Capitalisme

Le capitalisme désigne un système économique et par extension l'organisation sociale induite par ce système. Il peut être défini par deux caractéristiques principales : la propriété privée des moyens de production ; une dynamique fondée sur l'accumulation du capital productif guidée par la recherche du profit[1],[2].

La machine à vapeur, exemple-type de la nécessaire concentration des capitaux.

Les économistes, les sociologues et les historiens ont adopté des perspectives différentes dans leurs analyses du capitalisme et en ont reconnu diverses formes dans la pratique. Ceux-ci incluent : le capitalisme de laissez-faire, le capitalisme de marché libre, l'économie sociale de marché ou le capitalisme d'État. Les différentes formes de capitalisme présentent des degrés variables de libre marché, de propriété privée, d'obstacles à la libre concurrence et d'implication de l'État à travers les politiques sociales[3] et sont du ressort des politiques et de la loi. La plupart des économies capitalistes existantes sont des économies mixtes, qui combinent des éléments de libre marché avec l'intervention de l'État et, dans certains cas, la planification économique.

Le système capitaliste a connu une popularité croissante depuis la révolution industrielle et est actuellement le système économique de la plupart des pays de la planète[4].

Il lui est fait de nombreuses critiques concernant notamment la morale, la validité des théories économiques, le rôle de l’État, le pouvoir du capitaliste, le partage de la valeur ajoutée et du profit, l’organisation du travail ou encore les relations internationales, bref de façon globale sa régulation. En outre, l'implication du capitalisme dans de grandes questions sociétales, comme l’impérialisme ou les dégâts fait à l'environnement, font l’objet de controverses. Dans ces conditions, le mot capitalisme sera généralement employé avec une connotation critique ou une volonté de le combattre, notamment par les tenants du marxisme et de l'anarchisme.

Étymologie et définition

Sa définition diffère dans le temps, dans l'espace, et en fonction des sensibilités politiques des personnes qui l'emploient[5]. Larousse.fr définit le capitalisme comme « un système de production dont les fondements sont l'entreprise privée et la liberté du marché »[6].

Concrètement, le capitalisme repose sur deux éléments clés : la propriété privée et la liberté d'entreprendre comme source de revenu (dénommé « profit »). Compte tenu du fait que de nombreux systèmes politiques, philosophiques ou religieux, dont bien évidemment le marxisme, s'opposent à l'idée de « profit » soit en totalité, soit lorsqu'il est jugé excessif avec des conséquences critiquables, la compréhension du terme ne peut être dissociée de son contexte d'emploi qui renvoie à des réalités sous-jacentes qui peuvent différer : contextes sociaux et politiques, cadres idéologiques, théories de référence qui pondèrent, combinent et articulent de façon spécifique[7] des concepts ou des mécanismes importants tels que : la recherche du profit ; l'accumulation du capital ; la dissociation de la propriété du capital et du travail ; le salariat ; la régulation par le marché.

Avant le XIXe siècle

Le mot capital apparaît au XIIe siècle et désigne alors une quantité d'argent à faire fructifier[8],[9],[10], il provient du mot latin « caput », qui signifie « la tête », à l'origine la tête de bétail (le cheptel)[11],[12],[13]. Au milieu du XVIIe siècle le mot capitaliste est utilisé par le Hollandische Mercurius pour désigner « une personne possédant du capital »[14] puis en 1788, par le Français Étienne Clavier qui s'interroge : « L'Angleterre a-t-elle l'heureux privilège de n'avoir ni agioteurs, ni banquiers, ni faiseurs de services, ni capitalistes ? »[15] ; ou encore en 1794, sous la plume d'Arthur Young dans son livre Travels in France (1792)[10],[16].

Les emplois du terme au XIXe siècle

L'usage des termes « capitaliste » et « capitalisme » fut employé par de nombreux auteurs au cours du XIXe siècle :

Premier usage moderne

L'usage moderne du terme est attribué à Louis Blanc en 1850 et à Pierre-Joseph Proudhon en 1861 dans sa correspondance privée[23],[24].

Chez Marx et Engels

Marx et Engels emploient de manière très restreinte le mot capitalisme : seulement deux fois dans volume I du Capital[25] et dans les Théories de la plus-value[26], quatre et trois fois dans les volumes II et III du Capital[27]. Le mot « capitaliste » est beaucoup plus utilisé et figure plus de 2 600 fois dans les trois volumes (1867, 1885, 1894) combinés du Capital. Karl Marx et Friedrich Engels utilisent le terme de « capitaliste » (Kapitalist en allemand) dans leur Manifeste du Parti communiste en 1848 pour parler de la propriété privée détenue par une personne et de «forme capitaliste de production» (en allemand : kapitalistische Produktionsweise)[28],[29].

Marx et Engels parlent volontiers de « système capitaliste » (kapitalistisches System)[30],[31],[32] et du « mode de production capitaliste » (kapitalistische Produktionsform) dans Le Capital en 1867[33]. Marx n'utilise pas beaucoup le terme de « capitalisme », mais plutôt ceux de « capitalistes » et de « mode de production capitaliste », mentionnés plus de 2 600 fois dans les trois livres du Capital[note 2].

Emplois du terme du XXe siècle à nos jours

Pyramide du système capitaliste, début du XXe siècle, illustration issue d'une publication de 1911 du syndicat Industrial Workers of the World, inspirée d'un prospectus socialiste russe de 1901.

Le dictionnaire Larousse donne plusieurs définitions du capitalisme :

  • « statut juridique d'une société humaine caractérisée par la propriété privée des moyens de production et leur mise en œuvre par des travailleurs qui n'en sont pas propriétaires » ;
  • « système de production dont les fondements sont l'entreprise privée et la liberté du marché » ;
  • « système économique dont les traits essentiels sont l'importance des capitaux techniques et la domination du capital financier » ;
  • « Dans la terminologie marxiste, régime politique, économique et social dont la loi fondamentale est la recherche systématique de la plus-value, grâce à l'exploitation des travailleurs, par les détenteurs des moyens de production, en vue de la transformation d'une fraction importante de cette plus-value en capital additionnel, source de nouvelle plus-value »[34].

