États de Languedoc

Les États de Languedoc (latin: Comitia Occitaniæ) sont une assemblée provinciale d'Ancien Régime propre à la province de Languedoc, ce qui en faisait un pays d'états.

Réunion des États de Languedoc, 4 décembre 1704
Blason de la province et des États de Languedoc, repris des armes médiévales des comtes souverains de Toulouse

Époque médiévale

Au début de la guerre de Cent Ans, la nécessité pousse le roi de France Philippe VI à demander des subsides à ses sujets pour soutenir les dépenses militaires. En 1346[1], alors qu'il convoque prélats, barons, communes et bonnes villes de son royaume, il réunit par souci d'économie les représentants des sept sénéchaussées du Midi à Toulouse. Il fait de même à Montpellier en 1351. Dès lors, les assemblées de langue d'oc siègeront à dates régulières. Elles sont chargées d'établir le montant de l'impôt versé au roi, sa répartition et sa levée.

Charles V reprend cependant à son compte l'administration financière mise en place par les États, qu'il n'est alors plus nécessaire de convoquer annuellement.

La crise survenue à la tête de la France, avec la folie de Charles VI, les remet pourtant dans une situation avantageuse : la reine Isabeau de Bavière leur accorde en 1418 à Troyes le droit de se réunir chaque fois qu'ils le jugeront bon. Une fois la paix revenue, Charles VII limite à nouveau leurs privilèges.

Louis XI rend l'impôt permanent et enlève ainsi aux États la principale de leurs prérogatives ; ils en conservent cependant l'apparence, puisqu'ils doivent toujours y donner leur consentement. Le , par lettres patentes[2], il nomme l'évêque d'Albi Louis Ier d'Amboise en tant que président des États de Languedoc qui sont désormais dirigés par les évêques.

À cette époque, ils se réunissent à Toulouse, Albi, Carcassonne, Béziers, Narbonne, Montpellier, Nîmes ou Beaucaire.

Époque moderne

La province de Languedoc à la fin de l'Ancien Régime.

Les États de Languedoc résistent à la politique de suppression menée par Richelieu. Ils arrivent, moyennant finances à faire reporter l'édit de création d'élections de 1629 qui aurait amené de facto à la disparition des États comme dans la Guyenne voisine.

Les États ont comme tâche principale la levée de l'impôt royal direct dans la province de Languedoc. Ils votent solennellement l'argent à verser au roi ; une partie, l'ancienne taille, est votée de manière mécanique, une autre, le don gratuit, est le résultat de négociations entre les représentants du roi et ceux de la province jusqu'aux années 1670. Après cette date, les États votent régulièrement un don gratuit de trois millions de livres tournois. Ils répartissent l'impôt entre vingt-deux, puis vingt-trois[3] diocèses civils. Trois de ces diocèses, le Gévaudan, le Velay et le Vivarais, disposent d'états particuliers qui sont les agents de la levée de l'impôt. Dans les autres diocèses, on réunit une assemblée, dite l'assiette, présidée par l'évêque, comprenant un baron, des représentants des villes, des commissaires du roi et des États. Cette assemblée répartit ensuite l'impôt entre les différentes communautés en utilisant le compoix, sorte de matrice cadastrale[4].

Les États avaient également jusqu'en 1572 la gestion des impôts indirects. Après cette date il ne leur reste que l'équivalent, impôt indirect levé sur la viande, le poisson et le vin.

En 1622, la cour des aides de Montpellier, obligée de fuir devant l'émeute qui sévissait dans cette ville, se réfugia à Pézenas pour y tenir son assemblée. La première séance eut lieu le dans la salle de l'hôtel de ville après une messe solennelle du Saint-Esprit célébré par les pères observatins. En 1630, les trésoriers de France établirent leur cours à Pézenas dans la maison de Lauriol. Depuis déjà un siècle, par ordonnance de François Ier, les séances de l'assiette du diocèse d'Agde se tenaient à Pézenas, dans la grande salle de la maison consulaire[5].

Le siège de réunion des États est à l'origine tournant entre les principales villes de la région, mais il se fixe à Montpellier en 1737.

Le roi seul décide de la convocation des États, mais ceux-ci désignent des officiers, qui siègent entre les sessions pour assurer la continuité de l'administration fiscale.

Les États de Languedoc ont joué un rôle dans la dynamisation économique de la province (canal du Midi, port de Sète, mais aussi routes et ponts), ainsi que dans l'aménagement de Montpellier, notamment l'esplanade du Peyrou.

Composition

Le président-né des États de Languedoc était l'archevêque de Narbonne, mais les personnages les plus importants étaient l'intendant de Montpellier, représentant du roi, le trésorier de la bourse et les trois syndics généraux (Toulouse, Carcassonne et Beaucaire-Nîmes), représentants des intérêts de la province. Des députés auprès du roi, les députés en cour, lui présentent des doléances annuelles auxquelles il se doit de répondre.

