Attaque d'Anvers

L'attaque d'Anvers est un épisode de la guerre de Quatre-Vingts Ans lors duquel François d'Anjou, frère de Henri III de France, tente de s'emparer par surprise de la ville d'Anvers le .

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Attaque d'Anvers
Attaque d'Anvers (1583).
Informations générales
Date
Lieu Anvers (Belgique actuelle)
Issue Victoire hollandaise
Belligérants
Cité d'Anvers François de France
Commandants
aucunComte Rochepot
Forces en présence
des milliers d'Anversois3 000 mousquetaires
1 000 cavaliers
Pertes
100 morts1 500 morts
500 prisonniers

Guerre de Quatre-Vingts Ans

Batailles

Coordonnées 51° 13′ 00″ nord, 4° 24′ 00″ est
Géolocalisation sur la carte : Belgique

Contexte

Vers 1566-68 s'est déclenchée aux Pays-Bas la guerre de Quatre-Vingts Ans, qui a vu les provinces du nord des Pays-Bas se rebeller contre les autorités espagnoles. En 1579, les provinces rebelles se sont regroupées dans l'Union d'Utrecht, formant les Provinces Unies des Pays-Bas, qui en 1581, ont publié l'Acte de La Haye, par lequel ils déclaraient ne plus reconnaître pour roi Philippe II d'Espagne.

Dans le but d'obtenir des appuis qui rendraient officielle leur déclaration d’indépendance, le stathouder Guillaume Ier d'Orange-Nassau et les États généraux des Provinces-Unies cherchèrent un candidat qui occuperait le trône des Provinces-Unies. Après l'échec des négociations avec Matthias de Habsbourg, ils arrivèrent à un accord avec François d'Anjou, frère du roi Henri III.

En septembre 1580 fut signé le traité de Plessis-lès-Tours, par lequel les États généraux étaient disposés à accepter François d'Anjou comme roi des Provinces-Unies. Les conditions de l'accord étaient clairement favorables aux Provinces-Unies : Anjou devrait se contenter d'être une figure purement représentative, alors que le pouvoir de facto demeurait dans les mains des États généraux.

En janvier 1583, le duc d'Anjou, impatienté par le retard pris par son couronnement et en désaccord avec les limitations que le traité imposait à son autorité et avec les concessions religieuses au protestantisme majoritaire dans les Provinces-Unies, planifia de se rendre maître militairement de diverses cités des Flandres et du Brabant.

L'attaque d'Anvers

Préparatifs

Faisant partie du plan qui consistait à faire pénétrer les forces du duc d'Anjou à l'intérieur de plusieurs cités de la zone, le , la garnison française de Dunkerque profita d'un affrontement mineur entre ses troupes et les habitants, pour s'assurer militairement de la place. Ils procédèrent de la même manière à Ostende, Dixmude, Termonde, Alost et Vilvorde. À Bruges, à cause d'un retard dans la mise en exécution des plans, les chefs français furent arrêtés par les autorités néerlandaises, averties de ce qui s'était passé dans les autres cités.

Ayant l'intention de prendre aussi Anvers, capitale du Brabant et résidence de Guillaume d'Orange, ayant comme bourgmestre Philippe de Marnix, le , le duc d'Anjou amena ses troupes à Borgerhout[1], près d'Anvers, sous le prétexte de préparer une attaque contre Eindhoven.

Méfiant des intentions françaises, Guillaume d'Orange demanda à François d'Anjou la raison de la présence de ses troupes près d'Anvers ; Anjou répondit en garantissant sa fidélité aux Provinces-Unies et en s'engageant de ne pas introduire de troupes dans la cité.

Attaque de la ville

Le 17 janvier à midi, 300 soldats de la cavalerie d'Anjou s'approchèrent de la porte d'Anvers, en feignant d'accompagner un homme blessé et sollicitant d'entrer dans la cité pour le soigner. Après avoir abattu les soldats qui défendaient la porte, ils entrèrent dans la cité, en donnant l'accès au reste de l'armée, qui les suivait avec 3 000 mousquetaires et 600 hommes à cheval, commandés par le comte Rochepot.

La faible garnison qui défendait Anvers fut rapidement submergée par les assaillants, qui se dispersèrent aussitôt dans les rues pour mettre la ville à sac. Les citoyens d'Anvers fermèrent les portes de la cité et improvisèrent une défense désespérée ; durant une heure, avantagés par la dispersion des forces françaises dans les rues étroites, ils engagèrent des combats au corps à corps dans toute la ville. Ces affrontements causèrent la mort d'environ 1 500 soldats français, et 500 autres furent faits prisonniers[2]  notamment Jean Bodin, ambassadeur du duc d'Anjou, qui a fait le récit de cette attaque[3] , alors que les pertes parmi les habitants sont estimées à un peu plus de 100[4].

Retrait du duc d'Anjou

Tableau satirique peint vers 1585 : la vache représente les provinces des Pays-Bas. Philippe II essaie de la diriger ; ses éperons labourent les flancs. Guillaume d'Orange retient la vache par les cornes et Élisabeth Ire lui donne à manger. La vache défèque sur le duc d'Anjou qui lui soulève la queue.