L'encyclopédie économique de référence en langue anglaise (NewPalgrave) définit le capitalisme comme un système dans lequel les moyens de production sont détenus par des particuliers[35].

Dans son sens moderne, l'étymologie du terme « capitalisme » renvoie à plusieurs définitions :

  • le capital, réalité tangible, masse de moyens aisément identifiables, sans fin à l'œuvre ;
  • le capitaliste comme agent opérationnel ou comme vecteur social[36] ;
  • le capitalisme qui est la façon dont est conduit, pour des fins peu altruistes d'ordinaire, ce jeu constant d'insertion[37].

Histoire du capitalisme

À l'époque médiévale

Ainsi que le démontre l'historien Fernand Braudel dans La dynamique du capitalisme[38], celui-ci s'est développé à partir du XVIe siècle en Europe[39]. Avant la révolution industrielle, l'aspect du capitalisme était principalement lié au commerce d'où le vocable « Capitalisme marchand » utilisé dans une vision marxiste, et ce, jusqu'à la fin du Moyen Âge[40],[41],[42]. La croissance économique a pu se développer dans le monde occidental après la disparition progressive du féodalisme[42]. Cette disparition a permis l'extension de cette croissance économique dans toute l'Europe au cours du XIXe et du XXe siècle. En effet, l'amélioration des sciences et techniques et de la pratique économique après la Renaissance a permis l'industrialisation dans la majeure partie du monde[5].

Émergence du capitalisme

Selon le sociologue Max Weber, le développement du capitalisme au XVIIIe siècle s'explique par l'apparition du protestantisme et notamment par la propagation des idées calvinistes. D'une part celles-ci conduisent les croyants, même riches, à un mode de vie à la fois consacré au travail (notion de vocation) et ascétique (et non hédoniste), ce qui est favorable à l'épargne et donc à la création de capitaux. D'autre part la notion de prédestination, selon laquelle Dieu aurait par avance choisi de façon irrévocable ceux qui seront damnés et ceux qui seront sauvés, créerait une véritable angoisse existentielle chez les réformés qui, dans cette incertitude, se tourneraient vers ce qui peut constituer pour eux des signes d'élection visibles : la bénédiction pendant la vie terrestre et la réussite économique - ce qui bien entendu encourage puissamment l'accumulation des richesses et donc le capitalisme[43].

Évolution des conditions juridique, sociale et politique en France

Les révolutions de la fin du XVIIIe siècle poseront un cadre juridique nouveau permettant la croissance du capitalisme avec notamment l'apparition la propriété foncière, du marché du travail et de la propriété intellectuelle.

Industrialisation

Le capitalisme prendra son véritable essor avec la révolution industrielle. Les modifications du travail et de son organisation engendrées par l'arrivée de machines entraînent pour la population paysanne une source d'emploi mais aussi pour les anciens travailleurs des domicile-ateliers, une source de chômage et de déqualification.

Colonialisme et impérialisme

Dans une thèse datée de 1984, Empire colonial et capitalisme français, histoire d'un divorce, Jacques Marseille se demande si l'empire colonial a été un frein ou un moteur pour le développement du capitalisme français. Selon lui, l'importance de l'empire pour le capitalisme français n'a été qu'une apparence statistique. Certains estiment donc que l'empire n'a pas été la source du progrès économique.

Cette théorie s'oppose à celle de Karl Marx sur le rôle du pillage colonial.

Développement de différents capitalismes

Au cours de l'histoire le capitalisme et l'économie de marché prennent des formes différentes en fonction des pays.

Selon Michel Albert (dans son ouvrage Capitalisme contre capitalisme, de 1991[44]), « le capitalisme triomphant, après la disparition à l'Est des régimes collectivistes, redevient dangereux et notre avenir se joue désormais entre cette victoire et ce danger, entre les deux modèles résiduels ».

Le capitalisme rhénan et nippon

Le capitalisme rhénan, qui se pratique en Allemagne et – avec des variantes au Japon – qui valorise la réussite collective, le consensus et le souci du long terme. Système également caractérisé par un poids majeur des banques (détentrices de près de la moitié des actions des sociétés cotées, et très influentes sur les autres entreprises), et l'influence importante de syndicats puissants.

Le capitalisme anglo-saxon

Le capitalisme anglo-saxon, fondé sur la réussite individuelle, le profit financier à court terme et leur médiatisation. Système caractérisé par le fait que l'actionnariat individuel mais surtout collectif (fonds d'investissement, fonds de pension pour les retraités du secteur privé, ou multinationales de taille mondiale), y ont une influence déterminante.

La troisième voie

Il s'agirait de réhabiliter le rôle de l'état, et de définir les moyens de production (terres agricoles, éducation, santé, défense, banque, et autres secteurs clé de l'économie) qui doivent être placés sous contrôle démocratique afin qu'ils répondent aux besoins des populations, et ceux non essentiels qui peuvent être laissés au secteur privé.

Selon Alberto Alesina (dans The future of Europe, Reform or Decline (2006)), entre capitalisme et communisme, l'existence d'une voie intermédiaire serait un leurre. Le capitalisme entraînerait à terme une concentration des richesses au sein d'une part de la population de plus en plus réduite, et une paupérisation du reste de la population. Un contrôle et une redistribution via l'intervention de l'État serait alors nécessaire.

Une économie mondialisée

Au XXIe siècle, le capitalisme se développe encore plus avec la mondialisation à travers le monde qui permet un échange facile des capitaux et marchandises.

Le capitalisme face à l'enjeu écologique

La production intensive, la recherche de profit, les transactions très importantes dans le monde et la société de consommation sans limite confronte le capitalisme aux enjeux environnementaux. En effet, la forte production épuise les ressources naturelles rapidement.

Mécanismes

Dans un régime l'autorisant, les biens qui forment le capital, peuvent appartenir à des personnes ou à des entreprises privées. Les rôles de détenteur de capitaux, d’apporteur de travail, d’entrepreneur et de consommateur sont dissociés et chacun cherche à satisfaire ses propres objectifs. Un même individu peut jouer simultanément ou successivement plusieurs de ces rôles, en plus de celui de consommateur.

