O'Brother

O’Brother (O Brother, Where Art Thou?, littéralement : « Ô frère, où es-tu ? ») est un road movie et une comédie franco-américano-britannique réalisé par Joel Coen et sorti en 2000. C’est le huitième film des Frères Coen. Ce film s’inspire très librement de l’Odyssée d’Homère, mais aussi du roman de James Joyce dont il constitue une réécriture humoristique (parfois parodique). On y retrouve certains personnages (Ulysse, éloigné de sa femme et qui cherche à rejoindre son foyer ; Polyphème, évoqué par le vendeur de bibles borgne ; Poséidon, évoqué par le shérif Cooley ; Pénélope la femme d’Ulysse ; Tirésias, l’aède par le vieil homme, le devin, et Ménélas, l’homme politique) et certaines situations, comme la rencontre avec les sirènes ou la bataille d’Ulysse avec Polyphème, le cyclope.

O'Brother
Titre original O Brother, Where Art Thou?
Réalisation Joel Coen et Ethan Coen
Scénario Joel et Ethan Coen
Acteurs principaux
Sociétés de production Touchstone Pictures
Universal Pictures
StudioCanal
Working Title Films
Mike Zoss Productions
Pirate Palace Productions
Maddest Roads
Pays d’origine États-Unis
France
Royaume-Uni
Genre road movie, comédie
Durée 106 minutes
Sortie 2000


Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Synopsis

Dans l’État du Mississippi, durant la Grande Dépression, trois prisonniers s’échappent de prison. À leur tête, le gentil et beau-parleur Ulysses est entouré du simple d’esprit et optimiste Delmar et du râleur et sanguin Pete. Ulysses a convaincu ses compagnons auxquels il était enchaîné, de s’évader pour retrouver le magot d’un braquage de banque s’élevant à un million deux cent mille dollars. Ils se lancent alors dans un long périple à travers l’État du Mississippi, traqués par le shérif Cooley.

Fiche technique

Distribution

Bande originale

O Brother, Where Art Thou?

Bande originale de divers artistes
Sortie [4]
Durée 61:24
Genre country, bluegrass, folk, gospel, blues
Format CD
Producteur T-Bone Burnett
Label Universal Music Group Nashville / Mercury
Critique

Bandes originales des films des frères Coen

Singles

Man of Constant Sorrow

La bande originale est principalement composée de chansons traditionnelles de country, bluegrass, folk, gospel et blues. L’album est supervisé et produit par T-Bone Burnett.

Liste des titres

No TitreAuteurArtiste(s) Durée
1. Po' LazarustraditionnelJames Carter & the Prisoners 4:31
2. Big Rock Candy MountainMcClintockHarry McClintock 2:16
3. You Are My SunshineDavis, MitchellNorman Blake 4:26
4. Down to the River to PraytraditionnelAlison Krauss 2:55
5. I Am a Man of Constant Sorrow (radio station version)Dick BurnettSoggy Bottom Boys & Dan Tyminski 3:10
6. Hard Time Killing Floor BluesJamesChris Thomas King 2:42
7. I Am a Man of Constant Sorrow (instrumentale)BurnettNorman Blake 4:28
8. Keep On the Sunny SideBlenkhorn, EntwisleThe Whites 3:33
9. I'll Fly AwayBrumleyAlison Krauss & Gillian Welch 3:57
10. Didn't Leave Nobody but the BabytraditionnelEmmylou Harris, Alison Krauss, Gillian Welch 1:57
11. In the HighwaysCarterLeah, Sarah, Hannah Peasall 1:35
12. I Am Weary, Let Me RestRoberts (Kuykendall)The Cox Family 3:13
13. I Am a Man of Constant Sorrow (instrumentale)BurnettJohn Hartford 2:34
14. O DeathtraditionnelRalph Stanley 3:19
15. In the Jailhouse NowBlind Blake, RodgersSoggy Bottom Boys & Tim Blake Nelson 3:34
16. I Am a Man of Constant Sorrow (avec le groupe)BurnettSoggy Bottom Boys & Dan Tyminski 4:16
17. Indian War Whoop (instrumentale)Hoyt MingJohn Hartford 1:30
18. Lonesome ValleytraditionnelThe Fairfield Four 4:07
19. Angel BandtraditionnelThe Stanley Brothers 2:15

