Pleyel

Pleyel est une marque de pianos française fondée en 1807 par Ignace Pleyel[1]. C'est l'une des plus anciennes manufactures de pianos. Elle a fait reconnaître son savoir-faire auprès de nombreux artistes parmi lesquels Frédéric Chopin,[2],[3] Camille Saint-Saëns, Maurice Ravel, Igor Stravinsky et Manuel de Falla.

Pour les articles homonymes, voir Pleyel (homonymie).

Manufacture Française de Pianos

Piano de concert Pleyel

Création 1807
Dates clés 2007 : immatriculation de la société actuelle
Fondateurs Ignace Joseph Pleyel
Forme juridique Société par actions simplifiée
Siège social Paris
 France
Direction Benjamin Garnier
Activité Facture instrumentale
Produits Piano
Société mère Algam
SIREN 430425314
Site web www.pleyel.com

Depuis 2017, la marque est la propriété de la société Algam[4].

Historique

L’histoire de Pleyel se confond avec celle de ses réalisations et des entrepreneurs qui ont contribué à bâtir son histoire et sa réputation. La salle Pleyel est en fait un prolongement direct et logique des pianos Pleyel.

Ignace Pleyel de 1807 à 1831

Ignace Pleyel, fondateur de la manufacture Pleyel.

Né le à Ruppersthal en Basse-Autriche, Ignaz Pleyel se révéla très tôt comme un musicien talentueux. Grâce au mécénat du comte Ladislaus Erdödy, il suivit les enseignements de Jean-Baptiste Vanhal, avant d’être l’élève de Joseph Haydn. Il devint maître de musique et chef d’orchestre à la cour du Prince Esterhazy à Eisenstadt, et fit de nombreux voyages à travers l’Europe, au cours desquels il rencontra les principaux acteurs de la vie musicale.

En 1783, Ignaz Pleyel — dont le prénom fut francisé en « Ignace » après être devenu français —, arriva à Strasbourg pour assister Franz-Xavier Richter, maître d’orchestre de la cathédrale depuis 1769, avant de lui succéder en 1789. Il se maria en 1788 et eut quatre enfants, dont Camille qui lui succédera. À la fin du XVIIIe siècle, Ignace Pleyel était un des musiciens français les plus populaires et les plus joués ; son talent était unanimement apprécié, y compris par ses confrères, au premier rang desquels Mozart. Il est à cette époque un compositeur prolifique, et il laissa derrière lui une œuvre abondante : quarante et une symphonies, six symphonies concertantes, soixante-quatre duos, deux opéras, et de très nombreux octuors, septuors, quintettes ou quartettes.

Les troubles politiques qui accompagnèrent la Révolution française le poussèrent à partir, en , pour l’Angleterre (où il retrouva Joseph Haydn) sur invitation des Professional Concerts dirigés par le violoniste Wilhelm Cramer. À son retour en France, il fut arrêté par les républicains et ne dut son salut qu’à la composition de l’hymne fleuve La Révolution du . Il avait déjà composé en 1791 un Hymne à la liberté avec Rouget de Lisle, et dès lors il fut sollicité de nombreuses fois pour composer ou jouer des hymnes lors de fêtes révolutionnaires. On dit même qu’il aurait prêté main-forte à Rouget de Lisle pour composer La Marseillaise…

En 1797, Ignace Pleyel décida de s’établir dans le quartier de la Chaussée d’Antin à Paris, où il ouvrit une boutique d’éditions musicales. Au même moment, il élabora une Méthode pour le piano forte avec Jan Ladislav Dussek, et publia certaines de ses œuvres, puis celles de ses confrères. Il créa, quelques années plus tard, une collection de partitions en format de poche à bas prix qu’il appela la « Bibliothèque musicale ». La maison d’édition Pleyel aura sorti en tout près de trois mille titres. En 1807, il lança la fabrication des premiers pianos Pleyel et maintint cette activité grâce au soutien de quelques mécènes. Les premiers pianos Pleyel sortirent avec le concours de Charles Lemme pendant quelques mois, mais très vite Ignace Pleyel décide de travailler seul. En 1824, il confia l’entreprise à son fils Camille qui poursuivait alors une carrière de concertiste.

Camille Pleyel de 1831 à 1855

Compositeur moins prolifique que son père, Camille Pleyel fut un concertiste de talent remarqué à la cour du roi d’Angleterre. Il voyagea énormément en Europe, rendant visite aux autres grands facteurs, notamment Broadwood et Érard, qui sont avec Pleyel les pionniers dans la fabrication de pianos.

Camille impulsa à la maison une nouvelle dynamique et lui apporta une renommée internationale. Très vite il s’entoura de musiciens qui suivirent de près la conception des pianos et exportèrent le nom de Pleyel — véritable « marque » — dans le monde entier. Il accorda une attention extrême au perfectionnement de ses instruments, en réponse aux exigences des compositeurs qui souhaitaient des sonorités puissantes et riches. Ce fut la naissance du « son Pleyel » si caractéristique des pianos Pleyel. En 1834, la manufacture Pleyel produisait alors mille pianos par an avec deux cents ouvriers.

