Ligue du Bien public

La ligue du Bien public[1] est une révolte de princes, menés par Charles, comte de Charolais, et d'autres grands seigneurs, contre l’accroissement des pouvoirs du roi de France Louis XI. Elle dure de mars à octobre 1465.

Pour les articles homonymes, voir Ligue et Bien public (homonymie).

Formation

Le serment des princes réunis au sein de la Ligue du Bien public.
Maître de la Chronique scandaleuse, Interpolation de la Chronique de Louis XI de Jean de Roye (dite Chronique scandaleuse), Paris, BnF, début du XVIe siècle.

Coalition menée par des princes contre la politique de Louis XI qui veut briser leur volonté d’indépendance, la ligue du Bien public est une révolte féodale contre l’autorité royale, contraignant le roi à une riposte militaire.

Avec à sa tête Charles, comte de Charolais, rendu furieux par la vente à Louis XI des villes de la Somme par son père, le duc de Bourgogne Philippe le Bon, la haute noblesse rejette les décisions royales qui réduisent ses prérogatives. Ainsi le duc de Bourbon, favori de Charles VII, le père de Louis XI, et ayant beaucoup d'influence au Conseil du roi, perd cette prérogative au profit des conseillers roturiers ou de petite noblesse de Louis XI.

Les grands féodaux forment ce qu'ils appellent la « ligue du Bien public » et affirment dans un manifeste, publié le , vouloir remédier au « désordonné et piteux gouvernement », « masquant leurs intérêts féodaux, que Louis XI veut abolir, sous un nom d'intérêt général »[2]. En entrant en guerre contre le roi, la coalition projette d'installer à sa place un régent, qui serait le faible Charles de France, duc de Berry (18 ans) et frère cadet de Louis XI. Le roi répond d'ailleurs, dès le , par un contre-manifeste.

La ligue du Bien public réunit :

Guerre du Bien public

Pour se défendre, Louis XI fait appel à Francesco Sforza, duc de Milan, et propose aux Liégeois une alliance militaire contre leur ennemi commun, alliance signée le .

Louis XI, qui bénéficie du soutien efficace de Gaston IV de Grailly, comte de Foix et de Béarn, dispose d'une armée de 30 000 hommes. Dès le début des hostilités, en mai et , il marche contre le Bourbonnais, au centre du pays. Puis il entame une course vers la capitale, les armées bretonne et bourguignonne s’étant donné rendez-vous à Saint-Denis, début juillet. Avant qu'elles ne puissent joindre leurs forces, le roi choisit d'affronter l'armée bourguignonne conduite par le comte de Charolais. Le choc se produit à Montlhéry, au sud de Paris, le . Les péripéties de la bataille sont confuses (et avec rebondissements) et son issue suffisamment indécise pour que les deux partis s'attribuent la victoire : le comte de Charolais, parce qu'il est resté maître du terrain, Louis XI, parce qu'il a fait reculer l'armée bourguignonne, avant de prudemment ordonner une retraite stratégique pendant la nuit et de ramener à Paris une armée « victorieuse » (bien que son oncle le comte du Maine ait fui le champ de bataille avec un tiers des troupes royales). Le roi peut ainsi raffermir dans la capitale son autorité chancelante.

Néanmoins, Louis XI sort globalement affaibli de l’affrontement, d'autant qu'il n'a pu empêcher la jonction, le , des deux armées bourguignonne et bretonne, bientôt rejointes par les comtes d’Armagnac et d’Albret et le duc de Lorraine.

Entré dans Paris le , Louis XI y organise la défense. Le siège est mis devant Paris par les féodaux. Louis XI sort de la ville le , rejoint Rouen d’où il rallie une partie du royaume et assemble des provisions, qu’il fait parvenir à Paris le , avec une armée puissante en renfort. Une trêve est signée le , n'empêchant pas les ligueurs de prendre Pontoise et Rouen. Les combattants des deux bords ne savent trop comment en finir. Louis XI feint de s'incliner.

Paix

Par trois traités, Louis XI fait la paix et « le bien public », suivant l'expression du chroniqueur Philippe de Commynes, « fut converti en bien particulier ».

