Château de Clermont (Loire-Atlantique)

Le château de Clermont, construit entre 1643 et 1649, est un château situé sur la commune du Cellier[1], dans le département français de la Loire-Atlantique.

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Château de Clermont

Façade nord-ouest.
Période ou style style Louis XIII
Début construction 1643
Fin construction 1649
Destination initiale Habitation
Protection  Inscrit MH (1941)
Coordonnées 47° 19′ 31″ nord, 1° 20′ 02″ ouest
Pays France
Région historique Bretagne
Région Pays de la Loire
Département Loire-Atlantique
Commune Le Cellier
Géolocalisation sur la carte : Loire-Atlantique
Géolocalisation sur la carte : France

Inscrit monument historique le 14 novembre 1941[2], ce château est connu pour avoir été la propriété de l'acteur Louis de Funès, dont il fut la dernière résidence jusqu'à la mort du comédien en 1983. De 2014 à 2016, l'orangerie du château accueille le « musée de Louis », consacré à l'acteur.

Histoire

XVIIe – XIXe siècles

Château de Clermont face à un océan de nuages. Automne 2018. Le Cellier, Loire-Atlantique.

Le château de Clermont occupe l'emplacement de l'ancien monastère de Mont-Clair, détruit par les Normands en 845. Une seigneurie de ce nom, probablement fondée par l'évêque de Nantes à une date inconnue, aurait eu comme premier titulaire Thébaud de Clairmont. Elle est citée en 1385 avec comme seigneur Richard de Bourcigné, dont les descendants conservèrent la terre jusqu'en 1523[3].

Les Chenu, constructeurs (vers 1640-1711), et leurs descendants (1711-1853)

La fille de Christophe Brécel, sénéchal de Nantes, apporta le domaine en dot à Jehan Chenu, « seigneur de l'Endomière, Bois-Garnier et Saint-Philbert en Anjou ».

L'édifice actuel a été bâti par René Chenu, seigneur de Lendormière, Clermont, Saint Philbert,, de 1643 à 1649, au lendemain de la victoire de Rocroy (), où celui qui sera appelé plus tard le « Grand Condé » et qui ne portait alors que le titre de duc d'Enghien, sauva le trône de Louis XIV enfant et mérita une immense faveur. Il reflète l'enthousiasme d'une période remplie de gloire.

Cette famille de grands administrateurs militaires ajouta à son nom celui de cette terre.

René Chenu, le père (1599 - 1672), le constructeur du château, où il décède, gentilhomme de la Chambre du Roi, fut longtemps, au nom du duc de Montmorency, puis du prince de Condé, gouverneur des places fortes d'Oudon et de Champtoceaux qui commandaient le cours de la Loire en amont, maître des Eaux et forêts des châtellenies d'Oudon et Champtoceaux.

Les Chenu étaient vassaux des princes de Condé, possesseurs de nombreux biens dans l'Ouest de la France et ce cas de sujétion, si fort sous l'Ancien Régime, se doublait d'une vive amitié personnelle. René Chenu était le contemporain et le fidèle allié d'Henri II de Bourbon, prince de Condé. Les dates de naissance et de décès d'Hardy Chenu coïncident peu ou prou avec celles du Grand Condé, dont il fut le gentilhomme de la Chambre.

Une tradition bien affirmée veut qu'un Chenu, père ou fils, ait dans un combat sauvé la vie de son seigneur, qui voulait lui manifester sa reconnaissance. En tout cas, la construction du château, dont les proportions ont quelque chose de grandiose, témoigne de munificences princières[4].

Clermont reste dans la descendance des Chenu pendant deux siècles.

René Chenu a pour successeur dans ses charges son fils Hardy Chenu (1621 - 1683), "conducteur et visiteur général des fortifications, villes, châteaux et places fortes de Bretagne"[4]. Ce dernier a pour successeur dans ses charges et comme seigneur de Clermont, son fils, François Chenu, né à Clermont en 1649 , décédé également à Clermont en 1711, laissant deux filles. L'aînée d'entre elles, Madeleine Chenu, mariée au Cellier en 1701 avec Germain Nicolas, seigneur de Claye, hérite de Clermont.

Tous deux n'ont également que des filles, dont l'aînée, Madeleine Nicolas de Claye (1701-1775), décédée à Clermont, y épouse en 1729 François de La Bourdonnaye, seigneur de Liré, commissaire aux États de Bretagne.

