Institut des sciences sociales, économiques et politiques

L’Institut des sciences sociales, économiques et politiques (ISSEP) est une école privée d’enseignement supérieur à but non lucratif fondée en 2018 à Lyon.

Co-fondé par Marion Maréchal, qui en est la directrice générale, il dispense à la fois un enseignement de management type école de commerce, des sciences politiques et de la culture générale.

Historique

Genèse

Marion Maréchal fonde l'école avec Thibaut Monnier, conseiller régional RN d’Auvergne-Rhône-Alpes et secrétaire départemental du parti dans l'Isère, et avec le soutien opérationnel d'Agnès Marion, membre du conseil national du RN et ancienne candidate à la mairie de Lyon, via son imprimerie Saint-Joseph[1],[2]. Thibaut Monnier indique avoir eu « l’idée de lancer une école à Lyon » avant que le projet ne se développe « dans [son] entourage »[2]. L’association est enregistrée le 30 octobre 2017  les statuts étant déposés par Thibaut Monnier, Sylvain Roussillon et Amaury Navarranne  et domiciliée à Saint-Étienne, puis le site de l’Issep est créé le 13 novembre[2],[3]. Thibaut Monnier propose à Marion Maréchal de s'associer au projet en décembre 2017 ; elle le rejoint en janvier 2018[4]. Selon Le Figaro, l'initiative bénéficie des réseaux et du soutien de nombreux conseillers régionaux FN[3].

Il est conçu pour que sa « famille de pensée investisse davantage le champ de la métapolitique » dans sa conquête du pouvoir[5],[6]. Il « ambitionne de former les futurs dirigeants de « la vraie droite » et « mener la guerre des idées » tel que le décrit L'Obs lors de son ouverture[7]. Selon sa directrice, il s'agit d'« une école conservatrice » assumant « le souhait de former une nouvelle élite patriotique », avec pour ambition de constituer un « Sciences-Po de droite »[8],[9]. Marion Maréchal se revendique d'Émile Boutmy et son souhait au XIXe siècle de répondre à la « faillite morale » de la classe politique[8]. L'ancien député européen FN puis MNR Jean-Yves Le Gallou précise que « l'idée de Marion est de professionnaliser des sympathisants politiques ou responsables d'association sur qui la droite de la droite pourra s'appuyer si elle prend le pouvoir », une façon de « faire de la politique autrement » selon Marion Maréchal et « de former ses soutiens » d'après Paul-Marie Coûteaux[10]. Pour Lyon Capitale, son but est de « former les directeurs de cabinet mais aussi les têtes pensantes du FN de demain »[2].

En date de novembre 2018, une quarantaine d'entreprises lyonnaises ont soutenu l'établissement[11].

Statut et organisation

L'établissement de 360 m2 est situé dans le quartier de la Confluence à Lyon.

Son président honoraire est Patrick Libbrecht, ancien directeur général de la société agroalimentaire Materne[12]. Selon les statuts de 2019, le bureau de l’ISSEP est présidé par le monarchiste Sylvain Roussillon, par ailleurs responsable de la société lyonnaise Janus International qui gère la communication de Marion Maréchal selon l'historien Grégoire Kauffmann, ce que l'intéressé dément. Pierre Meurin, ex-président des Jeunes pour la France, occupe le poste de secrétaire ; Christophe Bentz, délégué général du Parti chrétien démocrate, celui de secrétaire général[1],[2].

Fondé sur une structure d'association à but non lucratif, le projet est au départ financé par des dons tenus secret et prévoit un retour à l'équilibre financier au bout de quelques années[8]. Son intérêt reste avant tout appuyé sur le nom de Marion Maréchal[8]. Il s'agit d'une école privée hors contrat[1].

La première rentrée a lieu en . Quelque 80 étudiants y suivent des cours, dont une quinzaine en magistère 1[8],[13]. La première promotion est placée sous le patronage de Georges Loustaunau-Lacau, dont elle prend le nom[14],[15].

La reconnaissance académique comme établissement d'enseignement supérieur privé est accordée le par le rectorat de Lyon, plusieurs mois après l'ouverture, à cause d'un dossier initial incomplet[16]. Ce manque de reconnaissance académique freine le nombre d'inscriptions[16], et la formation ne bénéficie d'aucune reconnaissance par l’État[17].

