René Vallet de Villeneuve

René, François Vallet, comte de Villeneuve, dit Villeneuve de Chenonceaux, est un militaire et homme politique français, né le à Paris et mort le au château de Chenonceau.

Biographie

Famille

La famille Vallet serait originaire de Jarzé, à proximité de la capitale angevine, Angers. Les premières acquisitions archivées, mentionnent Guillaume Vallet concernant des parcelles de vigne sur la paroisse de Jarzé, en date du [1].

Le père de René, Pierre-Armand Vallet de Villeneuve[2], est le secrétaire du roi, trésorier général de la Ville de Paris et receveur général des finances à Metz. Sa mère, Madeleine-Suzanne Dupin de Francueil[3], est la petite-fille du fermier général et financier, Claude Dupin. Madeleine-Suzanne perd sa mère, Suzanne Bollioud de Saint-Jullien[4], à l'âge de trois ans en 1754 et elle est élevée par Madame Dupin. Le mariage entre Pierre-Armand et Madeleine-Suzanne se déroule à Paris le , union arrangée par Monsieur et Madame Dupin et qui intervient juste après le décès de leur fils unique Jacques-Armand Dupin de Chenonceaux, le . Ce choix est motivé depuis que leur belle-fille, Julie de Rochechouart, a quitté l'Hôtel des Dupin à Paris en 1763 avec leur petit-fils, Claude-Sophie Dupin de Rochefort[5]. La mésentente entre Madame Dupin et Julie est notoire et le départ de cette dernière est consécutif à la mauvaise vie de son époux Jacques-Armand et son incarcération l'année précédente, en 1762. Le couple de Chenonceaux ne résidant plus rue Plâtrière, c'est ainsi que Madame Dupin décide d'accueillir dans son hôtel particulier son neveu, le fils de sa sœur benjamine Françoise-Thérèse Guillaume de Fontaine[6] : Pierre-Armand Vallet de Villeneuve.

Jeunesse

Blason de la famille Vallet de Villeneuve.

Mme Dupin reporte toute son affection sur son neveu et les deux enfants issus du mariage avec Madeleine Suzanne Dupin de Francueil, René et Auguste Vallet de Villeneuve. René-François est né rue Plâtrière à Paris, paroisse Saint-Eustache, le . Son parrain est François Bollioud de Saint-Jullien, gouverneur et lieutenant du roi en la ville de Bourg-Argental et receveur général du clergé en France. La marraine est la très haute et très puissante, Françoise-Renée-Hervé Carbonnel de Canizy, comtesse de Forcalquier[7]. Son frère, Auguste-Louis-Claude Vallet de Villeneuve est né au même domicile rue Plâtrière à Paris, le [8].

Lors de la Révolution française, Mme Dupin part s'installer au château de Chenonceau, au cours des massacres de Septembre 1792 dans les prisons parisiennes. Elle est accompagnée de son amie, la comtesse de Forcalquier, sa nièce Madeleine-Suzanne Dupin de Francueil, ses petits-neveux René et Auguste Vallet de Villeneuve ainsi que sa gouvernante et lectrice, Marie-Thérèse Adam. Malheureusement, du fait de sa fonction en tant que trésorier de la ville de Paris, Pierre-Armand Vallet de Villeneuve reste dans la capitale. Il est emprisonné et condamné par le Tribunal révolutionnaire au moment de la grande Terreur au printemps 1794. Âgé de 62 ans, il meurt en détention à la Conciergerie, le 21 ventôse de l'An II ()[9]. Suicide ou mort « naturelle », sa fin brutale le soustrait à l'échafaud. Veuve, Madeleine Suzanne Dupin de Francueil épouse en secondes noces à Chenonceaux le 7 messidor de l'An IV (), Joseph Delaville Le Roulx, négociant et homme politique.

Mme Dupin se charge de l'éducation de René et Auguste, bientôt rejoint par le fils de son médecin personnel, Pierre Bretonneau, maître-chirurgien à Saint-Georges-sur-Cher : Pierre-Fidèle Bretonneau, à l'avenir prometteur. René Vallet de Villeneuve épouse le à Paris, Appoline Charlotte Adélaïde de Guibert[10]. Elle est la petite-fille du général de Guibert et par sa mère, l'arrière petite-fille de Michelle Carton-Dancourt, la tante de Louise Dupin. Ainsi, à la cinquième génération, se sont unis par le mariage deux descendants du comédien Florent Carton-Dancourt. René Vallet de Villeneuve, ainé des petits-neveux de Mme Dupin, hérite à son décès, du château de Chenonceau ainsi que l'ensemble du domaine, au mois de . Le cadet, Auguste, reçoit le marquisat du Blanc dans le département de l'Indre.

