Kamtchatka

Le Kamtchatka (en russe : Камчатка), est une péninsule volcanique de 1 380 km de long située en Extrême-Orient russe qui s'avance dans l'océan Pacifique. Son nom provient de son principal cours d'eau, le fleuve Kamtchatka. D'une superficie de 270 000 km2, la péninsule compte une population d'environ 330 000 habitants, essentiellement des Russes, avec une minorité de Koriaks dans le nord. Cela représente une densité de 1,2 habitant au kilomètre carré. Une partie des volcans de la péninsule est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1996 sous le nom de « volcans du Kamtchatka ». Sur un plan administratif, la péninsule forme avec les îles du Commandeur le kraï du Kamtchatka, né le de la fusion de l'oblast du Kamtchatka et du district autonome de Koriakie. Cette fusion avait été approuvée par un référendum organisé en octobre 2005 auprès des populations concernées.

Pour les articles homonymes, voir Kamtchatka (homonymie).

Kamtchatka

Carte représentant la péninsule.
Localisation
Pays Russie
Région Kraï du Kamtchatka
Coordonnées 57° nord, 160° est
Étendue d'eau Mer d'Okhotsk
Mer de Béring
Océan Pacifique
Géographie
Superficie 270 000 km2
Longueur 1 380 km
Largeur 430 km (max.)
Altitude 4 835 m (Klioutchevskoï)
Géolocalisation sur la carte : Russie

Géographie et géologie

Situation géographie

Topographie de la presqu'île de Kamtchatka.

Longue de 1 380 km et large de 430, la péninsule du Kamtchatka est baignée par la mer d'Okhotsk à l'ouest et notamment le golfe de Chelikhov au nord-nord-ouest, la mer de Béring à l'est et l'océan Pacifique au sud-est. Le kraï du Kamtchatka, qui contient la péninsule, est bordé au nord par l'oblast de Magadan et au nord-nord-est par le district autonome de Tchoukotka. Au sud, la péninsule se termine par le cap Lopatka.
Elle fut « découverte » au XVIIIe siècle par l'explorateur danois Vitus Béring, pour le compte du tsar Pierre Ier.

Le fleuve Kamtchatka et la plaine centrale, dans laquelle celui-ci coule, sont bordés par deux grandes chaînes — la chaîne Centrale et la chaîne Orientale — comprenant environ 160 volcans dont 29 sont actifs. Au nord, la partie la plus étroite de la péninsule du Kamtchatka est appelée l'isthme de l'Anapka.

Le plus grand lac de la péninsule est le lac Ajabatchie.

Séparée de Moscou par neuf fuseaux horaires et 6 500 km, la péninsule et sa capitale furent totalement interdites aux étrangers pendant cinquante ans, jusqu'en 1990, en raison de la présence d'infrastructures militaires ultra-secrètes.

Activité sismique

Les trois volcans, dans le raïon de Ielizovo.

Terre jeune du point de vue géologique, la péninsule s'est dressée il y a moins d'un million d'années. Le chapelet de volcans du Kamtchatka continue sa croissance.

La péninsule est une zone de subduction de la plaque pacifique sous la plaque d'Okhotsk.

Cela se traduit par un volcanisme de subduction : la péninsule est traversée du nord au sud par deux chaînes parallèles de montagnes volcaniques, qui font partie de la ceinture de feu du Pacifique. La chaîne orientale est particulièrement active.

La région est également soumise à un fort risque sismique : au printemps 2006, un tremblement de terre de magnitude 7,9 a touché la Koriakie. Le séisme de 1952 avait atteint une magnitude 9.

Il existe une fosse océanique côté Pacifique, la fosse des Kouriles, profonde de 10 500 mètres.

La vallée des geysers avant le glissement de terrain de 2007.

Le point culminant de la presqu'île est le Klioutchevskoï (4 835 m), mais le sommet le plus impressionnant est le volcan Kronotski. Les trois volcans visibles depuis Petropavlovsk-Kamtchatski  Koriakski, Avatchinski et Kozielski  sont beaucoup plus accessibles.

Au centre du Kamtchatka se trouvait jusqu'à récemment la seule vallée des geysers de l'ensemble du continent eurasiatique. Cette vallée, qui faisait partie du patrimoine naturel de l'humanité de l'UNESCO, était accessible aux visiteurs moyennant 4 h d'hélicoptère depuis Petropavlovsk. Sur les sept kilomètres carrés de ce site très visité se trouvaient 20 grands geysers et environ deux cents sources d'eau chaude et autres phénomènes thermaux. Le vers 14 h 30, heure locale, la vallée a été bouleversée par un important glissement de terrain, qui a réduit le nombre et l'activité des geysers[1],[2].

