Arbre d'alignement

On appelle arbre d'alignement les espèces d'arbres couramment plantées de manière linéaire et régulière le long des routes[1],[2] et des rues pour les orner[3] et les ombrager[réf. souhaitée]. Henri II ordonna par lettres patentes, en 1552 « à tous les seigneurs hauts justiciers et tous manants et habitants des villes, villages et paroisses, de planter et de faire planter le long des voiries et des grands chemins publics si bonne et si grande quantité desdits ormes que, avec le temps, notre royaume s’en puisse avoir bien et suffisamment peuplé ».

Allée de tilleuls taillés en rideaux à Saint-Germain-en-Laye, France.
Allée de hêtres à Mariemont, Belgique.
Alignements de platanes communs bordant le canal du Midi, France.
Une allée de cyprès, typique des paysages ruraux d'Italie.
Alignements de cerisiers à fleurs en Corée du Sud.
Charmille de charme commun du Haut-Marais à La Reid, Belgique.

Dans certaines régions, les alignements de bocage et de bord de route contribuaient ou contribuent encore à une part importante au paysage[4], à la trame verte et au stock de bois sur pied (bois d’œuvre, bois de chauffage, arbres têtards producteurs de perches, fruitiers[5]…)[6].

Ils font partie du cadre de vie et peuvent contribuer au bien-être psychologique, et leur destruction ou un élagage trop « dur » sont de moins en moins apprécié[7].

Histoire

Des alignements d'arbres ont probablement existé depuis l'Antiquité. Dans les villes ils semblent avoir été plus rares. À Paris le premier alignement semble dater de 1597, planté au mail de l’Arsenal ; ce n'est qu'avec l'urbanisme de Haussmann et des hygiénistes qu'ils se développeront[8]. En France, les plans reliefs montrent qu'aux XVIIe et XVIIIe siècles ils étaient assez communs autour des villes, le long de grands axes routiers.

Esthétique paysagère

Le principe paysager de la plantation d'alignement est principalement celui de la « colonnade ». La répétition d'arbres d'une même essence, conduits de manière homogène (hauteur des premières branches, port, forme du houppier), induit une « vibration » spatiale de la composition, semblable à celle des colonnades antiques. Le fait que ce soient des arbres, « êtres vivants », qui bien que de la même espèce botanique sont tous différents dans le détail, introduit de subtiles variations dans la répétition du motif. C'est pour cette raison que les alignements sont si précieux en ville : ils sont réguliers à grande échelle, mais infiniment variés à petite échelle. Ce sont des monuments « vivants », ambassadeurs de la nature en ville. De plus, ils magnifient les perspectives, font passer le « désordre urbain » des façades au second plan. Ils introduisent une certaine régularité dans le chaos urbain, mais avec la souplesse d'une structure vivante.

Aspects techniques

Les espèces (essences) choisies pour ces plantations doivent répondre à divers critères, notamment de résistance à des conditions de milieu parfois difficile, surtout en milieu urbain (sol tassé, sel de déneigement, manque d'eau et de lumière, chocs divers, imperméabilisation, manque de place pour les racines, travaux répétés…). Elles doivent en outre supporter facilement les bulles de chaleur urbaines, l'élagage et ne pas produire de fruits salissants ou dangereusement toxiques ou écotoxiques et répondre aussi à des critères esthétiques, qui peuvent varier selon les lieux et les époques. Il faut rappeler ici que l'élagage de ces arbres doit respecter strictement les règles techniques de l'élagage raisonné. Pour les arbres en port libre ou semi libre, l'élagage doit se limiter aux tailles d'adaptation vis à vis des immeubles riverains et pour maintenir la commodité de passage. L'entretien courant consiste seulement dans l'enlèvement des bois morts ou des branches fragiles (fourches à écorces incluses par exemple). Si les arbres sont taillés de façon architecturée ou en volume constant (têtes de chats, rideaux…), la gestion de l'élagage doit respecter les règles de l'art de chaque type de conduite.