René et Auguste sont très liés à leur oncle, Maurice Dupin de Francueil[11], en réalité de la même génération. Maurice qui est également officier dans l'armée impériale, rend souvent visite à René au château de Chenonceau ou Auguste, au marquisat du Blanc. La mort accidentelle de Maurice à Nohant, le , marque profondément les deux frères de Villeneuve.

Carrière

René Vallet de Villeneuve s'engage dans la carrière militaire sous le Consulat. Il fait partie de l'ancienne aristocratie ralliée à Napoléon Ier qui le fait comte d'Empire le , en récompense de ses succès diplomatiques. En 1806, il est nommé premier chambellan du Roi de Hollande, Louis Bonaparte. René Vallet de Villeneuve est nommé Chevalier de la Couronne de Bavière le , commandeur de l'ordre impérial de la Réunion le [12]. Son épouse devient la dame du palais de la reine Hortense de Beauharnais. Le comte René Vallet de Villeneuve est désigné par Marie-Aurore de Saxe pour être le tuteur de sa cousine, Aurore Dupin, future George Sand, mineure et seule légataire de la famille Dupin de Francueil.

Le médecin tourangeau, Pierre Fidèle Bretonneau ainsi que son épouse Marie-Thérèse Adam, lectrice et héritière de Madame Dupin, sont des familiers de René Vallet de Villeneuve. Pendant leur absence au cours du Premier Empire, les châtelains confient la surveillance du domaine à Pierre Bretonneau qui réside à Chenonceaux depuis 1801 comme simple officier de santé et premier magistrat de la commune à partir de 1803. Le comte prend la succession de son protégé, à la mairie tourangelle au mois d' et va le rester pendant près de soixante ans. Il possède également un domicile parisien au no 24 rue de Grammont[13]. Quant à son frère Auguste, propriétaire des terres du Blanc, avec le titre de baron, il est chef d'escadron, trésorier de la garde nationale depuis 1809 et receveur municipal de la ville de Paris dès 1801. Sa résidence à Paris se situe au no 11 rue d'Anjou-Saint-Honoré[13]. Il a épousé Laure de Ségur (1778-1812), fille du comte Louis-Philippe de Ségur et dont la nièce n'est autre que la romancière Sophie Rostopchine, comtesse de Ségur (1799-1874). Le baron Auguste Vallet de Villeneuve meurt dans son château de la ville du Blanc, le .

Le comte René de Villeneuve continue à servir sous la Restauration et il est nommé Chevalier de la Légion d'Honneur le , par Louis XVIII. Il prend part à l'expédition d'Espagne en 1823.

George Sand

Aurore Dupin de Francueil, plus connue sous le pseudonyme de George Sand.

Marie-Aurore de Saxe meurt au château de Nohant, le . Au lendemain de l'enterrement de Madame Dupin de Francueil, la famille est convoquée à Nohant, dont le comte Vallet de Villeneuve, afin de prendre connaissance des dernières volontés de la défunte. La lecture du testament provoque une violente colère de Sophie-Victoire Delaborde, la mère d'Aurore Dupin de Francueil. En effet, Aurore est la seule héritière et propriétaire du domaine de Nohant. Victoire Delaborde est stupéfaite d'apprendre que sa belle-mère nomme René Vallet de Villeneuve comme seul et unique tuteur de sa propre fille. Toute la rancœur contenue ces dernières années à l'égard de sa belle-famille, se déchaîne brutalement, par des paroles outrageantes[14]. Victoire Delaborde refuse cet arrangement et exige que sa fille vienne avec elle, à Paris. La rupture avec la famille paternelle est consommée. René Vallet de Villeneuve s'incline et Aurore quitte Nohant pour Paris, vivre avec sa mère le [15].

Ce n'est que vingt ans plus tard, au cours d'une rencontre fortuite à Paris[16] au mois d' avec la fille aînée du comte, Emma-Augustine de la Roche-Aymon[17], que les relations se renouent avec les Vallet de Villeneuve. Aurore devenue la célèbre George Sand, est invitée au château de Chenonceau. Elle s'y rend au mois de , accompagnée de son fils Maurice et de sa fille Solange. Elle restera désormais en relation avec les Vallet de Villeneuve. Dans sa correspondance du avec son demi-frère Hyppolite Chatiron, George Sand décrit son séjour à Chenonceau[18] :

« Le fait est que nos hôtes ont été excellents pour moi et pour mes enfants […] Chenonceaux est une merveille. L'intérieur en est arrangé à l'antique avec beaucoup d'art et d'élégance. On y jette toujours son pot de chambre par la fenêtre, ce qui faisait le bonheur de Maurice ! »

Second Empire

René Vallet de Villeneuve est nommé sénateur du Second Empire, le et siège dans la majorité impériale, jusqu'à sa mort[19]. Il est promu Officier de la Légion d'Honneur le et Commandeur de la Légion d'Honneur, le [20].