Le roi de France Louis XI accorde à son frère Charles, duc de Berry, le duché de Normandie ; il rend au duc de Bourgogne (représenté par le comte de Charolais) les villes de la Somme, qui pourraient être rachetées à ses héritiers, et lui cède en toute propriété Boulogne, Guînes, Roye, Péronne et Montdidier ; il donne au duc de Lorraine (Jean de Calabre) les villes de Mouzon, Sainte-Menehould et Neufchâteau ; il abandonne au duc de Bretagne la régale et une partie des aides, lui rend Montfort et Étampes ; au duc de Bourbon, plusieurs seigneuries en Auvergne ; au duc de Nemours, le gouvernement de Paris et de l'Île-de-France ; au comte d'Armagnac, diverses châtellenies du Rouergue ; il fait Tanguy du Chastel grand écuyer, le comte de Saint-Pol connétable, etc. Une commission de 36 membres, présidée par Dunois, devait réformer les abus de l'administration. Mais Louis XI ne respecta pas longtemps les conditions qui lui étaient imposées.

Suites

Louis XI pardonne à certains ligueurs, mais en punit également d'autres :

En 1468, Charles le Téméraire forme une nouvelle ligue avec Charles de France, Jean d’Alençon et François II de Bretagne et le soutien d'Édouard IV d'Angleterre. Mais Louis XI, fort du soutien des états généraux réunis à Tours en avril[3], réussit à séparer François II et Charles de France des ligueurs (traité d'Ancenis).

Notes et références

  1. Ligue du Bien public, page 188 dans Histoire des Français de Théophile Lavallée, historien et professeur de statistique à l'école spéciale militaire de Saint-Cyr de 1832 à 1869.
  2. Jean Débordes, Les Mystères de l'Allier : histoires insolites, étranges, criminelles et extraordinaires, Éditions de Borée, , 467 p. (lire en ligne), p. 205.
  3. http://www.culture.gouv.fr/Wave/image/archim/Pages/03884.htm.

Voir aussi

Bibliographie

  • Olivier Bouzy, La révolte des nobles du Berry contre Louis XI : guerre et économie en 1465, Paris, L'Harmattan, , 276 p. (ISBN 2-296-01035-0, présentation en ligne).
  • Jean Favier, Louis XI, Paris, Fayard, , 1019 p. (ISBN 2-213-61003-7, présentation en ligne).
  • Jacques Heers, Louis XI : le métier de roi, Paris, Perrin, , 430 p. (ISBN 2-262-01233-4).
    Réédition : Jacques Heers, Louis XI, Paris, Perrin, coll. « Tempus » (no 40), , 430 p., poche (ISBN 2-262-02084-1).
  • Paul Murray Kendall (trad. Éric Diacon), Louis XI : « l'universelle araigne » [« Louis XI: The Universal Spider »], Paris, Fayard, , XXVIII-584 p. (ISBN 2-213-00038-7).
    Réédition : Paul Murray Kendall (trad. de l'anglais par Éric Diacon), Louis XI : l'universelle araigne [« Louis XI: The Universal Spider »], Paris, Pluriel, coll. « Pluriel », , 702 p., poche (ISBN 978-2-8185-0428-4).
  • Élodie Lecuppre-Desjardin, « Avant un an, il s'en repentira. L'argumentaire bourguignon déployé à la veille de la guerre du Bien public. Petite étude sur la prise de décision à la fin du Moyen Âge », Publications du Centre européen d'études bourguignonnes, vol. 57 « Rencontres de Münster (-) : Les cultures de la décision dans l'espace bourguignon : acteurs, conflits, représentations », , p. 157-166 (DOI 10.1484/J.PCEEB.4.2017032).
  • Michel Rimboud, « Un épisode décisif de la guerre du Bien public : le passage de la Seine à Moret par les armées bourguignonne et bretonne, - », dans Patrick Gilli et Jacques Paviot (dir.), Hommes, cultures et sociétés à la fin du Moyen Âge : Liber discipulorum en l'honneur de Philippe Contamine, Paris, Presses de l'Université de Paris-Sorbonne, coll. « Cultures et civilisations médiévales » (no 57), , 413 p. (ISBN 978-2-84050-845-8, présentation en ligne), p. 293-306.

Articles connexes

Liens externes

  • Plan de la bataille de Montlhéry du .
  • Récit de la bataille de Montlhéry par Paul Murray Kendall dans sa biographie de Louis XI .
  • Lettres de Louis XI (traité de Conflans), Paris, le (Ordonnances des rois de France de la troisième race, tome XVI, p. 355) .
  • Lettres patentes de Louis XI (apanage pour le duc de Normandie), Paris le (Ordonnances des rois de France de la troisième race, tome XVI, p. 398) .
  • Lettres de Louis XI (traité de Caen), Caen, le (Ordonnances des rois de France de la troisième race, tome XVI, p. 448) .
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