En France, un guide technique de plantation le long des routes nationales a été publié en 1979 par la Direction des routes et de la circulation routière[9] ainsi que des recommandations pour l'entretien des arbres[10].

Aménités

En ville, les avenues bordées d'arbres et les places plantées de mails de grands arbres, sont moins sujettes aux « îlots de chaleur urbains ». C'est bien entendu l'effet « parasol » des grandes canopées. Mais l'évapotranspiration au niveau des feuillages fait gagner des degrés en moins, en cas de fortes chaleurs (jusqu'à −4 °C). La vaporisation de l'eau absorbe en effet des calories. Comme cet effet disparaît quand l'alimentation des arbres par l'eau du sol diminue, occasionnant un stress hydrique, Il est essentiel de maintenir les sols « frais » en profondeur : sols perméables laissant la pluie s'infiltrer, irrigation profonde à partir de réservoirs alimentés en eau de pluie. C'est le principe de la « ville éponge » que certaines villes commencent à mettre en œuvre lors d'aménagements d'espaces publics. C'est une garantie de meilleure résilience des villes vis à vis des effets prévisibles du réchauffement global. Par exemple, Lyon est une métropole pionnière sur ce type d'aménagement (rue Garibaldi, place de Francfort). Parmi d'autres aménités liées aux plantations d'alignement il faut noter la fixation d'une partie de la pollution de l'air, la fixation du CO2, la production d'O2. Les arbres sont aussi le refuge d'une biodiversité très variée. La quantité d'aménités produite est proportionnelle au volume des houppiers et à la surface foliaire de grandes canopées : des tailles architecturées, des élagages drastiques, réduisent sensiblement les aménités procurées par les grands arbres d'alignement urbains.

Essences d'alignement

Parmi les espèces les plus souvent utilisées à cet effet en Europe moyenne, on rencontre notamment :

Le platane est particulièrement abondant de nos jours le long des routes du sud de la France, où beaucoup datent des guerres napoléoniennes, car Napoléon souhaitait protéger ses armées de la chaleur et du soleil lorsqu'elles se déplaçaient en campagnes. C'est aussi l'arbre emblématique des villes et des villages du Midi. Mais il est très rustique et il est un des arbres les plus utilisés en Europe jusqu'à des latitudes plus nordiques, jusqu'au sud de la Scandinavie et le nord de la Grande Bretagne, il est très commun en Belgique par exemple. Il est souvent l'un des arbres les plus communs, voire le plus commun, au cœur des grandes villes européennes (Londres, Paris, Bruxelles, Berlin, Madrid, Lisbonne, etc). C'est l'essence qui présente le plus d'adaptabilité et de résilience vis-à-vis des conditions urbaines peu favorables aux arbres (vitesse de croissance, plasticité écologique et adaptation à des sols divers). Il se prête parfaitement, grâce à ses troncs de grandes dimensions de couleur claire, à l'effet « colonnade » si apprécié en ville et le long des routes, tandis que son houppier très développé permet d'obtenir facilement une ample « voûte végétale ». Enfin il supporte bien divers modes de taille et de formations plus jardinées (élagage, palissage, etc).

Certains tilleuls peuvent accueillir des pucerons qui causent des désagréments par la production de miellat.

Trois fabacées arborescents sont beaucoup utilisés (ils sont parfois confondus entre eux) :

Ces essences peuvent être assez cassantes et peuvent présenter des fourches à écorces incluses qui fragilisent certains houppiers. Elles sont aussi moins faciles à former que le platane ou les tilleuls.

Ils sont complétés par de nombreuses rosacées comme :

Divers magnolias horticoles s'ajoutent aux arbres à fleurs, mais aussi le lilas d'été.

Plus accessoirement, on utilise aussi :

Les ormes étaient autrefois abondamment plantés, si ce n'est les arbres les plus communs en alignement ainsi que dans les bocages en Europe occidentale, mais la graphiose de l'orme les a anéantis. De nouvelles variétés sélectionnées ou hybrides, plus ou moins résistantes à la graphiose, sont désormais disponibles mais ne sont pas encore plantés aussi massivement que les ormes d'autrefois.

