Église orthodoxe roumaine

L’Église orthodoxe roumaine (en roumain : Biserica Ortodoxă Română) est une juridiction autocéphale de l'Église orthodoxe. Son Patriarche porte le titre d'« Archevêque de Bucarest, Métropolite de Munténie et Dobrogée, Locum Tenens de Césarée de Cappadoce, Patriarche de toute la Roumanie et président du Saint Synode, avec résidence à Bucarest » (le titulaire actuel est Daniel Ciobotea depuis le ).

Église orthodoxe roumaine
(ro) Biserica Ortodoxă Română

Cathédrale patriarcale de Bucarest
Fondateur(s) Métropolite Nifon Rusailă en 1864
Autocéphalie ou autonomie
déclarée 1864
Reconnaissance 1885 par le Patriarcat œcuménique de Constantinople
Primat actuel Patriarche Daniel de Roumanie
Siège Patriarcat de Roumanie, à Bucarest
Territoire primaire Roumanie
Extension territoriale 18 300 églises en Roumanie
Rite byzantin
Langue(s) liturgique(s) roumain, ukrainien, serbe, sporadiquement hongrois, anglais et français
Tradition musicale byzantine
Calendrier calendrier julien révisé
Population estimée 20 millions (18 en Roumanie, 0,7 en Moldavie)

Deuxième Église orthodoxe par le nombre de ses fidèles après celle de Russie, elle compte la majorité de ses fidèles en Roumanie, mais elle en a aussi en Moldavie, en Ukraine, en Serbie, en Europe occidentale, aux États-Unis et au Canada. Les Roumains de Serbie qui se trouvent au sud du Danube sont les seuls qui ne bénéficient pas encore d'une liberté d'opinion religieuse totale car il leur est interdit de pratiquer en roumain.

Après l'effondrement de la dictature communiste fin 1989, l'influence de l'Église est devenue très importante : émissions religieuses à la télévision (chaîne Trinitas TV[1]) et à la radio, catéchisme à l'école publique intégré dans le cursus, exemption d'impôts alors que sa puissance foncière est considérable, lobbying politique, 15 000 prêtres et 41 000 moines, religieuses, bénévoles actifs et salariés soit davantage que le personnel hospitalier en Roumanie[2].

Organisation

Carte des diocèses en Roumanie et en Moldavie.
Basilique orthodoxe de Iași.

Organisation territoriale

En République de Roumanie

Église (en bois) de la Nativité et de la Vierge à Ieud.

En République de Moldavie :

En dehors des pays roumanophones :

En dehors de l'organisation territoriale de l'Église orthodoxe roumaine, il existe également en Roumanie des exarchats d'autres Églises orthodoxes, pour les minorités :

Histoire

La tombe des quatre martyrs à Niculițel (en) en 304-305. Deux autres martyrs de 249-251 reposent à côté.
Inscription dans la tombe des quatre martyrs : Zotikos, Attalos, Kamasis et Philippos.

Chronologie succincte

  • Venue de l'apôtre André en Scythie Mineure où, selon la tradition ecclésiastique roumaine, il aurait été martyrisé sur une croix en X (en fait, il a été martyrisé à Patras en Grèce, où ses reliques se trouvent) ;
  • 249-251 : deux premiers martyrs gètes sont inhumés à Niculițel (en) ;
  • , 304 : autres martyrs daces: Montanus et sa femme Maxima sont noyés à cause de leur foi ; il s'ensuit une vague de martyres ;
  • 304-305 : quatre nouveaux martyrs sont placés dans la tombe de Niculițel : Zotikos, Attalos, Kamasis et Philippos ;
  • 311 : lorsque l'empereur Galère, d'origine dace, décrète la liberté de religion pour la première fois en 311, l'évêché de Tomis (Constanța) est élevé au rang de métropole, comprenant à elle seule au moins 14 diocèses ;
  • IVe et Ve siècles : controverses entre orthodoxes et ariens : les Goths, qui dominent alors la région, choisissent l'arianisme et persécutent les orthodoxes ;
  • VIe et Xe siècles : arrivées successives des Slaves qui progressivement deviennent chrétiens orthodoxes ;
  • XIe et XIIIe siècles : les orthodoxes vivant entre le Danube et la Russie dépendent des éparchies de Severin aux Portes de Fer et de Vicina en Dobrogée, où résident des perichorètes (περιχωρέτοι : responsables des régions périphériques de l'Empire) qui envoient au nord du Danube des chorévêques (χωρεπισϰόποι : évêques itinérants des « Valaques » et des « Sklavènes ») ; ces éparchies elles-mêmes dépendent du patriarche de Constantinople ;
  • XIVe siècle : constitution des métropoles autonomes d'« Hongro-Vlachie » et de « Moldavie », sous obédience du patriarche de Constantinople ; le premier métropolite de Valachie sera le perichorète de Vicina : Hyacinthe ;
  • 1429 : construction du monastère de Căpriana en Moldavie (sous juridiction de la métropole de Moldavie de l'époque) ;
  • 1812 : la Moldavie orientale passe sous contrôle russe et prend le nom de Bessarabie. Il y avait à ce moment 749 églises et de nombreux monastères dans ce territoire : tout est rattaché en 1836 au patriarcat de Moscou. Aujourd'hui la plupart appartiennent à l'église russe de Moldavie, une minorité est sous obédience roumaine ;
  •  : déclaration unilatérale d'autocéphalie de la métropolie orthodoxe roumaine unie ;
  •  : reconnaissance de l'autocéphalie par le patriarche de Constantinople ;
  • le siège de Bucarest est élevé au rang de patriarcat par Constantinople : le premier patriarche étant Mgr. Miron Cristea.

