Pierrot le Fou

Pierrot le Fou est un film franco-italien réalisé par Jean-Luc Godard, sorti en 1965.

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Pierrot le Fou
Réalisation Jean-Luc Godard
Acteurs principaux
Pays d’origine France
Italie
Genre Road movie
Durée 115 minutes
Sortie 1965


Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Synopsis

Ferdinand Griffon est un homme qui vit avec sa femme et ses enfants. Il est un peu désabusé car il vient de perdre son emploi à la télévision. Un soir, alors qu'il revient d'une désolante soirée mondaine chez ses beaux-parents, il se rend compte que la baby-sitter qui est venue garder ses enfants est une ancienne amie, Marianne. Il décide de tout quitter et de partir avec elle vers le sud de la France, dans un grand périple où se mêleront trafic d'armes, complots politiques, rencontres incongrues, mais aussi pauses bucoliques et déchirements amoureux.

Fiche technique

Distribution

Genèse du film

Choix des acteurs

Les rôles principaux devaient au départ être tenus par Michel Piccoli et Sylvie Vartan, mais cette dernière refusa. Le cinéaste décida donc de changer de couple et fit appel à Jean-Paul Belmondo ainsi qu'à Anna Karina, sa première femme, qui collabora pour la sixième fois avec son mari[réf. nécessaire].

Samuel Fuller, qui joue son propre rôle dans une scène située au début du film, a apprécié de travailler avec Godard. Dans une table ronde à Los Angeles en 1968, il explique :

« Jean-Luc Godard a eu la gentillesse de me proposer de jouer mon propre rôle dans une scène de cocktail de Pierrot le Fou. J’étais là pour préparer un film que je n’ai jamais tourné. On me demandait ce que je faisais à Paris. J’expliquais. La vedette, Belmondo, me demandait « qu’est-ce que le cinéma ? » J’expliquais. C’était agréable de travailler avec un réalisateur comme lui. Particulièrement vif. En ce qui me concerne, je me sentais vraiment en confiance[2]. »

Tournage

Le tournage commence le lundi et se termine huit semaines plus tard, le , pour un total de quarante-quatre jours[3].

Le film a été tourné à Hyères, Gonfaron, Toulon, Giens, Porquerolles, Paris, Issy-les-Moulineaux, Tremblay-lès-Gonesse, Neuilly et dans le studio de Saint-Maurice[3].

Musique du film

Jean-Paul Belmondo et Anna Karina chantent eux-mêmes deux chansons dans le film, Jamais je ne t'ai dit que je t'aimerais toujours, ô mon amour et Ma ligne de chance (deux chansons de Serge Rezvani, alias Cyrus Bassiak, que Godard omit de faire figurer au générique du film).

Anna Karina explique[réf. nécessaire] : « Jean-Luc adorait Le Tourbillon. Il savait par Truffaut que Bassiak était un auteur-compositeur terriblement original. » Pendant la phase de repérage du film, au volant de sa grosse voiture américaine, il se rendit un jour à 7 heures du matin chez Rezvani, et en repartit avec ces chansons[réf. souhaitée].

Analyse

Pierrot le Fou est considéré comme un précurseur du road movie[4].

Bien qu'il ne soit jamais nommé, Arthur Rimbaud est constamment présent au travers de citations (principalement issues d'Une saison en enfer : « L'amour est à réinventer », « La vraie vie est ailleurs »[5], etc., ainsi que la citation finale « Elle est retrouvée. Quoi ? — L'Éternité. C'est la mer allée Avec le soleil ». Rimbaud apparaît également dans un portrait en noir et blanc, orné de voyelles de couleurs, ce qui constitue une citation cinématographique. Enfin, l'attitude de certains personnages rappelle celle du poète et aventurier (Ferdinand et Marianne, désargentés, se refusent à travailler ; Fred fait du trafic d'armes en Afrique, leur fuite vers le sud, etc.).

Louis-Ferdinand Céline apparaît à travers la citation cinématographique de deux de ses deux romans : Guignol's Band et Le Pont de Londres. En outre, Ferdinand (dont le prénom fait référence à l'écrivain) évoque un voyage « au bout de la nuit ».

Le personnage de Pierrot le Fou fait également référence à la vie du peintre abstrait Nicolas de Stael, dont de nombreux tableaux sont « interprétés » par le chef opérateur Raoul Coutard, Pont-Neuf, Rouge, jusqu'à son suicide, dans le film avec des bâtons de dynamite de couleurs primaires[6].

Accueil critique

L'envoyé spécial du Figaro au festival de Venise, Louis Chauvet, n'est pas tendre avec Godard. Il juge que les films de Godard sont tous les mêmes et qu'il n'y a que le titre qui change, considérant celui-ci comme « imprégné d'un surréalisme de pacotille ». Du long métrage, il ne retient que la prestation de Raymond Devos[7].

En revanche, dans son article « Qu'est-ce que l'art, Jean-Luc Godard ? », Louis Aragon est très élogieux :

« Pendant que j'assistais à la projection de Pierrot, j'avais oublié ce qu'il faut, paraît-il, dire et penser de Godard. Qu'il a des tics, qu'il cite celui-ci et celui-là, qu'il nous fait la leçon, qu'il se croit ceci ou cela... enfin qu'il est insupportable, bavard, moralisateur (ou immoralisateur) : je ne voyais qu'une chose, une seule, et c'est que c'était beau. D'une beauté surhumaine[8]. »

Autour du film

  • L'histoire est sans rapport avec celle de Pierre Loutrel, célèbre gangster surnommé « Pierrot le fou »[9].
  • Malgré ce que Jean Luc Godard a essayé lui-même de faire croire, le scénario de ce film ne s'est pas écrit au jour le jour, mais était depuis longtemps pensé par le cinéaste[10].
  • Lors de sa sortie, Pierrot le Fou est interdit aux moins de dix-huit ans pour « anarchisme intellectuel et moral »[11].
  • On peut apercevoir vers la fin du film, lors d'une scène tournée à Toulon, le cuirassé Jean Bart.