Certains arbres qui sont les plus abondants dans les forêts européennes sont traditionnellement moins utilisés en alignement en ville et au bord des routes. C'est notamment le cas des chênes européens, bien qu'ils n'y sont pas absents et sont par ailleurs souvent plantés dans les bocages. Les chênes sont réputés moins bien supporter la sécheresse et la pollution urbaine, mais en réalité c'est leur croissance lente et leur manque d'allure lorsqu'ils sont jeunes qui décourage le plus souvent de les planter. De plus, ces arbres à grand développement prennent souvent un aspect peu esthétique après les inévitables élagages. Cependant l'intérêt croissant pour l'intégration écologique des projets urbains, des infrastructures et des espaces verts conduit depuis quelques décennies à une vague de plantation d'arbres autochtones, dont les chênes. Une variété du chêne pédonculé à port fastigié est aujourd'hui fréquemment utilisée dans les rues étroites, où sa faible largeur, son port régulier ne nécessitant pas de taille et sa croissance lente, en font un arbre contrôlable et rassurant pour les gestionnaires. Le hêtre commun est un arbre trop vigoureux, et il produit beaucoup de déchets au sol difficiles à ramasser en automne. Il est donc assez peu utilisé dans les villes et le long des routes, mais il forme de majestueux alignements dans les parcs, les campagnes et les forêts dans les régions ou le climat est suffisamment frais et humide (comme en Belgique, et surtout en Normandie, en particulier dans le pays de Caux où les doubles alignements de hêtres autour des clos-masures constituent l'identité du paysage). Des cultivars de hêtre plus petits ou avec un port fastigié existent également. Le châtaignier supporte mal les sols souvent alcalins des villes, il présente aussi l’inconvénient de produire beaucoup de déchets encombrants et pourrissants, et la chute des lourdes bogues épineuses n'est pas sans danger pour la tête des passants.

Le chêne chevelu a récemment été choisi comme « essence jalon » pour remplacer le platane sur les célèbres alignements du canal du Midi, sur 40 % du linéaire en plusieurs sections réparties tout le long du canal. Car le platane y est désormais durablement menacé par le chancre coloré et voué à être entièrement remplacé. Ce chêne a été peu planté en alignement jusqu'à nos jours, mais il a une croissance relativement soutenue, il est bien adapté aux variations climatiques et édaphiques locales, et surtout il est susceptible de pouvoir créer un effet de monumentalité végétale comme le platane. Les autres sections du canal seront plantés, en fonction du climat des régions traversées, par le tilleul à grandes feuilles, l'érable plane, le peuplier blanc, le micocoulier de Provence, le pin parasol, et d'autres essences plus localement[11]. À la suite d'une recherche sur les potentialités des espèces d'arbres pour remplacer le platane, d'autres essences, répondant aux mêmes critères de monumentalité et de capacité d’adaptation aux diverses conditions locales, avaient été proposées pour devenir l'« essence jalon » : le copalme d'Orient, le chêne à feuilles de châtaignier, le chêne zéen, le tilleul argenté, le caryer cordiforme et le pacanier, mais la plupart sont quasiment inconnues en France[12].

Les conifères sont peu utilisés en alignements au bord des chemins, notamment à cause de leur intégration paysagère jugée plus difficile en plaine, mais aussi des quantités importantes d'aiguilles et de cônes qui s’accumulent sur le sol en dessous des arbres, qui se décomposent lentement, et l’inadaptation de beaucoup d'espèces aux conditions sèches et ensoleillées. Mais deux espèces méditerranéennes emblématiques, le pin parasol et le cyprès d'Italie, sont très utilisés en alignement dans les régions méridionales où le climat le permet. Dans les autres régions le pin noir d’Autriche est occasionnellement utilisé en alignement, ainsi que les différentes espèces de cèdres. On peut citer aussi le cyprès de Leyland, le cyprès de Lawson et le thuya géant, qui sont cependant plus souvent utilisés pour former des haies. Le cyprès de Monterey est très présent sur la côte atlantique (Bretagne et Normandie notamment). Le séquoia géant se développe à merveille en alignement sous le climat français, et en Europe de l'Ouest en général, mais très peu ont été plantés (Ferrières-en-Brie, Marne-la-Vallée, et un double alignement récent de 502 séquoias sur plusieurs kilomètres à Sénart). Le métaséquoia et le cyprès chauve sont deux conifères qui se ressemblent, au feuillage plus clair, léger et caduc, et qui s'intègrent plutôt comme des feuillus.