Son épouse Appoline de Guibert, fille unique du comte de Guibert, meurt à Chenonceau, le . René Vallet de Villeneuve contracte une pleurésie à la fin de l'année 1862 et meurt dans son château de Chenonceau, le [21]. La propriété revient à ses deux enfants, Emma-Augustine Vallet de Villeneuve marquise douairière de La Roche-Aymon (1796-1866) et à Septime Vallet de Villeneuve (1799-1875). Mais les héritiers du comte de Villeneuve ne conservent pas cette fort dispendieuse demeure en entretien et réparations. Le prestigieux domaine qui appartenait à la famille depuis 130 ans, est donc mis en vente au mois d'.

René Vallet de Villeneuve et Appoline de Guibert suivant leurs dernières volontés, reposent dans cette région de Touraine qu'ils affectionnaient tant, à Chenonceaux.

George Sand et la famille de Villeneuve

Consulter en ligne les témoignages de George Sand à propos de sa famille Vallet de Villeneuve, extraits de ses œuvres :

Sources

Ouvrages

Archives

Les grandes armes de l'Empire français, modèle de tapisserie pour la manufacture des Gobelins par François Dubois (1790-1871) d'après Jacques-Louis de La Hamayde de Saint-Ange (1780-1860), en 1809.

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Jean Buon (préf. Michelle Perrot), Madame Dupin : Une féministe à Chenonceau au siècle des Lumières, Joué-lès-Tours, Éditions La Simarre, , 224 p. (ISBN 978-2-36536-027-2, présentation en ligne). 
  • Harumi Yamazaki-Jamin, À propos de Suzanne, Madame Dupin de Francueil, née Bollioud de Saint-Jullien (1718-1754), vol. 49 : Annales de la Société Jean-Jacques Rousseau, Genève, Éditions Droz, , 427 p. (ISBN 978-2-600-01448-9), p. 283 à 298. 
  • Michel Laurencin (ill. Georges Pons), Dictionnaire biographique de Touraine, Chambray-lès-Tours, Éditions C.L.D., , 632 p. (ISBN 978-2-85443-210-7, notice BnF no FRBNF35287344). 
  • Robert Ranjard, Le secret de Chenonceau, Tours, Éditions Gibert-Clarey, (1re éd. 1950), 256 p., « Le comte René de Villeneuve », p. 211 à 223. 
  • Jean de Jaurgain, Notice sur les familles Vallet de Villeneuve et de Guibert, Paris, Imprimerie de la Cour d'Appel, , 70 p. (lire en ligne), « François-René, comte de Villeneuve », p. 16 à 18. 
  • Adolphe Robert (dir.), Edgar Bourloton (dir.) et Gaston Cougny (dir.), Dictionnaire des parlementaires français : depuis le 1er mai 1789 jusqu'au 1er mai 1889, t. V, Paris, Éditions Bourloton, , 650 p. (lire en ligne), « Villeneuve de Chenonceaux », p. 530. 
  • Gaston de Villeneuve-Guibert, Le portefeuille de madame Dupin : Dame de Chenonceaux, Paris, Éditions Calmann-Lévy, , 606 p. (lire en ligne). 
  • Casimir Chevalier, Histoire abrégée de Chenonceau, Lyon, Éditions Alphonse Louis Perrin et Marinet, , 361 p. (lire en ligne), chap. XXIV (« Le comte de Villeneuve »), p. 320 à 330. 
  • Gustave Desnoiresterres, Épicuriens et lettrés : XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Éditions Georges Charpentier, , 459 p. (notice BnF no FRBNF30333532), « La famille de Fontaine (Dupin et Vallet de Villeneuve) », p. 440 à 447. 

Voir aussi

Articles de l'encyclopédie

Le château de Chenonceau par Gustave Le Gray. Photographie réalisée en 1851, lorsque le comte Vallet de Villeneuve en était le propriétaire.