Le profit effectivement réalisé par l'investisseur en capital (entrepreneur individuel ou actionnaire par exemple) dans l'entreprise dépend de la réaction du marché.

La création et le développement de l’entreprise sont dirigés par les investisseurs qui supportent le risque de l'entreprise sur leurs capitaux, et attendent donc une rémunération supérieure à celle d'une épargne sans risque (typiquement un prêt à l’État), la différence étant une prime de risque.

L'État dans une économie de marché

L'État dispose d'un « domaine privé », correspondant aux propriétés privées d'un individu ordinaire ou d'un groupe privé. Très souvent, la distinction n'est pas bien faite entre ce domaine privé et le domaine public (la partie dont l'État est gestionnaire pour le compte de la collectivité)[45]. D'autant que dans certains cas un même bien peut appartenir, en fonction des circonstances, au domaine privé de l'État ou au domaine public, et que la gestion des possessions de l'État (publiques ou privées) est l'occasion de débats aussi bien théoriques que pratiques.

Par rapport à son domaine privé, l'État se trouve en théorie dans la même situation qu'un capitaliste ordinaire, dont le but est de tirer le meilleur avantage économique possible de son capital. Mais ce n'est pas systématiquement le cas : les impératifs et les méthodes de gestion politiques peuvent l'emporter sur les exigences économiques, le risque étant couvert par le contribuable.

Par ailleurs, il arrive, dans le cadre d'une économie de marché, que l'État gère ses participations capitalistiques en privilégiant les retombées politiques aux retombées économiques de sa participation : voir économie mixte et société d'économie mixte.

L'État dans les pays communistes

Les communistes qui n'ont pas adhéré aux conceptions et aux pratiques qui ont instauré les régimes du « bloc communiste », ont dès la fin du XIXe siècle désigné par capitalisme d'État le cas où l'État est propriétaire de tout le capital (ou presque).

Depuis la chute du mur de Berlin en 1989, les États communistes ayant pratiqué cette économie, fonctionnent sous un régime de libéralisme économique avec une privatisation pratiquement totale, en général avec une appropriation par les anciennes élites.

L'impérialisme et le colonialisme

L’impérialisme et le colonialisme ont été présentés par certains auteurs marxistes ou assimilés comme les « formes extrêmes du capitalisme », notamment par Rudolf Hilferding (Le Capital financier, 1910), Rosa Luxemburg (L'Accumulation du capital, contribution à l'explication économique de l'impérialisme, 1913), ou Lénine (L'Impérialisme, stade suprême du capitalisme, 1916).

Le rôle de l'individu

En 1957 la romancière américaine Ayn Rand publie La Grève, une fiction réputée pour être le récit le plus influent aux USA après la Bible[46]. Elle y développe sa vision du monde, l'objectivisme, selon laquelle la clé du progrès social se trouve dans la découverte et le développement des habiletés de l’individu[47].

Par son apologie du self made man, Rand est considérée comme la théoricienne à la fois d'un capitalisme individualiste et du libertarianisme, prônant les valeurs de la raison, du mérite et de l'« égoïsme rationnel », son concept central. Des personnalités diverses, tels l'économiste Alan Greenspan, le président Ronald Reagan et Jimmy Wales, co-fondateur de Wikipédia, se réclameront plus tard de ses conceptions.

Histoire des théories

Le capitalisme est le produit d'initiatives et d'adaptations successives au cours du temps. Il a pris diverses formes, qui pour la plupart coexistent encore de nos jours et continuent d'évoluer.

  • Selon Max Weber (cf L'analyse de l'émergence du capitalisme selon Max Weber), le capitaliste – pour des raisons qu'il analyse comme essentiellement éthiques et religieuses – considère la quantité de biens disponibles comme un indicateur de conduite de sa vie ; il met un frein à sa consommation et s'organise de façon rationnelle et méthodique dans le but de produire, en investissant et en accumulant ses biens pour en produire de plus en plus. Ce qu'il dénomme « l'esprit du capitalisme », porté par la nouvelle classe bourgeoise, désigne non pas prioritairement la recherche de la sécurité ou de la consommation, mais une logique d'effort individuel et collectif, tendue vers la croissance. Pour Max Weber, ce n'est pas dans les facteurs techniques ou économiques qu'il faut voir l'origine de la rupture majeure par rapport aux systèmes antérieurs : pour lui, c'est essentiellement une affaire de changement de mentalité et de culture[48].
  • Selon Fernand Braudel[49], les premières formes de capitalisme sont dérivées du « commerce au long cours » et sont constatées aux environs du XIIe siècle en occident dans la ville de Bruges (en Belgique) qui fut avant Anvers, le centre boursier mondial comme l'est aujourd'hui Wall Street. Les commerçants, qui investissaient jusque-là dans des opérations ponctuelles, systématisent leur activité et deviennent des négociants, puis des négociants-banquiers, puis des banquiers-négociants: Le centre de gravité et la finalité des échanges se déplace ainsi progressivement de l'activité commerciale vers l'activité financière.

Vision historique

Plusieurs formes de capitalisme sont à l'œuvre dans les sociétés selon la nature des moyens de production employés dans une époque déterminée.

Ainsi, Louis Bergeron, directeur d'études à l'EHESS, distingue selon les circonstances historiques[50] :

  • le capitalisme ancien qui jusqu'au milieu du XIXe siècle comprend un éventail assez large :
    • le capitalisme foncier (châtelains et gentilshommes fermiers, bourgeois propriétaires et gros fermiers, agriculteurs « industriels »…) ;
    • le capitalisme « mixte » (maîtres de forges, grands investisseurs, spéculateurs immobiliers, exploitants de mines…) ;
    • le capitalisme négociant : négociants-banquiers, grands armateurs, marchands-fabricants ;
    • le capitalisme d'industrialisation et de renouvellement social : avec de nouvelles élites promues par de nouveaux modèles d'ascension sociale.