Ginkgo biloba est la seule espèce faisant partie de la plus ancienne famille d'arbres connue, les ginkgoacées. Cet arbre très ornemental est maintenant communément planté en ville en raison de sa résistance aux conditions urbaines. Les plants mâles sont seuls utilisés, les femelles produisant des fruits nauséabonds qui sont une vraie nuisance.

Les palmiers ne sont pas des arbres à proprement parler mais ils se prêtent bien à la plantation comme arbres d'alignements, principalement dans les régions littorales méditerranéennes, et dans une moindre mesure dans les régions atlantiques, où certaines espèces rustiques se développent très bien. Le dattier des Canaries est sans aucun doute le plus prisé. Il est planté en pleine terre dès que le climat l'autorise, jusqu'aux côtes bretonnes et anglaises. Dans les régions plus rudes, il est souvent cultivé en pot pour orner les villes en été puis rentré en hiver. Le vrai dattier, presque aussi rustique, est aussi beaucoup utilisé plus au sud (en Espagne surtout). Washingtonia filifera et Washingtonia robusta symbolisent les régions douces des États-Unis, mais ils sont également plantés en Europe méridionale. On peut citer aussi Brahea armata, Brahea edulis, Sabal palmetto, Sabal bermudana, Butia capitata, Butia yatay ou encore Syagrus romanzoffiana et l'imposant Jubaea chilensis. Trachycarpus fortunei est un palmier assez modeste mais il est le plus rustique et le mieux adapté aux climats frais d'Europe moyenne.

Dans les pays à climat tropical, on utilise de très nombreuses espèces adaptées aux conditions locales, telles que les eucalyptus, les flamboyants, l'arbre à pluie, le cassier, le badamier, le faux baobab, Madhuca longifolia, diverses espèces de palmiers, etc[13].

Symbolique

Au début de la Première Guerre mondiale en France, les routes étaient bordées d'environ 3 millions d'arbres d'alignements. Dans le nord et l'Est, ces arbres qui ont été des repères pour les soldats, les canons et les populations ; de plus en plus déchiquetées au fur et à mesure qu'on approchait le front. Ils ont fortement marqué de nombreux soldats, dont ceux venus du Commonwealth (souvent cités ou dessinés dans leurs lettres et récits). Un officier anglais (Gillespie) propose ainsi en 1915 que soit commémorativement plantée après la guerre « longue allée (…) des Vosges à la mer », suggestion ensuite portée 4 ans plus tard par l'abbé Lemire à chambre des Députés (1919). La reconstruction n'a pas retenu ce projet, mais des milliers d'arbres et notamment en allées d'honneur ont été plantés par exemple en France (à Vimy par les canadiens), et en Australie où chaque arbre (parfois avec une plaque d’identification) représentait un engagé ou un soldat mort au champ de bataille. L'idée a aussi été reprise ou adaptée en Nouvelle-Zélande, au Canada, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Italie. En 2018, Un colloque est dédié à cette histoire et à la conservation de ce patrimoine, souvent dégradé[14].

Conflits d'usage

« Projet d'avenue » (un seul côté est ici illustré), par Jacques-Joseph Baudrillart en 1827 dans son Traité général des eaux et forêts, chasses et pêches, composé d'un recueil des reglemens forestiers, dʹun dictionnaire des eaux et forêts, d'un dictionnaire de chasses et d'un dictionnaire des pêches. Sur les bords de l'avenue plantée d'un double alignement d'arbres, l'auteur planifie une coupe d'une partie des arbres tous les 30 ans, mais de manière à toujours conserver l'alignement paysager, et une ressource en bois.

