Jean VIII Paléologue

Jean VIII Paléologue (en grec : Ιωάννης Η' Παλαιολόγος), né le à Constantinople, et mort le dans la même ville, est un empereur byzantin de 1425 à 1448, fils de Manuel II Paléologue, empereur byzantin, et d'Hélène Dragaš.

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Jean VIII Paléologue
Empereur byzantin

Médaille par Pisanello, réalisée à Florence en 1438.
Règne
Co-empereur : 1421 -
Empereur : -
(23 ans, 3 mois et 9 jours)
Période Paléologue
Précédé par Manuel II Paléologue
Suivi de Constantin XI Paléologue Dragasés
Biographie
Naissance
Constantinople (Empire byzantin)
Décès (55 ans)
Constantinople (Empire byzantin)
Père Manuel II Paléologue
Mère Hélène Dragaš
Épouse Anne de Moscou
Sophie de Montferrat
Marie de Trébizonde
Empereur byzantin

Avant la mort de Manuel II Paléologue

Il se voit confier la régence à Constantinople pendant le voyage de son père Manuel II Paléologue à Thessalonique et dans le Péloponnèse entre 1414 et 1416. Ensuite, gouverneur de Thessalonique, il reçoit dans les murs de la cité le prince ottoman Mustafa Çelebi, révolté contre son frère le sultan Mehmed Ier et vaincu par lui ; à la suite de cette défaite, Mustafa est interné par les Byzantins sur l'île de Lemnos.

Jean VIII est couronné co-empereur auprès de son père au début de l'année 1421. La même année, le sultan Mehmed Ier décède, et Jean VIII, contre l'avis de son père, veut aider Mustafa à s'imposer comme successeur contre son neveu Mourad II, afin d'obtenir des avantages pour les Byzantins. Manuel II est très hostile à cette idée aventureuse, mais cède finalement, et Jean VIII fait transporter Mustafa de Lemnos à la presqu'île de Gallipoli. Le prétendant soutenu par les Byzantins parvient à se faire reconnaître à Gallipoli et Andrinople, mais, passant en Asie mineure au début de 1422 et marchant sur Brousse, il est mis en déroute par son neveu ; rattrapé dans les Balkans, il est pendu. Mourad II tourne alors sa fureur vers les Byzantins et assiège Constantinople et Thessalonique[1].

À l'automne 1422, le sultan doit lever le siège de Constantinople à la suite de la révolte de son frère cadet appelé aussi Küçük Mustafa, qui s'empare de Nicée avec l'appui des Byzantins. Mais Mustafa le Jeune est lui aussi vaincu par Murad II au début de 1423, et le sultan le fait étrangler. Ensuite, renonçant provisoirement à Constantinople, il fait redoubler les attaques contre Thessalonique et envoie une armée mettre le Péloponnèse au pillage[2]. Jean VIII est alors envoyé par son père en Occident pour demander de l'aide. Il se rend d'abord à Venise, puis auprès de l'empereur germanique Sigismond[3].

Jean VIII revient les mains vides au printemps 1425. Entre-temps, le sultan a accordé une paix aux conditions drastiques à Manuel II : sur le continent, en dehors du Péloponnèse, les Byzantins sont réduits aux villes côtières de Constantinople, Sélymbrie, Thessalonique, Anchialos et Messembrie, et se voient imposer un tribut annuel de 20 000 hyperpérions. Manuel II, devenu grabataire, se fait moine en juin 1425, et meurt le .

Après la mort de Manuel II

Le contexte : un Empire byzantin très affaibli

L'Empire byzantin sur lequel règne Jean VIII est constitué de Constantinople et de Sélymbrie ; Anchialos et Messembrie sont donnés en apanage à son jeune frère Constantin XI Paléologue, tandis que son autre frère Théodore II Paléologue est despote de Morée. Quant à Thessalonique, la ville a en fait été abandonnée dès 1423 aux Vénitiens par les Byzantins, incapables d'en assurer la défense. De ce fait, l'Empire byzantin, qui était parvenu à reprendre quelques territoires aux Ottomans après la défaite de ces derniers lors de la bataille d'Ankara en 1402 (la reprise de Thessalonique est à cet égard importante), a reflué face à la refondation de la puissance ottomane.

