Moon River
Moon River est une chanson écrite par Johnny Mercer et composée par Henry Mancini et originellement interprétée par Audrey Hepburn dans le film de Blake Edwards, Diamants sur canapé sorti en 1961.
Sortie | 1993 |
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Enregistré |
1961 |
Durée | 2 min 1 s |
Genre | Ballade |
Format | CD |
Auteur | Johnny Mercer |
Compositeur | Henry Mancini |
Producteur | Tim Sexton |
Label | Big Screen Records/Giant Records |
L'œuvre a notamment été récompensée par l'Oscar de la meilleure chanson originale en 1962.
Historique
C'est Blake Edwards, le réalisateur embauché par la Paramount et les producteurs Martin Jurow et Richard Shepherd pour tourner Diamants sur canapé, qui désire que ce soit Henry Mancini qui en compose la musique et la chanson comme le rapporte Sam Wasson dans son récit de la genèse du film[1]. Mais Martin Rackin, directeur de la production chez Paramount, décrète que Henry Mancini ne composera que la musique, car il n'est pas intéressé par l'idée de chanson nostalgique que Mancini suggère ; il préfère confier ce travail à quelqu'un mieux à même de retranscrire l'« élégance de Broadway » avec un air cosmopolite[1]. Henry Mancini n'en reste pas là et insiste auprès de Blake Edwards pour composer la chanson. Edwards arrive à convaincre les producteurs qui déclarent maintenant que « la chanson ne devait pas du tout parler de New York. Elle évoquait une fille originaire de « Tulip »[Note 1] au Texas et devait correspondre à cette image-là »[1]. Henry Mancini doit alors spécialement composer pour Audrey Hepburn dont la tessiture de la voix est limitée (à peine plus d'une octave). L'inspiration vient à Mancini avec trois notes « do, sol, fa » qui débouchent sur une mélodie qu'il fait écouter à Blake Edwards. Celui-ci est conquis ainsi que les producteurs Jurow et Shepherd. Ces derniers demandent à Mancini avec quel parolier il désire travailler et, sans hésitation, Mancini répond « avec Johnny Mercer »[1].
Johnny Mercer, un homme doux et rêveur[1], originaire de Géorgie, a toujours la nostalgie de son Sud natal et, inspiré par l'histoire de Holly qui, elle, a la nostalgie de son Texas, il propose rapidement trois textes à Mancini. Le premier commence par « I'am Holly… », le second est rejeté, et c'est le troisième qui est retenu. Provisoirement baptisé « Blue River », le texte est remanié par Johnny Mercer qui remplace « blue » par « moon » et se met à chanter à Mancini la ballade que l'on connaît…
Les producteurs sont à leur tour séduits, mais reste à vaincre les résistances d'Audrey Hepburn. La perspective de devoir chanter avec sa voix qu'elle trouvait plus fluette qu'à l'époque de Drôle de frimousse l'effrayait, mais les faiblesses invoquées deviennent un argument pour le réalisateur Blake Edwards, renforçant son idée qu'au travers d'une interprétation authentique « les spectateurs percevraient dans la faiblesse de ses capacités vocales l'image d'une Holly simple et nature ». Convaincue, Audrey Hepburn commence immédiatement à prendre des cours de guitare et de chant, car le début des prises de vue est fixé au .
L'album enregistré par Henry Mancini paraît en 1962 sous le titre Breakfast at Tiffany's: Music from the Motion Picture (en)[2], mais la version Moon River chantée par Audrey Hepburn n’est pas incluse. Sur les 11 titres qui composent l'album, figurent 2 versions de Moon River : la première est un mixage instrumental/vocal (interprété par des chœurs) tandis que l’album s’achève sur la version Moon River Cha Cha qui, dans le film, illustre musicalement avec d’autres morceaux comme The Big Blow Out, Loose Caboose, la séquence de la fête organisée par Holly dans son appartement.
