Eugène de Mazenod

Eugène de Mazenod (né à Aix-en-Provence, le et mort à Marseille, le ) est un ecclésiastique catholique français qui fut évêque de Marseille (1837-1861). Il est le fondateur de la congrégation cléricale missionnaire des Oblats de Marie-Immaculée (à l'origine Société missionnaire de Provence). Il a été canonisé en 1995 par Jean-Paul II.

Saint Eugène de Mazenod

Eugène de Mazenod.
Saint, fondateur
Naissance le
Aix-en-Provence, royaume de France
Décès le   (78 ans)
Marseille, Second Empire
Nom de naissance Charles Joseph Eugène de Mazenod
Nationalité Français
Béatification
par Paul VI
Canonisation
par Jean-Paul II

Biographie

Une jeunesse en exil

Charles Joseph Eugène de Mazenod, fils de Charles Antoine de Mazenod et de Marie Rose Eugénie Joannis est né à Aix-en-Provence le 1er août 1782 où son père et son grand-père étaient présidents à la cour des comptes du Parlement de Provence. Sa mère richement dotée, était issue d'une famille de médecins[1]. Compte tenu du rang de son père dans l'Ancien Régime, la famille dut fuir dès les premiers troubles révolutionnaires, tout d'abord à Nice qui faisait alors partie du Royaume de Sardaigne, puis, au fur et à mesure de l'avancée des troupes révolutionnaires en Italie, à Turin (1789), où il est scolarisé au collège royal, puis à Venise (1794), Naples (1797) et enfin Palerme en Sicile.

À Venise, les conditions de vie de la famille Mazenod se font plus difficiles et les frères d'Eugène sont contraints de trouver du travail. Eugène rencontre alors un prêtre jésuite, Don Bartolo Zinelli, qui s'occupe de lui faire continuer gratuitement ses études, et qui sera à l'origine de sa vocation religieuse[2]. Il écrira près de cinquante ans plus tard en revoyant Venise : « Bienheureux Zinelli, que serais-je devenu sans vous ? ». C'est dans la pauvreté qu'Eugène de Mazenod vivra son adolescence, privé de compagnons de son âge, mais également de sa mère, rentrée en France dès la promulgation des lois sur le divorce, afin de recouvrer ses biens confisqués par la Révolution.

Le prêtre

Mgr de Mazenod en bas de la basilique Notre-Dame de la Garde

En 1802, un an après la signature du concordat entre Napoléon et le pape Pie VII, Eugène de Mazenod revient en France. Après des hésitations sur sa vocation avec deux projets de mariages, il décide de faire ses études théologiques au collège de Saint-Sulpice de Paris où il rentre le . Pendant les années de captivité du pape Pie VII par Napoléon, Eugène de Mazenod entre en résistance et sert d'agent de liaison entre le supérieur de la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice, le père Emery, et les cardinaux romains fidèles au pape[3]. Fort de ses convictions, il refuse d'être ordonné par le cardinal Maury imposé par Napoléon sans l'accord du pape Pie VII ; il est ordonné prêtre le par l'évêque d'Amiens, Mgr Claude Jean François Demandolx, ami de la famille et autrefois vicaire de Marseille avec son grand-oncle[4]. Il refuse l'offre de Mgr Demandolx qui lui propose d'être son vicaire général car il veut se consacrer uniquement aux pauvres[5].

Lorsqu'il rentre en Provence en octobre 1812, il se consacre à l'évangélisation des pauvres avec lesquels il s'entretient en langue provençale. Il a conscience des dangers de son entreprise dans le contexte politique soupçonneux du premier empire. En 1814, le typhus se déclare parmi les prisonniers de guerre entassés dans les prisons d'Aix-en-Provence ; en visitant les malades, il finit par être gravement atteint lui-même mais se rétablit grâce à sa robuste constitution[6]. Un peu plus tard, le , il fonde les Missionnaires de Provence, avec l'assentiment des vicaires généraux d'Aix. Il installe cette nouvelle fondation dans l'ancien couvent des carmélites d'Aix. Le souci majeur d'Eugène de Mazenod est de s'adapter à la situation réelle des gens dont la vie chrétienne a été si bouleversée depuis vingt-cinq ans. D'où un certain nombre d'innovations, en particulier les visites à domicile et l'utilisation du provençal. Les Missionnaires de Provence participent également à plus de quarante missions paroissiales pour prêcher sur les bases de la foi chrétienne et confesser les pénitents, favorisant un retour à la pratique religieuse dans la région, après les troubles de l'époque[7].

