Claude Régy

Claude Régy, né à Nîmes le et mort à Paris le [1], est un metteur en scène de théâtre français qui a contribué au renouvellement du jeu de l'acteur et de l'esthétique du théâtre contemporain.

Pour les articles homonymes, voir Régy.

Longtemps assistant d'André Barsacq au théâtre de l'Atelier, travaillant la plupart du temps en collaboration avec des dramaturges contemporains, il a amené sur scène des écritures aussi diverses que celles de Peter Handke, Marguerite Duras, Jon Fosse, Arne Lygre, Botho Strauss ou Leslie Kaplan ainsi que les traductions de la Bible par Henri Meschonnic. Il a travaillé avec plusieurs scénographes, notamment Jacques Le Marquet, Daniel Jeanneteau et Sallahdyn Khatir. Il continua à travailler avec de jeunes acteurs, notamment au sein de l'école du TNB.

Biographie

Fils de Marcel Régy, officier de cavalerie[2], Claude Régy naît dans une famille protestante et bourgeoise, et grandit entre Montauban et Nîmes[3]. Tout en reniant le puritanisme, il reste très attaché à la spiritualité de la Bible.

Il s'oriente d'abord vers des études de droit et de sciences politiques mais, très vite, décide d’abandonner l’université afin de monter à Paris se former à l’art dramatique. Il suit les cours de Charles Dullin, Tania Balachova et Michel Vitold. Il devient assistant d'André Barsacq au Théâtre de l'Atelier, avant d’entamer ses propres mises en scène.

En 1952, Claude Régy a vingt-neuf ans quand son compagnon se suicide, à l'âge de vingt-deux ans[4]. « Après un temps de solitude absolue, d’éloignement, j’ai basculé cette souffrance dans le travail. J’ai fait mon premier spectacle »[5] écrit-il. Il met alors en scène Doňa Rosita, de Federico Garcia Lorca en 1952, au Théâtre des Noctambules.

Intéressé par la littérature contemporaine, il se lance dans l’adaptation des œuvres de grands auteurs modernes (Marguerite Duras, Nathalie Sarraute…). Il montre un réel intérêt pour le dialogue et l’échange avec les auteurs de son temps, qu'ils soient français, ou anglo-saxons. Ses spectacles, joués au Théâtre Antoine à Paris avec des comédiens prestigieux (Delphine Seyrig, Jean Rochefort, Michel Bouquet, Jean-Pierre Marielle, Pierre Brasseur, Pascale Champagne ou Isabelle Huppert), connaissent un grand succès.

Claude Régy se tourne, dans les années 1970, vers des auteurs non francophones tels que Peter Handke, Luigi Pirandello ou Anton Tchekhov. Il découvre aussi de nouveaux auteurs, qu'il met en scène, tel Gregory Motton (en).

En 1980, il fonde sa propre compagnie, Les Ateliers contemporains[6].

Il s’est par ailleurs essayé à l’interprétation, notamment dans deux pièces de Jean-Paul Sartre, La Putain respectueuse, dans une mise en scène de Julien Bertheau, et Morts sans sépulture, dans une mise en scène de Michel Vitold en 1946.

Sa conception du théâtre tranche avec tout[réf. nécessaire] ce qui se faisait avant lui. Il développe une esthétique minimaliste qui deviendra la marque de fabrique de ses spectacles.

Vie privée

À sa mort, Claude Régy est le compagnon d'Alexandre Barry[7].

Esthétique théâtrale

Cette section ne cite pas suffisamment ses sources (décembre 2019). 
Pour l'améliorer, ajoutez des références vérifiables [comment faire ?] ou le modèle {{Référence nécessaire}} sur les passages nécessitant une source.

Claude Régy accorde plus d’importance au jeu de l'acteur qu’à l'intrigue ; il se place contre l’incarnation des personnages, et penche davantage vers l’appropriation du texte par le comédien. Visuellement, la présence ou l’absence de lumière prend le dessus sur le décor, les mots s’écoutent, les gestes s’observent, et tout cela se dilue dans des séquences volontairement longues et étirées.

L'esthétique du jeu d'acteur selon lui se caractérise par une diction hachée et monocorde, où les syllabes sont entre-coupées de silence, pour laisser place à notre imagination. La respiration est considérée comme l'essence du théâtre ; chaque geste, chaque mot doit être nécessaire. Le metteur en scène mise sur la force du silence et la sensibilité des acteurs à ce qui les entoure.

Il défend une création où l'on admet le doute, l'incertitude, l'incompréhension. Il s'exprime ainsi : « le désespoir est force de vie ». Il invite le spectateur à se nourrir du vide, en proposant des spectacles à l'esthétique minimaliste, où gestes et voix sont mis en valeur par une épuration maximale. Il mise sur la lenteur, la solitude, et ce climat de vide crée une vibration qui entraine le spectateur dans un état d'hypnose.

Il dit que parler de son travail est une tricherie, qu'il faut que les choses restent mystérieuses et secrètes, il refuse de donner un mode d'emploi à la compréhension de ses spectacles. D'ailleurs les spectacles sont plus à s'approprier qu'à comprendre: « il faudrait toujours que le public se sente en état de création », affirme-t-il. Il donne à voir et à entendre un spectacle sans finitude, où le public a aussi son travail de création à faire.