Classement hebdomadaire

Classement (2000–2002) Meilleure
position
États-Unis (Top Country Albums) 1
États-Unis (Billboard 200) 1
États-Unis (Billboard Top Soundtracks) 1
Canada (Canadian Albums Chart) 3
France (SNEP)[5] 9
Australie (ARIA)[6] 15
Nouvelle-Zélande (RIANZ)[7] 14
Allemagne (Media Control AG)[8] 87

Autour du film

  • Pour le rôle d'Ulysse, les premiers choix étaient Pierce Brosnan et Mel Gibson. Jim Caviezel et Christopher Reeve devaient incarner Pete, tandis que Michael J. Fox, Kevin Kline, Daniel Stern ou encore Danny DeVito étaient envisagés pour incarner Delmar. Nicole Kidman, Minnie Driver et Gwyneth Paltrow ont été envisagées pour incarner Penny. Pour le rôle de Big Dan Teague, les premiers choix étaient Jeff Bridges, Albert Brooks ou encore Mel Brooks. Enfin, pour le rôle de Pappy O'Daniel, les premiers choix étaient Sean Connery ou encore Donald Sutherland.
  • Les premières images du film montrent un camp de travaux forcés où des prisonniers noirs enchaînés cassent des pierres. Ils chantent la chanson Po Lazarus avec enthousiasme, et frappent les pierres avec des merlins (masses) de manière synchronisée (un coup par mesure musicale). Cette scène imite les chants de travail (worksong en anglais) des anciens esclaves afro-américains et même les chants de travail africains.
  • La chanson du générique (Big Rock Candy Mountain) composée par Harry McClintock a des paroles surréalistes expliquant que le Far West est un pays idéal plein d’éléments étranges (des pourboires qui poussent dans les buissons, des arbres aux cigarettes, de la limonade qui jaillit, des flics aux jambes de bois, des poules qui pondent des œufs bouillis, des bulldogues aux dents en caoutchouc, des prisons en tôle de boîte de conserve, des cascades de whisky…).
  • Le personnage de Tommy Johnson a réellement existé. Si dans le film les personnages principaux rencontrent Tommy Johnson à un carrefour, ce n’est pas un hasard. Tommy Johnson a été le premier bluesman à parler du « Pacte avec le Diable ». Il a raconté qu’il avait rencontré le diable à un carrefour. Celui-ci lui a appris à jouer le blues en échange de son âme. Cette légende sera reprise plus tard par Robert Johnson. C’est sans doute aussi une allusion au célèbre Cross Road Blues de Robert Johnson.
  • Le morceau que joue Tommy Johnson au coin du feu est Hard Time Killing Floor Blues de Skip James, autre figure emblématique du blues des années 1920-30.
  • Inspiré par l’Odyssée d’Homère, le film a pour grande ambition d’amuser le spectateur. Souvent très proche de la comédie musicale (scène des sirènes, des Baptistes ou la cérémonie du Ku Klux Klan), O’Brother est dépourvu de toute noirceur et de sarcasme, ce qui a pourtant fait le succès des frères Coen. Celui-ci s’est transformé en semblant d’ironie, poussant du coup le côté farce un peu loin. Les frères Coen n’ont véritablement pas peur de la caricature[9].
  • Les trois évadés sont des quasi-demeurés : « Ulysse  » Everett tout d’abord, le play-boy beau-parleur du groupe qui, se rêvant philosophe, ne cesse de raisonner dans le vide, sans cesse animé d’un optimisme à toute épreuve et obsédé par ses cheveux (sa première inquiétude à chaque réveil) et par la gomina dont il ne peut se passer. Cette idée fixe détruit le côté pseudo-intellectuel du personnage. Pete est une sorte de brute abêtie, aux réactions primaires et à la diction de plouc en contraste total avec celle, soignée, d’Everett. Il rêve d’ouvrir un restaurant et d’y être maître d’hôtel en smoking. Delmar, sorte de benêt naïf, complète le trio.
  • De même, l’apparition du gangster George « Baby Face » Nelson toujours en colère ou des deux opposants politiques, candidats au poste de gouverneur : l’un, vieux style, représentant de grands intérêts et entourés d’incapables, l’autre se présentant comme l’ami des « petites gens  », menant une campagne moderne mais chef secret du Ku Klux Klan.
  • Les références à l’Odyssée sont nombreuses, même si on est loin d’une réelle adaptation de l’œuvre d’Homère. En voici une liste non exhaustive[9] :
    • le personnage d’« Ulysse », Everett, souhaite retrouver son épouse Penny (Pénélope) qui elle-même est sur le point de se marier avec son « soupirant » ;
    • Everett, comme Ulysse, a pour principale arme sa verve  ; la démagogie presque instinctive du personnage est un ressort comique du film, le poussant par exemple à se contredire ou faire des phrases à rallonge pour ne dire que des banalités ;
    • les vers avec lesquels débute le film sont les premiers de l’Odyssée ;
    • le personnage du géant borgne Big Dan Teague est une allusion au cyclope Polyphème ; le moment où Ulysse et ses compagnons endossent les habits blancs des membres du KKK et doivent échapper à la vigilance de Big Dan Teague rappelle celui où les héros de Homère se couvrent de peaux de moutons pour sortir de sa grotte.
    • les trois femmes de la rivière hypnotisent les trois comparses telles les Sirènes de l’Odyssée ;
    • la transformation (présumée) d’un des compagnons d’« Ulysse » Everett en animal (plus précisément en crapaud (toad) dans le film) fait référence à la rencontre avec la magicienne Circé ;
    • la rencontre des compagnons d’« Ulysse » Everett avec les baptistes est une référence possible avec l’épisode des Lotophages ;
    • Everett emploie un déguisement de vieil homme pour passer inaperçu, comme Ulysse lors de son retour à Ithaque ;
    • la rencontre des trois personnages principaux avec le prophète aveugle est comparable avec la consultation du devin aveugle Tirésias aux Enfers, à qui Ulysse demande comment rentrer chez lui  ; il peut aussi faire référence à l'aède aveugle Démodocos (et donc à Homère)