- modèles de branches mettant en œuvre savoir-faire et une culture professionnelle nouveaux (textile, sidérurgie-métallurgie…)

- modèle de l'entrepreneur individuel ou familial (faisant travailler son patrimoine et agissant « à la force du poignet »…)

- modèles impliquant des ressources, des compétences et initiatives nouvelles (immigrants étrangers, ingénieurs, universitaires…)

Selon les Modèles formels de représentation

Si la science économique s'attache à décrire l'économie indépendamment des idéologies, il a été décrits plusieurs schémas de fonctionnement parmi lesquels on remarque essentiellement :

  • Le modèle marxiste du capitalisme industriel : il utilise un stock de machines de plus en plus onéreuses et concentrées dans des manufactures ou usines. Le besoin toujours accru en capital entraîne la création de nouveaux cadres juridiques : la Société Anonyme supplante la société en commandite par action. Le capital de l'entreprise s'ouvre davantage vers « l'extérieur » : les apporteurs de capitaux frais affluent, parmi lesquels les financiers. A noter que Marx n'explique pas d'où viennent ces capitalistes qui affluent ni ces financiers.
  • Le modèle marxiste du capitalisme financier, où l'activité est modélisée par le cycle « Argent → Marchandise → Argent ». Ainsi Karl Marx avance que l'argent serait devenu l'alpha et l'oméga de l'activité économique, celle-ci n'étant plus que le support obligé de la reproduction du capital via la création de la plus-value.
  • Le modèle du capitalisme entrepreneurial, où l'entrepreneur de Joseph Schumpeter, les dynasties bourgeoises décrites par E. Beau de Loménie, ou plus récemment le manager d'Alfred Chandler, qui émergent à la fin du XIXe siècle, se distinguent des « propriétaires », et des « ouvriers ». Les profits des propriétaires s'apparentant dans ce cas à une rente, puisqu'ils ne rémunèrent plus le rôle d'entrepreneur-gestionnaire qu'ils ne sont pas ou qu'ils ne sont plus. Ce modèle est celui des entreprises se finançant à la bourse et il sera observé que cela permet à l’État de prélever des impôts, charges et taxes à la fois sur le bénéfice de l'entreprise puis sur le revenu des actionnaires en même temps que sur le revenu des salariés, ce qui lui permet, en France, de prélever finalement largement plus de la moitié de la valeur ajoutée des entreprises.
  • Le modèle du capitalisme monopoliste d'État, où selon Herzog et Boccara les appareils étatiques sont mis au service de l'économie afin de limiter la baisse tendancielle du taux de profit pour les capitaux et l'initiative privés. Cependant, la baisse tendancielle du taux de profit n'ayant pas été observée à ce jour dans les pays capitalistes, le fondement théorique marxiste au monopole d’État semble avoir disparu.
  • Le modèle du capitalisme cognitif, issu de la mutation des conditions de production, où il est fait de plus en plus appel au capital-savoir. En pratique, cela semble un nouveau vocabulaire pour décrire le modèle entrepreneurial moderne.

Critiques du capitalisme

En 1911 le syndicat Industrial Unionism fait une critique marxiste en présentant le capitalisme sous la forme d'une structure hiérarchisée, pyramidale et de classe. Le haut de la pyramide serait fait de dirigeants, supportés par des charlatans, supportés par des forces armées, supportés par des industriels, supportés par des travailleurs qui nourrissent tout le monde, eux-mêmes n'étant supportés par personne d'autre que le sol.

Le capitalisme est l'objet de nombreuses controverses. Ces controverses peuvent porter :

  • sur l’accumulation du capital en elle-même ;
  • sur la propriété du capital ;
  • sur le comportement des propriétaires du capital ;
  • sur les conséquences humaines, sociales, écologiques et économiques d'un système dont la logique de fonctionnement est la croissance du capital ;
  • sur les catégories mêmes du capitalisme, en tant que formes sociales : le travail en lui-même, la valeur, la marchandise, l'argent. C'est une critique radicale et catégorielle du travail et de la valeur, qui n'a plus rien à voir avec l'ensemble des marxismes. Cette critique est portée par l'« École de Krisis », par Moishe Postone, Robert Kurz ou Anselm Jappe.

On trouve sous un régime capitaliste de nombreuses inégalités de revenu, de patrimoine, etc. La pauvreté existe, de même que la faim. Certains y voient un scandale spécifique au capitalisme, et préconisent d'autres systèmes.

Au début du XXIe siècle, des critiques au sein même de l'établissement financier ont vu le jour devant une forme exacerbée du capitalisme, comme celle de Jean Peyrelevade qui parle de « capitalisme total »[51]. Cet auteur propose notamment d'interdire les stock-options comme part de la rémunération des dirigeants pour éviter les conflits d'intérêts et d'offrir des dividendes plus avantageux aux actionnaires anciens afin de limiter les allers-retours spéculatifs.

La crise financière majeure qui frappe les marchés mondiaux à la suite de la crise des subprimes (février 2007) a par ailleurs contribué à un regain important de critiques envers le capitalisme et l'« ultralibéralisme ». Alan Greenspan, président pendant 18 ans de la Réserve fédérale et libertarien proclamé[52], qui défendait la supériorité de l'autorégulation des marchés sur la régulation étatique, a estimé le face à la commission de contrôle d'action gouvernementale qu'il avait eu « partiellement tort » de faire plus confiance au marché qu'au gouvernement pour réguler le système financier. Il a par ailleurs fait part de son désarroi : « J'ai trouvé une faille [dans mon idéologie]. Je ne sais pas à quel point elle est significative ou durable, mais ce fait m'a plongé dans un grand désarroi »[53] Greenspan utilise ici le mot idéologie non comme un ensemble de croyances irréfutables mais comme le cadre conceptuel à travers lequel il explique le monde[54]. Greenspan est fortement critiqué, en particulier par les libéraux américains[réf. souhaitée], pour être un des responsables de la crise en ayant conduit une politique monétaire laxiste, par absence de véritable indépendance par rapport au pouvoir politique, à l'origine de l'explosion du crédit (baisse systématique des taux pour entretenir la croissance). Il est à noter que la politique monétaire expansionniste est contraire aux principes libertariens de laissez-faire en matière de création monétaire. Greenspan, plutôt que de trouver une faille dans son idéologie, ne l'a tout simplement pas appliquée. Sa politique monétaire relevant plutôt de l'interventionnisme selon les économistes de l'école autrichienne.

