Place Jean-Jaurès (Marseille)
La place Jean-Jaurès, dite la Plaine, est une voie située à la limite des 1er, 5e et 6e arrondissements de Marseille, entre les quartiers de Thiers, du Camas et de Notre-Dame-du-Mont. Elle est plus connue sous le nom de La Plaine.
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Place Jean-Jaurès
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Place Jean-Jaurès « La Plaine » | ||
Situation | ||
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Coordonnées | 43° 17′ 42″ nord, 5° 23′ 11″ est | |
Arrondissement | 1er, 5e et 6e | |
Quartier | Thiers Le Camas Notre-Dame-du-Mont |
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Morphologie | ||
Type | Place | |
Superficie | 25,220 m2 | |
Transport | ||
Bus | ||
Histoire | ||
Anciens noms | Plan Saint-Michel Place de la Constitution |
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Géolocalisation sur la carte : Marseille
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Origine du nom
Le nom de la Plaine est paradoxal, car il faut la grimper pour y arriver. Ce nom provient tout simplement d'une francisation de l'appellation ancienne du lieu, « Plan Saint-Michel » (en provençal : Plan Sant-Miquèu), plan signifiant plateau en provençal[1].
Le , pour honorer la mémoire de Jean Jaurès, assassiné au début de la Première Guerre mondiale cinq ans plus tôt, la place est renommée Place Jean-Jaurès.
Historique
Sous l'Ancien régime
Au XIIIe siècle s’y trouvait le camp des croisés qui s’embarquaient à Marseille à destination de la terre sainte[2]. Malgré un certain éloignement du centre ville de l'époque, elle servait à l’époque à diverses manifestations : champ de manœuvre, accueil des monarques avant leur réception à l’hôtel de ville. Ainsi le roi Robert Ier de Naples, comte de Provence, accompagné de sa femme Sancia de Majorque, est accueilli le en ce lieu par les notables de la ville avant de pénétrer dans la ville pour se recueillir devant les reliques de son frère Saint Louis d'Anjou[3]. De même François Ier à son retour triomphant après la bataille de Marignan, accompagné de la reine Claude, y sera reçu par un cortège composé des consuls, du viguier Louis de Vento et de l’évêque Claude de Seyssel[4]. Le c’est le roi Charles IX qui y sera reçu avec sa mère Catherine de Médicis, son frère le duc d’Anjou et son cousin Henri de Bourbon, futur Henri IV[5]. De même le le roi Louis XIII y sera reçu par le premier consul Boniface de Cabannes[6].
Au XVIIIe siècle
Marseille s'urbanise rapidement au XVIIIe siècle, s'étendant au-delà de ses frontières portuaires originelles. Des immeubles commencent alors à border la place et fait naître le quartier. La place s'ordonne alors autour des immeubles typiquement provençaux qui y sont construites[7] et est, sociologiquement, essentiellement bourgeoise.
En 1770, la Plaine accueille la toute première corrida qui ait lieu en France[8].
Au XIXe siècle
La construction en 1843 du clocher de la Basilique Notre-Dame-de-la-Garde permettait d'installer un bourdon qui fut commandé à un fondeur lyonnais Gédéon Morel ; l'énorme cloche de 8 234 kg fut transportée par chariot le long du Rhône puis exposée à la place Jean-Jaurès pour y être bénie le par Mgr Eugène de Mazenod et baptisé « Marie Joséphine » avant d'être transportée au sommet de la colline Notre-dame-de-la-Garde[9].
Le , le conseil municipal délibère d'établir sur la place une fontaine avec un grand jet d'eau, ainsi que des grands bassins à eau. Ces trois bassins concentriques de 20 mètres de diamètre sont installés au centre de la place ; plus de 103 jets s'en échappent[10].
À partir de 1860 la place accueille la foire de Saint-Lazare qui se tenait auparavant aux Allées, partie haute de la Canebière[11]. Cette foire se maintiendra avec plus ou moins de succès jusqu'aux années 1960 avec auto-tamponneuses et grande roue[12].
