Recès d'Empire

Le recès de la Diète d'Empire (en allemand : Reichsdeputationshauptschluss ou Hauptschluss der außerordentlichen Reichsdeputation) est une résolution (recès) de la dernière séance de la Diète d'Empire tenue le à Ratisbonne (électorat de Bavière). Le recès est le résultat des négociations de la députation extraordinaire de la Diète, conduites sous la médiation et sur les propositions de la France et de la Russie. La Diète l'approuve le et l'empereur François II le ratifie le suivant. Il est décidé, en vertu de l'accord entre la France et le Saint-Empire romain germanique de 1802 et en conséquence du traité de Lunéville, la sécularisation et la médiatisation afin de dédommager des princes allemands des terres au-delà du Rhin, perdues en faveur de la Première République française au cours des guerres de la Révolution française.

Première page du recès de la Diète d'Empire (25 février 1803).

D'autres princes, qui ne possèdent pourtant rien sur la rive gauche du Rhin, obtiennent des avantages territoriaux. Pour plaire au tsar de Russie, le Premier consul Napoléon Bonaparte obtient que le duc d'Oldenbourg reçoive le nord-est de la principauté épiscopale de Münster. L'électorat de Brunswick-Lunebourg, dont le titulaire est le roi Georges III du Royaume-Uni, s'agrandit de la principauté épiscopale d'Osnabrück.

Le recès d'Empire bouleverse le Saint-Empire romain germanique dans la mesure où les principautés ecclésiastiques disparaissent, ainsi que 45 villes libres sur 51. Les princes sont indemnisés bien au-delà des pertes subies. Les souverains obtiennent l'autorisation de séculariser tous les biens d'Église se trouvant sur leur territoire. La puissance impériale s'en trouve fragilisée alors que la France renforce son influence dans le monde germanique en ayant joué la carte des États moyens et de la Prusse contre l'empereur. Le recès d'Empire mécontente gravement les chevaliers qui vont devenir de farouches opposants à Bonaparte.

Contexte

L'article 7 du traité de Lunéville prévoit le « dédommagement » des « princes et États de l'Empire » qui « se trouvent particulièrement dépossédés, en tout ou en partie », par la « cession que fait l'Empire à la République française » et que, « en conformité des principes formellement établis au congrès de Rastatt, l'Empire est tenu de donner aux princes héréditaires qui se trouvent dépossédés à la rive gauche du Rhin, un dédommagement qui est pris dans le sein dudit Empire, suivant les arrangements qui, d'après ces bases, seront ultérieurement déterminés ».

Négociation préalables

Cinq traités bipartites sont signés, à Paris :

  • un traité signé le , entre la France et la Prusse, relatif aux indemnités de celle-ci ;
  • un second traité signé le , entre la France et la Prusse, relatif aux réclamations de la maison d'Orange-Nassau ;
  • un traité signé le , entre la France et la Bavière, relatif aux intérêts de celle-ci ;
  • un traité signé le , entre la France et la Russie, par lequel celles-ci conviennent de se charger de la médiation pour le règlement des indemnités et dressent, à cet effet, un plan général destiné à être présenté à la Diète ;
  • un traité signé le , entre la France et le Wurtemberg.

Députation extraordinaire

Le , la Diète d'Empire nomme la députation extraordinaire. Son avis est ratifié par l'empereur le suivant. Elle comprend quatre princes-électeurs — Mayence, Saxe, Bohème et Brandebourg — et quatre membres du collège des princes — Bavière, Wurtemberg, le grand-maître de l'ordre Teutonique et le landgraviat de Hesse-Cassel.

Le collège des villes d'Empire n'est pas représenté. Elle s'assemble le . L'archevêque de Mayence y délègue le baron d'Albini, Franz Joseph von Albini ; le roi de Bohème, de Schraut puis le comte de Coloredo-Mansfeld ; l'électeur de Saxe, de Globig ; l'électeur de Brandebourg, le comte de Gœrtz et Hœnliein ; le duc de Bavière, le baron de Rechberg et Rothenlœwen ; le grand-maître de l'ordre Teutonique, le baron de Nordegg-Rabenau ; le duc de Wurtemberg, le baron de Norman, suppléé, lors de la première séance, par le baron de Bühler ; et le landgraviat de Hesse-Cassel, de Gunterrode puis Starkloff.

Princes-électeurs

Pour un article plus général, voir Prince-électeur.

Le nombre des princes-électeurs est porté de neuf à dix.

Deux archevêques perdent la qualité de prince-électeur :

L'archevêque de Mayence conserve sa qualité de prince-électeur ainsi que celle d'archichancelier. Mais le siège de l'électorat de Mayence est transféré à Ratisbonne.