Climat

Le climat est froid et humide (classification de Köppen Dfc).

Relevé météorologique du Kamtchatka
Mois jan. fév. mars avril mai juin jui. août sep. oct. nov. déc.
Température minimale moyenne (°C) −10 −11 −10 −5 2 6 10 12 8 0 −4 −9
Température maximale moyenne (°C) −4 −5 −2 1 8 15 20 20 15 7 0 −4

Ressources

Les ressources naturelles du Kamtchatka incluent le charbon, l'or, le tungstène, le platine, le mica, la pyrite et le gaz naturel.

La faune

Le Kamtchatka héberge de très nombreuses espèces. C'est le résultat de la grande variété de climats coexistants qui vont du climat subarctique au climat tempéré, à la topographie locale, au grand nombre de rivières, aux eaux très riches du nord-ouest de l'océan Pacifique, de la mer de Béring et de la mer d'Okhotsk ainsi qu'à la faible densité humaine et au modeste développement économique. Malgré tout, l'exploitation des ressources halieutiques et du commerce des fourrures se sont traduits par une diminution importante de certaines espèces.

Parmi les mammifères terrestres, le Kamtchatka est connu pour la présence et la taille des ours bruns du Kamtchatka. Dans la réserve naturelle de Kronotski il y a une population estimée à 500-600 individus par million d'hectares (10 000 km2)[3]. On trouve également de nombreuses autres espèces telles que le loup, le renard arctique, le lynx, le glouton, la zibeline, la belette, l'hermine, la loutre de mer, le mouflon des neiges, le renne, l'orignal, le lièvre, la marmotte, le lemming et plusieurs espèces d'écureuils.

La péninsule est le lieu de reproduction du pygargue empereur, le plus grand des aigles de la planète, ainsi que de l'aigle royal et du faucon gerfaut.

Le Kamtchatka est la région du monde qui abrite sans doute le plus grand nombre de variétés de saumon en particulier les six espèces anadromes du Pacifique : royal ou chinook, rouge ou sockeye, coho, rose, keta et chum. Les biologistes estiment qu'un sixième à un quart des saumons du Pacifique sont originaires du Kamtchatka. Le lac de Kourile est connu pour être le plus grand lieu de reproduction du saumon rouge d'Eurasie. Pour répondre à la demande grandissante de la pêche et à la diminution mondiale du stock des saumons sauvages, 2,4 millions hectares sur les 9 situés le long des rivières les plus productives en saumon sont en train d'être déclarés réserve naturelle.

Les cétacés qui fréquentent ces eaux très riches comprennent l'orque, le marsouin commun et le marsouin de Dall, la baleine à bosse, le grand cachalot et le rorqual commun. Les espèces moins fréquentes sont la baleine grise (populations de l'est), la baleine à bec, le baleine de Minke. La baleine bleue fréquente en été la côte sud est. Parmi les pinnipèdes, le lion de mer de Steller, l'otarie à fourrure du Nord, le phoque tacheté et le phoque commun sont abondants sur la plus grande partie des côtes de la péninsule. Dans le nord, on rencontre, côté Pacifique, le morse et le phoque barbu, tandis que le phoque rubané se reproduit sur la banquise de la baie de Koraguinski. La loutre de mer se trouve essentiellement à l'extrémité sud de la péninsule.

Les espèces d'oiseaux de mer qui fréquentent la région comprennent principalement le fulmar boréal, le guillemot, la mouette tridactyle, le macareux, le cormoran, et le faucon gerfaut.

La faune marine, également très riche, est typique des mers du nord. Les espèces ayant une importance commerciale primordiale sont le crabe royal du Kamtchatka, la coquille Saint-Jacques, le calmar, le lieu noir, la morue, le hareng, le flétan ainsi que des poissons plats.

Économie

La plupart des habitants, environ 60 %, résident dans la capitale administrative, Petropavlovsk-Kamtchatski. Les secteurs d'activité les plus développés sont la pêche, la sylviculture, le tourisme (une industrie en pleine croissance) et l'armée. La présence militaire est importante dans la péninsule ; la base principale de la flotte de sous-marins russes du Pacifique se trouve dans la baie d'Avatcha de Pétropavlovsk-Kamtchatski (base de Rybach). Il existe également plusieurs bases aériennes ainsi que des sites radars.

Du point de vue administratif, la péninsule du Kamtchatka fait partie du kraï du Kamtchatka, qui comprend également une partie du continent, les îles du Commandeur et l'île Karaguinski. La majorité de la population est russe. La minorité la plus importante est celle des Koryaks qui habitent surtout au nord dans la région autonome de Koriakie (13 600 personnes). Le , un référendum a été tenu pour la fusion de l'oblast du Kamtchatka et de la Koriakie pour former le krai du Kamtchatka. Le résultat favorable a entraîné la fusion effective le .