Ces alignements, y compris dans les trous des arbres à cavités abritaient de nombreux oiseaux, qui avec le développement de la vitesse et du nombre des véhicules, ont aussi pu pâtir de mortalité par collision avec les véhicules[15].

Le long des routes, de très nombreux alignements d'arbres ont été coupés ces dernières décennies pour permettre d'élargir les chaussées ou des rectifications de tracé, pour diminuer les coûts d'entretien des routes, ou pour des raisons de sécurité[16], pour ôter des obstacles préjudiciables en cas de sortie de route. C'est le fameux concept de « la route qui pardonne » qui limite actuellement les possibilités de replantation d'arbres d'alignement. Il est pourtant prouvé maintenant que les plantations d'alignement contribuent à apaiser la route et à diminuer les vitesses.

Certains individus, se réclamant éventuellement de catégories de conducteurs tels que des motards, ont parfois réalisé des abattages intempestifs et illégaux de tels alignements, dans le but déclaré de protester contre des configurations jugées dangereuses, parfois à la suite d'accidents mortels.

Du fait d'opposition de citoyens face à des coupes parfois massives, brutales, des élus locaux ont cependant parfois préféré conserver les arbres, pour leur intérêt paysager et écologique, et mettre en place des limitations de vitesse, des talus. Parfois, on a préféré la pose de rails ou glissières de sécurité pour à la fois protéger les motards, automobilistes et les arbres, leurs fonctions écosystémiques et les espèces (dont les espèces protégées) qu'ils hébergent.

Législation

Depuis le 10 aout 2016, la loi Biodiversité et Paysage a institué la protection spécifique des arbres d'alignement. Ce texte est inspiré par la Convention Européenne du Paysage ; et dans de nombreux pays européens les arbres d'alignement font l'objet d'une politique de protection et de plantations nouvelles. Ce texte a été intégré dans le Code de l'Environnement sous l'article L. 350-3 : « Les allées d'arbres et alignements d'arbres qui bordent les voies de communication constituent un patrimoine culturel et une source d'aménités, en plus de leur rôle pour la préservation de la biodiversité et, à ce titre, font l'objet d'une protection spécifique. Ils sont protégés, appelant ainsi une conservation, à savoir leur maintien et leur renouvellement, et une mise en valeur spécifiques.

Le fait d'abattre, de porter atteinte à l'arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l'aspect d'un ou de plusieurs arbres d'une allée ou d'un alignement d'arbres est interdit, sauf lorsqu'il est démontré que l'état sanitaire ou mécanique des arbres présente un danger pour la sécurité des personnes et des biens ou un danger sanitaire pour les autres arbres ou bien lorsque l'esthétique de la composition ne peut plus être assurée et que la préservation de la biodiversité peut être obtenue par d'autres mesures. Des dérogations peuvent être accordées par l'autorité administrative compétente pour les besoins de projets de construction.

Le fait d'abattre ou de porter atteinte à l'arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l'aspect d'un ou de plusieurs arbres d'une allée ou d'un alignement d'arbres donne lieu, y compris en cas d'autorisation ou de dérogation, à des mesures compensatoires locales, comprenant un volet en nature (plantations) et un volet financier destiné à assurer l'entretien ultérieur. »

Cet article concerne tous les arbres d'alignement, qu'ils soient publics ou privés, et tout type de voie (route, chemin, allée de château, canal, chemin de halage…). On considère en général qu'un alignement existe à partir de trois arbres.

En France, un certain nombre d'associations de défense des arbres d'alignement ont porté des cas de destruction ou de projets de destruction d'arbres d'alignement devant les tribunaux (administratifs et civils) et ont obtenu gain de cause dans certains cas. Il y a donc une jurisprudence qui est en train de se mettre en place pour l'application de ce texte.