Cinq princes laïques conservent la qualité de prince-électeur :

Quatre autres princes laïques sont élevés au rang de prince-électeur :

Collège des princes

Le nombre des sièges au collège des princes de la Diète est réduit à 131, à savoir[1] :

OrdreNomAntérioritéPrince
1AutricheBohêmeEmpereur, en tant qu'archiduc d'Autriche[2]
2 Haute-BavièreBavière[3]
3 StyrieN[4]Bohême[3]
4 MagdebourgBrandebourg[3]
5 SalzbourgSalzbourg[3]
6 Basse-BavièreN[4]Bavière[3]Électeur palatin, en tant que duc de Bavière[2]
7 RatisbonneRatisbonne[3]
8 SoulzbachN[4]Bavière[3]Électeur palatin, en tant que duc de Bavière[2]
9 Ordre teutonique
10 NeubourgBavière[3]
11 BarmbergBavière[3]
12 BrêmeBrunswick-Lunebourg[3]
13 MisnieN[4]Saxe[3]
14 BergN[4]Bavière[3]Électeur palatin, en tant que duc de Bavière[2]
15 WurzbourgBavière[3]
16 CarinthieN[4]Bohême[3]Empereur, en tant qu'archiduc d'Autriche[2]
17 EichstättSalzbourg[3]
18 Saxe-Cobourg
19 BruchsalTBade[3]
20 Saxe-Gotha
21 EttenheimTBade[3]
22 Saxe-Altenbourg
23 ConstanceBade[3]
24 Saxe-Weimar
25 AugsbourgBavière[3]
26 Saxe-Eisenach
27 HildesheimBrandebourg[3]
28 Principauté de (Brandebourg-) AnsbachBrandebourg[3]
29 Principauté (héréditaire) de PaderbornBrandebourg[3]
30 Principauté de (Brandebourg-) BayreuthBrandebourg[3]
31 FreisingBavière[3]
32 Principauté de Brunswick-Wolfenbüttel
33 Landgraviat de ThuringeN[4]
34 Brunswick-LunebourgBrunswick-Lunebourg
35 PassauBavière[3]
36 Principauté de (Brunswick-) CalenbergBrunswick-Lunebourg[3]
37 Principauté de TrenteBohême[3]
38 Principauté de (Brunswick-) GrubenhagenBrunswick-Lunebourg[3]
39 Principauté de BrixenBohême[3]
40 HalberstadtBrandebourg[3]
41 Duché de CarnioleN[4]Bohême[3]
42 Margraviat de Bade-BadeBade[3]
43 Wurtemberg-TeckN[4]Wurtemberg[3]
44 Margraviat de Bade-DurlachBade[3]
45 OsnabrückBrunswick-Lunebourg[3]
46 VerdenBrunswick-Lunebourg[3]
47 Principauté épiscopale de MünsterBrandebourg[3]
48 Bade-HachbergBade[3]
49 Principauté de Lübeck
50 Duché de WurtembergWurtemberg[3]
51 HanauN[4]Hesse[3]Électeur de Hesse[2]
52 Holstein-Glückstadt
53 Fulde
54 Holstein-Oldenbourg
55 KemptenBavière[3]
56 Mecklembourg-Schwerin
57 ElwangenWurtemberg
58 Mecklembourg-Güstrow
59 Ordre souverain de Malte
60 Hesse-Darmstadt
61 BerchtolsgadenSalzbourg[3]
62 Landgraviat de Hesse-CasselHesse[3]
63 WestphalieN[4]
64 Poméranie citérieure
65 Holstein-PlœnN[4]
66 Poméranie ultérieureBrandebourg[3]
67 BrisgauN[4]Duc de Modène[2]
68 Duché de Saxe-LauenbourgBrunswick-Lunebourg[3]
69 Corvey
70 Principauté de MindenBrandebourg[3]
71 MisnieN[4]Saxe[3]
72 LeuchtenbergBavière[3]
73 Anhalt
74 Saxe-Henneberg
75 Schwerin
76 CaminBrandebourg[3]
77 Principauté de Ratzebourg
78 HirschfeldHesse[3]
79 TyrolN[4]Bohême[3]Empereur, en tant qu'archiduc d'Autriche[2]
80 TübingenN[4]Wurtemberg[3]
81 QuerfurtN[4]Saxe[3]
82 ArenbergT
83 Hohenzollern-Hechingen
84 FritzlarN[4]Hesse[3]Électeur de Hesse[2]
85 Lobkowitz
86 Salm-Salm
87 Dietrichtein
88 Nassau-Hadamar
89 ZwiefaltenN[4]Wurtemberg[3]
90 Nassau-Dillenbourg
91 Auersberg
92 StarckenbourgN[4]
93 Frise orientaleBrandebourg[3]
94 Fürstenberg
95 Schwarzenberg
96 GottingenN[4]Brunswick-Lunebourg[3]
97 MindelheimN[4]Bavière[3]Électeur palatin, en tant que duc de Bavière[2]
98 Liechtenstein
99 Tour et Taxis
100 Schwarzbourg
101 Landgraviat d'OrtenauN[4]Duc de Modène[2]
102 AschaffenbourgN[4]Ratisbonne[3]Électeur-archichancelier[2]
103 ElschsfeldN[4]Brandebourg[3]Roi de Prusse, en tant que duc de Magdebourg[2]
104 BlankenbourgN[4]
105StagardN[4]Duc de Mecklembourg-Strelitz[2]
106ErfurthN[4]Brandebourg[3]Roi de Prusse, en tant que duc de Magdebourg[2]
107 Nassau-UsingenN[4]Prince de Nassau-Usingen[1]
108 Nassau-WeilbourgN[4]Prince de Nassau-Weilbourg[1]
109 Hohenzollern-SigmaringenN[4]Prince de Hohenzollern-Sigmaringen[1]
110 Salm-KyrbourgN[4]Prince de Salm-Kyrbourg[1]
111 Furstenberg-Baar et StuhlingenN[4]Prince de Fustenberg[1]
112 Schwarzenberg-KlettgauN[4]Prince de Schwarzenberg[1]
113 Tour et Taxis / BuchauN[4]Prince de Tour et Taxis[1]
114 WaldeckN[4]Prince de Waldeck[1]
115 Löwenstein-WertheimN[4]Prince de Löwenstein-Wertheim[1]
116 Œttingen-SpielbergN[4]Prince d'Œttingen-Spielberg[1]
117 Œttingen-WallersteinN[4]Prince d'Œttingen-Wallerstein[1]
118 Solms-BraunfelsN[4]Prince de Solms-Braunfels[1]
119 Hohenlohe-NeuensteinN[4]Prince de Hohenlohe-Neuenstein[1]
120 Hohenlohe-Waldenbourg-SchillingsfurstN[4]Prince de Hohenlohe-Waldenbourg-Schillingsfurst[1]
121 Hohenlohe-Waldenbourg-BartensteinN[4]Prince de Hohenlohe-Waldenbourg-Bartenstein[1]
122 Isembourg-BiersteinN[4]Prince d'Isembourg-Bierstein[1]
123 Kaunitz-RittbergN[4]Prince de Kaunitz[1]
124 Reuss-Plauen-GreizN[4]Prince de Reuss-Plauen-Greiz[1]
125 LigangeN[4]Prince de Linange[1]
126 Ligne (Edelstetten)N[4]Prince de Ligne[1]
127 Looz (Wolbeck)N[4]Duc de Looz[1]
128 Comtes de Souabe
129 Comtes de Wettéravie
130 Comtes de Franconie
131 Comtes de Westphalie
  • N : voix créées

