Laure Junot d'Abrantès

Laure Adélaïde Constance Junot, duchesse d’Abrantès[1], née Permon le à Montpellier et morte le à Paris, est une mémorialiste française.

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Biographie

Fille de Charles Martin Permon, pourvoyeur de vivres pour l’Armée d’Amérique[2] et administrateur civil en Corse, et de Panoria Comnène, Laure Permon se prétendait issue par sa mère d’une branche déchue des empereurs byzantins. Mariée au général Junot, qui deviendra fou et finira par se suicider en 1813, elle commença une carrière littéraire pour pallier ses multiples revers de fortune, et ce grâce à la collaboration d'un jeune écrivain Honoré de Balzac, alors encore méconnu[3].

Laure d’Abrantès a rapporté dans ses Mémoires que le jeune Napoléon Bonaparte avait demandé sa mère en mariage après son veuvage. Si l'information semble quelque peu douteuse, il est néanmoins certain qu’il a beaucoup fréquenté sa famille une fois qu’elle s’est, après diverses vicissitudes, installée à Paris après la chute des Jacobins le 9 thermidor an II.

Mariée au général Jean-Andoche Junot au début du Consulat, elle entre bientôt dans l’animation de la vie parisienne où sa beauté, son esprit caustique et son extravagance ne tardent pas à la faire remarquer. Si le premier Consul la surnomme la petite peste, c'est de manière affectueuse car il la traite, ainsi que Junot, avec la plus grande générosité (sa grande sœur qui avait alors douze à treize ans baptisa Napoleon Le Chat botté) un sentiment qui néanmoins ne sera jamais partagé par l'intéressée, la duchesse n'hésitant pas à se répandre en sarcasmes et calomnies à son endroit dans ses Mémoires historiques sur Napoléon Ier. Elle fait montre, durant la mission diplomatique de son mari à Lisbonne, d’une telle prodigalité que celui-ci se retrouve à son retour à Paris, en 1806, surchargé de dettes que ses propres intrigues ne font rien pour arranger. À Paris, elle reçoit les leçons de piano de Daniel Steibelt, qui lui dédie deux œuvres, Le Bouquet, pour sa fête en , et une grande pièce en l'honneur de la paix de Tilsit. Elle rejoint à nouveau son mari à Lisbonne après son entrée victorieuse dans cette ville, fin 1807, mais même les libéralités et le butin acquis à Lisbonne ne satisfont pas ses exigences. Elle accompagne ensuite Junot durant une partie de la guerre d’Espagne.

De retour en France en , la vivacité de ses remarques et la réception d’invités exécrés de l’Empereur suscitent le mécontentement de Napoléon. Elle devient également la maîtresse du comte de Metternich, ambassadeur d’Autriche en France. L’aggravation des troubles mentaux de Junot la menace ensuite de ruine, ce qui explique peut-être pourquoi elle a trempé dans les intrigues visant à restaurer les Bourbons au trône en 1814. Elle ne se ralliera pas à Napoléon pendant les Cent jours.

Elle possédait au no 34 avenue de Madrid à Neuilly-sur-Seine le château de Saint-James[4].

Après 1815, elle passe la majeure partie de son temps à Rome, dans le monde artistique qu’elle anime par la vivacité de sa conversation. De retour à Paris, sous la Restauration, elle devient monarchiste et traite Napoléon Bonaparte de monstrueux usurpateur, puis tente de combler ses dettes et de retrouver son rang en vendant meubles et bijoux. Mais surtout, elle rêve d’écrire pour ajouter à ses maigres revenus des droits d’auteur[5]. C’est ainsi qu’elle devient la maîtresse du jeune Honoré de Balzac vers 1828, après s’être longtemps refusée à lui. L’auteur de La Comédie humaine lui sert d’abord de conseiller, de correcteur et d’homme à tout faire[6]. C’est lui qui la pousse à rédiger ses Mémoires qu’il corrigera inlassablement et dont, le succès acquis, elle niera impudemment qu’il y eût mis la main[7].

La Duchesse connaît cependant une triste fin de vie, jalonnée de difficultés financières et littéraires. La publication de ses Mémoires ne suffit pas à assainir sa situation financière. Elle dut se résigner à vendre l'hôtel d'Abrantès, résidence du couple Junot, ainsi que son mobilier, la cave et une riche bibliothèque[8],[9]. Après quelques années de succès, les échecs se succèdent : Balzac ne travaille plus pour elle, elle le perd comme amant et elle doit louer un rez-de-chaussée rue de La Rochefoucauld où elle tente de reconstituer un salon avec des amis fidèles aux souvenirs de l’Empire. Juliette Récamier, Théophile Gautier (qui la surnommait « la duchesse d’Abracadabrantès »), des acteurs mondains et des douairières sont de ceux-là. Les journaux parlent de la Société des polichinelles au sujet des acteurs mondains. Mais le pire est à venir : le libraire Ladvocat refusant ses manuscrits, la duchesse tombe dans l’indigence, doit vendre son mobilier, et finit sa vie dans un hôpital où, faute d’argent, on la place dans une mansarde[10].