Une notice explicative a été publiée en par le ministère de la Transition écologique et solidaire, dans laquelle il est bien précisé qu'en cas de suppression « dérogatoire » d'un alignement, les replantations « compensatoires » doivent obligatoirement prendre la forme de « plantations d'alignement » de façon à perpétuer dans l'espace et dans le temps le « motif paysager » de l'alignement. On doit donc replanter des arbres d'alignement en continuité ou à proximité des arbres abattus.

On note au sujet des plantations d'alignement une tendance actuelle qui consiste, non à planter des arbres d'une même essence de façon régulière (ce qui correspond au « motif paysager » originel, mis en œuvre dès l'invention des « allées »), mais à panacher les essences pied-à-pied. Cette mode affaiblit considérablement l'aspect paysager des plantations et est totalement contraire l'esprit de la loi (le « motif paysager » disparaît définitivement). Certaines maladies (en particulier le chancre coloré du platane) pouvant se transmettre d'arbre à arbre par les racines, l'idée de limiter ce risque en panachant les essences est en fait typiquement une « fausse bonne idée » car elle peut conduire à la disparition complète de l'aspect esthétique et culturel des allées. On peut par contre envisager sans problème d'employer des essences différentes, mais sur des tronçons homogènes d'une même voirie.

Il faut noter que le Code Civil (articles 671 à 673) ne s'applique pas aux arbres d'alignement.

Les alignements situées sur les terres d'exploitation agricoles, en Europe (et donc en France), dans le cadre de l'écoéligibilité de la nouvelle Politique agricole commune (PAC), sont éligibles au dispositif des « surfaces équivalentes topographiques », ce qui facilite l'accès aux subventions européennes pour les agriculteurs maintenant ces éléments d'intérêt écopaysagers. Il en va de même pour quelques autres éléments paysagers semi-naturels d'intérêt agroécologique et écologique éventuellement associés (ex : Prairies permanentes, bandes enherbées, lisières, mares, bocage, arbres groupés…)

Leur abattage est facilité en 2021 par le gouvernement français[17].

Problèmes phytosanitaires

Le platane commun est sensible à des champignons du feuillage (anthracnose et oïdium), et à un insecte piqueur, le tigre du platane. Mais il a surtout un ennemi mortel : le chancre coloré (Ceratocystis platani). Ce champignon microscopique s'attaque à la partie vivante de l'arbre et finit par bloquer le transport de sève (comme son cousin responsable de la maladie de l'orme). Ce pathogène a été introduit en France lors de la deuxième guerre mondiale. Les troupes américaines stationnées à Marseille, dans le parc Boréli, ont introduit des spores à partir planches de bois de platane (Platanus occidentalis). On n'a reconnu et identifié le pathogène, qui a détruit des milliers d'arbres à Marseille et dans la région, que dans les années 70. L'épidémie avait eu le temps de s'étendre dangereusement.

Deux modes de contamination sont connus pour le chancre coloré : l'eau, qui véhicule des spores provenant d'arbres atteints (cas du Canal du Midi), et les outils et engins de travaux. Un arbre atteint peu aussi contaminer son voisin par contact racinaire. Les chantiers d'entretien ou de travaux publics peuvent toucher les racines ou les troncs (chocs, élagages…), en les contaminant avec les spores du champignon. L'obligation de lutte a été décrétée au niveau national et la désinfection de tout le matériel pouvant transporter des spores est obligatoire pour tous travaux à proximité de platanes, dans toute le France (arrêté ministériel du ). Jusqu'à présent les tentatives de production de cultivars résistants au chancre coloré ne sont pas concluantes (arbres de port et de croissance différents du platane traditionnel, résistance pouvant être contournée par le champignon).