Après la déroute, le duc d'Anjou se retira avec le reste de ses troupes vers Termonde ; sa route s'est vue interrompue par la rupture intentionnelle d'une digue à Malines, causant une inondation au passage des Français, et qui provoqua environ 1 000 morts parmi eux[4]. Continuant vers le sud, ils arrivèrent à Mons, où ils stationnèrent.

Cette attaque est connue dans la littérature anglo-saxonne comme la furie française, en souvenir de la furie espagnole de 1576, lors de laquelle les tercios espagnols mirent à sac la cité, tuant plusieurs milliers de citoyens[5].

Conversations

Depuis Mons, le duc d'Anjou engagea une correspondance avec Guillaume d'Orange et avec les autorités d'Anvers, dans laquelle il justifiait son désir de contrôler Anvers par les offenses que lui infligeaient les États généraux qui voulaient limiter son autorité ; il réaffirmait sa fidélité à la cause hollandaise et attribuait les événements à une insubordination de ses troupes.

Alexandre Farnèse, gouverneur des Pays-Bas espagnols, essaya de profiter de la situation à son bénéfice, proposant au duc d'Anjou une alliance avec le parti espagnol. Les demandes démesurées du duc d'Anjou, qui voulut rester maître de plusieurs cités de la frontière franco-hollandaise en échange de la remise des places sous commandement français, empêchèrent un accord[4].

La mainmise simultanée du duc d'Anjou sur toutes les places ayant des garnisons françaises, l'interception de la correspondance avec son frère le roi de France et la découverte des pourparlers avec Farnèse montrèrent clairement la duplicité du duc d'Anjou à l'égard des Provinces-Unies, mais la situation de ces dernières dans la guerre contre l'Espagne n'était pas assez solide pour rompre les accords avec les Français : sans l'appui du duc d'Anjou, et par conséquent celui de la France, les Provinces-Unies ne seraient pas capables de contenir l'avancée des tercios espagnols d'Alexandre Farnèse. Guillaume d'Orange leur conseilla d'essayer de se réconcilier avec le duc, voyant dans cette stratégie l'unique manière de maintenir leur indépendance à l'égard de l'Espagne. Dans les derniers jours du mois de , le duc d'Anjou et les États généraux établirent un accord provisoire selon lequel[6] :

  • Les soldats français faits prisonniers durant l'attaque seraient libérés ;
  • On rendrait les propriétés du duc d'Anjou à Anvers ;
  • On remettrait au duc d'Anjou 90 000 florins[7] pour le paiement de l'arriéré des soldes des troupes françaises ;
  • Le duc d'Anjou devrait réactualiser les conditions du traité de Plessis-lès-Tours ;
  • Les troupes françaises devraient jurer fidélité aux États généraux ;
  • Les places prises par les forces françaises seraient rendues ;
  • Le duc d'Anjou devrait se retirer à Dunkerque avec ses troupes jusqu'à la conclusion définitive de l'accord.

Conséquences

Le commandement des troupes françaises passa au maréchal de Biron. Ce dernier s'empara de Gouda, et repoussa les Espagnols à Roosendaal, mais bientôt Alexandre Farnèse conquit Eindhoven, Diest, Westerlo, Gand et Bruges dans une avance rapide. Le duc d'Anjou tomba malade à Dunkerque et, devant la proximité de l'armée espagnole, revint en France. Farnèse continua sa marche, prenant Dunkerque, Nieuport, Dixmude et Menin[6].

Guillaume d'Orange fit fortifier Anvers. Son appui au duc d'Anjou et son mariage en avril avec Louise de Coligny, fille du chef des huguenots français Gaspard de Coligny, éveillèrent l'hostilité de la cité. Rejeté par les Anversois et craignant pour sa sécurité, le , il se retira en Zélande, province dont il était stathouder et où il comptait de nombreux partisans. En dépit de ses tentatives pour maintenir les appuis français du côté hollandais, l'opposition des États généraux et celle de la population finirent par obtenir l'expulsion des troupes françaises : le , elles embarquèrent à Biervliet (Zélande) pour se retirer définitivement en France[6].

François d'Anjou mourut en France en juin 1584. Guillaume d'Orange fut assassiné par Balthazar Gérard le mois suivant. Le retrait français facilita l'avancée des tercios d'Alexandre Farnèse qui capturèrent sans difficultés, au cours de cette année, les territoires le long de l'Escaut ; Zutphen et d'autres cités de Gueldre furent prises en septembre grâce au changement de camp de Guillaume van der Bergh, qui les remit aux Espagnols.

En , les tercios assiégèrent Anvers, obtenant la reddition de la cité en août 1585.

Voir aussi

Références

  1. Actuellement, Borgerhout est un district d'Anvers.
  2. George Edmunson: History of Holland. Juan de Mariana parle de 2 000 prisonniers, un chiffre exagérément élevé.
  3. Jean Bodin, Lettre à Jean Bautru des Matras, le 25 janvier 1583.
  4. John Lothrop Motley: The rise of the dutch republic, cap. VI.
  5. Frédéric Duquenne (L'entreprise du duc d'Anjou aux Pays-Bas) se réfère à cette attaque comme "la folie d'Anvers".
  6. Juan de Mariana : Historia general de España.
  7. John Lothrop Motley parle de 30 000 florins

Sources

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