La Plaine est au centre du mouvement de contestation de la Commune en 1871. Entre le et le , des militants marseillais se rassemblent sur la place pour apporter leur soutien aux révolutionnaires dans la capitale. L'année précédente, en août, des militants avaient déjà tenté une insurrection à Marseille, et les chefs du groupe avaient été envoyés au cachot du Fort Saint-Jean, dont parmi eux Gaston Crémieux[13].
En 1883, la Plaine est creusée : son sous-sol est percé d'un tunnel de 700 mètres de long pour donner passage au premier tramway (un train à vapeur), encore emprunté aujourd'hui pour se rendre jusqu'au quartier Thiers et à la Canebière.
Le , Louis Capazza et Alphonse Fondère partent de cette place en ballon et arrivent en Corse. Un monument inauguré le par les aviateurs Dieudonné Costes et Maurice Bellonte et situé à l’angle de la rue Sibié et sculpté par Louis Botinelly rappelle cet événement[14].
A partir de 1892 est installé le plus grand marché de la ville, dont l'existence se perpétue jusqu'à aujourd'hui.
Au XXe siècle
Jusqu'en 1936 on y trouvait les bassins construits en 1852 où les enfants marseillais pouvaient faire un tour en barque[15]. L'écrivain Jean Giono dans son roman Noé parle ainsi de la Plaine : « C'est une vaste place encadrée de chaque côté par deux allées d'arbres. Au printemps il y a dessus une foire. Du temps de ma jeunesse, il y avait au centre de cette place un bassin dans lequel évoluait un bateau à rames à forme de petit paquebot et pouvant contenir une dizaine d'enfants. Un feignant costumé en matelot faisait faire pour deux sous trois fois le tour du bassin, lentement, avec de longues pauses. Cela s'appelait le tour du monde. Chaque fois que je descendais à Marseille avec mon père, il me payait ça. Je montais dans la barque et j'étais navré de le quitter, car il restait à terre. Il restait à terre et il faisait lentement le tour du bassin en même temps que moi, car il était navré de me quitter. Mais, dès que nous arrivions à Marseille, lui et moi il me disait : Viens, Jean, je vais te payer le tour du monde[16] ».
Par la suite cette retenue d'eau a été comblée, car l'eau s'infiltrait dans la terre et gouttait sur le tramway en dessous.
A une date inconnue, la Plaine est à nouveau creusée pour accueillir dans son sous-sol un parking sous-terrain. A la surface, elle accueille aussi un marché, autour duquel il était possible entre les années 1930 à 1983 de faire un tour en carriole tractée par un âne[17]. Il y avait aussi un théâtre Guignol qui faisait la joie des enfants. Dès les années 1930, un square avec bacs de sable pour les enfants a été construit au centre de la place (square dénommé ultérieurement Yves Montand).
Le maire Gaston Defferre inaugure le premier feu de signalisation tricolore de la ville en 1953[18].
Au XXIe siècle
Sur la Plaine se déroule le mardi, jeudi et samedi un marché, ainsi que, le mercredi, un marché aux fleurs. On trouve bon nombre de cafés autour de la place, ainsi que de nombreux restaurants dans les petites rues entre la Plaine et le cours Julien.
La place fait l'objet d'une rénovation intégrale à partir de 2019, dans le cadre du plan « Ambition Centre-Ville ». Cette rénovation augmente la surface d'espace verts, agrandit les chaussées et les zones piétonnes, réduit les voies et les places de parking, qui sont transférées dans le parking du sous-sol. Deux aires de jeux, d'environ 660m2, deux arrêts de bus, une piste cyclable et 186 arbres sont aménagés[19]. La rénovation coûte environ 13 millions d'euros[20]. Une partie de la population manifeste contre ce projet qu'ils accusent d'être un plan de gentrification[21]. La Plaine attire en effet les "néo-marseillais", plus diplômés et plus aisés que la moyenne[22].
Situation et accès
La place Jean-Jaurès est située entre le boulevard Chave et le quartier de Noailles, à la jonction des 1er, 5e et 6e arrondissements.