Notes et références

  1. Georges Reverdy, L'histoire des routes de France : du Moyen Âge à la Révolution, Paris, Presses de l'École nationale des ponts et chaussées, , 271 p. (ISBN 978-2-85978-280-1, notice BnF no FRBNF40631934, présentation en ligne).
  2. ex. : Groupe de travail « Plantations ». Les arbres de nos routes. Plan de rénovation des plantations d'alignement des routes du département de la Loire. Direction départementale de l’Équipement. Conseil Général du département de la Loire (1992)
  3. Alphonse Du Breuil, Manuel d'arboriculture des ingénieurs : plantations d'alignement, forestières et d'ornement, boisement des dunes, des talus, haies vives des parcelles excédantes des chemins de fer, Paris, Garnier frères, Victor Masson, , 224 p. (notice BnF no FRBNF30361389, lire en ligne sur Gallica).
  4. Corinne Bourgery et Dominique Castaner, Les plantations d'alignement, le long des routes, chemins, canaux, allées, Paris, Institut pour le développement forestier, coll. « Collection Mission du paysage », , 416 p. (ISBN 978-2-904740-13-8, notice BnF no FRBNF34989379, présentation en ligne).
  5. J-P Wagner, L’arboriculture fruitière et les routes fruitières, La Vie aux Champs, Luxembourg, .
  6. Thierry Bélouard et Frédéric Coulon, « Le cas de la France », dans Ronald Bellefontaine et al., Les arbres hors forêt : vers une meilleure prise en compte, Montpellier et Rome, CIRAD et FAO, (ISBN 92-5-204656-9, présentation en ligne, lire en ligne), p. 149-156.
  7. André Toussaint, Vincent Kervyn de Meerendre, Bernard Delcroix et Jean-Pierre Baudoin, « Analyse de l’impact physiologique et économique de l’élagage des arbres d’alignement en port libre », Biotechnologie, Agronomie, Société et Environnement, vol. 6, no 2, , p. 99–107 (lire en ligne).
  8. Patricia Pellegrini, « Pieds d’arbre, trottoirs et piétons : vers une combinaison durable ? », Développement durable et territoires, vol. 3, no 2 « Trames vertes urbaines », (DOI 10.4000/developpementdurable.9329).
  9. Direction des routes et de la circulation routière (1979), Les plantations des routes nationales ; Guide technique. Ministère des transports. Direction générale des transports intérieurs
  10. Direction Générale de l'Aménagement du territoire, du Logement et du Patrimoine, Direction générale des Ressources naturelles et de l'Environnement, Préserver les arbres. Recommandations pour éviter les dégâts aux arbres
  11. Plaquette d'information émise en 2017 par Voies navigables de France, concernant le projet de replantation du canal du Midi, .
  12. Brochure d'information émise en 2014 par Voies navigables de France, concernant le projet de replantation du canal du Midi, .
  13. Michel Chauvet, « Pl@ntUse : Le wiki des plantes utiles et de leurs usages », sur Pl@ntUse (consulté le )
  14. [ https://www.allees-avenues.eu/colloque-2018 « Les allées d’arbres - de la guerre à la paix » ] colloque international, 12 & 13 novembre 2018
  15. Housset, Ph.: Avifaune et routes. Université de Rouen (1993)
  16. Académie des sciences morales et politiques (préf. Jean Cluzel), L'insécurité routière : les accidents de la route sont-ils une fatalité ? (rapport), Paris, Presses universitaires de France, coll. « Cahier des sciences morales et politiques » (no 19), , 109 p. (ISBN 978-2-13-053919-3, OCLC 53374398, notice BnF no FRBNF39090739, SUDOC 074781685, présentation en ligne, lire en ligne).
  17. Reporterre, « En catimini, le gouvernement facilite l'abattage des arbres d'alignement », sur Reporterre, le quotidien de l'écologie (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

  • Site et vidéos du colloque « Arbres d'alignement en ville : vecteurs de biodiversité » (Bruxelles, ) : www.alignement.be

Bibliographie

  • Adolphe Chargueraud, Traité des plantations d'alignement et d'ornement dans les villes et sur les routes départementales : installations, culture, taille, élagage, entretien, remplacement, rendement, dépenses, législation, Paris, J. Rothschild, , 332 p. (notice BnF no FRBNF30223233, lire en ligne sur Gallica).
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