En comparaison avec la Valachie et la Transylvanie, on trouve le plus grand nombre de monastères médiévaux fortifiés en Moldavie.

Cathédrale du salut de la nation roumaine

La cathédrale du salut de la nation roumaine en cours de construction (novembre 2017).

Dans le centre de Bucarest, près du Palais du Peuple d'inspiration stalinienne, la plus grande église de Roumanie est en construction, selon la loi spécialement votée au parlement le et publiée le , qui précise aussi son nom : « Catedrala Mântuirii Neamului Românesc » (« cathédrale du salut de la nation roumaine »). Le bâtiment devrait atteindre plus de 120 m de haut, accueillir plus de 5 000 fidèles[3] et englober une bibliothèque, un hôtel, des salons de réception et la résidence du Patriarche de l’Église orthodoxe roumaine[3]. Le Patriarcat motive ce chantier par le fait que les églises de Bucarest seraient trop petites pour la population de la capitale[4] et que le patriarche Miron Cristea avait déjà proposé un projet similaire[5], mais l'entreprise est très critiquée pour cinq raisons[6] :

  • le « salut d'une nation » advient par le devoir de mémoire, la catharsis des crimes, l'adoption de valeurs humanistes et la lutte contre la corruption, non par un bâtiment pharaonique de plus dans la continuité de ceux du régime communiste ;
  • les églises historiques démolies dans les années 1980 sous la dictature de Nicolae Ceaușescu n'ont toujours pas été reconstruites, alors que les architectes et les spécialistes du patrimoine ont pris soin de les photographier sous tous les angles, d'en relever les plans, d'en conserver les œuvres d'art et même, dans certains cas, les pierres elles-mêmes, numérotées et entreposées ;
  • les fonds sont en grande partie publics, alors que les hôpitaux manquent de lits, de personnel et d'appareils, et que de nombreux médecins roumains doivent s'expatrier ; l’estimation du coût du chantier n’est pas consensuelle et va de 400 millions à 1 milliard d’euros[3] et des surcoûts non négligeables sont à prévoir pour les finitions de l’édifice : le chantier connaît des interruptions et retards dus au fait que les caisses de l’État sont souvent vides ;
  • son encombrement, alors que les lignes de tramways déconnectées au centre-ville, sous le régime communiste, n'ont toujours pas été reconnectées plus d'un quart de siècle après la Libération, ce qui oblige le public à marcher plus d'un kilomètre par tous les temps, à travers une circulation pléthorique et dangereuse, pour aller d'un terminus à l'autre ;
  • selon des architectes et historiens de l'art tel Gheorghe Joja, les cathédrales ne font pas partie de la tradition orthodoxe roumaine.

Sa construction a été financée à 70 % par l’État (le pape Jean Paul II en son temps avait fait un don de 180 000 euros) ce que le patriarche Daniel a justifié comme un « réparation » pour les cinq églises détruites dans le quartier par le régime communiste[7].

Étymologie des mots roumains du dogme théologique orthodoxe

Certains sont d'origine latine, rappelant l'implantation du christianisme en Mésie et Scythie mineure durant l'Antiquité tardive, d'autres d'origine grecque, slavonne et même hongroise, rappelant les anciennes obédiences de l'église orthodoxe des roumains au Moyen Âge, rattachée tantôt au patriarcat grec de Constantinople, tantôt aux patriarcats slaves balkaniques de Pescium (Peci), de Lychnidus (Ohrid), de Preslav et de Târnova (Veliko Trnovo) ; de cette seconde période datent aussi son ancienne langue liturgique slavonne et son alphabet gréco-cyrillique spécifique qui fut longtemps celui de la langue roumaine dans les pays où vivaient les roumains (Transylvanie vassale de la Hongrie, Moldavie, Valachie et sud du Danube sous influence byzantine, bulgaro-valaque et finalement ottomane).

Pour les sacrements

En roumain, sacrement se dit taina, du slavon, signifiant aussi « mystère », « caché » (ascuns du latin abscondere). Le mot taina ou similaire veut dire secret en russe, bulgare, polonais, tchèque, serbe, croate.

Pour le salut des âmes

Pour la notion chrétienne du salut, le roumain utilise mântuire du hongrois menteni, izbăvire du slavon izbaviti, cerească salvare du latin caelum salutare, « salut du ciel », slobozire du slavon svobod « libre », « libéré », limpezire du latin limpidus, ou enfin scăpare du latin excappare, « échapper ».

