République socialiste soviétique d'Ukraine
La république socialiste soviétique d'Ukraine (en ukrainien Українська Радянська Соціалістична Республіка, Oukrayins'ka Radians'ka Sotsialistytchna Respoublika ; en russe Украинская Советская Социалистическая Республика, Oukrainskaia Sovietskaia Sotsialistitcheskaia Respoublika ; littéralement « République socialiste des conseils ukrainienne »), est proclamée le comme gouvernement autonome.
Ne doit pas être confondu avec République soviétique d'Ukraine.
1919–1991
Drapeau de la RSSU. |
Sceau de l'État. |
Devise | en ukrainien : Пролетарі всіх країн, єднайтеся! (« Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! ») |
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Hymne | Hymne de la république socialiste soviétique d'Ukraine |
Statut |
État souverain (1919—1922) République socialiste soviétique (1922—1991) |
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Capitale |
De 1919 à 1934 : Kharkov. À partir de 1934 : Kiev. |
Langue(s) | Aucune, russe et ukrainien de facto, suivant les régions. |
Monnaie | Rouble soviétique ou карбованець, karbovanets en ukrainien. |
Fuseau horaire | UTC +3 |
Population | 51 706 746 hab. |
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Superficie | 603 700 km2 |
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Création. | |
Intégration à l'URSS. | |
1941 – 1944 | Occupation allemande. |
Catastrophe de Tchernobyl. | |
Déclaration d'indépendance. | |
1er décembre 1991 | Référendum d'indépendance. |
(Der) 1990 – 1991 | Leonid Kravtchouk |
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Entités précédentes :
- République soviétique ukrainienne (1918)
- République soviétique de Donetsk-Krivoï-Rog (1919)
- République soviétique d'Odessa (1919)
- République populaire ukrainienne (1920)
- Ukraine libertaire (1921)
- Pologne (1939)
- Royaume de Roumanie (Bucovine et Boudjak, 1940)
- Tchécoslovaquie (Ruthénie subcarpathique, 1945)[1]
- République populaire roumaine (îles du bras danubien de Kilia et île des Serpents, 1948)
- RSFS de Russie (Crimée, 1954)
Entités suivantes :
Elle est du au une république socialiste soviétique formant l'Union soviétique avant la dislocation en 1991. Par sa population, elle est la deuxième république fédérée de l'URSS, et par sa superficie elle était la troisième (3 % de sa superficie et 18 % de sa population). Elle était un des pays fondateurs et membre de l'Organisation des Nations unies.
Avant la RSSU (1917-1918)
Dans la foulée de la révolution de Février se constitue le une Rada (un conseil) autonome, présidée par l'historien Mykhaïlo Hrouchevsky. La Rada centrale manifeste son opposition au coup d'état bolchevik en proclamant le la République populaire ukrainienne, autonome mais non séparée de la République russe. Les bolcheviks réagissent en refusant de reconnaître la Rada centrale et en créant une série de républiques soviétiques : celle d'Odessa, celle de Donetsk, celle de Tauride (rebaptisée ensuite de Crimée) et enfin la République populaire ukrainienne des soviets (dans l'Est). Néanmoins en 1917, le parti bolchevik est peu implanté en Ukraine, exception faite des régions industrielles de l'Est et du Sud.
Après la signature de l'armistice du 15 décembre 1917 entre puissances centrales et le gouvernement bolchevik russe, la Rada proclame l'indépendance de l'Ukraine le mais dès le mois de février, les troupes bolcheviques prennent le contrôle des principales villes du pays, dont Kiev : la Rada se réfugie alors à Jytomyr. Encerclée, la république populaire d'Ukraine doit à son tour signer un traité séparé avec l'Allemagne à Brest-Litovsk le , mais il reste lettre morte car une semaine après, les États bolcheviks d'Ukraine s’unifient les 17- pour former la République soviétique ukrainienne, avec Kharkov pour capitale.
Le , en application du traité de Brest-Litovsk entre les Empires centraux et Lénine, les troupes allemandes occupent le pays. Tandis que le gouvernement de la République soviétique ukrainienne attend la fin de la guerre à Krasnodar, les Allemands jouent la carte du nationalisme ukrainien. Pour mettre la main sur les richesses du pays, alors essentielles pour leur victoire, ils contribuent à l'instauration de l'hetmanat, en la personne de Pavlo Skoropadsky.