Elle est inhumée au cimetière de Montmartre[11], où sa tombe est ornée d'un médaillon de David d'Angers.

Famille et Descendance

Marguerite Gérard, La Duchesse d’Abrantès et le général Junot (vers 1800), localisation inconnue.

Laure et Jean-Andoche Junot ont eu deux filles et deux fils :

  • Joséphine Junot d'Abrantès (Paris, -Paris, ), mariée en à Jacques-Louis Amet (Farnham (Surrey), -)
  • Constance Junot d'Abrantès (Paris, -Paris, ), mariée en 1829 à Louis Antoine Aubert (1799-1882), d'où descendance.
  • Louis Napoléon Andoche Junot, 2e duc d'Abrantès (Paris, -Neuilly-sur-Seine, ) mourut célibataire et sans descendance.
  • Andoche Alfred Michel Junot, 3e duc d'Abrantes (Ciudad Rodrigo-Espagne, - Bataille de Solférino-Italie, ) 1er mariage le à Marie Céline Elise Lepic (-) d'où descendance :
    • Jeanne Joséphine Marguerite Junot d'Abrantès (Paris, -), mariée à Paris le à Xavier Eugène Maurice Le Ray (Sèvres, -Paris, ), qui fut titré 4e duc d'Abrantès en 1869, d'où descendance et extinction de la branche mâle en 1982. 2e mariage le à Marie Louise Léonie Lepic (-) sœur de sa 1re femme d'où descendance :
    • Jérôme Napoléon Andoche Junot d'Abrantès (Paris, -Paris, )
    • Marguerite Louise Elisabeth Junot d'Abrantès (Paris, -1919), mariée à Paris, le à César Elzéar Léon Vicomte Arthaud de La Ferrière (1853-1924).

Durant la Guerre d'indépendance espagnole, Jean-Andoche Junot eu une relation avec Juliana de Almeida e Oyenhausen (en), fille de Leonor de Almeida Portugal, 4e marquise de Alorna.

Publications

Notes et références

  1. Suite à la victorieuse campagne napoléonienne au Portugal, Napoléon 1er décerne au général Junot le titre de duc d'Abrantès en mars 1808.
  2. Samuel S. de Sacy. Notes sur Les Secrets de la princesse de Cadignan. Folio classique. p. 394.
  3. André Maurois, Prométhée ou la vie de Balzac, Paris, Hachette, 1965, p. 116.
  4. Devenu plus tard un lycée de jeunes filles. Voir René Sordes, Histoire de Suresnes. Des origines à 1945, édité avec la Société historique de Suresnes, avec le concours de la ville de Suresnes, 1965, p. 332.
  5. André Maurois, op. cit., p. 116.
  6. André Maurois, op. cit., p. 115-119 et 160.
  7. André Maurois, op. cit., p. 167.
  8. Les Archives de Paris conservent sa déclaration de succession sous la cote DQ7 3407.
  9. Archives de Paris, Témoins de l'histoire aux archives de Paris : portraits et documents, Paris, Archives de Paris, , 113 p. (ISBN 978-2-86075-014-1 et 2860750142, OCLC 869803786, lire en ligne)
  10. André Maurois, op. cit., p. 379.
  11. Division 22.

Annexes

Bibliographie

  • Auguste de Roosmalen, Derniers momens de la duchesse d'Abrantès, précédés du récit de sa naissance écrit par elle-même, Paris, chez l'auteur et chez Mme Goullet, , 28 p. (lire en ligne).
  • Virginie Ancelot, Les Salons de Paris : Foyers éteints, Paris, Éditions Jules Tardieu, , 245 p. (lire en ligne), « Le Salon de la duchesse d’Abrantès », p. 83-122.
  • Robert Chantemesse, Le Roman inconnu de la duchesse d’Abrantès, Paris, Plon, 1927.
  • Henri Malo, Les Années de bohême de la duchesse d’Abrantès, avec six portraits, Paris, Émile-Paul Frères, 1927.
  • Henri Malo, La Duchesse d’Abrantès au temps des amours, Paris, Émile-Paul Frères, 1927.
  • Nicole Toussaint du Wast, Laure Junot, duchesse d’Abrantès, Paris, Fanval, 1985.
  • Jean Autin, La duchesse d'Abrantès, Paris, Perrin, coll. « Présence de l'histoire », , 328 p. (ISBN 978-2-262-00741-6).
  • Juliette Benzoni, La petite peste et le Chat Botté, Paris, Plon, 2014.

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