Pour la repentance, modestie, humilité et sagesse

On utilise aussi le mot repentance ((ro) pocăința) du slavon pokoje. Pour être reçu au paradis ((ro) rai, mot slavon) et recevoir le salut, il faut avoir été humble ((ro) smerenie slavon sŭmĕriti, ou umilință du latin humilitas) qui est l'opposé de l'hypocrisie/orgueil (fățărnicie du mot față « apparence », trufie du latin trophaeum « trophée », ainsi que les mots proto-roumains îngâmfare qui veut dire « se gonfler », prefăcatorie qui veut dire « dissimulation, faux-semblant ».

La « sagesse en dévotion volontaire » (cucernicie du latin conquerire) est un autre concept de la doctrine du salut.

Pour l'universalité de l'Église

Le mot pour église, (ro) biserică, est unique en Europe. Il vient du mot latin basilica (du grec βασιλικα - qui veut dire « communication reçue du roi » et « le lieu où l'Empereur administre la justice »).

Pour la grâce/miséricorde, le saint-esprit, l'amour, la tolérance

En roumain, duh, mot slavon signifie l'esprit de Dieu, le Saint-Esprit, par contradiction avec spirit qui veut dire esprit plutôt mauvais.

Le har, mot grec, veut dire la grâce/miséricorde de Dieu.

L'amour (en roumain : iubire qui est l'amour actif du slavon ljubiti, dragoste qui est un sentiment permanent du slavon dragostĩ) est un commandement (porunca du slavon porončiti, ou comanda s'il s'agit de quelque chose d'automatique, ou encore ordin s'il s'agit d'un ordre) du Jésus annonciateur du salut (Isus vestitorul) du slavon vestia l'« annonce », (Isus mântuitorul) du hongrois menteni.

Relations avec les autres Églises

Relations avec l'Église orthodoxe vieille-ritualiste lipovène

Relations avec l'Église catholique romaine

Démographie

Selon le recensement de la population de 2011, 16 307 004 citoyens roumains déclarent appartenir à l'Église orthodoxe roumaine, parmi eux, 96,5 % de Roumains et 2,1 % de Roms[9].

Notes et références

  1. Source: http://www.balantza.com/cati-preoti-romania/
  2. Arielle Thedrel, « La cathédrale qui sème la discorde à Bucarest », Le Figaro, (lire en ligne).
  3. Source : catedrala.ro
  4. Ion Cătălin, article Catedrala Mântuirii Neamului, proiectul unui simbol național în anii interbelici, dans Historia du 23 novembre 2011.
  5. Lavinia Stan, L. Turcescu, Politics, national symbols and the Romanian Orthodox Cathedral in : Europe-Asia Studies no 58 (7), 2006, p. 1119-1139 et Iosif Țon, Catedrala mântuirii neamului : cum încurajează biserica ortodoxă corupţia în poporul român [romanialibera.ro/opinii/comentarii/catedrala-mantuirii-neamului--cum-incurajeaza-biserica-ortodoxa-coruptia-in-poporul-roman-304702] , dans România liberă du 13 juin 2013.
  6. « L'héritage commun des religions chrétiennes », Le Monde, (lire en ligne).
  7. Selon l'évêque Emilian Lovișteanul sur
  8. (ro) « Tab13. Populaţia stabilă după religie – judeţe, municipii, oraşe, comune », sur Institutul Național de Statistică din România (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • Olivier Gillet, Religion et nationalisme : l'idéologie de l'Église orthodoxe roumaine sous le régime communiste, Éditions de l'université de Bruxelles, Bruxelles, 1997 (ISBN 2800411570)
  • Lavinia Stan and Lucian Turcescu, Religion and Politics in Post-Communist Romania, New York, NY: Oxford University Press, 2007.
  • Lavinia Stan and Lucian Turcescu, “Religion and Politics in Post-Communist Romania”, in Quo Vadis Eastern Europe? Religion, State, Society and Inter-religious Dialogue after Communism, ed. by Ines A. Murzaku (Bologna, Italy: University of Bologna Press, 2009), p. 221-235.
  • Lavinia Stan and Lucian Turcescu, “Politics, National Symbols and the Romanian Orthodox Cathedral”, Europe-Asia Studies, vol. 58, no. 7 (November 2006), p. 1119-1139.
  • Lavinia Stan and Lucian Turcescu, “Pulpits, Ballots and Party Cards: Religion and Elections in Romania”, Religion, State and Society, vol. 33, no 4 (December 2005), p. 347-366.
  • Lavinia Stan and Lucian Turcescu, “The Devil’s Confessors: Priests, Communists, Spies and Informers”, East European Politics and Societies, vol. 19, no. 4 (November 2005), p. 655-685.
  • Lavinia Stan and Lucian Turcescu, “Religious Education in Romania”, Communist and Post-Communist Studies, vol. 38, no. 3 (September 2005), p. 381-401.
  • Lavinia Stan and Lucian Turcescu, “Religion, Politics and Sexuality in Romania”, Europe-Asia Studies, vol. 57, no. 2 (March 2005), p. 291-310.
  • Lavinia Stan and Lucian Turcescu, "The Romanian Orthodox Church and Post-Communist Democratization", Europe-Asia Studies, vol. 52, no. 8 (December 2000), p. 1467-1488.
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