L'évêché de Marseille, supprimé en 1790, est, après de nombreuses interventions des autorités civiles, rétabli par une ordonnance royale du , nommant évêque de Marseille Fortuné de Mazenod, oncle d'Eugène. Le nouvel évêque, qui était alors âgé de 73 ans, prend pour vicaire Eugène de Mazenod ainsi que le père Tempier.

Armoiries de Mgr de Mazenod dans la basilique Notre-Dame de la Garde
Statue de Mgr de Mazenod à l'entrée de la crypte de la basilique Notre-Dame de la Garde

La société des Missionnaires de Provence traverse une grave crise et certains de ses membres sont rappelés dans leur diocèse d'origine. Seule une approbation par le Saint-Siège peut sauver l'institution. Eugène de Mazenod se rend à Rome où il rencontre le pape Léon XII qui approuve les statuts de cette société qui prend le nom de congrégation religieuse des « Oblats de Marie-Immaculée » (OMI) pour l'apostolat missionnaire des zones défavorisées, dont les membres étaient au nombre de 4 760 en 1997.

L’évêque

En 1837 Mgr Fortuné de Mazenod âgé de 88 ans donne sa démission et, fait assez rare, son neveu lui succède. Le gouvernement de Louis-Philippe Ier qui n'a aucune sympathie pour le bouillant ecclésiastique et a failli le priver de ses droits civiques, estime qu'Eugène de Mazenod sera moins dangereux dans ces hautes fonctions. De 1837 à sa mort en 1861, l'évêque mènera de front sa tâche de pasteur et celle de supérieur des Oblats.

Le supérieur des Oblats

Le 20 juin 1841, Eugène de Mazenod reçoit Mgr Ignace Bourget, jeune évêque de Montréal, à la recherche de missionnaires. L'évêque de Marseille accepte de l'aider et six premiers missionnaires s'embarquent pour le Canada. C'est le point de départ d'une vaste évangélisation qui se poursuivra aux États-Unis, en Afrique et à Ceylan (Sri Lanka aujourd'hui).

Au mois de novembre 1857, il reçoit la visite de Mgr de Marguerye, évêque d'Autun, venu lui demander quelques missionnaires, et en mars de l'année suivante des Oblats lui furent envoyés et installés à Autun. En juillet 1859, Mgr de Mazenod se rend à Autun, où il est fait chanoine honoraire du Chapitre. À cette occasion, les reliques de saint Lazare d'Aix sont exposées. Mgr de Marguerye se rend à son tour en novembre de la même année avec la relique d'un bras de ce saint, et fait une retraite à Notre-Dame de la Garde[8]

Le pasteur de Marseille

Mgr de Mazenod, toile de la chapelle absidiale axiale de la cathédrale de La Major, où se trouve son tombeau.

La population de Marseille double presque pendant l'épiscopat de Mgr de Mazenod et atteint 260 000 habitants en 1861. Il crée 21 paroisses et construit 34 églises. Il fait commencer les travaux de deux vastes chantiers :

  • La cathédrale de la Major maintenue par décision de la ville sur son ancien emplacement malgré l'opposition constante de l'évêque qui aurait préféré une construction sur le cours du chapitre, actuellement cours Joseph Thierry[9]. Le décret du 25 septembre 1852 signé par Louis-Napoléon, président de la République française, confirma cette décision[10].
  • La basilique Notre-Dame de la Garde qui deviendra le symbole de la ville. Grâce à son intervention auprès du général Adolphe Niel, futur maréchal, le comité des fortifications donnera un avis favorable et le ministère de la Guerre, propriétaire des terrains, donnera l'autorisation de la construction de la basilique[11]. Mgr de Mazenod, sans remettre en cause la désignation d'Henri-Jacques Espérandieu comme architecte, regrettera de voir un architecte protestant diriger la construction d'un sanctuaire catholique dédié à la vierge Marie. Il posa la première pierre le 11 septembre 1853.

Fin de vie

Tombe de Monseigneur de Mazenod

La maladie le surprend début janvier 1861. Durant les derniers jours il murmure : « Comme je voudrais me voir mourir, pour bien accepter la décision de Dieu… Si je viens à m'assoupir et que je sois plus mal, éveillez-moi, je vous prie. Je veux mourir en sachant que je meurs ! » Doyen des évêques de France, il meurt le 21 mai 1861. Les funérailles ont lieu à l'église Saint-Martin à cause des travaux de la nouvelle cathédrale. Mgr Chalandon, archevêque d'Aix, célèbre la messe et prononce l'homélie. Son tombeau se trouve dans la chapelle axiale de la cathédrale de la Major à Marseille.