La rencontre avec des artistes de tout pays permit à Camille Pleyel de partir à la conquête de nouveaux marchés internationaux dominés jusqu’ici par les Anglais. Il adapta même certains de ses instruments aux conditions climatiques de pays lointains en les « tropicalisant » afin de leur donner une meilleure résistance aux conditions hygrométriques.

Auguste Wolff de 1855 à 1887

Clavecin Pleyel de 1889 au musée de Berlin.

Auguste Wolff est associé à Camille Pleyel dès 1853. Lui-même issu d’une famille de musiciens, il est un compositeur talentueux et un musicien accompli. Wolff sera un facteur de pianos d’exception et contribuera grandement au développement de l’entreprise en multipliant les innovations et en modernisant continuellement les pianos produits. Il met l’accent sur la fabrication de pianos réputés à la fois pour leur sonorité et leur élégance.

En 1865, Wolff crée sur le boulevard Ornano, à Saint-Denis, une vaste usine de 55 000 m2 équipée de machines à vapeur, de plus de 200 machines-outils, de canalisations de chauffage, d’air comprimé et de vapeur générés par une station autonome, produisant 2 500 pianos en 1887.

Gustave Lyon de 1857 à 1936

Dès 1883, Gustave Lyon, le gendre de Wolff, reprend les rênes de la manufacture Pleyel. Polytechnicien, ingénieur des Mines et musicien accompli, il met à contribution ses connaissances scientifiques pour améliorer la qualité des pianos et percer les mystères de l’acoustique. En 1889, alors que la maison Pleyel produit son 100 000e piano, Lyon est distingué par un grand prix d’honneur lors de l’Exposition universelle de Paris pendant laquelle est exposé un clavecin construit pour l'occasion. Il modernise l’usine créée par Wolff trente ans plus tôt. Les pianos Pleyel restent très appréciés de la nouvelle génération de musiciens — emmenée par Camille Saint-Saëns, Fédor Chaliapine, Rimsky-Korsakov, ou encore Wanda Landowska — séduits par l’harmonie si particulière de ces pianos européens inspirés de la facture allemande. C'est pour Landowska qu'est entreprise la conception et la fabrication de nouveaux clavecins (et notamment le fameux « Grand Modèle de Concert » dont 180 exemplaires de ce type seront produits entre 1923 et 1969.

Une très rare occasion de voir et écouter en concert (à Vérone, en Italie au mois de ) le clavecin Grand Modèle de concert « Wanda Landowska » parfaitement restauré sous la direction de Claude Mercier-Ythier. Il s'agit ici d'un instrument exceptionnel, commandé pour la claveciniste Irma Rogell, élève de Wanda Landowska et sur les conseils de cette dernière depuis les États-Unis en 1957.

Parallèlement à son activité de facteur de pianos, Lyon se passionne pour l’acoustique des lieux de concert qui, en plus d’être un domaine scientifique, est encore un art. Il se spécialise ainsi dans l’orthophonie des salles et est souvent sollicité par les architectes pour corriger leur acoustique, notamment au Palais de Chaillot à Paris.

Dès 1925, Lyon lance le chantier de construction de la salle Pleyel, rue du faubourg Saint-Honoré, à Paris. Mais la grande crise de 1929 est fatale au groupe Pleyel : les pianos déposent le bilan en 1933, et la salle est reprise par son banquier, le Crédit lyonnais, en 1934. À la mort de Gustave Lyon, les pianos Pleyel et la salle Pleyel sont donc séparés.

Le Crédit Lyonnais puis Hubert Martigny

Le Crédit Lyonnais reste propriétaire de la salle Pleyel jusqu'en 1998, date à laquelle il la vend dans le cadre des cessions d’actifs du Consortium de réalisation (CDR). Apprenant, en 1997, que la salle est à vendre, l’industriel — et mélomane — Hubert Martigny décide de présenter un dossier de rachat. En 1998, il devient propriétaire de la salle Pleyel et rachète, en 2000, la marque de pianos aux investisseurs italiens propriétaires de la dernière manufacture en France, Pleyel and Co, à Alès dans le Gard.

La manufacture des années 2000

Claviers du clavecin Pleyel de 1889.

En plus des pianos Pleyel, Hubert Martigny, rachète également les marques « Érard », « Rameau » et « Gaveau ». Victime d'une concurrence commerciale très forte des marchés asiatiques et notamment chinois, la manufacture Pleyel ferme en 2007 son usine d’Alès, ouverte en 1973, pour se réinstaller à Saint-Denis[5],[6].

La manufacture installe une salle d'exposition à la salle Pleyel, où sont visibles ses modèles signés par de grands artistes contemporains (Marco Del Re, Aki Kuroda et Jean Cortot) et de grands designers : Andrée Putman a ainsi créé pour Pleyel le piano Voie lactée[7] de 2,17 m. La direction de Pleyel prend alors résolument le virage du luxe, avec des séries limitées, puis se lance dans la fabrication de mobilier haut de gamme au slogan "Design Manufacturier d'exception". La sonorité du piano est laissée de côté au profit du meuble.

