Écosystème

En écologie, un écosystème est un ensemble formé par une communauté d'êtres vivants en interaction (biocénose) avec son environnement (biotope). Les composants de l'écosystème développent un dense réseau de dépendances, d'échanges d'énergie, d'information et de matière permettant le maintien et le développement de la vie[1]. Un écosystème transformé par l'Homme dans le but de nourrir, c'est-à-dire dans un contexte agricole s'appelle un agrosystème (ou agroécosystème).

Cet article concerne la notion d'écosystème en écologie. Pour les autres significations, voir Écosystème (homonymie).

Tapis de Salix glauca sur le Scoresby Sund (Groenland) avec un crâne de bœuf musqué au premier plan, deux espèces caractéristiques de la toundra.

Le terme fut forgé au XXe siècle pour désigner l'unité de base de la nature, dans laquelle les êtres vivants interagissent entre eux et avec leur habitat[2]. La notion d'écosystème regroupe toutes les échelles : de la Terre au simple caillou en passant par la flaque d'eau, la prairie, la forêt, et les organismes vivants eux-mêmes. Chacun constitue un écosystème à part entière.

Dans chaque écosystème se trouve un ou plusieurs réseaux trophiques (ou « chaînes alimentaires »). Les zones de transition entre deux écosystèmes sont nommées écotones.

Des concepts modélisateurs utilisent l'approche écosystémique pour mettre l'accent sur les processus d'un composant de l'écosystème (géosystème pour le sol, hydrosystème pour l'eau libre, sylvosystème pour les forêts, agroécosystème pour les activités agricoles).

Définitions

Le terme « écosystème » naît en 1935 sous la plume d'Arthur George Tansley[3]. Il définit un écosystème comme étant un « complexe d'organismes et de facteurs physiques. » Il ajoute que « les systèmes ainsi formés sont […] les unités de base de la nature et […] offrent la plus grande diversité de type et de taille »[1].

Le rapport de l'ONU sur l’Évaluation des écosystèmes pour le millénaire définit un écosystème comme un « complexe dynamique composé de plantes, d’animaux, de micro-organismes et de la nature morte environnante agissant en interaction en tant qu’unité fonctionnelle »[4].

Le CNRS définit un écosystème comme l'« ensemble vivant formé par un groupement de différentes espèces en interrelations (nutrition, reproduction, prédation…), entre elles et avec leur environnement (minéraux, air, eau), sur une échelle spatiale donnée »[5].

Les composantes de l'écosystème

La forêt tropicale de l'île de Bali

Les écosystèmes contiennent des combinaisons d'espèces plus ou moins complexes que l'on peut organiser de manière simplifiée en producteurs primaires (les plantes), consommateurs (les animaux) et bioréducteurs (micro-organismes). Ces différents groupes assurent tous ensemble les cycles de la matière, alimentés par l'énergie du soleil[1] au sein d'un environnement d'éléments physiques, géologiques, édaphiques, hydrologiques, climatiques, etc. Dans un écosystème équilibré, à chaque niveau, en interactions avec les autres niveaux, la quantité de biomasse est stable.

Le sol est une composante majeure de l'écosystème ayant un rôle particulier : il est à la fois milieu naturel et support de la plus grande diversité des habitats. Il agit comme un accumulateur, un transformateur et un milieu de transfert pour les cycles biogéochimiques : l'eau, le carbone, les sels minéraux, les métaux…

La richesse spécifique des écosystèmes est extrêmement variable en fonction des latitudes, des sols et des climats[6]. Ainsi, les scientifiques s'accordent à dire que plus de 50 % des espèces végétales et animales du globe sont concentrées dans les forêts tropicales. Ces dernières auraient subi de moindres variations climatiques au cours des temps, ce qui aurait permis aux espèces de poursuivre leur évolution sur une longue période, jusqu'à aujourd'hui.

L'espèce humaine fait partie intégrante des écosystèmes dans lesquels elle évolue. C'est sur cette base que l'anthropologue française, Béatrice Galinon-Mélénec, a conçu le paradigme de « L'Homme-trace » selon lequel les « conséquences-traces » des interactions multi-échelles humain-milieu provoquent une évolution de l'un comme de l'autre[7].

L'Association française de normalisation précise que, du point de vue humain, un écosystème est constitué « des êtres humains et de leur environnement physique, des plantes et des animaux » et que cet écosystème est dit durable si « ses composantes et leurs fonctions sont préservées pour les générations présentes et futures »[8].