    • L’obsession d’Everett pour ses cheveux peut être vue comme une allusion aux nombreux qualificatifs concernant la chevelure d’Ulysse dans l’Odyssée ;
    • L’Ulysse original et celui du film se révèlent tous les deux en faisant quelque chose que nul autre ne peut réaliser : le premier en tirant avec son arc et l’autre en chantant Man of Constant Sorrow, comme seul le peut le leader des « Culs Trempés » ;
    • le prénom de Pappy O’Daniel, Ménélas, est celui du roi de Sparte dans L’Iliade et son opposant, Stokes, se prénomme Homère ;
    • L’abattage des troupeaux d’Hélios par les hommes d’Ulysse dans l’Odyssée est symbolisé par la rafale de « Baby Face » Nelson sur des vaches ;
    • chaque fois qu’« Ulysse » Everett s’endort, un événement néfaste se produit, ce qui est également le cas dans l’Odyssée ;
    • lorsque Everett rencontre Big Dan Teague, on peut voir une statue d’Homère en arrière-plan ;
    • la chanson chantée par « Ulysse » Everett, I Am A Man Of Constant Sorrow, signifie : « je suis un homme à la peine constante », ce qui correspond à la description d’Ulysse dans l’Odyssée ;
    • à la fin du film, « Ulysse » Everett est submergé et se raccroche à son cercueil flottant, tel son alter ego homérique s’agrippant à un morceau de bois après son naufrage ;
    • la dernière phrase d’Everett fait référence à la mythologie grecque : « Retrouver une alliance dans une telle quantité d’eau, c'est un travail pour Hercule ! ».
  • Le film utilise d’ailleurs des procédés propres à la tragédie grecque , tant dans les thèmes que dans la forme : prophétie, chœur explicitant les ellipses
  • On retrouve dans toute la filmographie des Frères Coen une certaine minutie esthétique (cf. Frédéric Astruc), axée autour d’un travail des couleurs (notamment dans Barton Fink ). De même ici, où la pellicule paraît curieusement décolorée. En fait, les couleurs sont désaturées sélectivement, par suppression de teintes et recolorisation numérique. Mais à cette dimension picturale habituelle pour eux, ils en rajoutent ici une nouvelle, musicale, et ce dès l'ouverture du film : alors que l’écran est encore noir, on entend un fond de blues, mêlé au son caractéristique de masses cassant des pierres. On sait où on est : le Sud profond. L’image apparaît, nous révélant effectivement des bagnards, tous noirs, chantant et accomplissant leur rude tâche.
  • La musique — le gospel et le hillbilly s’ajoutant au blues et à la country — ne va plus cesser, cimentant véritablement le film, lui donnant toute son unité au-delà des scènes disparates. Le point d’orgue est peut-être l’enregistrement d’un disque par les trois compères, accompagnés de Tommy, un guitariste noir qui « a vendu son âme au diable ». Le groupe des quatre musiciens est baptisé « The Soggy Bottom Boys », en français « Les Culs Trempés ».
  • La chanson du concert en salle (In the jailhouse now, littéralement : « Dans la prison maintenant ») montre au refrain Pete qui chante en Yodel (style de musique traditionnelle du Tyrol autrichien). Elle est un métissage entre la musique country et le yodel apporté jadis aux États-Unis par les colons suisses et autrichiens, et adaptée par les chanteurs traditionnels américains, à leur façon. Cette scène rappelle une scène du film The Blues Brothers. Dans les deux films, les personnages sont poursuivis par la police et chantent dans une salle bondée avec un grand succès[réf. nécessaire].
  • La scène montre des fidèles blancs chrétiens qui se font laver de leurs péchés dans une rivière par un pasteur. On y voit les fidèles chanter la chanson de gospel Down in the river to pray (littéralement : « Descendons dans la rivière pour prier ») a cappella (sans instruments). Ce sont quelques paroles de cette chanson qui donnent son titre francophone au film : « Oh brother, let's go down … in the river to pray » (littéralement : « Ô frère, descendons … dans la rivière pour prier »).
  • Le titre du film est un hommage direct au film réalisé et scénarisé en 1942 par Preston Sturges Les Voyages de Sullivan, où le personnage principal de ce film est un cinéaste qui veut réaliser un film social intitulé justement O’Brother, Where Art Thou ?.
  • La scène présentant une cérémonie du KKK semble faire référence au film Le magicien d’Oz. La danse des gardes et la stratégie utilisée par Ulysse est la même.
  • L'inondation finale, annoncée à plusieurs reprises par les personnages, dès le début du film, est une référence à la construction d'un des barrages de la Tennessee Valley Authority (TVA). Au début des années 1930, la vallée du Tennessee était une région misérable : le chômage était très élevé, et les agriculteurs gagnaient peu, car les sols étaient épuisés et érodés par une culture et une exploitation forestière trop intensives. La TVA fut créée le 18 mai 1933 par le président Franklin Delano Roosevelt, dans le cadre du New Deal. Son rôle était multiple : produire de l'électricité et assurer la navigabilité du fleuve de façon à attirer les industries (notamment les industries de transformation d'alumine pour l'entreprise Alcoa), restaurer l'équilibre écologique de la vallée, améliorer la productivité agricole, etc. De plus, ce projet nécessitait une importante main d'œuvre, d'où un impact très bénéfique sur l'emploi. De nombreux barrages hydroélectriques furent construits sur le Tennessee dans les années 1930 et 1940, l'effort de guerre augmentant la demande en énergie. À la fin de la guerre, la TVA était le premier producteur d'électricité du pays. 1 050 km de voies navigables avaient été aménagées sur le Tennessee. Les forêts avaient été replantées ; les méthodes de culture s'étaient améliorées.