La version d’Audrey Hepburn n’est commercialisée qu’après son décès, en 1993, dans l’anthologie Music from the Films of Audrey Hepburn (voir section « discographie ») compilant 11 thèmes musicaux de 10 de ses films, dont 2 issus de Diamants sur canapé (instrumental et vocal). C’est un hommage posthume rendu à l’actrice où, dans le livret, le compositeur Henry Mancini (mort 1 an et 5 mois après l’actrice) raconte la genèse de la chanson :
« Pour Moon River, il est très difficile d’imaginer que j’aurais pu écrire la mélodie et Johnny Mercer les paroles sans qu’Audrey soit impliquée. Je n’ai jamais été plus inspiré que par ce film. […] Moon River a été écrit pour Audrey. Personne d’autre ne l’a jamais si parfaitement compris. Il y a eu plus de mille versions de Moon River, mais la sienne est incontestablement la définitive. Quand nous avons prévisualisé le film, [Martin Rackin] le responsable de Paramount était là et a dit, « une chose est sûre, c’est qu’on va virer cette chanson ». Audrey a alors bondi de sa chaise. Mel Ferrer a dû mettre sa main sur son bras pour la retenir. C’est la seule fois où je l’ai vue perdre son contrôle[Note 2]. »
Le film s'ouvre sur une version instrumentale et vocale (chœurs)[Note 3] de Moon River accompagnant l'arrivée au petit matin de Holly Golightly (Audrey Hepburn) devant les vitrines de Tiffany, mais c'est plus tard, dans l'escalier extérieur de secours de son immeuble, que Paul Varjak (George Peppard) entend et découvre une Holly nostalgique qui interprète la chanson Moon River tout en s'accompagnant à la guitare. Une version instrumentale avec chœurs, plus rythmée (Moon River Cha Cha[2]), est jouée lors de la fête organisée par Holly dans son appartement. Le film s'achève sur une version de Moon River chantée par des chœurs[Note 4].
Les cinq déclinaisons originales de Moon River du film sont éditées pour la première fois dans l'album Henry Mancini : Moon River and Me qui en compte neuf.
Une crique de Savannah, ville natale de Johnny Mercer en Géorgie, a été baptisée d'après la chanson. Andy Williams, qui a repris la chanson, a également appelé sa maison de production Moon River.
La chanson a effectivement été reprise de nombreuses fois (voir section « reprises »).
Paroles
- Henry Mancini : « Chaque fois que j'ai entendu quelque chose d'aussi juste, c'était à vous donner les frissons, et lorsque Johnny Mercer a chanté ces mots « huckleberry friend », je les ai ressentis. J'ignore s'il savait l'effet que ces mots produisaient ou si c'était juste quelque chose qui lui venait comme ça, mais c'était palpitant.[Note 5],[Note 6] »
- La chanson évoque Moon River, une rivière large de près de deux kilomètres qui coule près de Savannah, en Géorgie[Note 7]. Elle reflète sans doute la nostalgie de son auteur, Johnny Mercer, pour le Sud, où il est né et a grandi. On suit alors cette rivière qui ramène, au gré de ses courbes, vers l'ami « Huckleberry » des Aventures de Huckleberry Finn, roman de Mark Twain[Note 8].
- L'expression « Mon ami Huckleberry », dans la chanson, est souvent considérée comme une référence à Huckleberry Finn, l'ami de Tom Sawyer. Mais, dans son autobiographie, Johnny Mercer précise que c'est en souvenir d'un ami d'enfance, son cousin Walter Rivers, avec lequel il avait l'habitude d'aller cueillir des airelles près d'une rivière en Géorgie[3].
- L'un des trois textes de travail commençait par ces paroles : « I'm Holly, like I want to be / like Holly on a tree back home... », texte qui n'a pas été retenu[1].
Distinctions
Récompenses
Oscars du cinéma 1962 : Oscar de la meilleure chanson originale à Johnny Mercer et Henry Mancini.
Grammy Award 1962 :
- Grammy Award de l'enregistrement de l'année à Henry Mancini et son orchestre pour l'interprétation de la chanson Moon River.
- Grammy Award de la chanson de l'année à Moon River, paroles de Johnny Mercer et musique d'Henry Mancini, interprétée par Andy Williams.
- Grammy Award du meilleur arrangement musical à Henry Mancini pour la chanson Moon River.
Laurel Awards 1962 : Golden Laurel de la meilleure chanson à Johnny Mercer et Henry Mancini.
Discographie
1993 : Music From the Films of Audrey Hepburn (1 CD Big Screen Records/Giant Records 74321 15345 2, mono/stéréo) Livret dépliant avec historique écrit par Henry Mancini, fac simile de la lettre d'Audrey Hepburn adressée à Henry Mancini, photos d'Audrey Hepburn et d'Henry Mancini.
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Voir l'article détaillé. |
Reprises
- Classement par ordre alphabétique du nom en faisant abstraction du pronom « The » pour les groupes musicaux
Par interprètes
- 2Cellos,
- The Afghan Whigs,
- Paul Anka,
- Anna Caterina Antonacci (au Théâtre national de l'Opéra-Comique à Paris, le ).