La délimitation d'un écosystème est arbitraire : il n'y a pas de limites objectives, de frontières physiques. Il existe donc une quantité infinie d'écosystèmes. À l'échelle terrestre, il est possible de caractériser les différents types de milieux existants et d'établir une typologie, nécessairement incomplète et imprécise. Ces zones de vie, aussi appelées biomes ou écorégions, ont été classifiées par différents organismes dont le Fonds mondial pour la nature, qui en recense 14 pour le milieu terrestre. En Europe, la base de données de l'Union Européenne Corine biotopes sert de référentiel de classification des habitats.

Services écologiques

Les écosystèmes sont sources de très nombreux « bienfaits » pour l'espèce humaine, gratuits tant que les écosystèmes sont préservés. Depuis la Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement de 1992, qui s’est tenue à Rio de Janeiro au Brésil, et avec l'Évaluation des écosystèmes pour le millénaire[4], ces services écologiques commencent à être quantifiés, et certains tentent d'évaluer leur valeur économique. On les classe généralement en :

  • services d'approvisionnement : nourriture, eau, bois, fibres, matières et molécules organiques, molécule d'intérêt pharmaceutique, ressources génétiques auto-entretenues, etc.
  • services de régulation : régulation macro- et micro-climatiques, régulation des inondations et des maladies, résilience des écosystèmes face aux catastrophes, etc.
  • services culturels : bénéfices non matériels, enrichissement spirituel, plaisirs récréatifs et culturels, expérience et valeurs esthétiques, intérêt pédagogique offert par la nature utile aux relations sociales et à la formation humaine. Ce sont les aménités environnementales ;
  • services de soutien : ils sont la condition du maintien des conditions favorables à la vie sur Terre, avec notamment les cycles bio-géo-écologiques des éléments (nutritifs ou non). Ce sont les systèmes bouclés de rétroactions qui sont nécessaires à la production de tous les autres services fournis par les écosystèmes. Ils contribuent notamment à l'entretien des équilibres écologiques locaux et globaux, la stabilité de la production d'oxygène atmosphérique et du climat global, la formation et la stabilité des sols, le cycle entretenu des éléments et l'offre d'habitat pour toutes les espèces ;
  • on leur ajoute parfois les « services ontogéniques », qui représentent l'apport au corps humain et à l'esprit qui se sont développés depuis trois millions d'années au contact direct de la nature et de ses stimuli. Cette interaction reste aujourd'hui nécessaire à l'épanouissement humain et à sa santé (immunitaire notamment)[réf. nécessaire].

Tous ces services dépendent de la biodiversité, élément clé du caractère auto-catalytique, évolutif et auto-adaptatif des écosystèmes.

Un système dynamique

Plectorhincus lineatus sur le récif corallien du Timor oriental

L'écosystème est un système naturel dynamique. Avec leurs interactions mutuelles et avec leur biotope, les espèces transforment l’écosystème qui évolue ainsi avec le temps : il s'agit d'un ensemble dynamique issu d'une coévolution entre les espèces et leur habitat. S'il tend à évoluer vers un état théorique stable, dit climacique, des événements et des pressions extérieures l'en détournent sans cesse. La biocénose met alors en œuvre ses capacités d'évolution et d'adaptation face au contexte écologique et abiotique en perpétuel changement. Cette capacité à supporter des impacts sans que cela ne modifie la structure de l'écosystème ou à revenir à l'état antérieur à la suite d'une perturbation est appelée résilience écologique.

Un écosystème vivant n'est jamais tout à fait stable : il suit une trajectoire vers un climax théorique, mais reste dans un état hors d'équilibre, sans cesse en mouvement, grâce à de complexes boucles de rétroactions. On parle de régression écologique lorsque le système évolue d'un état initial vers un état moins stable. Un écosystème est sain quand l'ensemble des organismes vivants et des milieux inertes forment un système capable de résilience[5].

Écosystèmes menacés

En 2012, l'UICN[9] a annoncé vouloir créer, avant 2025, une liste rouge des écosystèmes vulnérables, menacés ou en danger critique dans le monde[9]. C'est une initiative testée et portée par un biologiste vénézuélien, Jon Paul Rodríguez[10], qui a travaillé sur l'importance des données locales[11] et les critères régionaux des listes rouges[12], puis réalisé un tel classement pour les écosystèmes terrestres du Venezuela, et publié en 2011[10] une liste argumentée de critères d'évaluation environnementale de la santé des écosystèmes et de hiérarchisation des menaces pour les écosystèmes.