Le Père Joseph Fabre lui succède à la tête de sa congrégation.

Hommages

Statue de Mgr Mazenod en Pologne
  • Mgr de Mazenod a été béatifié par Paul VI le 19 octobre 1975 et depuis lors canonisé le 3 décembre 1995 par Jean-Paul II. Il est fêté le 21 mai[12].
  • Une statue de Mgr de Mazenod réalisée par Ramus a été placée à l'entrée de la crypte de Notre-Dame de la Garde.
  • Son nom a été donné à une rue à Marseille et Lyon ainsi qu'à une avenue à Aix en Provence, ainsi qu'à Québec. A Lyon, la rue Mazenod doit en réalité son nom à une autre origine : Catherine Mazenod, donatrice de terrains.
  • Une statue de Mgr Mazenod existe en Pologne.
  • Un collège privé[13], fondé en 1953 dans le quartier du Rouet, dans le 8e arrondissement de Marseille, porte son nom. Il se trouve désormais dans le quartier des Accates, dans le 11e arrondissement, depuis 2013.
  • Un collège privé porte également son nom à Ngaoundéré au Cameroun depuis le 8 décembre 1954, fondé par Mgr Yves Plumey O.M.I.[14].
  • En Haïti, le collège-lycée privé Mazenod est dirigé par les OMI, dans la ville de Camp-Perrin (canton des Cayes)
  • Il existe un santon de Provence à l'effigie de St Eugène de Mazenod réalisé par Artera[15].
  • L'unité Pastorale, Salon-de-Provence-Grans, dans le Diocèse d'Aix-en-Provence porte le nom Unité Pastorale Saint-Eugène-de-Mazenod.

Armoiries

Ce prélat a modifié comme suit les armes de sa famille : D'argent, à une croix de calvaire, de sable, soutenue des lettres O.M.I. ; parti, d'azur à trois molettes d'or, au chef d'or, chargé de trois bandes de gueules[16].

Notes et références

  1. Académie de Marseille, Dictionnaire des marseillais, Edisud, Marseille, 2001, p. 226, (ISBN 2-7449-0254-3)
  2. Dom Antoine-Marie o.s.b, Lettre du 13 mai 2017, Abbaye Saint-Joseph de Clairval, , 4 p. (lire en ligne), p. 1
  3. Dom Antoine-Marie o.s.b, Lettre du 13 mai 2017, Abbaye Saint-Joseph de Clairval, , 4 p. (lire en ligne)
  4. Cardinal Roger Etchegaray, Petite vie de Eugène de Mazenod, Paris, Desclée de Brouwer, 1995, p. 52-53
  5. Xavier Lecoeur, « Saint Eugène de Mazenod, un homme de tête et de cœur », La Croix, (lire en ligne)
  6. Cardinal Roger Etchegaray, Petite vie de Eugène de Mazenod, Paris, Desclée de Brouwer, 1995, p. 61
  7. Dom Antoine-Marie o.s.b, Lettre du 13 mai 2017, Abbaye Saint-Joseph de Clerval, , 4 p. (lire en ligne), p. 3
  8. Yvon Beaudoin, o.m.i., Dictionnaire historique, Oblate Communications.
  9. Augustin Fabre, Les Rues de Marseille, Edition Camoin, Marseille, 1869. Tome V p. 353
  10. Casimir Bousquet, La Major, cathédrale de Marseille, Vve Marius Olive, Marseille, 1857. p. 612.
  11. Robert Levet, La Vierge de la Garde au milieu des bastions, Editeur Paul Tacussel, Marseille, 1994.
  12. Voir sint Eugène de Mazenod sur Nominis.
  13. Site du collège privé Eugène-de-Mazenod, à Marseille
  14. Yves Plumey, Mission Tchad-Cameroun, documents souvenirs visages, l’annonce de l’Évangile au Nord-Cameroun et au Mayo Kebbi 1946-1986, éditions Oblates, Paris, 1990
  15. Santon de Provence
  16. Abbé Joseph Hyacinthe Albanés, Armorial & sigillographie des Évêques de Marseille avec des notices historiques sur chacun de ces Prélats, Marius Olive, Marseille, 1884, p. 184

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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