- Louis Armstrong,
- John Barrowman,
- Carla Bruni,
- Melissa Benoist (dans l'épisode Crossover de The Flash, avec Supergirl)
- Mary Black,
- Art Blakey & The Jazz Messengers (instrumental),
- Sarah Brightman,
- Aretha Franklin
- Keeley Bumford pour le jeu Bayonetta 2,
- Jerry Butler,
- Al Caiola (en) (instrumental),
- Liz Callaway,
- Perry Como,
- Ray Conniff,
- Ania Dąbrowska,
- Étienne Daho,
- Bobby Darin,
- Arielle Dombasle (Cabaret New Burlesque du 26 au , au Cirque d'Hiver, à Paris),
- Billy Eckstine,
- Ella Fitzgerald,
- Emi Fujita (en),
- Melody Gardot,
- Judy Garland,
- Karel Gott,
- Grant Green,
- Greyhound (band) (en),
- Patty Griffin,
- Lisa Hannigan,
- Eddie Harris (instrumental),
- PJ Harvey et Vincent Gallo,
- Anne Hathaway, dans la série Les Simpson (saison 21, épisode 10),
- The Innocence Mission,
- Bradley Joseph (instrumental),
- Barney Kessel (instrumental),
- The Killers,
- Ben E. King,
- Eartha Kitt,
- Kid Koala,
- James Last,
- Danielle Licari,
- Dean Martin
- Katie Melua,
- Morrissey,
- Willie Nelson,
- Patsy Ann Noble,
- Frank Ocean ,
- Luciano Pavarotti[12],
- Pink Martini,
- Franck Pourcel[12] (instrumental),
- The Puppini Sisters,
- Jim Reeves,
- R.E.M.,
- Bruno Ribera[12],
- André Rieu,
- Andrea Ross,
- Pedro José Sanchez Martinez, dans le film La Mauvaise Éducation,
- Frank Sinatra,
- Barbra Streisand,
- Sarah Vaughan,
- Westlife,
- Andy Williams,
- Danny Williams (en), qui atteint le sommet des ventes au Royaume-Uni en 1961 avec son interprétation,
- Victoria Williams,
- Nancy Wilson,
- Kim Yoo-jin.
- Jacob Collier, pour lequel il obtient un grammy award du meilleur arrangement accapella[13]
Reprises au cinéma
- En 1989, dans le film Né un 4 juillet d'Oliver Stone; on peut entendre la chanson pendant la scène du bal.
- En 2004, la chanson est reprise en version espagnole interprétée par Pedro José Sanchez Martinez dans le film La Mauvaise Éducation de Pedro Almodóvar.
- En 2012, la chanson est reprise dans sa version chantée par Louis Armstrong dans le film d'animation Jean de la Lune de Stephan Schesch (de).
Reprises à la télévision
- En 2006, la version instrumentale sert de thème final dans la série Cold Case, S3E13.
Reprises en jeux vidéos
- En 2014, la chanson est reprise dans Bayonetta 2.
Notes et références
Notes
- Ville fictive du Texas.
- Traduction libre de l'anglais par l'éditeur.
- Version originale éditée pour la première fois dans l'album Henry Mancini : Moon River and Me.
- Version intégrale éditée dans l'album Henry Mancini : Moon River and Me.
- Extrait de la présentation sur la couverture de la compilation Henry Mancini : Moon River and Me.
- Traduction libre de l'anglais par l'éditeur.
- Paroles de la chanson : « Moon River, wider than a mile ».
- Paroles de la chanson : « Waiting 'round the bend, my Huckleberry friend ».
Références
- Extrait du récit de Sam Wasson (trad. Françoise Smith), 5e Avenue, 5 heures du matin : Audrey Hepburn, Diamants sur canapé et la genèse d'un film culte [« Fifth Avenue, 5 A.M.:Audrey Hepburn, Breakfast at Tiffany's, and the Dawn of the Modern Woman »] (récit), Paris, Sonatine Éditions, coll. « Documents », (1re éd. 2010), 238 p., 16 x 21 cm, relié, couverture cartonnée (ISBN 978-2-35584-074-6, présentation en ligne)
Illustrations : plan et adresses du New York de Holly Goligthly. 8 clichés noir et blanc : 4 photos de quelques « acteurs » de la genèse (Truman Capote, Marilyn Monroe, Audrey Hepburn…) et 4 photos de plateau.
- Musique interprétée par Henry Mancini et son orchestre, 33 tours LP RCA Records, réédité sur CD BMG Music/RCA Records (1988).
- Autobiographie de John Mercer : Portrait of Johnny: The Life of John Herndon Mercer.
- Musique composée par Henry Mancini.
- Musique composée par Frederick Loewe.
- Paroles d'Ira Gershwin et musique de George Gershwin, voir accréditation Sacem.
- Musique composée par Franz Waxman.
- Musique composée par John Williams.
- Musique composée par John Barry.
- Musique composée par Nelson Riddle.
- Paroles de Johnny Mercer.
- Accréditations Sacem
- (en) « Jacob Collier », sur GRAMMY.com, (consulté le )
Liens externes
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