À la suite notamment de cette initiative de nombreux travaux ont porté sur l'évaluation du statut de conservation des écosystèmes, et au-delà parfois sur les risques de collapsus écologique.

Il existe en Europe un projet de Liste rouge européenne des habitats, et en France un travail sur une Liste rouge des écosystèmes développé avec le Service du Patrimoine Naturel du Muséum national d'Histoire naturelle, lequel a produit à cette occasion une synthèse des démarches existantes de « Listes rouges écosystémiques » en Europe[13].

Extension de la notion

On trouve de plus en plus d'usages métaphoriques de l'écosystème pour désigner un ensemble d'entités qui interagissent dans un environnement.

En économie, un écosystème est constitué d'un regroupement d'entreprises d'une filière et de leurs parties prenantes (clients, employés, fournisseurs, sous-traitants, pouvoirs publics…), qui ont en commun un projet de développement dans le temps, encadré par des engagements pris les uns envers les autres. Dans un écosystème d'entreprises, chacun contribue à la création de valeur qui profite à toutes les entreprises, à la différence d'un cluster.

En sociologie et en écosophie le terme d'écosystème social et politique est de plus en plus utilisé pour définir les rapports entre des individus au sein des communautés. Ainsi que pour préciser les rapports des communautés entre elles.

L'idée de l'existence d'un écosystème mental ou psychologique fait partie intégrante du concept d'écologie mentale.

Avec l'expansion des réseaux numériques, on parle aussi de l'écosystème du web ou écosystèmes virtuels. Ils sont analogues aux écosystèmes informationnels.

Références

  1. « Historique de la notion d'écosystème », sur universalis.fr (consulté le )
  2. A.G. Tansley, « The Use and Abuse of Vegetational Concepts and Terms », Ecology, vol. 16, no 3, , p. 284-307 (lire en ligne [PDF])
  3. Patrick Blandin, « La diversité du vivant avant (et après) la biodiversité: repères historiques et épistémologiques », dans Casetta E, Delors J, La biodiversité Enjeux philosophiques, éthiques et scientifiques, Paris, Editions Matériologiques, .
  4. « Rapports de synthèse », sur millenniumassessment.org (consulté le )
  5. « Les écosystèmes », sur cnrs.fr (consulté le )
  6. « La biodiversité », sur cnrs.fr (consulté le )
  7. (en) Galinon-Mélénec Béatrice, « "From Traces… to Human-Trace Paradigm", Springer Proceedings in Complexity, 2015, pp. 337-349 », sur SPRINGER,
  8. Projet de norme P 14-010-1 sur l' « Aménagement durable des Quartiers d’affaires » ; AFNOR n°P 14-010-1 (1re d'une série de trois normes) sur l'« Aménagement durable des Quartiers d’affaires », soumise à enquête publique, de mai 2012 à fin juillet 2012
  9. Catherine Vincent, « Les scientifiques veulent créer une "Liste rouge" des écosystèmes menacés », Le Monde, (lire en ligne)
  10. J.P. Rodriguez, K.M. Rodriguez-Clark, J.E.M. Baillie et al., « Establishing IUCN Red List Criteria for Threatened Ecosystems », Conservation Biology, vol. 25, no 1, , p. 21–29 (DOI 10.1111/j.1523-1739.2010.01598.x, lire en ligne [PDF])
  11. J.P. Rodríguez, G. Ashenfelter, F. Rojas-Suárez et al., « Local data are vital to worldwide conservation », Nature, vol. 403, (lire en ligne [PDF])
  12. U. Gärdenfors, C. Hilton-Taylor, G.M. Mace et J.P. Rodriguez, « The Application of IUCN Red List Criteria at Regional Levels », Conservation Biology, vol. 15, no 5, , p. 1206–1212 (DOI 10.1111/j.1523-1739.2001.00112.x, lire en ligne [PDF])
  13. Savio L & Gaudillat V (2016) Synthèse sur les Listes Rouges écosystémiques en Europe (Version 2), PDF, 112 p (78 p. + annexes) ; Rapport SPN 2015/35. Paris:MNHN‐DIREV‐SPN

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • (fr) Bernard Fischesser et Marie-France Dupuis-Tate, Le guide illustré de l'écologie, Éditions de la Martinière & CEMAGREF, Paris, 2007 (ISBN 978-2-85362-447-3)

Liens externes

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