En , les Empires centraux s'effondrent et des républiques populaires ukrainiennes se constituent dans l'ancienne Autriche-Hongrie : république des Lemkos, République houtsoule et surtout Ukraine occidentale. En Ukraine orientale, Skoropadsky est contraint de se réfugier en Allemagne en décembre 1918 tandis qu'un Directoire, présidé par Simon Petlioura, restaure la République populaire ukrainienne et combat l'Armée rouge. À partir du retrait des Allemands, plusieurs camps se disputent le contrôle de l'actuel territoire ukrainien : les troupes des états ukrainiens de l'ex-Autriche-Hongrie à l'Ouest, celles de Simon Petlioura à l'Est, ainsi que les armées tchécoslovaque, polonaise, roumaine, les armées russes blanches de Denikine, épaulées par les Français qui occupent Odessa jusqu'en , les troupes anarchistes de Makhno, et enfin, en 1919, deux Armées rouges qui cherchent à faire leur jonction : celle de la Hongrie bolchévique à l'Ouest et celle de la Russie bolchévique au Nord et à l'Est. La première sera vaincue par une coalition franco-serbo-roumano-tchécoslovaque, mais la victoire finale appartient à la seconde, et le pouvoir soviétique reprend définitivement pied en Ukraine orientale au printemps 1919.
Débuts de la RSSU
La république socialiste soviétique d’Ukraine est proclamée le comme gouvernement autonome, au 3e congrès des soviets d’Ukraine réuni du 6 au 10 mars à Kharkov. À la faveur de la progression de l'Armée rouge, les bolchéviks proclament, au nom de la république soviétique d'Ukraine, une république socialiste soviétique en Galicie (de juillet à )[2].
Cependant, le traité de Riga (1921) rattache la Galicie à la Pologne, qui reconnaît en échange la république socialiste soviétique d'Ukraine et ses frontières occidentales. L'Ukraine occidentale se trouve dès lors partagée entre la Tchécoslovaquie (Ruthénie subcarpathique), la Pologne (Galicie orientale) et la Roumanie (Bucovine septentrionale) et n'a plus aucune autonomie politique, mais est épargnée par la terreur rouge, la collectivisation, les déportations et les famines soviétiques qui sévissent en Ukraine orientale, dans la République socialiste soviétique. À l'intérieur de l'URSS, les limites de celles-ci ont été en partie modifiées, au profit de la République socialiste soviétique russe. À partir de 1924, la RSSU comprenait, en Podolie, une région autonome de langue roumaine.
La formation territoriale
Entre 1939 et 1954, l'URSS attribue à la république socialiste soviétique d'Ukraine plusieurs territoires, qui étaient auparavant rattachés soit aux pays voisins (Pologne, Roumanie, Tchécoslovaquie) soit à la république socialiste fédérative soviétique de Russie.
- La Galicie orientale, polonaise, est annexée à l'Ukraine conformément au Pacte germano-soviétique de 1939. L'Armée rouge s'en empare en . Le Soviet suprême de l'Union soviétique vote son incorporation à l'Ukraine le . Cette annexion est entérinée par les accords de Yalta et la conférence de Potsdam en 1945. Il s'agit des régions de Lvov, Tarnopol et Stanislav (aujourd'hui Ivano-Frankivsk).
- La Bucovine du Nord (aujourd'hui Oblast de Tchernivtsi) est occupée par l'Armée rouge en puis annexée par l'URSS conformément au Pacte germano-soviétique. Elle s'était unie à la Roumanie en 1918, en dépit du vote contraire de la minorité ukrainienne. On rattache en outre à l'Ukraine un arrondissement de la Moldavie occidentale roumaine, celui de Herța.
- Le Boudjak (Sud de la Bessarabie) est dans le même cas que la Bucovine du Nord. Il était devenu roumain en 1918 par l'union de la République démocratique moldave au royaume de Roumanie, mais dans le Boudjak les Bulgares, Russes et Ukrainiens étaient ensemble plus nombreux que les Roumains, et en 1940 il n'entra donc pas dans la composition de la nouvelle république socialiste soviétique de Moldavie, mais de la république socialiste soviétique d'Ukraine.
- Lors du rattachement de la Bucovine du Nord et du Boujak, les deux tiers « Est » de la région autonome ukrainienne de langue roumaine reviennent dans le giron territorial ordinaire de la république socialiste soviétique d'Ukraine, le tiers « Ouest » étant attribué à république socialiste soviétique de Moldavie.
- La Transcarpatie est cédée par la Tchécoslovaquie à l'URSS le . Elle reçoit le nom de Zakarpatska oblast, c'est-à-dire « oblast de Transcarpatie ».