Postérité

Le film est à l'origine de la vocation de cinéaste de Chantal Akerman :

« Je ne connaissais rien du cinéma, je n'avais vu que des films du genre Le Gendarme à Saint-Tropez et je croyais que le cinéma n'était bon que pour aller rigoler en bande. Je ne me rendais pas compte que c'était un moyen d'expression artistique. Je suis allée voir Pierrot le Fou comme n'importe quel autre film, sans savoir qui était Godard, j'ai pris une place parce que le titre m'avait plu. Et pour la première fois de ma vie, j'ai vu que le cinéma était un art. En sortant de la salle, j'ai dit que je voulais faire des films[12]. »

Hommages et références

  • En clin d'œil au film, Mathieu Kassovitz a intitulé son premier film : Fierrot le pou.
  • Dans la scène de voiture de Sin City (film de Robert Rodriguez) qu'il a réalisée, Quentin Tarantino utilise le même procédé que Godard pour évoquer le défilement de la route. Des spots de différentes couleurs passent alternativement de chaque côté du pare-brise.
  • Leos Carax fait de nombreuses références à Pierrot le Fou dans Les Amants du Pont-Neuf.
  • Laurent Baffie fait sans doute[Interprétation personnelle ?] un clin d'œil à Pierrot le Fou dans son film Les Clés de bagnole en commandant systématiquement deux demis.[réf. nécessaire] Ferdinand-Pierrot, qui a la même habitude dans le film de Godard, explique qu'il aime, après en avoir fini « un », qu’il lui en reste « la moitié ».
  • Le groupe de metal français Hypno5e a intégré certains passages vocaux du film dans ses compositions.[Lesquelles ?]
  • Un épisode de la série d'animation japonaise Cowboy Bebop est intitulé Pierrot le Fou en version française et anglaise (le titre original est sans rapport, se traduisant littéralement par « Le requiem du clown »).
  • Un morceau du groupe japonais Yellow Magic Orchestra, sur l'album éponyme de 1978, porte le nom de Pierrot le Fou. C'est la troisième référence à Godard sur cet album.[précision nécessaire]
  • C'est également en référence à ce titre que le blog de Pierre Ménès est intitulé Pierrot le Foot.
  • Un an après la sortie du film, Nino Ferrer reprend dans sa chanson Madame Robert, en l'adaptant quelque peu, une réplique aussi célèbre qu’insolite de Belmondo  : « Heureusement que j’aime pas les épinards, sans ça j’en mangerais, or je peux pas les supporter » devient dans la chanson « Mon frère n'aime pas les épinards / Et c'est heureux pour mon frère, car / S'il les aimait, il en mangerait / Et il ne peut pas les supporter ».
  • On peut voir dans la dernière scène du film "peut-être" de 1999, un poster dans la chambre d'Arthur : il s'agit de l'affiche de Pierrot le fou, un clin à Jean-Paul Belmondo qui joue lui-même dans le film de Klapich.

Distinctions

Notes et références

  1. L'histoire du film est librement inspirée du roman ; voir « Jean Luc Godard, cinéaste-écrivain », par Julien d'Abrigeon.
  2. Nicolas Brenez et Édouard Arnoldy, « Cinéma / Politique - Los Angeles, 1968 », Débordements, (lire en ligne).
  3. Núria Aidelman, « Les Archives de script de Suzanne Schiffman : Godard au travail dans Pierrot le Fou », La bibliothèque du film, (lire en ligne, consulté le ).
  4. Olivier Père, « Pierrot le Fou », Les Inrockuptibles, (lire en ligne, consulté le )
  5. Cette citation est apocryphe. L'original est : « La vraie vie est absente » (Une saison en enfer, Délires I). Elle a souvent été citée sous cette forme erronée, popularisée par le film de Godard.
  6. (en) Sally Shafto, « Leap into the Void: Godard and the Painter », Senses of cinema, no 39, (lire en ligne, consulté le ).
  7. Louis Chauvet, « Venise : Louis Chauvet », Le Figaro,
  8. Louis Aragon, « Qu'est-ce que l'art, Jean-Luc Godard ? », Les Lettres françaises, no 1096, (lire en ligne, consulté le )
  9. Cf. les propos de Jean-Luc Godard à l'occasion de la sélection de Pierrot le Fou à la Mostra de Venise « Jean-Luc Godard et Anna Karina à la Mostra de Venise 1965 », Archive INA.
  10. Godard au travail, d'Alain Bergala.
  11. Boris Gobille, « Un défi à la loi ? Les controverses autour de Pierrot le fou de Jean-Luc Godard », Quaderni. Communication, technologies, pouvoir, no 86, , p. 9–21 (ISSN 2105-2956, DOI 10.4000/quaderni.859, lire en ligne, consulté le )
  12. Frédéric Strauss, « Chantal Akerman : Une cinémathèque imaginaire », La bibliothèque du film, (lire en ligne, consulté le ).

Annexes

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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