Sosthène II de La Rochefoucauld

Sosthène II Marie Charles Gabriel de La Rochefoucauld ( - Paris - Bonnétable (Sarthe), inhumé au cimetière de Picpus), 4e duc de Doudeauville (après la mort de son frère aîné, 1887), 1er duc de Bisaccia (1851), grand d'Espagne de 1re classe, Bailli Grand Croix de l'Ordre de Malte, est un homme politique français sous la IIIe République, député de la Sarthe de 1871 à 1898.

Pour les autres membres de la famille, voir Maison de La Rochefoucauld.

Une carrière politique

Fils cadet de Sosthène de La Rochefoucauld 2e duc de Doudeauville et d'Elisabeth-Hélène-Pierre de Montmorency-Laval, Sosthène II Marie Charles Gabriel de La Rochefoucauld ne s'occupe de politique jusqu'aux événements de 1871, qu'à travers son mandat de conseiller-général du canton de Bonnétable (Sarthe), à partir de 1861.

Sous le gouvernement d'Adolphe Thiers

Élu comme légitimiste par les conservateurs de la Sarthe le , représentant à l'Assemblée nationale (1871) le 9e et dernier[1], il prend place parmi la droite monarchiste et ne cache pas, en maintes occasions, son éloignement pour les institutions républicaines.

Adversaire du gouvernement d'Adolphe Thiers, après avoir voté pour la paix, pour les prières publiques, pour l'abrogation des lois d'exil, il est un des onze représentants qui se déclarent opposés à l'adoption d'un ordre du jour de confiance en faveur du chef du pouvoir exécutif, à la suite de la discussion des impôts sur les matières premières le .

Quelques mois plus tard, le 20 juin, il fait partie des délégués de la droite qui font auprès de Adolphe Thiers la manifestation connue sous le nom de députation des « bonnets à poil », ayant pour objet de le sonder sur ses vues politiques.

Il soutient en 1873, à Paris, la candidature bonaparto-royaliste du colonel Stoffel[2]. M. de La Rochefoucauld se prononçe pour le pouvoir constituant de l'Assemblée, contre la dissolution, contre le retour à Paris et contribue au renversement de Thiers le .

Présidence de Mac Mahon

Après la chute du Président il donne son concours à la politique suivie par les ministres de maréchal de Mac Mahon et, à plusieurs reprises, se rend auprès du « comte de Chambord » pour négocier la « fusion » entre les deux branches (légitimiste et orléaniste) des Bourbons et préparer une restauration monarchique.

Devant l'insuccès de ces tentatives il se décide à voter en faveur du septennat .

Le , il est nommé ambassadeur de France à Londres. A ce poste, il se fait remarquer par l'éclat donné à ses réceptions, et par le luxe royal qu'il déploie lors d'une visite de Albert Édouard, prince de Galles, dans ses propriétés.

Il continue à siéger assez assidûment à l'Assemblée.

Membre de la commission des lois constitutionnelles, lorsque Auguste Casimir-Perier vint demander, en , que l'Assemblée se hâtât de voter ces lois, La Rochefoucauld dépose (15 juin) une proposition ainsi conçue :

« L'Assemblée nationale décrète :
Article 1er. Le gouvernement de la France est la monarchie. Le trône appartient au chef de la maison de France.
Art. 2. Le maréchal de Mac Mahon prend le titre de lieutenant-général de royaume.
 »

Cette proposition, appuyée par la droite monarchiste, ne réunit qu'un petit nombre de voix. Comme elle était, d'ailleurs, contraire au régime légal du Septennat, M. de La Rochefoucauld doit se démettre de ses fonctions d'ambassadeur : il reçoit ses lettres de rappel le .

Il vote ensuite contre l'ensemble de la Constitution de 1875, pour la loi sur l'enseignement supérieur, offrit de sa bourse 1 200 000 francs à l'Université catholique d'Angers, et s'associe jusqu'à la fin de la législature, aux manifestations de ses collègues royalistes.

Alors qu'a lieu le scrutin pour l'élection des sénateurs inamovibles, il est du petit nombre de ceux qui repoussent tout compromis avec les gauches.

Après avoir posé, puis retiré sa candidature au Sénat, le duc de Doudeauville est élu député[3] de la 1re circonscription la Sarthe (Mamers), au second tour de scrutin, le , contre M. Granger, républicain[4]. L'appoint des voix bonapartistes décide du succès.

Il siége dans la minorité de droite, combat le cabinet Jules Simon, et applaudit à l'acte du 16 mai 1877. Adversaire des « 363 », il est réélu député, avec l'appui du gouvernement, le 14 octobre suivant, par 7 241 voix (13 784 votants, 16 217 inscrits), contre MM. de Beaurepaire[5], Granger[6] et Girard[7].