- Cinq îles situées côté roumain du talweg du bras danubien de Kilia (frontière soviéto-roumaine fixée par le traité de paix de Paris) et l'île des Serpents en mer Noire (roumaine depuis 1878 et qui n'avait pas été annexée en 1940) ont été rattachées à l'Ukraine soviétique le .
- Enfin la Crimée (oblast de Crimée), qui appartenait à la république socialiste fédérative soviétique de Russie, est cédée à l'Ukraine par Khrouchtchev en 1954 à l'occasion du tricentenaire de l'union entre la Russie et l'Ukraine — plus exactement l'Ukraine de la rive gauche du Dniepr.
Selon l'article 18 de la constitution de 1959 de la RSS d'Ukraine, « La république socialiste soviétique d'Ukraine est composée des oblasts de : Zaporojie, Volhynie, Vinnitsa, Odessa, Ivano-Frankovsk, Ruthénie subcarpatique, Tarnopol, Tchernivtsi, Tchernigov, Tcherkassy, Soumy, Rivne, Poltava, Mykolaïv, Lviv, Lougansk, Kirovograd, Kiev, Khmelnytsky, Kherson, Kharkov, Jytomyr, Drohobytch, Stalino, Dniepropetrovsk, Crimée ».
La RSS d'Ukraine fut un des membres fondateurs de l'Organisation des Nations unies en 1945. Elle avait un siège à l'Assemblée générale de l'ONU, qui lui fut attribué le , à l'instar de la RSS de Biélorussie, aux côtés de l'Union des républiques socialistes soviétiques. L'URSS disposait ainsi de trois voix dès la fondation de l'ONU.
Le rôle de la RSS d'Ukraine dans l'Union soviétique
Culture
L'URSS était composée de quinze républiques dites « unionales » (союзная республика) qui possédaient chacune une constitution propre, un drapeau, un hymne et des dirigeants locaux. Drapeaux et hymnes n'étaient cependant pas ceux que les nations en question avaient eu avant la formation de l'URSS, interdits car assimilés au « nationalisme bourgeois », mais de nouveaux symboles créés par les bolchéviks et liés à l'identité communiste de l’homo sovieticus. La RSS d'Ukraine ne dérogeait pas à la règle. Elle disposait d'universités prestigieuses en URSS, comme l'université nationale Taras-Chevtchenko de Kiev, l'université nationale de construction et d'architecture de Kiev, l'université nationale polytechnique de Lviv, l'Université Ivan Franko de Lviv), l'université nationale de Kharkiv ou l'université nationale d'économie de Kharkiv. De ce fait, plusieurs dirigeants soviétiques étaient originaires d'Ukraine ou y avaient passé leur jeunesse, comme Nikita Khrouchtchev ou Léonid Brejnev.
Cependant, comme ailleurs en URSS, la russification poussait la population et l'enseignement à utiliser plutôt le russe que l'ukrainien (ainsi, le régime soviétique ne finançait que très peu ou pas les écoles ukrainophones, de toute façon minoritaires). L'impact fut considérable sur les Ukrainiens de la partie anciennement polonaise, tchécoslovaque ou roumaine, qui avaient conservé l'usage de l'ukrainien y compris littéraire et savant (langue ausbau) et qui voyaient dans cette russification un « génocide culturel » (voir l'Organisation des nationalistes ukrainiens dans ces régions), tandis que la majorité des autres Ukrainiens parlait volontiers le russe à 90 %, synonyme depuis trois siècles de tremplin social. Sur ces derniers, c'est la « crise ukrainienne » commencée en qui a eu un impact considérable, en les obligeant à choisir entre l'identité et la langue russe ou l'identité et la langue ukrainienne dans le contexte d'un affrontement géopolitique et militaire meurtrier qui les dépasse[3].