Le clergé était représenté par les trois archevêques et vingt évêques[6] de la province. C'est l'ordre qui dominait de fait les débats[7]. Le rang des clercs était réglé par leur sacre. Ceux qui ne pouvaient assister aux États avaient le droit d'y envoyer leur vicaire général.

Les sièges nobles aux États étaient tenus par les vingt-trois[8] barons des états de la province. Il y avait : le comte d'Alais, qui avait la première place ; le duc de Polignac, qui avait la seconde place ; les barons de tour du Gévaudan et du Vivarais, qui siègeaient aux États à tour de rôle, une fois tous les huit ans pour le Gévaudan et tous les douze ans pour le Vivarais ; puis venaient le marquis de Mirepoix, le baron de Barjac (à partir de 1682), le marquis de Villeneuve, le comte d'Avéjan (à partir de 1733), le comte de Rieux, le marquis de Castries, le baron de Tornac (à partir de 1694), le baron de Bram (à partir de 1720), le marquis de Murviel (à partir de 1683), le marquis de Ganges, le baron d'Aureville (à partir de 1748), le baron de Castelnau-d'Estrétefonds, le baron de Saint-Félix, le baron de Lanta, le baron de Florensac, le baron d'Ambres, le baron de Rouairoux (à partir de 1680), le marquis de Calvisson, et le baron de Castelnau de Bonnefons (à partir de 1772).

Les députés du Tiers étaient désignés surtout par les villes : les chefs-lieux des diocèses envoyaient deux députés, et les autres communautés « députantes » du diocèse un député à tour de rôle. L'édit de 1659 défendait aux États de s'assembler plus de quarante jours, sous peine de nullité. À la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe siècle, les secrétaires des États de Languedoc appartenaient à la famille de Fieubet.

Dans le lieu des séances, les barons laïcs occupaient tout le côté situé à la gauche du siège central du président, le siège immédiatement à la droite du président était normalement occupé par le comte d'Alais. Les clercs avaient la préséance sur leurs homologues laïcs, aussi occupaient-ils tout le côté droit de l'assemblée (par rapport au président) qui leur était exclusivement réservé[9]. Les députés du Tiers étaient quant à eux situés en position centrale, en bas par rapport aux tribunes des barons clercs et laïcs.

La table suivante donne la liste des députés aux États par diocèse civil.

Diocèse civilClergéNoblesseTiers-État
AlbiArchevêque d'AlbiCastelnau-de-Bonnefons puis PierrebourgAlbi (2)
Cordes, Gaillac ou Rabastens (1)
AletÉvêque d'AletComte d'Alais
Tornac
Arques
Alet (1)
Bas-MontaubanÉvêque de MontaubanCastelsarrasin, Montech ou Villemur (1)
CarcassonneÉvêque de CarcassonneBaron de Capendu (jusqu'en 1682)
Baron de Voisins (jusqu'en 1677)
Carcassonne (2)
Montolieu ou Montréal (1)
CastresÉvêque de CastresAmbresCastres (1)
Saint-Gervais, Lacaune, Castelnau-de-Brassac, Montredon, Montech ou Saint-Amans (1)
Graulhet, Fiac ou Briatexte (1)
LavaurÉvêque de LavaurLa GardioleLavaur (2)
Saint-Paul, Puylaurens, Revel, Labruguière ou Sorèze (1)
LimouxLimoux (1)
MirepoixÉvêque de MirepoixMarquis de MirepoixMirepoix (1)
Petit-CommingesÉvêque de CommingesValentine (1)
RieuxÉvêque de RieuxRieux (1)
Montesquieu, Gaillac-Toulza, Cazères, Saint-Sulpice, Le Fousseret ou Carbonne (1)
Saint-PapoulÉvêque de Saint-PapoulBaron de BramSaint-Papoul (1)
Castelnaudary (1)
ToulouseArchevêque de ToulouseCastelnau-d'Estrétefonds
Lanta
Saint-Félix
Toulouse (2)
AgdeÉvêque d'AgdeBaron de FlorensacAgde (2)
Pézenas (1)
Alais (Alès)Évêque d'AlèsAlais (Alès) (2)
Anduze, Le Vigan, Saint-Hippolyte, Ganges ou Sauve (1)
BéziersÉvêque de BéziersBaron de Murviel
Baron de Villeneuve
Béziers (2)
Gignac (1)
LodèveÉvêque de LodèveLodève (2)
Clermont (1)
MendeÉvêque de MendeBaron du tour de GévaudanMende (1)
Marvejols (1)
MontpellierÉvêque de MontpellierMontpellier (2)
Aniane, Les Matelles, Lunel, Frontignan, Poussan ou Mauguio (1)
NarbonneArchevêque de NarbonneComte de MérinvilleNarbonne (2)
Tuchan, Villerouge, Durban, Lapalme, Sigean, Gruissan, Peyriac-de-Mer, Fabrezan, Pérignan, Lézignan
NîmesÉvêque de NîmesNîmes (2)
Le PuyÉvêque du PuyLe Puy (2)
Saint-PonsÉvêque de Saint-PonsSaint-Pons (2)
UzèsÉvêque d'UzèsUzès (2)
Pont-Saint-Esprit ou Bagnols (1)
Les Vans, Barjac, Saint-Ambroix, Roquemaure, Aramon, Montfrin ou Vallabrègues (1)
ViviersÉvêque de ViviersBaron du tour du VivaraisAnnonay, Tournon, Montlaur, Boulogne, Largentière, Joyeuse, Bourg-Saint-Andéoldes ou Viviers (1)