Financiarisation contre capitalisme

Selon certains analystes et critiques (par ex. Alain Touraine), le système économique a subi une dérive financière qui l'a éloigné du capitalisme. Le développement de la financiarisation a conduit à une économie d'endettement généralisé, s'éloignant d'une éthique capitaliste où les risques sont principalement assumés par ceux qui fournissent un capital stable.

Pour d'autres[Qui ?], la spéculation financière est inhérente au capitalisme, et la grande place accordée à la finance dérégulée a été un des leviers du capitalisme pour maintenir un taux de profit croissant malgré le ralentissement de la croissance à la fin des années 1970[55].

Aspects éthiques

Le philosophe André Comte-Sponville avait posé la question de savoir si le capitalisme était moral dès avant la crise économique de 2008. Selon lui, il est d'autant plus question de morale dans les discours et les préoccupations que la morale fait défaut dans les comportements humains[56].

Il voit trois raisons complémentaires à ce retour de la morale, associées à trois temporalités différentes[57] :

  • Dans le court terme (depuis vingt ou trente ans), le passage de la génération des soixante-huitards aux nouvelles générations moins politisées marque le retour d'une certaine morale ;
  • Dans le moyen terme (depuis le XXe siècle), le triomphe du capitalisme l'a rendu moralement moins justifiable que lorsque l'adversaire communiste lui tenait lieu de faire-valoir ;
  • Dans le long terme (depuis la Renaissance et le XVIIe siècle), la mort sociale de Dieu correspond à un processus de laïcisation, de sécularisation, et donc, s'agissant de la France, de déchristianisation, qui pose toutes sortes de problèmes tournant autour de la communauté, qui n'est plus fondée sur une communion religieuse.

Il remet en perspective le problème des limites opposées au comportement humain en distinguant une hiérarchie de quatre ordres au sens pascalien du terme[58] :

  • l'ordre techno-scientifique (auquel appartient l'économie en tant que science) ;
  • l'ordre juridico-politique ;
  • l'ordre de la morale (ce qui relève du devoir) ;
  • l'ordre de l'éthique (ce qui relève de l'amour).

Même si les ordres de la morale et de l'éthique ont des préoccupations plus élevées, l'ordre no 1 (économico-techno-scientifique) n'est pas soumis à l'ordre no 3 (l'ordre de la morale) du fait de structurations internes différentes : le possible et l'impossible n'ont que faire du bien et du mal[59].

Un système addictif

La critique du capitalisme addictif[60] repose sur l’idée d’un emballement collectif des formes de production, de marketing et de consommation du même ordre que celui qu’on observe dans les addictions individuelles, provoquant chez de nombreux agents économiques des symptômes de manque, de sevrage, de tolérance, et la poursuite d’activités problématiques malgré leurs conséquences négatives. De la même façon que les drogues, les offres de consommation inhérentes au capitalisme[61] agissent sur les circuits neurologiques du plaisir et de la récompense[62] afin de susciter de nouveaux désirs. Toutefois, cette tendance addictive du capitalisme ne concerne pas seulement les façons de consommer visées par les critiques classiques de la "société de consommation", elle concerne aussi les façons de produire, de commercer, de surveiller ou de gagner de l’argent, caractérisées elles aussi par une insatiabilité et un manque de contrôle analogues à ce qu’on peut observer dans l’usage des drogue - dont témoignent par exemple les pratiques de certains traders sur les marchés financiers ou de lobbyistes sur ceux des médicaments. Au cours des quarante dernières années, cette tendance a connu une accélération sans précédent avec l’optimisation extrême des activités[63], l’élimination systématique des sources de déficit, la numérisation des relations marchandes, la mise en concurrence généralisée, l’élargissement des sources de commerce, l’intensification de la course à l’argent et au succès, l’usage compulsif des technologies et, finalement, une sur-utilisation des ressources naturelles dont les conséquences écologiques et humaines sont de plus en plus incontrôlables. La rationalisation des activités économiques qui était, selon Max Weber, au centre de la modernité capitaliste[64], prend de ce fait un caractère d'hyper-rationalisation dont les effets sur la vie pratique de beaucoup de gens contredisent les récompenses attendues, ce qui est le signe distinctif d’un processus addictif.

Aspects environnementaux

Naomi Klein affirme dans son livre Tout peut changer que le modèle capitaliste occidental est en guerre contre la vie sur Terre. Plus que d'un problème d'émissions de gaz à effet de serre, c'est le mode de vie occidental qui est en cause et qui risque de mener l'humanité à sa perte. Pour elle, la crise climatique ne peut être résolue dans un système néolibéral et capitaliste prônant le laissez-faire, qui encourage la consommation démesurée et a conduit à des méga-fusions et des accords commerciaux hostiles à la santé de l'environnement. Elle soutient que cette crise pourrait bien ouvrir la voie à une transformation radicale susceptible de faire advenir un monde non seulement habitable, mais aussi plus juste[65].

Le capitalisme et la guerre

Le capitalisme est également critiqué pour les conflits qu'il engendre. Ainsi Jean Jaurès déclare dans un discours de 1895 que « le capitalisme porte en lui la guerre » et il précise «... toujours cette guerre politique, économique et sociale des classes entre elles, des individus entre eux, dans chaque nation, suscitera les guerres armées entre les peuples. C’est de la division profonde des classes et des intérêts dans chaque pays que sortent les conflits entre les nations. »[66]

Dans les autres courants de pensée

De manière générale

L'étude du fonctionnement des marchés dans le capitalisme est souvent loin de l'idéal de la concurrence pure et parfaite. En pratique, le bon fonctionnement des marchés nécessite une réglementation et un contrôle afin d'éviter les positions dominantes, les malversations et tout ce que l'homme peut inventer pour tricher ce qui n'est pas contradictoire avec le « laissez-faire » ni avec le droit de propriété[67],[68]. Il est généralement constaté que le capitalisme permet une croissance économique[69] plus forte. La mesure dans laquelle les différents marchés sont libres, ainsi que les règles définissant la propriété privée, est une question de politique et de la politique, et de nombreux États ont ce qu'on appelle des économies mixtes[70].