Agriculture
Les débuts de l'agriculture intensive en RSS d'Ukraine ont commencé sous Staline à l'époque de la collectivisation forcée des terres de toute l'URSS et de la répression des paysans accusés d'être des koulaks (« dékoulakisation »). La famine s'en est suivie. La propagande du régime affirme que cette collectivisation forcée aurait apporté des moyens modernes dans toute l'URSS et particulièrement en Ukraine (achat de tracteurs européens, construction de silos à grains en masse), mais en fait elle a eu un impact catastrophique sur la production agricole de toute l'URSS et spécialement en Ukraine, principale terre à blé. Dans les années 1932 et 1933, une seconde famine a sévi dans le pays, ainsi que cela se produisit dans d'autres régions de Russie et d'Asie centrale. En Ukraine, cette grande famine, appelée Holodomor, aurait fait entre 4 et 7 millions de morts ukrainiens. Après la Seconde Guerre mondiale l'Ukraine souffrit d'une troisième famine qui retarda la reconstruction, et il fallut la déstalinisation et la priorité donnée par Nikita Khrouchtchev à la production sur l'« activité révolutionnaire » de la police politique, pour que l'Ukraine redevienne le grenier à blé de l'URSS, notamment grâce à ses Terres Noires, et produisant, à partir de 1955, 30 % du blé soviétique, 40 % de la betterave (notamment sucrière), et 40 % de la pomme de terre. En 1991, la République réalisait 35 % de la production agricole soviétique, pour une superficie totale de seulement 3 %.
Industrie
Outre une agriculture forte, la RSS d'Ukraine hébergeait un complexe industriel puissant. Avant la guerre, 72,4 % de l'acier et 68,6 % du charbon de l'URSS étaient produits en Ukraine, principalement dans le Donbass. Ce n'est qu'après la Seconde Guerre mondiale, et après l'évacuation de nombreuses usines devant l'avancée allemande, que d'autres régions soviétiques devinrent de grandes zones industrielles. En effet, Staline pensait que centraliser toute la production industrielle de l'URSS en Ukraine était une erreur, puisqu'en cas d'attaque de l'Ouest, l'Ukraine aurait été touchée la première, privant l'URSS de son industrie. En 1991, la RSS d'Ukraine produisait 41,7 % de l'acier, et 31,3 % du charbon. Malgré tout, la RSS d'Ukraine est restée la clef de voûte de l'industrie soviétique, grâce à notamment à des entreprises comme Antonov. En 1991, la RSS d'Ukraine réalisait 32 % de la production industrielle de l'Union soviétique.
Population et démographie
La RSS d'Ukraine compte environ pour 18 % de la population totale de l'URSS, ce qui en faisait la république la plus peuplée après la Russie, avec une population trois fois inférieure à celle de la Russie, mais pour un territoire 28 fois plus petit, si l'on compte la Sibérie faiblement peuplée. Suite aux grandes déportations des années 1930 et 1945-55, de nombreux Ukrainiens vivent hors d'Ukraine, particulièrement en Russie et au Kazakhstan.
Entre 1945 et 1991, les populations française et ukrainienne sont de tailles comparables, la France ayant connu après-guerre le baby-boom, et l'Ukraine l'afflux d'ouvriers et de cadres russes venus pour remettre en état les industries (notamment du Donbass et des grandes villes). La réindustrialisation de la RSS d'Ukraine attirait en outre nombre d'ouvriers venus des républiques pauvres d'URSS (Biélorussie, Moldavie, Caucase, Asie centrale). Cet afflux a compensé les pertes des famines soviétiques antérieures à 1948 et des génocides des occupants nazis (Shoah en Ukraine), pertes en raison desquelles la démographie ukrainienne est faible par rapport aux autres républiques soviétiques, avec un accroissement annuel moyen de 0,8 %.
Notes et références
- C'est par le traité soviéto-tchécoslovaque du (« Traité au sujet de l’Ukraine subcarpatique » et « Protocole annexé au traité conclu entre l’URSS et la République tchécoslovaque au sujet de l’Ukraine subcarpatique ») que la Ruthénie subcarpathique est devenue soviétique.
- Le , à la suite de l'échec des Bolcheviks de la république soviétique d'Odessa à prendre le contrôle de la Bessarabie au printemps 1918, ils proclamèrent aussi, sur les cartes, une République soviétique bessarabienne qui n'a cependant pas contrôlé la Bessarabie alors déjà unie à la Roumanie par le vote, en avril 1918, du soviet suprême de la République démocratique moldave, à majorité menchévique et nationaliste moldave, vote que la Russie soviétique refuse de reconnaître.
- (en) Steven Rosenberg, Ukraine crisis: Meeting the little green men, BBC News, , consulté le .
Bibliographie
- Thomas Chopard, Le Martyr de Kiev : 1919. L'Ukraine en révolution entre terreur soviétique, nationalisme et antisémitisme, Paris, Vendémiaire, coll. « Chroniques », , 286 p. (ISBN 978-2363581525)
- L'Ukraine moderne. In: L'information géographique, volume 23, n°5, 1959. pp. 208-209.
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