Liste des sessions

(...)

Les États sous la présidence des évêques et archevêques d'Albi

(...)

Les États sous la présidence des évêques d'Alet

(...)

Les États sous la présidence des archevêques de Narbonne

(...)

(...)

Bibliographie

  • Martine Biard Postes et messageries en Languedoc de Louis XIV à la Révolution de 1789, préface de Louis Secondy, Paris, Éditions Edilivre, 2011. (ISBN 978-2-8121-3641-2).
  • Dom Claude Devic, dom Joseph Vaissète, Histoire générale de Languedoc, vol. IX (1271-1443), Toulouse, Privat, 1885 (réimp. 2004) (ISBN 978-2-84575-170-5 et 2-84575-170-2).
  • Philippe Wolff (s.d.), Histoire du Languedoc, Toulouse, Privat, coll. « Histoire des Provinces », , 540 p. (ISBN 2-7089-1705-6).
  • Henri Gilles, Les États de Languedoc au XVe siècle, Toulouse, Édouard Privat, coll. « Bibliothèque méridionale / 2 » (no XL), , 361 p. (présentation en ligne), [présentation en ligne].
  • Pierre-Jean Souriac, « Les États de Languedoc face à la guerre dans la première moitié du XVIe siècle », Cahiers de la Méditerranée, vol. 71 « Crises, conflits et guerres en Méditerranée (Tome 2) », , p. 63-80 (lire en ligne).

Fonds d'archives

Articles connexes

Liens externes

Notes

  1. Ou 1345, si l'on fait commencer l'année au 25 mars.
  2. Lettres patentes de Louis XI, Senlis, le (1473 avant Pâques).
  3. À partir de 1694, le nouveau diocèse d'Alès obtient un siège aux États.
  4. Arlette Jouanna, « États de Languedoc », dans Lucien Bély, Dictionnaire de l'Ancien Régime, Paris, PUF, 2000 (1996), p. 510-512.
  5. Albert Paul Alliès, Une ville d'états : Pézenas au XVIe et XVIIe siècles.
  6. Depuis la création de l'évêché d'Alès en 1694.
  7. Bernard Barbiche, Les Institutions de la monarchie française à l'époque moderne, Paris, PUF, 2001 (1999).
  8. Depuis l'érection en 1694 de Tornac en baronnie avec droit d'entrée aux États.
  9. Ch. de Tourtoulon, Une séance des États de Languedoc, Académie des Sciences et Lettre de Montpellier, 1870 ; p. 317, partie III, Rolle de ceux qui ont assisté aux États généraux de la Province de Languedoc assemblés par mandement du Roy en la ville de Montpellier aux mois d'octobre novembre et décembre 1761  : liste de tous les membres de l'assemblée, de chacun des trois ordres : clergé, noblesse et tiers-état, ayant participé aux états de 1761. .
  10. L'Histoire générale de Languedoc parle de « Waldemar III », mais il ne peut s'agir que de Valdemar IV (peut s'expliquer si certaines listes ne reconnaissent pas le duc Valdemar V de Schleswig comme Valdemar III de Danemark).
  11. Bibliothèque nationale, Pièces originales, vol. 48, dossier d'Amboise, folio 114 (d'après Joseph Vaesen et Étienne Charavay, Lettres de Louis XI, tome V, p. 147 note n° 1, Société de l'histoire de France et Librairie Renouard, Paris 1895).
  12. Bibliothèque nationale, Pièces originales, vol. 48, dossier d'Amboise, folio 119.
  13. Histoire générale de Languedoc de Dom Vaissète, lire en ligne.
  14. C'est le titre donné par l’Histoire générale de Languedoc : il s'agit plus vraisemblablement de l’Histoire du fanatisme de nostre temps et le dessein que l'on avoit de soulever en France les mécontens des Calvinistes.

Liens

Le vaisseau le Languedoc, offert en 1761 par les états lors du don des vaisseaux.

  • Portail du royaume de France
  • Portail de l’Occitanie
  • Portail de la région Occitanie
  • Portail de Toulouse
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.