Villes d'Empire

Les villes d'Empire suivantes sont abolies :

Les six villes d'Empire suivantes sont maintenues :

Modifications territoriales

Pertes et gains (superficie (en km²) et population, chiffres arrondis)
Pertes Profits
km² Habitants km² Habitants
Prusse 2 000 140 000 12 000 600 000
Bavière 10 000 600 000 14 000 850 000
Bade 450 30 000 2 000 240 000
Wurtemberg 400 30 000 1 500 120 000

Électorat de Bavière

La maison de Wittelsbach est la plus touchée par l'annexion de la rive gauche du Rhin si bien que l'électorat de Bavière reçoit en compensation :

L'électeur de Bavière, membre de la confédération du Rhin, obtiendra de Napoléon l'érection de son électorat en royaume de Bavière (1806).

Nassau

Le duché de Nassau obtient :

Hesse-Darmstadt et Bade

Le landgraviat de Hesse-Darmstadt sera érigé, en 1806, en grand-duché de Hesse et du Rhin.

Duché de Wurtemberg

Devenu électorat de Wurtemberg, il obtient :

L'électorat duché sera érigé, en 1806, en royaume de Wurtemberg (le Wurtemberg profite de ses alliances matrimoniales : l'électrice est la sœur du roi d'Angleterre et la tsarine est la sœur de l'électeur).

Prusse

Le royaume de Prusse est largement indemnisé en obtenant

Duché d’Aremberg

Louis-Engelbert, duc d'Aremberg, dont l'ensemble des territoires était situé sur la rive gauche du Rhin, perdit l'essentiel de ses possessions. En exécution de l’article 7 de la résolution, il lui fut assigné, à titre d’indemnité, le comté de Recklinghausen, qui faisait partie de l’électorat de Cologne, et le bailliage de Meppen (Allemagne), dépendant de l’ancienne principauté épiscopale de Münster. Ces deux pays, dont la population était d’environ soixante et dix mille âmes, furent érigés en duché d'Arenberg-Meppen.

Notes et références

  1. Köbler 2007, p. XXIV.
  2. Köbler 2007, p. XXIII.
  3. Himly 1876, p. 305, n. 1 (suite).
  4. Himly 1876, p. 304, n. 1.

Voir aussi

Bibliographie

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