Il reprend sa place à Droite, mais voit son élection invalidée le , comme entachée de pression. Il obtient sa réélection[8], le 3 mars suivant, contre M. Lherminier[9], républicain. Toujours prêt à combattre le gouvernement de la République, il fait une opposition constante aux divers ministères de Gauche qui occupent successivement le Pouvoir et parait plusieurs fois à la tribune, pour y faire, au nom de la Droite royaliste, des déclarations politiques.

Il vote contre l'article 7, contre l'amnistie, etc., et est réélu[10], le , contre MM. Leporché[11] et Granger[12] Il repousse le projet de loi sur de divorce adopté en 1882 par la Chambre des députés, et présente un amendement tendant à interdire à la femme divorcée de porter le nom de son mari : cet amendement fut pris en considération puis rejeté, à la suite de quelques observations de Charles Lepère. Il se montre aussi très opposé à la politique extérieure du gouvernement, et vote contre les crédits de l'expédition du Tonkin. Plusieurs fois, les interruptions lancées par M. de La Rochefoucauld aux orateurs de la Gauche qui occupaient la tribune, provoquent des incidents parlementaires.

Présidence de Jules Grévy

Doyen du conseil général de la Sarthe, qu'il a présidé, il est inscrit, en , sur la liste monarchiste de ce département, et réélu député[13] au second tour de scrutin, le 6e sur 7.

Il préside le groupe de la Droite royaliste, dont il est encore fréquemment l'interprète, donne son adhésion au programme révisionniste lu à la tribune de la Chambre, le , par le général Boulanger, et se prononce, en dernier lieu, contre le rétablissement du scrutin d'arrondissement (), pour l'ajournement indéfini de la révision de la Constitution, contre les poursuites contre trois députés membres de la Ligue des patriotes, contre le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse, contre les poursuites contre le général Boulanger.

Présidence de Sadi Carnot

En 1889 le duc de Doudeauville fait partie du « Comité des Dix » et signe le manifeste des droites. Aux élections générales du (élections législatives françaises de 1889), il se représente, comme révisionniste, aux électeurs de Mamers. Il est réélu au premier tour[14] contre le républicain Georges Le Chevalier[15].

Il se fait remarquer, le , dans le débat animé sur la validation des élections de l'arrondissement de Lodève, par des interruptions qui lui valent un rappel à l'ordre avec inscription au procès-verbal.

Le , dans la discussion des interpellations sur un épisode du scandale de Panamá, l'« affaire Cottu », qui provoqua la démission du ministre de la Justice Bourgeois, il propose un ordre du jour de réprobation envers ce dernier et le gouvernement. Dix jours plus tard, au nom des Droites qu'il préside, il appuie la proposition de Cazenove de Pradines tendant à inviter le Président de la République à dissoudre la Chambre.

Sa profession de foi pour les élections de 1893 dépeint assez bien le personnage :

« Aux inepties débitées ou imprimées sur mon compte, je ne veux répondre que par le dédain. Au moment où la question financière est si grave et où la moralité publique a tant souffert de ces tristes affaires du Panama, vous ne retirerez pas à votre ancien député la confiance que vous lui témoignez depuis vingt-deux ans. Vous ne lui préférerez pas un nouveau venu dans le département, qui n'a d'autre raison d'y paraître que d'être le candidat officiel de M. le préfet.
Mon dévouement vous est acquis. Vous me connaissez tous. Protecteur de l'agriculture, défenseur du commerce et de l'industrie, avant tout ami de l'ouvrier, mon passé vous garantit mon avenir. Comptez sur moi comme je compte sur vous.
 »

L'appel est entendu : le duc obtient d'emblée 6 985 suffrages contre 5 661 à Le Chevalier.

Au cours de la nouvelle législature, s'il appartient à plusieurs commissions, il n'intervient qu'une fois.

Aux élections de 1898, il est battu d'assez peu; et de manière peu élégante, par Joseph Caillaux, qui obtient 12 939 voix, tandis que lui-même en recueille 11 737 , sur 29 140 inscrits et 24 883 votants.

Fonctions

Titres et décoration

Un amateur d'art et un homme du monde

Le duc de Doudeauville habitait à Paris, l'hôtel de La Rochefoucauld Doudeauville, 47 rue de Varenne, aujourd'hui Ambassade d'Italie, dans la Sarthe, le château de Bonnétable et, dans l'Eure & Loir, le château d'Esclimont .

Il fait restaurer ces trois demeures par l'architecte Henri Parent et y mène une active vie mondaine.

Il est admis au Jockey Club en 1856, et en est élu vice-président en 1877 [16]. En 1884, il en devient le président et le reste jusqu'à sa mort, en 1908. Il était également membre de plusieurs autres cercles parisiens.

Son fils, Armand François de La Rochefoucauld sera aussi président du Jockey Club de 1919 à 1962, pendant plus de quarante ans, et son arrière-petit-fils, Roland du Luart , l'est depuis 2014.

Le duc de Doudeauville était également propriétaire de la Vallée aux Loups, ancienne demeure de Chateaubriand.