Leur successeur, leur fils, Charles Bertrand de La Bourdonnaye, guidon des gens d'armes de la Reine, décède sans postérité en 1792 [5].

Révolution et Restauration

Durant la Révolution française, le château de Clermont est séquestré et occupé un temps par les troupes républicaines.

Après la Révolution, Louis Marie Juchault des Jamonières, fils de Rosalie de La Bourdonnaye, elle-même sœur de Charles Bertrand de La Bourdonnaye, parvient à en reprendre possession [6].

Le 2 janvier 1814, il reçoit le titre de Baron de l'Empire [7].

Par lettres patentes du Roi Charles X, le 28 janvier 1826, Louis Marie Juchault des Jamonières reçoit le titre de baron héréditaire, avec institution d'un majorat sur sa terre de Clermont [8]. Il meurt en 1842. En 1853, l'aîné de ses fils, Antoine baron Juchault des Jamonières vend Clermont au baron de Lareinty.

Celui-ci, Henri Baillardel de Lareinty, sera sénateur et président du conseil-général de la Loire Atlantique, mais revend le château de Clermont dès 1861 à Léon Nau de Maupassant [4]. Ce dernier, malgré son homonymie, est issu d'une famille de Saumur sans aucun lien de parenté connu avec l'écrivain Guy de Maupassant, dont la famille est d'origine lorraine [9].

Propriété de la famille Nau de Maupassant (1860-1963)

Il est tour à tour la propriété de :

  • 1860-1880 : Léon Nau de Maupassant (1810- 1880), épouse le à la basilique sainte-Clotilde à Paris, Mélanie-Élisabeth de Hübner (1834- 1908) ;
  • 1880-1908 : Mélanie-Élisabeth de Hübner (1834- 1908), son épouse ;
  • 1908-1941 : Charles Nau de Maupassant (1866- 1941), leur fils, épouse le à Paris, Marie Barthélémy (1884- 1963) ;
  • 1941-1963 : Marie Barthélémy (1884- 1963), son épouse, morte sans enfant.
Le château de Clermont, vallée de la Loire, Le Cellier, Loire-Atlantique.

Épouse du « comte » Charles Nau de Maupassant[10], Marie Barthélémy est la tante paternelle de Jeanne de Funès de Galarza, née Jeanne Barthélémy, épouse du comédien Louis de Funès. Le couple de Funès se rend souvent en vacances au domaine de Clermont dès les années 1940. À la mort de Marie Barthélémy en 1963, Jeanne de Funès hérite de la moitié du château en indivision, et d'une ou plusieurs fermes du domaine[11]. Durant plusieurs années, les négociations qu'elle entreprend auprès des six autres co-héritiers pour acheter l'autre moitié échouent[12].

Propriété de la famille de Funès (1967-1986)

L'intégralité du domaine est finalement mise aux enchères le [12],[13]. Devenu une grande vedette, et alors en plein succès commercial de La Grande Vadrouille, Louis de Funès décide de l'acquérir pour redonner à son épouse le château de son enfance, elle qui a vécu avec lui ses années de galère alors qu'elle venait d'un milieu bourgeois. Face au baron Charles Juchault des Jamonières, le notaire mandaté par Louis de Funès remporte les enchères pour 830 000 francs de l'époque (soit environ 1 080 000 euros en 2020[14]), soit à peu près ce qu'il peut toucher pour un film à la même époque[15].

Le château, inhabité depuis six ans et délabré, nécessite deux ans de travaux et restaurations[12]. L'acteur se sépare de sa maison de campagne à Saint-Clair-sur-Epte et de son appartement d'été à Hyères[16]. Cette retraite loiraine, dont il apprécie le calme qu'il trouve en ces lieux, lui permet de vivre loin des journalistes et des curieux, alors que sa vie quotidienne d'antan en région parisienne n'est plus permise depuis trois ans par sa notoriété envahissante[11],[12]. Il laisse son épouse s'occuper de la restauration et se consacre plutôt aux 25 hectares de parcs et jardins l'entourant[15]. Passionné de botanique, l'acteur y entretient notamment une roseraie[16]. Il interdit la chasse sur ses terres et pratique l'agriculture biologique sur ses cultures[16]. À partir de 1976, après son double infarctus, Louis de Funès se sépare également de son appartement parisien du parc Monceau, pour ne plus vivre qu'au château[16]. Il y réside jusqu'à sa mort, survenue à l'hôpital de Nantes en 1983[16].