A noter qu'un marché « libre » est celui où l’État n'impose pas la présence d'un acteur qu'il contrôle (monopôle de vente ou d'achat par exemple) et ne signifie pas qu'il n'y a pas de réglementation contrairement à une idée fausse et répandue.

Le capitalisme a été contesté dès qu'il a été mis en œuvre, par divers économistes comme Karl Marx au XIXe siècle[71], et il est perçu différemment selon le pays où il a été implanté. L'on peut opposer au capitalisme :

  • l'économie primitive, où les échanges sont marginaux et chaque groupe exploite la nature pour son propre compte ; en réalité, cette économie était du capitalisme primitif.
  • l'économie de potlatch, où les échanges, même importants, ne visent pas à une accumulation de capital (ni parfois même à la consommation : il arrive que les biens soient détruits purement et simplement à l'issue de l'échange), mais à une démonstration symbolique de puissance statutaire ; en réalité, il ne s'agit pas d'une économie mais de rituels sociaux associés au capitalisme primitif.
  • le communisme, qui désigne d'une manière générale une théorie d'organisation politique, sociale et économique sans classe sociale et sans État, censée bénéficier de la mise en commun des moyens de production et des biens de consommation pour répondre aux besoins de chacun ;
  • le socialisme d'État, où la propriété privée est réduite au minimum, et où tout le capital productif est géré collectivement ; toutefois, dans ce contexte économique, on trouve aussi le terme de capitalisme d'État, que certains (socialistes ou non) utilisent pour désigner l'économie où l'État est seul et unique propriétaire de capital, ce qui n'est en fait, de leur point de vue, qu'un capitalisme étatisé[72].

En pratique, aucun système économique viable autre que le capitalisme n'a été décrit à ce jour, la seule grande variable identifiée étant la participation de l’État au capital des entreprises et de nombreux théoriciens préconisent même explicitement des formes mixtes, avec des dosages variés selon le domaine et le but.[réf. nécessaire]

On notera par ailleurs que les formes politiques sont rarement « pures » en pratique, de sorte que le capitalisme se présente sous des formes variables selon la liberté de propriété et les possibilités d'investissements en capital mais c'est une erreur de penser qu'il y aurait d'autres systèmes économiques existant à ce jour.

Le capitalisme est cependant dépendant du système politique et législatif en place. Il nécessite :

Il est communément admis qu'un État est nécessaire pour remplir ce rôle.

Le capitalisme fonctionne très largement (et même essentiellement, pour le grand commerce international) sur la base du contrat et souvent avec des clauses d'arbitrage privé, les entreprises préférant un arbitrage à une justice jugée trop lente ou arbitraire selon les régimes politiques, où l'État n'intervient qu'à titre d'acteur potentiel en dernier ressort (sachant qu'il ne faut pas négliger l'effet économique d'une simple possibilité d'intervention).

On notera aussi que les anarcho-capitalistes considèrent que l'État est illégitime et dangereux, et qu'on peut parfaitement s'en passer en s'appuyant sur le droit naturel, sa propre capacité de défense, et des organismes privés. Pour eux, le capitalisme apparaît à la fin du XVIIIe siècle, puis est décrit et théorisé par Karl Marx au milieu du XIXe siècle.

Marxisme

Karl Marx a développé dans plusieurs ouvrages, dont le plus connu est Le Capital , une analyse du capitalisme ayant eu une influence considérable sur la pensée économique et politique. Pour Marx, le capitalisme se développe grâce à l'existence d'une catégorie sociale, formée d'hommes dépourvus de moyens de production et ainsi contraints de vendre leur force de travail : les prolétaires. En même temps que se développe le prolétariat, naît une autre classe sociale détentrice du capital : la bourgeoisie capitaliste.

Les prolétaires dépendent des capitalistes dans la mesure où la force de travail seule ne produit que de la valeur d'usage, pas de valeur d'échange, elle nécessite des matières premières et des moyens de production, donc l'usage de capital, détenu par les capitalistes. Le « travail vivant » (l'usage de la force de travail) est transformé en « travail mort » (le capital)[73].

Dans un système capitaliste, l'argent est utilisé pour acheter, produire, et vendre dans le but de faire du profit. Une somme d'argent A (le capital) est investi pour produire une marchandise M qui est vendu à un prix A' supérieur à A. Cette différence est la plus-value. Elle peut être réinvestie pour réaliser une nouvelle plus-value plus importante, créant une dynamique d'accumulation du capital (en apparence) sans fin (développement de l'entreprise qui lui permettra à son tour d'acheter d'autres groupes, qui lui profiteront à leur tour…).

D'après Marx, la plus-value a pour origine une différence entre la valeur du travail du prolétaire et le salaire effectivement versé au prolétaire. Le salaire du prolétaire s'établit à un niveau qui correspond aux dépenses socialement nécessaires pour assurer le renouvellement de sa force de travail, le travail au-delà est un surtravail accaparé par le capitaliste et source de la plus-value. Il s'agit pour le marxisme d'un mécanisme d'extorsion de plus-value au détriment des travailleurs.

Pour les marxistes, le système capitaliste n'est pas viable : il tend à concentrer une part toujours croissante des richesses dans un nombre toujours plus restreint d'individus, réduisant la société à deux classes, la bourgeoisie et le prolétariat, vouées à se livrer à une lutte des classes.

En outre, le capitalisme implique une croissance de la production sans croissance correspondante de la consommation car le but de l'économie capitaliste n'est pas de répondre à une demande, mais d'accroître les profits du capital. Cette hausse des profits s'accompagnant d'une paupérisation accrue des prolétaires, les débouchés sont faibles. Ceci conduit à des crises cycliques de surproduction[74].

