'il « se serait jeté dans la mêlée, et, dans un accès de rage, qu'il se serait relevé, après être tombé, avant de retomber ensuite, pour ne plus se redresser »[14]. Selon l'archevêque génois Léonard, il aurait péri écrasé par les fuyards[15], version reprise plus tard par Andrea Cambini, dans son Livre des origines des Turcs et de l'empire des Ottomans, document postérieur au siège. Ubertino Pusculus rapporte qu'il s'opposa seul à l'avancée ottomane et qu'il tua trois janissaires avant d'être mortellement blessé puis décapité. Nestor Alexandre (Iskander), l'auteur de la chronique slave en russe, livre un récit bien différent, probablement influencé par des rumeurs ayant cours après la chute de Constantinople. Il aurait sauté sur un cheval arabe et se serait précipité vers la Porte d'Or pour fuir la ville ; là, il aurait été intercepté par les Ottomans, qui l'auraient tué.

Finalement, le marchand Jacopo Tedaldi livre une version assez représentative du mystère qui entoure la mort de Constantin XI[16] :

« L'empereur de Constantinople mourut et d'aucuns disent qu'il eut la tête tranchée. D'autres disent qu'il mourut à la porte, en la presse, en soi cuidant issir. L'un et l'autre peut bien être vrai : c'est qu'il fut mort en la presse et que puis les Turcs lui eussent coupé la tête. »

Donald MacGillivray Nicol a compilé les différentes versions de la mort de l'empereur et ne parvient pas à démêler la réalité de la fiction. Les versions varient fortement selon les sources, les auteurs grecs insistant sur sa mort héroïque et les sources ottomanes ou slaves présentant une fin plus prosaïque. Quant aux auteurs occidentaux, tels Léonard de Chio, qui ont souvent, par mishellénisme, tendance à rabaisser la valeur des Grecs, ils livrent une version franchement déshonorante : l'empereur serait mort en tentant de fuir[17]. Mario Philippidès et Walter Hanak aboutissent à la même conclusion quant à l'incertitude qui règne autour des ultimes instants du règne et du dernier empereur romain.

Fin de l'Empire byzantin

Les historiens considèrent que sa mort signe la fin de l'Empire byzantin le mardi , mais en fait, Mistra, l'Empire de Trébizonde et la principauté de Théodoros sont trois États byzantins ayant subsisté jusqu'en 1460 (Mistra), 1461 (Trébizonde) et jusqu'au (Théodoros) : c'est cette dernière date qui signe la disparition politique définitive du monde byzantin, mais non sa disparition culturelle, qui perdure dans l'Empire ottoman jusqu'en 1923 à travers les Micrasiates, les Pontiques et les Phanariotes, et jusqu'à nos jours à travers le patriarcat œcuménique de Constantinople et les autres Églises orthodoxes.

Les empereurs Jean VIII Paléologue et Constantin XI Paléologue étaient morts sans héritier mâle. Les deux derniers fils de Manuel II Paléologue, Démétrios et Thomas, se partagent le gouvernement du « despotat de Morée » (Péloponnèse). Les deux frères sont dans l'impossibilité de venir en aide à Constantinople assiégée, car ils ont eux-mêmes à défendre la Morée contre une armée ottomane faisant diversion. Ensuite, ils se livrent une guerre fratricide suicidaire.

Le sultan Mehmed II décide de liquider les derniers vestiges de l'Empire byzantin. Démétrios choisit de se rendre au sultan : il reçoit une forte somme d'argent et quelques îles de l'Égée en apanage. Thomas se réfugie d'abord à Corfou, puis à Raguse qui l'expulse par crainte des Ottomans : il finit par s'installer à Rome où il est accueilli par le pape Pie II. Jusqu'à sa mort, il est considéré comme l'héritier de l'Empire byzantin. L'un de ses deux fils entre comme drogman au service du Sultan, l'autre devient un temps chef de la garde du Vatican, avant de finir abandonné de tous. Par la suite, les Paléologue et les Cantacuzène restés à Constantinople et ayant racheté leur liberté, se mettront tous au service des Ottomans comme drogmans (ambassadeurs-interprètes) et, plus tard, comme hospodars des principautés danubiennes vassales du Sultan.