Les Byzantins sont de nouveau sur la défense, comme en témoigne le siège que subit Constantinople en 1422, qui confirme le nouvel essor ottoman. Ces derniers consolident progressivement leur emprise sur la péninsule balkanique tandis que les Byzantins ne dominent que quelques territoires éparses. Seul le despotat de Morée apparaît comme relativement préservé de la menace ottomane et il semble être la seule base à partir de laquelle une reconquête territoriale serait possible. Toutefois, ce territoire est profondément déstabilisé par un état d'anarchie latent et l'incapacité du pouvoir central à y imposer son autorité durablement[4].

Le règne de Jean VIII Paléologue

Théodore II Paléologue ayant exprimé le désir de se retirer dans un monastère, Jean VIII décide de redistribuer les cartes entre les frères : faire de Constantin XI Paléologue le despote de Morée, et attribuer Messembrie à son autre frère Démétrios Paléologue. Jean VIII et Constantin XI se rendent dans le Péloponnèse à l'automne 1426, mais entre-temps Théodore II a changé d'avis. Les frères Paléologue attaquent la ville de Glarentza, qui appartient à Carlo Ier Tocco, comte palatin de Céphalonie et Zante, et au début 1427 ils défont ce dernier dans une bataille navale des Îles Échinades. Tocco abandonne à Constantin XI la portion du Péloponnèse qu'il contrôle et lui donne la main de sa fille ; Jean VIII y ajoute la partie ouest du domaine de Théodore II. Il découpe d'autre part un petit territoire dans le nord de la péninsule pour le plus jeune de ses frères, Thomas Paléologue. Après avoir effectué ce partage, l'empereur rentre à Constantinople[5].

Le , les Ottomans s'emparent de Thessalonique après un siège de plus de sept ans. La même année, Jean VIII parvient à un accord avec le pape Martin V pour la convocation d'un concile œcuménique où se négocierait la réunification des Églises : le pape s'engage à organiser le voyage en Italie d'une délégation de sept cents Orientaux, dont l'empereur et les patriarches de Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem. Mais Martin V meurt au début de l'année 1431, et la succession pontificale, puis le conflit qui éclate entre le nouveau pape, Eugène IV, et le concile de Bâle-Ferrare-Florence-Rome, ouvert en juillet 1431, gèlent les négociations avec les Byzantins.

En septembre 1437, le pape Eugène IV, ayant repris la main, parvient à obtenir le transfert de la majorité des membres du concile de Bâle à Ferrare, arguant notamment de la nécessité d'y intégrer des représentants des Églises orientales. Il envoie Nicolas de Cues à Constantinople pour y mander la délégation prévue. Laissant la régence dans la capitale à son frère Constantin XI, Jean VIII embarque fin novembre avec le patriarche Joseph II de Constantinople, des représentants des patriarches d'Alexandrie, d'Antioche et de Jérusalem, les métropolites de Nicée (Bessarion), d'Éphèse (Marc d'Éphèse), de Rhodes, de Trébizonde, de l'Église de Kiev et de toute la Rus' (Isidore de Kiev), des évêques de Bulgarie, de Géorgie, des archimandrites et d'autres membres du clergé. La délégation arrive à Venise en février 1438, à Ferrare en mars[6].

Les débats officiels sur la réunification des Églises sont ouverts le par le discours inaugural de Bessarion. En janvier 1439, la peste s'étant déclarée à Ferrare, le concile est transféré à Florence. Le , le décret d'Union des Églises est lu dans la cathédrale Santa Maria del Fiore, en grec (par Bessarion) et en latin. Le patriarche Joseph II de Constantinople était mort le , mais il a laissé un texte écrit avalisant le décret. Seul parmi les évêques, Marc d'Éphèse refuse de signer.

La délégation byzantine rembarque à Venise fin octobre, et est de retour à Constantinople en janvier 1440, après plus de deux ans d'absence. Aussitôt, l'apparente quasi-unanimité de l'Église grecque manifestée à Florence se dissout : plusieurs délégués qui avaient signé se rétractent ; Jean VIII a le plus grand mal à trouver un successeur partisan de l'Union au patriarche Joseph II de Constantinople, et quand il impose Métrophane II de Constantinople, en mai 1440, une grande partie du clergé refuse de reconnaître son autorité ; les trois patriarches d'Alexandrie, d'Antioche et de Jérusalem désavouent la signature de leurs représentants ; Isidore de Kiev, sitôt rentré, est chassé de Russie l'année suivante. Bessarion, complètement désillusionné, retourne en Italie en décembre 1440.