Distinctions principales

Récompenses

Nominations

Notes et références

  1. To the White Sea signifie littéralement « Vers la mer blanche »
  2. Ethan Coen ne sera crédité comme réalisateur qu'à partir de Ladykillers en 2004. Il est cependant coréalisateur de tous les films des frères Coen.
  3. « O Brother, Where Art Thou? (2000) - Financial Information », sur The Numbers (consulté le ).
  4. (en) Original Soundtrack - O Brother, Where Art Thou? - AllMusic.com
  5. Lescharts.com – Soundtrack – O BROTHER, WHERE ART THOU?. SNEP. Hung Medien.
  6. (en) Australian-charts.com – Soundtrack – O BROTHER, WHERE ART THOU?. ARIA Top 50 album. Hung Medien.
  7. (en) Charts.org.nz – Soundtrack – O BROTHER, WHERE ART THOU?. RIANZ. Hung Medien.
  8. (de) Charts.de – Soundtrack – O BROTHER, WHERE ART THOU?. GfK Entertainment. PhonoNet GmbH.
  9. https://akas.imdb.com/title/tt0190590/trivia?tr0793566.
  10. https://akas.imdb.com/title/tt0190590/awards.

Liens externes

  • Portail du cinéma américain
  • Portail du cinéma britannique
  • Portail du cinéma français
  • Portail sur Disney
  • Portail du Mississippi
  • Portail de l’humour
  • Portail de la prison
  • Portail des années 2000
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.