Rafle des notables
La rafle dite « des notables » est l'arrestation à Paris, le , par la police française et la Gestapo, de 743 Juifs français. Les individus arrêtés sont d'abord détenus à l’École militaire, puis transférés au camp de Royallieu, situé sur le territoire de la commune de Compiègne dans l’Oise. Ils font partie, le , du premier contingent de Juifs déportés, et la plupart d'entre eux sont assassinés au camp d'Auschwitz.
Contexte
L'ordre d'arrestation, donné le , est en lien avec une série d'attentats anti-allemands en octobre et novembre de la même année[1]. Ces attentats, qui conduisent également à l'arrestation des « fusillés de Châteaubriant », permettent à l'armée d'occupation de prétendre que les responsables des attentats sont des Juifs et des agents anglo-saxons[2] et ainsi de mener des actions de répression ciblées visant notamment les Juifs et les communistes[3]. La rafle est mentionnée allusivement par une photo et un commentaire dans L'Émancipation nationale, l'organe hebdomadaire du Parti populaire français de Jacques Doriot[4].
Arrestations
Les rafles commencent le au matin. 743 notables juifs français, parmi lesquels des chefs d’entreprises, des commerçants, des ingénieurs, des médecins, des avocats, des intellectuels sont arrêtés à leur domicile, leur nom a été trouvé dans le « fichier juif » qui recensait les Juifs français. Parmi eux, figurent le géographe Jacques Ancel, René Blum, frère de Léon Blum, le romancier Jean-Jacques Bernard[5], l'entrepreneur Natan Darty, l'écrivain Maurice Goudeket, le dentiste Benjamin Schatzman, le futur historien de la Shoah Georges Wellers. Après leur arrestation à l'aube, ils sont rassemblés dans le manège du commandant Louis Bossut, à l’École militaire[6], puis transférés au camp de Compiègne-Royallieu, dans l'Oise. Dans ce camp ne sont internés que des prisonniers juifs : outre les Juifs français, sont transférés 300 juifs étrangers en provenance du camp de Drancy où ils étaient déjà internés[7], pour atteindre le nombre de 1 000 détenus, demandé par les Nazis[8] dans la perspective d'une déportation[9]. Cette opération, qui est antérieure à la Conférence de Wannsee, à Berlin, de , et à la mise en œuvre de la « solution finale de la question juive », correspond toutefois au « projet » exposé par Hitler dès 1940 de « vider l'Europe de tous ses Juifs »[10]. Elle est supervisée par Theodor Dannecker, conseiller aux affaires juives en France de 1940 à 1942[7].
Déportations
Le , un convoi de 565 détenus juifs du camp de Drancy est constitué à la gare du Bourget à destination de Compiègne. 547 détenus de Compiègne sont ajoutés à ce convoi, dirigé par le SS Theodor Dannecker. Le convoi de 1 112 personnes, est acheminé dans des wagons de troisième classe à Auschwitz. La majorité des Juifs arrêtés le , dont René Blum et Natan Darty, sont de ce premier convoi. Benjamin Schatzman quant à lui est déporté le par le convoi no 36, Georges Wellers par le convoi no 76, du .
Postérité
- Une plaque commémorative est posée par l'association des Fils et filles de déportés juifs de France en 1999 à l'École militaire[11].
Références
- Sinclair 2020, p. 35.
- Otto Abetz, note du au ministère allemand des Affaires étrangères, citée par Sinclair, 2020, p. 35.
- Sinclair 2010, p. 36.
- « L’épuration de Paris », L’émancipation nationale, (lire en ligne)
- Jean-Jacques Bernard, Le Camp de la mort lente, Compiègne 1941-1942, [1944], rééd. Éditions Le Manuscrit, 2006.
- Sinclair 2020, p. 30.
- Sinclair 2020, p. 33.
- Sinclair 2020, p. 14.
- Sinclair 2020, p. 15.
- Laurent Joly, L'État contre les Juifs, Grassert, 2018, cité par Sinclair, 2020, p. 15.
- Sinclair 2020, p. 31.
Voir aussi
Bibliographie
- Jean-Jacques Bernard, Le Camp de la mort lente, Compiègne 1941-1942, Édition Albin Michel, Paris, 1944, 249 p. ; rééd. Éditions Le Manuscrit, 2006, 334 p. (ISBN 2748169301 et 978-2-7481-6930-0) [lire en ligne]
- Maurice Rajsfus : Drancy, un camp de concentration très ordinaire, Manya, 1991
- Anne Sinclair, La Rafle des notables, Grasset, , 128 p. (ISBN 978-2-246-82413-8 et 2-246-82413-3).
- Benjamin Schatzman, Journal d'un interné : Compiègne, Drancy, Pithiviers, 12 décembre 1941-23 septembre 1942, Paris, Fayard, , 748 p. (ISBN 2-213-62939-0).
- Jérôme Segal, « Le journal de Pierre Lévy (1886-1954) au camp de Royallieu (Compiègne) », Revue d'histoire de la Shoah, mars 2021.
Documentaire
- Pierre-Oscar Lévy, Jacky Assoun et Suzette Bloch, Premier convoi, 1992, 1h42min.
Articles connexes
Liens externes
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