La résolution des contradictions du capitalisme est pour les marxistes la socialisation des moyens de production, qui devraient être contrôlés par la collectivité dans l'intérêt de la collectivité entière et non plus d'une classe possédante. Cette transformation des rapports de production doit entraîner dans la perspective marxiste la disparition des classes sociales et de l'État. Cette nouvelle société est le socialisme ou communisme. Les modalités pratiques de cette socialisation (autogestion ou étatisation), la méthode de transition du capitalisme au socialisme (révolution ou réforme), et son caractère inéluctable ou non, font l'objet de débats entre différents courants se réclamant du marxisme.

Libéralisme

Le capitalisme rend nécessaire l’intervention minimale de l’État, ce qui est assuré par le libéralisme. C’est en ce sens que les rapports entre ces deux notions peuvent être établis[75].

Pour les libéraux, la logique du capital est, par elle-même, étrangère aux principes de la morale, c'est-à-dire une donnée exogène (qui provient de l'extérieur). Par conséquent, il appartient aux seuls propriétaires des biens qui sont utilisés comme moyens de production d'apprécier ce qu'ils font de ce capital. Pour les libéraux classiques, comme Tocqueville, par exemple, ou comme plus tard pour Raymond Aron, le marché est un moyen, en aucune façon une fin. En d'autres termes, la satisfaction maximale des désirs ne peut être le critère ultime du bien. Il ne suffit donc pas de concevoir forcément une économie dirigiste et planificatrice, qui s'appuie parfois sur un régime politique autoritaire, pour résoudre les inégalités, les abus, mais de concevoir aussi un changement des manières d'être. Ce qui signifie que si la tendance à soumettre l’économie à un État régalien est encouragée par les libéraux classiques, cela doit s’exercer dans le respect des libertés fondamentales et de contre-pouvoirs.

Selon les tenants du libéralisme, le capitalisme serait entièrement défini par des critères juridiques qui assurent l'existence de la liberté du commerce et de l'industrie, avec ses corollaires immédiats comme l'esprit d'initiative, la liberté d'entreprendre, la propriété privée des moyens de production. Selon cette conception, le régime capitaliste existe dès lors que les individus ont le droit de posséder et de disposer librement des biens de production et des fruits de leur utilisation, et de pouvoir les échanger librement, sans aucune contrainte, avec d'autres agents. Les propriétaires de moyens de production peuvent déterminer librement leurs actions en réalisant les arbitrages qui leur paraissent les plus pertinents entre les différentes finalités qui leur sont ouvertes :

  • souci de servir les consommateurs,
  • rémunération des collaborateurs et salariés,
  • recherche du profit,
  • accumulation du capital ou d'un patrimoine.

Dans cette conception, la recherche du profit monétaire et l'accumulation de capital ne sont pas – a priori et de façon dogmatique – les seules finalités offertes aux agents, et ne constituent pas pour tous une obligation ou une priorité exclusive et absolue. Si cette nuance mérite d'être prise en compte, force est de reconnaître que – dans la pratique et pour une majorité d'opérateurs intervenants en régime capitaliste – le mobile prioritaire, sinon principal, de l'activité économique n'en demeure pas moins la recherche du profit qui est le revenu du capitaliste comme tout un chacun a pour finalité essentiel de son travail, sinon évidemment la seule, de s'assurer un revenu. Lequel est présenté comme légitime et justifié par le fait qu'il est :

  • la « juste » rémunération de l'effort et de la prise de risque du capitaliste[76] ;
  • le résultat d'un équilibre « optimal » régulé à tout moment par les forces du marché et de la concurrence.

Il existe quelques controverses quant à la propriété privée des moyens de production, la création de biens ou de services à but lucratif dans un marché, ainsi que concernant les prix et les salaires qui sont éléments du capitalisme[77],[note 3].

Autoritarisme

Dans certains régimes politiques, le capitalisme existe en tant que système économique mais coexiste avec un gouvernement autoritaire. On parle alors de « capitalisme autoritaire »[78] ou de « capitalisme non-libéral »[79], une forme de capitalisme - lié au capitalisme d'État - qui associe propriété privée & fonctionnement des forces de marché avec des mesures autoritaires (comme la répression de la dissidence, la restriction des libertés d'expression ou de vote)[78],[79],[80]. Des exemples de pays décrits couramment comme capitalistes autoritaires sont : la Chine depuis les réformes économiques de Deng Xiaoping ; la Hongrie de Viktor Orbán ; la Russie de Vladimir Poutine ; Singapour sous Lee Kuan Yew et la Turquie de Recep Tayyip Erdoğan. Les régimes fascistes et les dictatures militaires pendant la guerre froide ainsi que l'Allemagne nazie ont également été décrits comme des pays « capitalistes autoritaires »[81],[82],[83],[84].

École néoclassique

L'école néoclassique d'économie voit dans le capitalisme une coopération générale (la concurrence poussant les acteurs à se positionner au mieux compte tenu des positions des autres) qui inclut les générations passées et futures, et un accroissement de production général qui bénéficierait à tous.

Interventionnisme

Les interventionnistes de gauche et de droite jugent le système à ses résultats sociaux. Selon eux, le capitalisme produit des rapports entre riches et pauvres toujours plus déséquilibrés en termes de pouvoir et d'inégalités économiques, et une sclérose sociale qui nuit à l'économie générale. Il appartient alors au pouvoir politique de rétablir à la fois l'équilibre et les conditions de la prospérité générale et de développement.

Selon leur sensibilité à l'un ou l'autre aspect et leur appréciation globale de la situation, les utilitaristes préconiseront un arbitrage politique variable adapté.

Notes et références

Notes

  1. Le sens de « capitalisation » est « action de capitaliser ; état capitalisé : la capitalisation des intérêts ruine plus vite le débiteur et n'enrichit pas toujours le créancier. » Enrichissement de la langue française ; dictionnaire des mots nouveaux, p. 54
  2. Le pluriel de capitaliste a pour but de désigner un groupe de personnes qui forme la classe dirigeante selon Karl Marx[réf. nécessaire]
  3. Il y a notamment des critiques exercées par Karl Marx concernant la propriété privée, le mode de production, les prix et les salaires. Voir Le Capital .