Historiographie

Dernier empereur de la longue histoire romano-byzantine, Constantin XI a suscité l'attention des historiens, qui retiennent généralement l'idée d'un souverain capable mais confronté à la situation quasi-désespérée de son Empire. Tant comme despote à Mistra que comme empereur, il se révèle volontariste et audacieux, bien que parfois trop téméraire au regard des forces évanescentes de son Empire et de la puissance ottomane en pleine expansion. Pour Georg Ostrogorsky, ni son courage, ni son énergie d'homme d'Etat ne peuvent sauver l'Empire d'une chute inévitable[18].

Culture

Constantin XI Paléologue chargeant les Ottomans, tableau de Theophilos Hadjimichaïl (1932).

En dépit de deux mariages, Constantin XI meurt sans descendance. Ses plus proches parents sont ses deux frères, Thomas et Démétrius, despotes de Morée. Néanmoins, la légende a parfois retenu une veuve qui lui survit, ainsi que plusieurs filles. Une lettre d'Aeneas Silvius (le futur Pie II) à Nicolas V, datée de juillet 1453, est la première à émettre cette idée. Mehmet II les aurait fait parader avant de les exécuter. Toujours selon Aeneas Silvius, un fils de Constantin serait parvenu à se réfugier à Galata. Le récit de la chute de Constantinople par Nestor Iskander, intitulé La Prise de Tsargrad, contribue aussi à propager cette idée de filles ou de fils survivants dans le monde slave. Enfin, le chroniqueur français Mathieu d'Escouchy, qui écrit au XVIe siècle, affirme que Mehmet a violé l'impératrice à Sainte-Sophie, avant de la faire rentrer dans son harem[19].

Dans les pays slaves orthodoxes dont la Russie, la mort du césar (tsar) Constantin XI Paléologue a évolué en mythes selon lesquels l'empereur reviendrait reconquérir Constantinople en franchissant cette même Porte d'Or où il est mort, utilisée au temps de l'Empire byzantin au retour des campagnes militaires triomphales. Dans la mythologie populaire panslaviste, il ferait ce retour triomphal réincarné en Tsar russe. Constantinople était d'ailleurs traditionnellement appelée « Tsargrad » dans les langues slaves.

En Grèce, il est devenu, dans l'histoire et la culture néo-helléniques, le symbole de la bravoure dans la résistance à l'envahisseur musulman et ottoman : au XIXe siècle, le poète Ioannis Zambélios (el) écrit une tragédie intitulée Constantin Paléologue ; le peintre naïf Theophilos Hadjimichaïl a représenté l'ultime charge héroïque du dernier empereur de Constantinople ; en 1956, Níkos Kazantzákis publie la tragédie intitulée Constantin Paléologue ; cette tragédie inspire au compositeur Manólis Kalomiris un opéra du même nom qui est aussi sa dernière œuvre (1961) ; et en 1971, le poète grec Odysséas Elýtis a consacré à cet empereur byzantin le grand poème Mort et Résurrection de Constantin Paléologue.

Constantin XI est l'un des personnages du film turc en noir et blanc İstanbul'un Fethi (« La Conquête de Constantinople »), réalisé par Aydın Arakon et sorti en 1951.

Notes et références

Notes

  1. L'historien contemporain George Sphrantzès, qui connaissait Constantin, donne l'année 1404, mais d'autres sources confirment l'année 1405[1]
  2. Certains byzantinistes comptent Constantin Lascaris dans la liste numérotée des empereurs de ce nom, si bien que Dragasès devient le douzième du nom.
  3. Si l'on ne prend pas en compte le Saint-Empire germanique prenant fin en 1806 ou le Premier Empire qui sombra en 1815, Napoléon étant sacré Empereur des Français par le Pape en 1804. Toutefois, ces empires ne présentent pas la continuité directe qui peut exister entre l'Empire byzantin et l'Empire romain.
  4. L'Histoire a voulu que le dernier empereur d'Occident, Romulus Augustule, porte le nom du fondateur légendaire de Rome et que le dernier empereur byzantin porte le nom du fondateur de Constantinople.