Liens externes

Notes et références

  1. Jean de Jaurgain, Notice sur les familles Vallet de Villeneuve et de Guibert, Paris, Imprimerie de la Cour d'Appel, , 70 p. (lire en ligne), p. 7
  2. Pierre-Armand Vallet de Villeneuve : fils de Nicolas Vallet de Villeneuve et de Françoise-Thérèse Guillaume de Fontaine. Né à Paris, le 28 septembre 1731. Marié le 9 février 1768 à Paris, paroisse de Saint-Eustache, avec Madeleine-Suzanne Dupin de Francueil (1751-1812).
  3. Madeleine Suzanne Dupin de Francueil : fille de Louis Dupin de Francueil et de Suzanne Bollioud de Saint-Jullien. Elle est née à Paris, le 14 juillet 1751.
  4. Suzanne Bollioud de Saint-Jullien : née et ondoyée le 11 décembre 1718 à Bourg-Argental, baptisée et reconnue dans cette même paroisse le dimanche 16 avril 1719. Elle meurt le 1er septembre 1754 à Paris.
  5. Jean Buon (préf. Michelle Perrot), Madame Dupin : Une féministe à Chenonceau au siècle des Lumières, Joué-lès-Tours, Éditions La Simarre, , 224 p. (ISBN 978-2-36536-027-2, présentation en ligne), « Après les belles années, les années sombres », p. 106
  6. Françoise-Thérèse Guillaume de Fontaine épouse Monsieur Nicolas Vallet, seigneur de La Touche, le 12 mai 1729 à Passy.
  7. René-François Vallet de Villeneuve : se reporter à la transcription intégrale de son acte de naissance, registre des actes de baptême, paroisse Saint-Eustache à Paris pour l'année 1777.
    Archives de Paris : État civil - Acte de naissance reconstitué. Cote du document : V3E N/2173. Archives de Paris 18 boulevard Sérurier 75019 Paris.
  8. Consulter l'extrait du dossier de la Légion d'Honneur d'Auguste Vallet de Villeneuve (1779-1837)
    Archives de Paris : État civil - Acte de naissance reconstitué. Cote du document : V3E N/2173. Archives de Paris 18 boulevard Sérurier 75019 Paris.
  9. 21 ventôse de l'An II, jour de décès transcrit dans l'acte du second mariage de Madeleine Suzanne Dupin de Francueil à Chenonceaux, le 7 messidor de l'An IV (25 juin 1796).
  10. Appoline Charlotte Adélaïde de Guibert : fille de Charles, Jacques Hyppolite comte de Guibert et d'Alexandrine Boutinon des Hayes de Courcelles. Elle est née et baptisée le 15 décembre 1776 à Paris et décédée le 18 novembre 1852 à Chenonceaux.
  11. Maurice Dupin de Francueil, né à Paris le 9 janvier 1778 du second mariage de Louis Dupin de Francueil et de Marie-Aurore de Saxe. Il est le père d'Aurore Dupin de Francueil.
  12. Ce titre est aboli le 28 juillet 1815, sous la Restauration.
  13. Henri Wissemans, Almanach des 25000 adresses des principaux habitans de Paris : pour l'année 1817, vol. 3, Paris, Éditions C.L.F. Panckoucke, , 712 p. (lire en ligne), « Villeneuve », p. 567
  14. Robert Ranjard, Le secret de Chenonceau, Tours, Éditions Gibert-Clarey, (1re éd. 1950), 256 p., « Le comte René de Villeneuve », p. 221
  15. Christophe Grandemange, Le château de Nohant : Maison de George Sand, Saint-Cyr-sur-Loire, Éditions Alan Sutton, coll. « Provinces Mosaïques », , 160 p. (ISBN 978-2-8138-0176-0), « Madame Dupin de Francueil », p. 24
  16. George Sand, Correspondance 1812-1876, t. 2, Paris, Éditions Calmann-Lévy, , 394 p. (lire en ligne), p. 333 à 334
  17. Louise-Augustine-Emma Vallet de Villeneuve : fille de René-François Vallet de Villeneuve et d'Apolline Charlotte Adélaide de Guibert. Elle est née à Paris, le 9 mars 1796 et épouse à Chenonceaux, le 27 avril 1815, le colonel Antoine-Marie-Paul-Casimir comte de la Roche-Aymon. Elle meurt à Paris, le 4 janvier 1866.
  18. George Sand, Correspondance 1812-1876, t. 2, Paris, Éditions Calmann-Lévy, , 394 p. (lire en ligne), p. 342 à 345
  19. « Villeneuve de Chenonceaux (François-René Vallet, comte de) », dans Adolphe Robert et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français, Edgar Bourloton, 1889-1891 [détail de l’édition].
  20. Archives Nationales : dossier de la Légion d'Honneur de René Vallet de Villeneuve - Cote du document LH/2666/74. Notice no L2666074. Site du Ministère de la Culture : « Base Léonore, René Vallet de Villeneuve (1777 - 1863) ».
  21. Archives municipales : État civil - acte de décès no 2. Mairie de Chenonceaux - no 1 place de la Mairie 37150 Chenonceaux
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