Histoire

La ville de Petropavlovsk-Kamtchatski avec en arrière-plan le mont Koriakski.

La Russie est établie dans la péninsule du Kamtchatka depuis le XVIIe siècle. Ivan Kamtchaty, Simon Dejnev, le Cosaque Ivan Rubets et d'autres explorateurs russes partirent explorer cette région dans le milieu des années 1600 et en revinrent avec des récits décrivant une terre de feu (à cause des volcans), riche en poissons et en fourrures.

En 1697, Vladimir Atlassov, fondateur de la colonie d'Anadyr, dirigea une expédition de 65 Cosaques et de 60 youkaguires chargée d'explorer la péninsule. Il construisit deux forts le long de la rivière Kamtchatka qui devinrent des comptoirs d'échanges pour les trappeurs de fourrures. De 1704 à 1706, ils installèrent les colonies de Verkhne (la plus haute) et Nijni (la plus basse) Kamtchatski. Une fois loin des yeux de leurs maîtres, les Cosaques exploitèrent sans ménagement les indigènes Kamtchadales. Les abus furent tels que l'administration du nord-ouest de Yakoutsk envoya Atlassov avec troupes et canons pour y restaurer l'ordre, mais il était trop tard. Le groupe de Cosaques avait acquis trop de puissance et Atlassov fut tué en 1711.

À compter de cette date, le Kamtchatka devint une région quasi-autonome, ne prenant pratiquement plus ses ordres de Yakoutsk. En 1713, il y avait approximativement 500 Cosaques vivant dans la région. Leur cruauté et leurs abus largement connus provoquèrent tout d'abord des protestations, puis des révoltes ouvertes des habitants indigènes; les soulèvements devinrent courants et atteignirent leur sommet lorsque, en 1731, la colonie de Nijni Kamtchatski fut rasée par les indigènes et ses habitants massacrés. Les Cosaques restants se regroupèrent et matèrent la rébellion à coup de fusils et de canons.

Les Itelmènes ou Kamtchadales sont les autochtones habitant la péninsule. Ils parlent une langue originale parmi les idiomes paléo-sibériens, l'itelmène. Leurs façons de vivre et coutumes ont été décrites par Georg Wilhelm Steller.

La population indigène, évaluée à 20 000 au début du XVIIIe siècle, était tombée à seulement 10 000 dans les années 1750.

La fondation de Petropavlovsk-Kamtchatski en 1740 par l'explorateur danois Vitus Béring constitua le début d'une « ouverture » significative vers l'extérieur du Kamtchatka, d'autant plus que le gouvernement en place commença à y envoyer des déportés. Par ailleurs, le gouvernement russe encouragea l'installation des nouveaux venus en leur offrant des terres. En 1812, la population indigène avait encore diminué et comprenait moins de 3 200 habitants alors que la population russe avait augmenté dans le même temps et était passé à 2 500.

En , La Boussole et l'Astrolabe de l'Expédition de La Pérouse firent relâche à Petropavlovsk. Barthélemy de Lesseps y débarqua avec des documents qu'il ramena en France par voie terrestre.

En 1854, les Français et les Britanniques, qui, à l'époque, étaient en guerre avec les Russes en Crimée, attaquèrent Petropavlovsk-Kamtchatski. Sous le coup de la surprise, 988 hommes équipés de 68 canons réussirent à défendre l'avant-poste contre 6 navires équipés de 206 canons et 2 540 hommes. Malgré cette défense héroïque, Petropavlosk fut abandonnée après le retrait des forces franco-britanniques. L'année suivante, lorsqu'une seconde force armée attaqua le port, elle le trouva désert. Les bateaux bombardèrent la ville et repartirent.

Les 50 années suivantes furent moins propices. Le port militaire fut déplacé à Oust-Amour et en 1867, l'Alaska fut vendue aux États-Unis, rendant caduc le rôle de Petropavlovsk en tant que plaque tournante pour les explorateurs et commerçants en transit vers les territoires américains. En 1860, la région (maritime) de Primorski fut créée et le Kamtchatka fut placé sous sa juridiction. En 1875, les îles Kouriles furent cédées au Japon en échange de la restitution à la Russie de Sakhaline. La population russe du Kamtchatka stagna à environ 2 500 habitants jusqu'au début du XXe siècle, tandis que la population indigène atteignait environ 5 000 personnes.