Références

  1. Hellebuyck 2006, p. 6.
  2. Donald MacGillivray Nicol, The Immortal Emperor, Cambridge: University Press, 1992.
  3. (en) Alexander Kazhdan (dir.), Oxford Dictionary of Byzantium, New York et Oxford, Oxford University Press, , 1re éd., 3 tom. (ISBN 978-0-19-504652-6 et 0-19-504652-8, LCCN 90023208).
  4. Nicol 2010, p. 191.
  5. Setton 1978, p. 18-19.
  6. Philippides et Hanak 2011, p. 361.
  7. Philippides et Hanak 2011, p. 362-363.
  8. Nicol 2008, p. 393.
  9. Nicol 1992, p. 51-52.
  10. Nicol 2008, p. 396-397.
  11. Nicol 1992, p. 52-55.
  12. Nicol 1992, p. 55-56.
  13. Philippidès et Hanak 2011, p. 234
  14. Philippidès et Hanak 2011, p. 232.
  15. Philippidès et Hanak 2011, p. 233.
  16. Buchon, Chroniques nationales françaises, 1824, Verdière, Paris, tome XXXVIII, p. 331.
  17. Donald M. Nicol 1992, p. 75-93.
  18. Ostrogorsky 1996, p. 589.
  19. Nicol 1992, p. 95.

Voir aussi

Sources primaires

  • (it) Nicolas Barbaro, Giornale dell' assediodi Constantinopoli, Vienne, E. Cornet,
    version anglaise traduite par J. R. Jones et publiée en 1969 par Exposition Press.
  • Georges Phrantzès, Chronicon, E. Bekker,
  • (en) Georges Sphrantzès (trad. Marios Philippides), The Fall of the Byzantine Empire: A Chronicle, Amherst, University of Massachusetts Press, (ISBN 0870232908)
  • Michel Doukas, Historia Turco-byzantina, Bucarest, Grecu,
    version française traduite par Jean Dayantis et publié en 2004 par l'Atelier national de reproduction des thèses de Lille.
  • (en) Michel Critopoulos (trad. C. T. Riggs), History of Mehmed the Conqueror, Princeton, (1re éd. 1470)

Bibliographie

  • Louis Bréhier, Vie et mort de Byzance, Albin Michel, coll. L'évolution de l'Humanité, Paris, 1946, (ISBN 2-226-05719-6).
  • Dionysios A. Zakythinos, Le despotat grec de Morée, Société d'édition Les Belles Lettres, 1932-1953.
  • Donald MacGillivray Nicol (trad. de l'anglais par Hugues Defrance), Les derniers siècles de Byzance, 1261-1453, Paris, Tallandier, coll. « Texto », , 530 p. (ISBN 978-2-84734-527-8).
  • (en) Donald MacGillivray Nicol, The immortal emperor : the life and legend of Constantine Palaiologos, last emperor of the Romans, Cambridge University Press, .
  • Steven Runciman, (trad. Hugues Defrance), La chute de Constantinople, 1453, Tallandier, coll. « Texto », .
  • John Julius Norwich, Histoire de Byzance 330-1453, traduction française, Perrin, 2002, (ISBN 978-2262018900).
  • Jacques Malherbe, Constantin XI : dernier empereur des Romains, Louvain, Bruylant Academia, .
  • Adam William Hellebuyck, « Foreign Relations and the End of Byzantium: The Use of Personal Diplomacy during the Reign of Constantine XI Palaiologos (1448 – 1453) », Bachelor's Degree Thesis, University of Michigan, (lire en ligne)
  • (en) Marios Philippides et Walter K. Hanak, The Siege and the Fall of Constantinople in 1453 : Historiography, Topography, and Military Studies, Farnham/Burlington (Vt.), Ashgate, , 759 p. (ISBN 978-1-4094-1064-5, lire en ligne).
  • Donald MacGillivray Nicol, The Despotate of Epiros 1267-1479 : A Contribution to the History of Greece in the Middle Ages, Cambridge, Cambridge University Press, , 312 p. (ISBN 978-0-521-13089-9).
  • (en) Kenneth M. Setton, The Papacy and the Levant (1204-1571), vol. 2 : The Fifteenth Century, Philadelphie, Pennsylvania : The American Philosophical Society, coll. « Memoirs of the American Philosophical Society » (no 127), , 580 p. (ISBN 978-0-871-69127-9)
  • (en) William Miller, The Latins in the Levant, a History of Frankish Greece (1204-1566), New York, E. P. Dutton and Company,
  • Denis Zakythinos, Le Despotat grec de Morée, vol. 2 : Vie et institutions, Athènes, L'Hellénisme contemporain,

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