En 1883, le sous-sol de la place est percé d'un tunnel de 700 mètres de longueur pour permettre le passage d'un tramway à vapeur reliant le cimetière Saint-Pierre au Marché des Capucins situé près de la Canebière[23], en passant par le boulevard Chave.
Ce tunnel sera ensuite parcouru par des tramways électriques, les lignes 12 (vers les Camoins), 40 (vers Aubagne) et 68 (limitée à Saint-Pierre). Seule cette dernière survivra à la substitution par des autobus, jusqu'en 2004. Le tunnel est actuellement emprunté par la ligne 1 du tramway de Marseille.
Monuments remarquables
- A un numéro inconnu a vécu le réalisateur et essayiste Alèssi Dell'Umbria[24].
- A un numéro inconnu ont vécu Étienne François Clary et son fils François Joseph Marie Clary dans leur hôtel particulier[25].
- Au no 28 a été installé un bas-relief commémorant le voyage de Louis Capazza et Alphonse Fondère jusqu'en Corse à partir de leur ballon.
- Au no 31, bâtiment qui fait l'angle avec le boulevard Chave, se trouve un immeuble construit par l'architecte Gaudensi Allar, frère aîné du sculpteur André-Joseph Allar, Grand Prix de Rome de sculpture en 1869, et où fut placé par Nicolas Henri Chave un buste en marbre en mémoire de son père en 1889[26].
- Au no 32 se trouve un bureau de poste qui a remplacé un couvent des sœurs de l’observance[27] ;
- Au no 34 se trouvait une bastide, démolie en 1885, dans laquelle Joseph Bonaparte avait épousé en 1794 Marie Julie Clary, sœur de Désirée[27].
- Au no 36 se trouvait un des plus vieux cinémas de Marseille, le Pelissier, détruit dans les années 1970.
Bibliographie
- Augustin Fabre, Les rues de Marseille, vol. 5, Marseille, E. Camoin, , 505 p., 23,5 × 15 cm, « Place Saint Michel », p. 238-264 ;
- André Bouyala d'Arnaud, Évocation du vieux Marseille, Paris, Les éditions de minuit, , 440 p., 22. × 14 cm, chap. XVII (« Le quartier de la Plaine »), p. 343-348 ;
- Adrien Blès, Dictionnaire historique des rues de Marseille : Mémoire de Marseille, Marseille, Jeanne laffitte, , 441 p., 31 × 23 cm (ISBN 2-86276-195-8), p. 195 ;
- Pierre Gallocher, Marseille, zigzags dans le passé, t. I, Marseille, Tacussel, , 218 p., 21,5 × 19 cm (ISBN 2-903963-11-8), « Marseille à la conquête de l'air », p. 163-167 ;
- Pierre Gallocher, Marseille, zigzags dans le passé, t. II, Marseille, Tacussel, , 268 p., 21,5 × 19 cm (ISBN 2-903963-41-X), « Une colline surnommée "La Plaine" », p. 173-191.