Enseignement et financement

L'ISSEP délivre une formation en deux ans, le magistère « Sciences politiques et management de projet », ouverte aux étudiants ayant validé un diplôme de niveau Bac+3 ou Bac+4, après une sélection sur dossier et un examen. L'enseignement est consacré pour moitié à la « direction des hommes et de projet » (management, communication, stratégie) et pour moitié aux humanités (sciences politiques et sociales, histoire, droit, philosophie etc.). Les frais de scolarité s'élèvent à 5 500 euros, pour environ 500 heures de cours[8] (chiffre cependant revu à la baisse depuis[18]).

Il propose également un programme de formation continue en dix week-ends, ouvert à tous pour un peu moins de 2 000 euros[9].

Le 26 mars 2019, l'école est la cible d'une attaque revendiquée par « le groupe antifasciste Lyon et environs », qui vandalise sa vitrine[19].

La 5e promotion de formation continue prend le nom de Jean III Sobieski.

En 2021, trois ans après l'ouverture, Mediapart indique que l'école « vivote péniblement », et que la stratégie consistant à rebondir sur les débats qui animent l'université française est un échec[18]. Alors que l'école promettait plus de 400 heures d’enseignement et une équipe d’une vingtaine de professeurs, son dossier ne contient plus que 90 heures de cours et des informations lacunaires sur à peine six professeurs. De plus, le « diplôme » de l’Issep n’a toujours aucune valeur dans l’enseignement supérieur et n’offre aucune équivalence, aucune université européenne n'ayant accepté de sponsoriser son enseignement[18]. Au total, l'école a formé en trois ans 230 étudiants, la majorité en formation continue[18]. Les 35 étudiants de la promotion 2021 sont tous des candidats du Rassemblement national, des proches de Marion Maréchal ou des militants de groupuscules identitaires comme Génération identitaire, mouvement dissous par la justice la même année[18].

Personnalités liées à l'école et intervenants

Dans l’organigramme du « conseil scientifique » figurent une quarantaine de figures plutôt conservatrices[20], dont l'essayiste Jacques de Guillebon (coprésident), l'homme politique et enseignant Patrick Louis (coprésident), le géopolitologue Pascal Gauchon, l'écrivain Yves-Marie Adeline, fondateur de l'Alliance royale, le philosophe Thibaud Collin ou encore le professeur de droit Guillaume Drago[21]. Cet organigramme est notamment alimenté par les réseaux de Charles Millon[22],[21]. Il compte également des personnalités étrangères telles que le professeur américain Paul Gottfried et le Britannique Raheem Kassam, conseiller de Nigel Farage[23]. L'entrepreneur Charles Beigbeder a aidé à trouver des mécènes sans lui-même participer au financement[24]. En 2020, parmi les enseignants, figurent notamment l'historien Jean Étèvenaux, les historiens du droit Jean-Luc Coronel de Boissezon et Philippe Pichot-Bravard, le journaliste Frédéric Pons ou encore des hauts gradés de l'armée tels que le général Bertrand de La Chesnais[25],[1].

L'ISSEP accueille également des conférenciers, les premiers invités étant Laurent Obertone, Ivan Rioufol du Figaro, Éric Zemmour et François Bousquet[26],[27], mais aussi l'entrepreneur Laurent Alexandre[28].

Victoria Pourcher, ancienne membre du RN et ancienne conseillère du 8e arrondissement de Lyon, est directrice administrative de l’établissement[1].

Marion Maréchal dit espérer que son école soit « le terreau dans lequel tous les courants de la droite pourront se retrouver et s’épanouir ». Selon l'AFP, l'établissement ouvre ainsi ses portes à « tous les courants de l’extrême droite » tout en créant « des passerelles avec une droite plus traditionnelle », et que « le conservatisme sur les mœurs apparaît comme un trait d’union, notamment par le combat mené par la quasi-totalité des intervenants contre l’ouverture du mariage aux couples de même sexe »[29].

L'historien russe Oleg Sokolov, spécialiste de Napoléon Bonaparte à l'université d'État de Saint-Pétersbourg, fait partie du conseil scientifique de l'ISSEP jusqu'en novembre 2019. Il en est limogé après avoir avoué le meurtre et le démembrement de sa compagne dans le cadre de l'affaire Anastasia Iechtchenko[30].

Antenne à l'étranger et partenariats

En octobre 2020, l'ISSEP ouvre des locaux à Madrid, où 24 étudiants font alors leur rentrée. L'antenne espagnole partage le même programme pédagogique mais sera autonome dans son fonctionnement et son recrutement[31]. Selon Médiacités, cette antenne « s’appuie sur des cadres du parti patriote Vox »[1]. Jaime Mayor Oreja, ministre de l’Intérieur de 1996 à 2001, figure parmi les intervenants[1].