Démétrios Paléologue, le frère de l'empereur, depuis son apanage de Messembrie, se fait le porte-voix des opposants à l'Union. En 1442, il s'entend avec les Ottomans et assiège Constantinople avec des troupes qui lui ont été confiées par le sultan. Mais l'entreprise échoue, personne dans la capitale ne pousse l'opposition à l'Union jusqu'à trahir l'empereur, et Démétrios est mis aux arrêts.

La croisade promise par le pape Eugène IV est prête en 1444 : une flotte quitte Venise pour se diriger vers l'Hellespont, et une armée chrétienne de vingt mille hommes, commandée par le roi hongrois Ladislas III Jagellon, quitte Buda pendant l'été. Le désastre de Varna, le , où le roi Ladislas III est tué, met un terme à l'expédition. La résistance chrétienne dans les Balkans se poursuit, dirigée par Jean Hunyadi, régent de Hongrie, dans le Nord, et par Constantin XI Paléologue, qui envahit la Thessalie au printemps 1445, dans le Sud, mais en 1446 les Vénitiens concluent une trêve avec le sultan ottoman et retirent leur flotte.

Pendant l'année 1447, le sultan Mourad II rétablit sa domination en Grèce. Jean VIII Paléologue meurt quelques jours après une nouvelle défaite de Jean Hunyadi face au sultan, la bataille de Kosovo de 1448, dans une situation totalement désespérée.

Famille

Il se maria trois fois, sans avoir d'enfant :

  1. en 1409 avec Anne de Moscou (1393-1417), fille de Vassili Ier Dmitrievitch, grand prince de Moscou.
  2. en 1421 avec Sophie de Montferrat (1399-1434), fille de Théodore II de Montferrat, marquis de Montferrat. Ils se séparent en 1426.
  3. en 1427 avec Marie de Trébizonde (morte en 1439), fille d'Alexis IV de Trébizonde.

Notes et références

  1. Nicol 2008, p. 354-355.
  2. Nicol 2008, p. 356.
  3. Nicol 2008, p. 356-357.
  4. Nicol 2008, p. 361-362.
  5. Nicol 2008, p. 368.
  6. Nicol 2008, p. 375.

Bibliographie

  • Louis Bréhier, Vie et mort de Byzance, Albin Michel, coll. L'évolution de l'humanité, Paris, 1946, (ISBN 2-226-05719-6).
  • Donald M. Nicol (trad. de l'anglais par Hugues Defrance), Les Derniers siècles de Byzance, 1261-1453, Paris, Tallandier, coll. « Texto », , 530 p. (ISBN 978-2-84734-527-8).
  • Cécile Morrisson et Angeliki Laiou, Le Monde byzantin III, l'Empire grec et ses voisins, Paris, Puf, coll. « Nouvelle Clio », , 494 p. (ISBN 978-2-13-052008-5).
  • (en) Jonathan Harris, The End of Byzantium, New Haven (Conn.), Yale University Press, , 298 p. (ISBN 978-0-300-11786-8, lire en ligne).
  • Ivan Djuric, Le crépuscule de Byzance, Maisonneuve & Larose, Paris, 1996, (ISBN 2-7068-1097-1).
  • Stavros Lazaris, « L'empereur Jean VIII Paléologue vu par Pisanello lors du concile de Ferrare-Florence », Byzantinische Forschungen 29 (2007), p. 293-324 et 11 figs. : http://halshs.archives-ouvertes.fr/docs/00/36/60/73/PDF/SL.Empereur_comprime.pdf.
  • Sebastian Kolditz, Johannes VIII : Palaiologos und das Konzil von Ferrara-Florenz (1438-1439), 2 tomes, Stuttgart : Anton Hiersemann Verlag, 2013-2014, (ISBN 978-3-7772-1319-4).
  • (en) John Julius Norwich, Byzantium : The Decline and Fall, Londres, Penguin, , 488 p. (ISBN 978-0-670-82377-2 et 0-670-82377-5).
  • Georg Ostrogorsky, Histoire de l'État byzantin, Paris, Payot, .
  • (en) Warren Treadgold, A History of the Byzantine State and Society, Stanford University Press, , 1019 p. (ISBN 978-0-8047-2630-6, lire en ligne).

Articles connexes

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