En 1905, durant la guerre russo-japonaise, deux navires japonais entrèrent dans la baie d'Avatcha et prirent Petropavlovsk. La ville avait de nouveau été abandonnée aux agresseurs, car jugée indéfendable. En 1927, les Japonais quittèrent la péninsule et le Kamtchatka redevint entièrement soviétique. La Seconde Guerre mondiale a peu touché le Kamtchatka, sauf en 1945, comme base de préparation de la libération des Kouriles. Après guerre, le Kamtchatka fut déclaré zone militaire pour des tests sur des véhicules lunaires. Il fut alors interdit aux Russes jusqu'en 1990 et aux étrangers jusqu'en 1992.

Voir aussi

Histoire

  • Stepan Kracheninnikov, Histoire et description du Kamtchatka, traduit du russe par M. de Saint-Pré, Amsterdam, Marc-Michel Rey, 1770. volume 1 (lire en ligne), volume 2 (lire en ligne)
  • Walter Kolarz, Les Colonies russes d’Extrême-Orient, traduit de l’anglais par M. Luz, Paris, Fasquelle, 1955.
  • Yves Gauthier et Antoine Garcia, L’Exploration de la Sibérie, Arles, Actes Sud, 1996.

Géologie

  • Vadim Gippenreiter, Kamtchatka, Les volcans, Paris, Éditions Atlas, 1992.
  • Andreï Netchaïev, Kamtchatka, un monde mystérieux à l’est de la Russie, traduit du russe par E. Netchaïev et D. Hartman, Moscou, collectif d’édition Quadrat, et Disentis, Desertina, 1994.

Ethnologie

  • Questions sibériennes, Sibérie III, Les peuples du Kamtchatka et de la Tchoukotka, sous la direction de Boris Chichlo, Paris, Institut d’études slaves, 1993.
  • Les Sibériens, sous la direction d’Anne-Victoire Charrin, Paris, Autrement, 1994.

Récits de voyage

  • Jean-François de La Pérouse, Voyage autour du monde sur l’Astrolabe et la Boussole, Paris, La Découverte, , 414 p., poche (ISBN 2-7071-2782-5)
  • Journal du voyage du comte de Beniowski à travers la Sibérie en conséquence de sa déportation par le sénat de Saint-Pétersbourg au Kamtchatka (1790), Montricher, Les Éditions noir et blanc, 1999.
  • (en) Peter Dobell, Travels in Kamtchatka and Siberia, with a Narrative of a Residence in China, Londres, H. Colbum, 1830.
  • John Cochrane, Récit d’un voyage à pied à travers la Russie et la Sibérie tartare des frontières de la Chine à la mer Gelée et au Kamtchatka, traduit de l’anglais par F. Pirart et P. Maury, Boulogne-Billancourt, Ginkgo éditeur, 2003.
  • Lisa Cristiani, Voyages dans la Sibérie orientale, Notes extraites de la correspondance d’une artiste, Paris, Le Tour du monde, 1849-1853.
  • (en) George Kennan, Tent life in Siberia, Adventures among the Koriaks and other tribes in Kamchatka and Northern Asia, New York / Londres, 1872.
  • (de) Karl von Ditmar, Reisen und Aufenthalt in Kamtschatka in den Jahren 1851-1855, Saint-Pétersbourg, 1890.
  • Sten Bergman, À travers le Kamtchatka, traduit du suédois par E. Söderlindh, Paris, Simon Kra, 1927.
  • Yves Paccalet, Kamtchatka, La terre des origines, Paris, JC Lattès, 2002.
  • Julie Boch et Émeric Fisset, Par les volcans du Kamtchatka. Un été dans l’Extrême-Orient russe, Paris, Transboréal, 2007.
  • Nastassja Martin, Croire aux fauves[4], éditions Verticales, 2019 (ISBN 9782072849817)

Romans évoquant le Kamchatka

Filmographie

  • Kamtchatka, là où la terre tremble, film documentaire de Wolfgang Mertin, Allemagne, 2007, 52'
  • Богатство (ru), une série télévisée en 12 épisodes sortie en Russie, met en scène le rôle du responsable de la région du Kamtchatka avant et pendant la guerre russo-japonaise.
  • Terre des ours, film documentaire de Guillaume Vincent sur les ours du Kamtchatka, sorti le .

Notes et références

  1. (fr) « Glissement de terrain torrentiel sur le site du patrimoine mondial des volcans du Kamchatka », sur UNESCO.org (consulté le )
  2. (en), (ru) « Valley of Geysers - What actually happened » (consulté le )
  3. « Les ours bruns du Kamtchatka | Kamtchatka », sur www.kamtchatka.ru (consulté le )
  4. « Croire aux fauves - Nastassja Martin », sur Babelio (consulté le )
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