Mariages et descendance

Il épouse, le à Paris, Yolande ( - Paris), princesse de Polignac, fille de Jules Armand de Polignac (17801847) 1er prince de Polignac (), 3e duc de Polignac (1847-1847) et Pair de France, 1er prince romain et de Polignac (, Titré par le pape Pie VII), ambassadeur de France, puis ministre des affaires étrangères, et président du conseil (1829-1830) du Roi Charles X, et de Charlotte Parkyns, sa seconde épouse. Ensemble, ils ont :

  1. Yolande de La Rochefoucauld (, Versailles, Dampierre), mariée, le à Paris, avec Charles d'Albert, (18451870), 9e duc de Luynes et de Chevreuse, dont postérité ;
  2. Louis de La Rochefoucauld (, Louxor (Égypte)) ;
  3. Jules de La Rochefoucauld () ;
Marie Georgine de Ligne, Léon Bonnat, 1899.

Veuf, il épouse en secondes noces, le à Belœil (Belgique), Marie Georgine de Ligne (, Bruxelles - Paris), princesse de Ligne, fille d'Eugène de Ligne (18041880), 8e prince de Ligne, ambassadeur en France du Roi des Belges, sénateur, président du sénat belge, et de la princesse Hedwige Lubomirska, sa troisième épouse. Dont :

  1. Charles Marie de La Rochefoucauld (1863–1907), grand d'Espagne (1892) au titre de duc d'Estrées, marié avec Charlotte de La Trémoïlle (1864-1944), fille de Louis Charles, duc de La Trémoïlle, et de Marguerite Duchatel. Dont une fille ;
  2. Henri François de La Rochefoucauld (1864-1866) ;
  3. Elisabeth Francoise de La Rochefoucauld ( - La Vallée-aux-Loups, Châtenay-Malabry), marié avec son cousin Louis Eugène, prince de Ligne, dont une fille ;
  4. Armand François de La Rochefoucauld (no) (1870–1963), 5e duc de Doudeauville (1908), président du Jockey Club (1919-1963), conseiller-général du canton de Bonnétable (1912-1940), marié en 1894 avec la princesse Louise Radziwill (1877-1942), fille du prince Constantin Radziwill et de Louise Blanc. Dont 2 fils et 2 filles ;
  5. Marie de La Rochefoucauld, mariée avec Henri Eugène François Marie d'Harcourt (1864 † 1908), 10e duc d'Harcourt , dont François Charles, 11e duc d'Harcourt, député du Calvados ;
  6. Edouard François Marie de La Rochefoucauld (1874–1968), dernier duc de Bisaccia (1908), marié avec Marie-Camille de Colbert. Dont trois enfants : 1) Marie-Carmen de La Rochefoucauld (1902-1999) mariée en 1928 avec le comte de Mailly-Nesle, d'où postérité. 2) Stanislas comte de La Rochefoucauld (1903-1965), marié en 1926 avec Sophie Alice Cocea, puis en 1947 avec Jeanne princesse de San Felice de Viggiano (sans postérité) ; 3) Elisabeth de La Rochefoucauld (1909-2006) mariée en 1929 avec Robert Le Gras du Luart (d'où postérité), puis en 1958 avec Mario comte Pinci.

Notes et références

  1. Par 41 207 voix (84 400 votants, 135 095 inscrits)
  2. Alain-Georges Ravel, Stoffel, un homme lige de Napoléon III, Paris, Thélès, , 416 p. (ISBN 2-84776-289-2, lire en ligne)
  3. Par 6 527 voix (12 825 votants, 15 426 inscrits)
  4. 6 118 voix
  5. 2 884 voix
  6. 1 946 voix.
  7. 1 645 voix.
  8. Avec 7 307 voix.
  9. 5 233 voix.
  10. Par 6 471 voix (12 814 votants, 15 761 inscrits)
  11. 4 148 voix.
  12. 2 037 voix.
  13. Par 52183 voix (107837 votants, 127345 inscrits)
  14. Avec 7 330 voix sur 15 276 inscrits et 12 903 votants.
  15. 5 441 voix.
  16. A. Gibert & Ph de Massa, Historique du Jockey-club français, Paris, , 417 p., p. 280, 188 & 187

Voir aussi

Bibliographie

  • « La Rochefoucauld (Marie-Charles-Gabriel-Sosthène de) », dans Adolphe Robert et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français, Edgar Bourloton, 1889-1891 [détail de l’édition] [texte sur Sycomore] ;
  • « Sosthène II de La Rochefoucauld », dans le Dictionnaire des parlementaires français (1889-1940), sous la direction de Jean Jolly, PUF, 1960  ;
  • Duc de Doudeauville, Une Politique française au XIXème siècle, 1927, Paris, Librairie ancienne Honoré Champion, 1 vol. in 8°, 534 p..

Articles connexes


  • Portail de la France au XIXe siècle
  • Portail de la Sarthe
  • Portail de la politique française
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.