Références
- Pierre Gallocher, Marseille, zigzags dans le passé, t. II, Marseille, Tacussel, , 268 p., 21,5 × 19 cm (ISBN 2-903963-41-X), « Une colline surnommée "La Plaine" », p. 173
- André Bouyala d'Arnaud, Évocation du vieux Marseille, Paris, Les éditions de minuit, , 440 p., 22. × 14 cm, chap. XVII (« Le quartier de la Plaine »), p. 343
- Augustin Fabre, Les rues de Marseille, vol. 5, Marseille, E. Camoin, , 505 p., 23,5 × 15 cm, « Place Saint Michel », p. 242
- Augustin Fabre, Les rues de Marseille, vol. 5, Marseille, E. Camoin, , 505 p., 23,5 × 15 cm, « Place Saint Michel », p. 244-245
- Augustin Fabre, Les rues de Marseille, vol. 5, Marseille, E. Camoin, , 505 p., 23,5 × 15 cm, « Place Saint Michel », p. 248
- André Bouyala d'Arnaud, Évocation du vieux Marseille, Paris, Les éditions de minuit, , 440 p., 22. × 14 cm, chap. XVII (« Le quartier de la Plaine »), p. 346
- « La place Jean Jaurès dite la "Plaine" - Notre-Dame du Mont et Cours Julien - Visiter Marseille et ses alentours - City guide - Marseille Forum », sur www.marseilleforum.com (consulté le )
- « Marseille : comment la Plaine s'est métamorphosée du 13e siècle à... 2019 », sur LaProvence.com, (consulté le )
- Robert Levet (préf. Général de division Jean-Charles Mouscardès et Cardinal Roger Etchegaray), La Vierge de la Garde au milieu des bastions : Quatre siècles de cohabitation entre l'Église et l'Armée sur une colline de Marseille (1525-1941), Marseille, Paul Tacussel, , 228 p., 22 × 18 cm (ISBN 2-903963-75-4), chap. 6 (« Un sanctuaire qui renaît et se développe avec de multiples autorisations du ministre de la Guerre »), p. 109-110
- Marcel de REGIS DE LA COLOMBIÈRE, Les Fontaines de Marseille, Vve M. Olive, (lire en ligne)
- Pierre Gallocher, Marseille, zigzags dans le passé, t. II, Marseille, Tacussel, , 268 p., 21,5 × 19 cm (ISBN 2-903963-41-X), « Une colline surnommée "La Plaine" », p. 181
- Pierre Gallocher, Marseille, zigzags dans le passé, t. II, Marseille, Tacussel, , 268 p., 21,5 × 19 cm (ISBN 2-903963-41-X), « Une colline surnommée "La Plaine" », p. 182
- « Quand Marseille brade la mémoire de ses communards pour gentrifier », sur France Culture, (consulté le )
- Pierre Gallocher, Marseille, zigzags dans le passé, t. I, Marseille, Tacussel, , 218 p., 21,5 × 19 cm (ISBN 2-903963-11-8), « Marseille à la conquête de l'air », p. 163-167
- Pierre Gallocher, Marseille, zigzags dans le passé, t. II, Marseille, Tacussel, , 268 p., 21,5 × 19 cm (ISBN 2-903963-41-X), « Une colline surnommée "La Plaine" », p. 190
- Jean Giono, Noé, éd. Gallimard, coll. bibliothèque de la pléiade, Paris, 1974, Tome 3, p. 805
- Pierre Gallocher, Marseille, zigzags dans le passé, t. II, Marseille, Tacussel, , 268 p., 21,5 × 19 cm (ISBN 2-903963-41-X), « Une colline surnommée "La Plaine" », p. 191
- « Quartier de la Plaine », sur Tarpin bien (consulté le )
- « Place Jean Jaurès Marseille - Soleam », sur Place jean Jaures Marseille (consulté le )
- « Place Jean Jaurès », sur Soleam (consulté le )
- hendrik davi, « Rénovation de la Place Jean Jaurès à Marseille : les raisons de la colère ! », sur Club de Mediapart (consulté le )
- « Transformation de La Plaine : menace ou opportunité pour le quartier ? », sur Made in Marseille, (consulté le )
- André Bouyala d'Arnaud, Évocation du vieux Marseille, Paris, Les éditions de minuit, , 440 p., 22. × 14 cm, chap. XVII (« Le quartier de la Plaine »), p. 348
- « Quand Marseille brade la mémoire de ses communards pour gentrifier », sur France Culture, (consulté le )
- Chardon (M Joseph), Tableau historique et politique de Marseille, ancienne et moderne, ou, Guide fidele du voyageur et des négocians dans cette ville : avec une description des monumens, établissemens publics, etc., etc.; une notice sur le climat, la population, les mœurs et usages des habitans ..., Chardon, (lire en ligne)
- Maurice Gontard, Histoire des lycées de Marseille, Marseille, Édisud,
- Adrien Blès, Dictionnaire historique des rues de Marseille : Mémoire de Marseille, Marseille, Jeanne laffitte, , 441 p., 31 × 23 cm (ISBN 2-86276-195-8), p. 195
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