Les spectacles se passent souvent dans l'obscurité pour exacerber la perception. Le décor n'est ni réaliste, ni symbolique ; il laisse un maximum d'espace à l'imaginaire du spectateur et privilégie avant tout l'acoustique. On voit peu l'acteur pour laisser place à l'imagination. Ces mises en scène explorent les limites de la perception ; on ne sait pas si on voit, ni si on entend. Ils demandent une grande concentration dont on n'a pas l'habitude au quotidien.

Ses spectacles ont vocation à atteindre un public au-delà des spectateurs, par la circulation des impressions qui suit le spectacle. Il propose un réel rituel avec une démarche d'engagement pour les spectateurs en leur demandant, par exemple, de ne plus parler dès l'entrée dans la salle ou en conservant les téléphones portables en dehors du lieu de la représentation…

Commentaires

Cette section ne cite pas suffisamment ses sources (décembre 2019). 
Pour l'améliorer, ajoutez des références vérifiables [comment faire ?] ou le modèle {{Référence nécessaire}} sur les passages nécessitant une source.

Claude Régy explique que le silence est un moyen de communication avant la parole[8] :

« Habituellement le spectateur considère que le spectacle commence quand le bruit arrive, or », rappelle Régy, « le silence fait partie du spectacle. Le silence dans la parole est une ouverture sur l'infini ; c'est le moment où l'imaginaire trouve sa place et où le spectateur peut ressentir la profondeur de l'esprit, du questionnement. La respiration fait partie de la traduction du texte, elle met en valeur la ponctuation. » […] « C'est la jouissance du texte. »

« L'écriture est l'impuissance à écrire, et c'est avec cette impossibilité que commence la poésie. »

Claude Régy traite les textes qu'il met en scène avec beaucoup de précision et de rigueur, il explique qu'il faut « prendre le temps ». Cet esthétique du jeu de l'acteur est très déstabilisante pour les comédiens, habitués à ce qu'on leur demande de l'efficacité. Aujourd'hui, les technologies meublent le vide (publicités, musique…), on a besoin de boucher les trous, on fuit le vide et la solitude et la quantité remplace la qualité. Selon Régy, le silence nous met en relation avec l'inconnaissable, l'irréel, l'irrationnel. Or « le doute est plus juste que le savoir qui est illusion », c'est pourquoi il est nécessaire de rester au plus proche du vide.

Claude Régy dit qu'il est à la « recherche d'un terrain inconnu par le rien » : il faut avoir le courage d'attendre, de laisser planer le silence, il arrive alors des choses qui n'arriveraient pas si on ne faisait que ce qu'on sait faire.

Œuvre théâtrale

Principales mises en scène

Comédien

Prix et nominations

Ouvrages

  • Espaces perdus, Les Solitaires Intempestifs, 1998.
  • L'Ordre des morts, Les Solitaires Intempestifs, 1999.
  • L'État d'incertitude, Les Solitaires Intempestifs, 2002.
  • Au-delà des larmes, Les Solitaires Intempestifs, 2007.
  • La Brûlure du monde, Les Solitaires Intempestifs, 2011.
  • Dans le désordre, Actes Sud, 2011.
  • Le théâtre, sensation du monde, Éditions Universitaires d'Avignon, 2014.
  • Du régal pour les vautours, Les Solitaires Intempestifs, 2016.
  • Écrits (1991-2011), Les Solitaires Intempestifs, 2016.

Distinctions

Voir aussi

Filmographie

  • Claude Régy : la brûlure du monde, d’Alexandre Barry. Rencontre au TNS, 23 janvier 2010.

Bibliographie

  • Journal du TNS, janvier-février 2010, no 2
  • Préface, in Vincent Rafis, Mémoire et voix des morts dans le théâtre de Jon Fosse, Dijon, Les presses du réel, 2009
  • Le Corps, le sens, Françoise Héritier, Jean-Luc Nancy, André Green et Claude Régy, 2007
  • Dans le désordre, propos provoqués et recueillis par Stéphane Lambert, Actes Sud, 2011 Prix du Syndicat de la critique - Meilleur livre sur le théâtre 2012.
  • Le Théâtre, sensation du monde, Claude Régy et Laure Adler, Éditions universitaires d'Avignon, collection « Entre-Vues » (ISBN 978-2-35768-007-4), 2014

Notes et références

  1. Ève Beauvallet, « Claude Régy, saine hypnose », Libération, 26 décembre 2019.
  2. Voir sur whoswho.fr.
  3. Voir sur la-croix.com.
  4. Jean-pierre Thibaudat, « Silence, Régy est mort », sur Club de Mediapart (consulté le )
  5. Claude Régy, Au-delà des larmes, Paris, Les Solitaires Intempestifs, , 144 p. (ISBN 978-2-84681-195-8)
  6. « Claude Régy », sur data.bnf.fr (consulté le )
  7. Voir sur lefigaro.fr.
  8. Résumé de la rencontre avec Claude Régy, au TNS, le 23 janvier 2010.
  9. « Rêve et Folie • Nanterre-Amandiers », sur nanterre-amandiers.com (consulté le ).

Liens externes

  • Portail de la littérature française
  • Portail du théâtre
  • Portail de la réalisation audiovisuelle
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.