Le domaine comporte alors 30 pièces, 365 fenêtres, d'importantes dépendances, un parc de 30 hectares.

Sa famille ne pouvant entretenir un tel bâtiment, le vend en 1986 à l'Association pour le Développement des Alternatives à l'Hospitalisation (ADAH).

Propriété de l'ADAH (1986-2005)

L'ADAH est une association qui s'occupe de personnes handicapées atteintes de troubles mentaux[17].

L'ADAH y installe ses pensionnaires et les logis extérieurs sont alors transformés en ateliers afin d'occuper ces derniers : couture, taille de pierre, menuiserie, blanchisserie. Une autre partie est transformée en salle de restaurant, une autre encore en salle des arts où sont tenues les manifestations artistiques du centre lors des portes ouvertes (théâtre, exposition des œuvres de l'atelier arts plastiques et manifestations musicales classiques extérieures) et une partie de la bâtisse est réhabilitée afin d'y accueillir l'organisation de divers évènements (mariages, congrès…).

Dans les jardins, l'association conserve la roseraie de Louis de Funès et l'utilise comme atelier d'horticulture.

Cependant, l'ADAH, face à des problèmes financiers, doit se résoudre à se séparer de Clermont, qui est finalement acheté en 2005 par un entrepreneur immobilier.

Celui-ci transforme le château pour y aménager et revendre 45 logements privés.

Depuis 2005

À la fin de l'été 2009 les premiers résidents emménagent dans les appartements créés dans le château.

De 2014 à 2016, l'orangerie a accueilli « Le Musée de Louis », créé par une association locale en vue d'entretenir la mémoire et l'œuvre de Louis de Funès. Ne pouvant acquérir, faute de subventions, les murs des locaux qu'il occupe, que leur propriétaire souhaite vendre, le musée doit fermer ses portes le 30 octobre 2016 [18].

Description

Château de Clermont, Le Cellier, Loire-Atlantique.

Dans ses grandes lignes, le château est resté intact depuis les années de sa construction, pendant la régence d'Anne d'Autriche et la minorité de Louis XIV.

Sa façade Sud, qui domine la Loire et offre une vue panoramique sur le pays des Mauges et le vignoble du Muscadet (pays du Loroux), est restée telle que la montre le dessin de la collection Gaignières, conservé au cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale de France.

Quant à la façade Nord, à laquelle mène une allée ombragée perpendiculaire à la rue de Clermont qui conduit au centre du bourg du Cellier distant d'un kilomètre environ, elle est demeurée encadrée par ses ailes d'origine. Le château comporte 365 ou 366 fenêtres et 30 pièces : il est entouré d'un parc de 3[19] hectares et de 17 hectares de vignes[4].

La chapelle du château date du XVIIe siècle, la grange du XIXe siècle[4].

Architecture

Jean Jacques Delusse, 1801.
Dessin du château réalisé au XVIIe ou XVIIIe siècle.

Le château de Clermont offre les trois grandes caractéristiques du style Louis XIII :

  • appareillage en brique et pierre, d'une teinte rose qui adoucit les lignes d'un tracé sévère ;
  • toitures en ardoise des divers corps de logis, distinctes et indépendantes les unes des autres ;
  • pavillon central servant de cage à l'escalier d'honneur, surélevé d'un attique et dominant les autres constructions.

À l'origine, ce pavillon central était surmonté d'un lanternon où se trouvait sans doute une cloche pour sonner l'alerte en cas de besoin[4].

Face au visiteur venu par la grande avenue et qui s'apprête à traverser les douves sèches qui précèdent la cour d'honneur, les deux ailes se terminent au premier plan par deux pavillons carrés et jumeaux que l'on peut qualifier de pavillons d'accueil[4].

Les ailes

Sur les côtés, les deux ailes renferment des pièces de servitude : chambres pour le personnel, remises, écuries, serres, tout cela placé directement sous l'œil du maître. À la jointure avec le corps principal se trouvent, à droite les cuisines, à gauche la chapelle, dont l'autel a conservé son beau retable d'origine. Au milieu des ailes s'ouvrent des passages voûtés qui conduisent à droite aux jardins, à gauche à la cour de ferme. Leurs deux claires entrées allient commodité et rupture de la monotonie des lignes. Une galerie s'étire au premier étage de l'aile droite[4].