L'ISSEP a également annoncé un partenariat avec l’université d'État de Saint-Pétersbourg et l'université Saint-Esprit de Kaslik au Liban[1].

Notes et références

  1. Daphné Gastaldi, « De Lyon à Madrid, Marion Maréchal recrute jusque dans les rangs des nostalgiques de Franco », sur Médiacités, (consulté le ).
  2. Antoine Sillières, « L’Issep, nouveau théâtre des marionnistes », sur Lyon Capitale.fr, (consulté le ).
  3. https://www.lefigaro.fr/politique/2018/06/21/01002-20180621ARTFIG00352--lyon-marion-marechal-beneficie-de-solides-reseaux.php
  4. https://www.marianne.net/societe/dans-les-coulisses-de-la-marion-marechal-academie
  5. BFMTV, « Marion Maréchal-Le Pen veut créer une « académie de sciences politiques » », sur BFMTV (consulté le )
  6. « L'école de sciences politiques de Marion Maréchal se dévoile sur internet », sur Franceinfo, (consulté le )
  7. Laubacher Nov. 2018, p. 42 et 43.
  8. Laubacher Nov. 2018, p. 43.
  9. Fargues 2018, p. 78 à 79.
  10. Fargues 2018, p. 79.
  11. https://www.mediacites.fr/enquete/lyon/2018/11/21/ces-entrepreneurs-lyonnais-au-service-de-lecole-de-marion-marechal/
  12. Laubacher Nov. 2018, p. 43 et 44.
  13. Alexandre Sulzer, « Marion Maréchal ne se cache (presque) plus », sur leparisien.fr, (consulté le )
  14. Benoît Dumoulin, « Loustaunau-Lacau : l'ISSEP reprend le flambeau abandonné par la Grande Muette », sur L'Incorrect, (consulté le )
  15. « Pour honorer sa mémoire, une promotion d'étudiant de l'Issep ont adopté le nom du général Loustaunau-Lacau », sur Valeurs actuelles, (consulté le ).
  16. Fargues 2018, p. 78.
  17. Valentine Arama, « L'école de Marion Maréchal reconnue par le rectorat de Lyon », sur msn.com
  18. Lucie Delaporte, « École de Marion Maréchal : anatomie d’un fiasco », sur Mediapart, .
  19. Lyon : l'Issep, l'école de Marion Maréchal, vandalisé
  20. Charles Sapin, « Marion Maréchal dévoile son Académie politique », sur lefigaro.fr,
  21. Lucie Delaporte, « Millon et Bannon, les deux fées de la «Marion Maréchal Académie », sur Mediapart, (consulté le ).
  22. Laubacher Nov. 2018, p. 44 et 45.
  23. Catherine Lagrange, « L'école de Marion Maréchal : du business et de la culture (très à droite) », sur lepoint.fr, (consulté le )
  24. « L'Issep : Jacques de Guillebon, Pascal Gauchon, Charles Beigbeder, Patrick Louis », sur liberation.fr,
  25. https://www.issep.fr/les-enseignants/?cn-reloaded=1.
  26. Paul Laubacher, « Eric Zemmour atterrit chez Marion Maréchal », sur nouvelobs.com, (consulté le ).
  27. Louis Hausalter, « Entre Zemmour et les cathos tradis, Marion Maréchal soigne ses réseaux », sur marianne.net, (consulté le )
  28. Alexandre Sulzer, « Issep : l’école de Marion Maréchal reconnue enfin comme... une école », Le Parisien, (lire en ligne, consulté le )
  29. « Marion Maréchal, tous les courants de l’extrême droite représentés dans son école lyonnaise », Ouest-France, AFP, (lire en ligne)
  30. Libération, « Crime - L'école de Marion Maréchal limoge un historien russe qui a reconnu avoir tué et démembré une ex-étudiante », Libération, , p. 1 (lire en ligne)
  31. Marion Maréchal : « Je suis convaincue que les pays latins ont la clé de l'avenir européen »
  • Paul Laubacher, « À l'école de Marion Maréchal », L'Obs, no 2818, , p. 42 à 45 (ISSN 0029-4713)
  • Laurent Fargues, « La vérité sur… l'école de Marion Maréchal », Challenges, no 586, , p. 78 à 79 (ISSN 0751-4417)

Voir aussi

Article connexe

Liens externes

  • Portail de la politique française
  • Portail des associations
  • Portail de la métropole de Lyon
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.