Références

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    « Real-world capitalist systems are mixed, some having higher shares of public ownership than others. The mix changes when privatization or nationalization occurs. Privatization is when property that had been state-owned is transferred to private owners. Nationalization occurs when privately owned property becomes publicly owned. »
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  21. Les Juifs et le capitalisme moderne (Die Juden und das Wirtschaftsleben)
  22. Die Protestantische Ethik und der Geist des Kapitalismus
  23. Voir notamment sa lettre à Delarageaz datée du 7 août 1852 dans Pierre-Joseph Proudhon, La Révolution sociale démontrée par le coup-d'État du Deux-décembre, Paris: Tops/H.Trinquer, 2013 [1852], p. 300-301.
  24. Braudel, Fernand. The Wheels of Commerce: Civilization and Capitalism 15–18 Century, Harper and Row, 1979, p. 237
  25. Volume I, page 124 (édition allemande)
  26. tome II à la page 493 (édition allemande)
  27. volumes II et III
  28. Le Capital
  29. Théories sur la plus-value
  30. Karl Marx. Chapter 16: Absolute and Relative Surplus-Value. Le Capital.
  31. Karl Marx. Chapter Twenty-Five: The General Law of Capitalist Accumulation. Das Kapital.
    « Die Verlängrung des Arbeitstags über den Punkt hinaus, wo der Arbeiter nur ein Äquivalent für den Wert seiner Arbeitskraft produziert hätte, und die Aneignung dieser Mehrarbeit durch das Kapital – das ist die Produktion des absoluten Mehrwerts. Sie bildet die allgemeine Grundlage des kapitalistischen Systems und den Ausgangspunkt der Produktion des relativen Mehrwerts. »
    « The prolongation of the working-day beyond the point at which the labourer would have produced just an equivalent for the value of his labour-power, and the appropriation of that surplus-labour by capital, this is production of absolute surplus-value. It forms the general groundwork of the capitalist system, and the starting-point for the production of relative surplus-value. »
  32. Karl Marx. Chapter Twenty-Five: The General Law of Capitalist Accumulation. Das Kapital.
    • Die Erhöhung des Arbeitspreises bleibt also eingebannt in Grenzen, die die Grundlagen des kapitalistischen Systems nicht nur unangetastet lassen, sondern auch seine Reproduktion auf wachsender Stufenleiter sichern.
    • Die allgemeinen Grundlagen des kapitalistischen Systems einmal gegeben, tritt im Verlauf der Akkumulation jedesmal ein Punkt ein, wo die Entwicklung der Produktivität der gesellschaftlichen Arbeit der mächtigste Hebel der Akkumulation wird.
    • Wir sahen im vierten Abschnitt bei Analyse der Produktion des relativen Mehrwerts: innerhalb des kapitalistischen Systems vollziehn sich alle Methoden zur Steigerung der gesellschaftlichen Produktivkraft der Arbeit auf Kosten des individuellen Arbeiters;
  33. Saunders, Peter (1995). Capitalism. University of Minnesota Press. p. 1
  34. « Définition en ligne du dictionnaire Larousse », sur larousse.fr
  35. Heilbroner, Robert L. Capitalism. New Palgrave Dictionary of Economics, Second Edition (2008):http://www.dictionaryofeconomics.com/article?id=pde2008_C000053&edition=current&q=state%20capitalism&topicid=&result_number=2
  36. (Fernand Braudel, La Dynamique du capitalisme et al. 1985, p. 233)
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  43. Dany-Robert Dufour, « Les prospérités du vice », Le Monde diplomatique, (lire en ligne, consulté le )
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  45. En France, ces deux notions, domaine privé de l'État et domaine public, ce dernier étant affecté à l'usage direct du public ou à un service public, relèvent de deux régimes différents, et la distinction entre les deux est constamment réaffirmée depuis l'Ancien Régime, avec de légers assouplissements depuis les lois du 5 janvier 1988 et du 25 juillet 1994 - cf http://www.fondation-igd.org/upload/pdf/Publi/Patri_dompub.pdf p. 24
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  47. Ayn Rand et le moteur du progrès social, Abebooks
  48. Voir l'ouvrage de Max Weber : L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme
  49. (Fernand Braudel, La Dynamique du capitalisme et al. 1985, p. ?)
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  52. Greg Ip et Emily Steel, « Greenspan Book Criticizes Bush And Republicans », Wall Street Journal, (consulté le )
  53. (en) Greenspan Concedes Error on Regulation, New York Times, 24 octobre 2008.
  54. « remember that what an ideology is, is a conceptual framework with the way people deal with reality. Everyone has one. You have to -- to exist, you need an ideology. The question is whether it is accurate or not. » ; « Flaw in the model that I perceived is the critical functioning structure that defines how the world works, so to speak. »
  55. Voir par exemple cette vidéo de Michel Husson.
  56. André Comte-Sponville, Le capitalisme est-il moral ?, Albin Michel, p. 16
  57. André Comte-Sponville, Le capitalisme est-il moral ? , Albin Michel, p. 16-40
  58. André Comte-Sponville, Le capitalisme est-il moral ?, Albin Michel, p. 47-70
  59. André Comte-Sponville, Le capitalisme est-il moral ?, Albin Michel, p. 71
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  72. L'expression est née avant la diffusion des idées de Weber, ce qui a un impact direct sur le sens à donner au mot « capitalisme » : il faut entendre le sens de 1750-1850, et non le sens moderne[réf. nécessaire].
  73. Karl Marx, Le Capital , chapitre 10.
  74. Marc Montoussé, Analyse économique et historique des sociétés contemporaines, Editions Bréal, (ISBN 978-2-7495-0658-6, lire en ligne), p. 98-100
  75. Le Monde Politique, « Libéralisme, capitalisme | Le monde politique », sur www.lemondepolitique.fr (consulté le )
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  83. (en) Fuchs, « The Relevance of Franz L. Neumann's Critical Theory in 2017: Anxiety and Politics in the New Age of Authoritarian Capitalism », Economic Politic Review, University of Westminster, (lire en ligne, consulté le )
  84. Fuchs, « Authoritarian Capitalism, Authoritarian Movements, Authoritarian Communication », Economic Politic Review, University of Westminster, (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

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