Les ailes de Clermont sont très différentes de celles des châteaux du début du XVIIe siècle. Jusqu'en 1624 en effet, ils étaient conçus avec des ailes de même hauteur ou presque que le corps principal, si bien que leur cours d'honneur offraient un aspect clos et fermé. On y sentait l'antique besoin de se protéger. Le Rocher-Portail, près de Fougères, est un rare témoin intact de ce genre d'architecture[4].

Clermont est l'un des derniers châteaux à présenter encore des ailes rattachées au corps principal de logis. Elles sont cependant très allégées, réduite en hauteur et italianisées, ce qui est naturel à l'époque où tant d'architectes français font leur instruction à Rome et en Vénétie.

Il est en effet édifié avant 1650, année à partir de laquelle, sous l'impulsion des constructeurs de Vaux-le-Vicomte, les corps principaux des châteaux se détacheront des ailes et adopteront définitivement pour la plupart un plan dans lequel François Mansart à Beaumesnil s'est montré précurseur[4].

Mélange de styles

On peut observer que, dans un plan à l'époque très moderne, l'architecte a maintenu, tant sur la façade Nord que sur la façade Sud des tourelles d'encorbellement et que, du côté de la Loire, il a utilisé des mâchicoulis comme points d'appuis pour les hautes toitures de ses pavillons d'angles. Ce sont là des éléments de styles antérieurs au XVIIe siècle mais qui, dans le cas présent, se marient dans un harmonieux ensemble[4]

Notes et références

  1. rue de Clermont en direction du village de Vandel, à 27 km à l'est de Nantes
  2. « Notice du château de Clermont », notice no PA00108578, base Mérimée, ministère français de la Culture. Consulté le 23 septembre 2009
  3. Claude Frégnac, Merveilles des châteaux de Bretagne et de Vendée (Hachette-Réalités, 1970, pp.172 à 175 - arch.pers.).
  4. Jean de la Robrie, extrait de Vieilles maisons françaises, n° 49, juillet 1971.
  5. Michel Nuss de Rijk, Généalogie de la Famille Jochaud du Plessix, tome 2, Paris, l'auteur, , 428-408 p., p. 166-175
  6. Michel Nuss de Rijk, Généalogie de la Famille Jochaud du Plessix, tome 2, Paris, l'auteur, , 428-408 p., p. 168-172
  7. Vicomte Albert Réverend, Armorial du Premier empire, Titres, Majorats et armoiries concédés par Napoléon 1er, tome deuxième, Paris, Librairie Honoré Champion, rééd. 1974, p. 355-356
  8. Vicomte Albert Réverend, Titres, Anoblissements et Pairies de la Restauration, 1814-1830, tome quatrième, Paris, Librairie Honoré Champion, rééd. 1974, p. 80-81
  9. René Rouault de La Vigne, « Les ancêtres de Guy de Maupassant, leur noblesse discutée à tort », Revue des Sociétés Savantes de Haute Normandie,, , p. 77-99
  10. La famille Nau avait obtenu de relever le nom de Maupassant pour en éviter l'extinction et usait d'un titre de fantaisie de comte (Pierre-Marie Dioudonnat, Simili-Nobiliaire français, Sedopols, Paris, 2002, notice « Nau de Maupassant »).
  11. de Funès et de Funès 2005, p. 129.
  12. Loubier 2014, p. 295-300.
  13. « Louis de Funès acquéreur du château de Clermont près de Nantes », sur www.lemonde.fr, Le Monde, (consulté le ).
  14. Chiffres de l'inflation en France d'après l'INSEE. Coefficient de transformation de l'euro ou du franc d'une année, en euro ou en franc d'une autre année – Base 1998 et Base 2015. Dernière mise à jour à l'indice de 2020.
  15. Dicale 2009, p. 346.
  16. Dicale 2009, p. 347.
  17. « Château de Clermont - De célèbres propriétaires... », www.lecellier.fr (consulté le )
  18. « Clap de fin pour le musée Louis de Funès »
  19. Ou 30, comme indiqué plus haut ?

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

Lien externe

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