Le facteur français de pianos (et ses fabrications) reçoivent le label « Entreprise du patrimoine vivant » le par le ministre de l’Économie, des Finances et de l’Emploi.

Production

Piano 1/4 de queue Pleyel

À cause d'une concurrence considérable, Pleyel ne produit que des instruments d'exception vendus entre 42 000 et 200 000 , avec de 20 à 25 exemplaires par an[8] alors que 2 000 pianos étaient vendus à la fin des années 1990. En France, les ventes de pianos ont considérablement chuté, de 40 000 instruments en 1980 à 8 000 en 2010.

Dans cette optique de haut de gamme, la fabrication d'un Pleyel peut exiger jusqu'à 24 mois d'élaboration et 9 mois de fabrication, soit jusqu'à 2 000 heures de travail, 5 000 pièces et l'intervention de professionnels de plus de 20 métiers différents[8]. L'entreprise emploie 15 artisans dont 4 femmes dans les 1 300 m2 de la manufacture de Saint-Denis.

D'après les responsables de Pleyel, l'équipe se compose de toutes les générations afin que leur savoir-faire soit effectivement transmis[5]. « Il faut que nos pianos restent des instruments, mais deviennent aussi des objets d'art », précise Hubert Martigny alors que la compétitivité de l'entreprise est en péril.

La fin de Saint-Denis

Le , la direction confirme officiellement que l'entreprise connaît des difficultés et qu'elle est sur le point de faire l'objet d'une cession, sans toutefois préciser le nom du futur propriétaire de la marque[9]. Il semble alors que le repreneur est un des grands groupes de luxe, de sorte que l'activité serait maintenue sur le sol français[5].

En , Pleyel annonce une collaboration avec Peugeot. Le Piano Peugeot Design Lab pour Pleyel[10] sera vendu 165 000 euros (prix public). Pleyel a déjà développé avec Audi, quelques années auparavant, un prototype qui ne fut pas commercialisé. Le nouvel instrument profitera non seulement d'une forme à la mode mais aussi de technologies issues du monde automobile. Ainsi, il sera fabriqué en fibre de carbone. Après plusieurs mois de développement, les ingénieurs, techniciens et designers des deux entreprises parachèvent un piano ultra-moderne imitant la voiture et l'aérodynamique de l'aile d'avion. De plus, en remplacement des trois pieds classiques, il ne possède qu'un socle. Ce piano est conçu sans perdre la qualité de la sonorité Pleyel. Le pianiste français Yves Henry, ayant déjà essayé cet instrument, précise que « le mythique modèle de 204 cm des années 1910 a servi de base[11]. » [Peugeot Pleyel : voir en ligne]

Toutefois, en , la confédération française des métiers d'art annonce la fermeture prochaine des ateliers de Saint-Denis.

En , Pleyel emménage dans des locaux du viaduc des Arts, 93-95 avenue Daumesnil à Paris (12e arrondissement).

Par ailleurs, en 2016 la société de distribution "Pleyel China" est inaugurée à Pékin en Chine[12].

Le repreneur Gérard Garnier, président d'Algam[13], poursuit la fabrication en France (Thouaré-sur-Loire) et en Indonésie[14],[15].

En septembre 2009, un facteur de pianos, Paul McNulty, a créé une reconstitution du modèle de 1830 du piano de Pleyel, qui se trouve maintenant dans une collection de l'Institut Fryderyk Chopin à Varsovie[16]. Cette copie a été utilisée lors du 1er Concours international Chopin sur instruments d'époque en septembre 2018.

Exemples sonores

  • Yuan Sheng. Frederic Chopin. Ballades Nos 1-4/Impromptus Nos 1-4. 1845 Pleyel fortepiano. bel: Piano Classics
  • Ronald Brautigam. Felix Mendelssohn. Piano Concertos. 1830 Pleyel (Paul McNulty). Bis
  • Janusz Olejniczak Chopin evening around 1831 Pleyel.
  • Alexei Lubimov. Chopin, Bach, Mozart, Beethoven: at Chopin’s home piano. Pleyel 1843 fortepiano. NIFCCD
  • Dina Yoffe. Fryderyk Chopin. Piano Concertos No 1 & 2. Version for one piano. 1848 Pleyel, 1838 Erard. Fryderyk Chopin Institute
  • Viviana Sofronitsky, Sergei Istomin. Frederyk Chopin. Complete works for cello and piano. 1830 Pleyel (Paul McNulty). Passacaille
  • Kevin Kenner. Fryderyk Chopin. 4 Impromptus. Fortepiano 1848 Pleyel. Fryderyk Chopin Institute
  • Tomasz Ritter. Fryderyk Chopin. Sonata in B Minor, Ballade in F minor, Polonaises, Mazurkas. Karol Kurpinski. Polonaise in D minor. 1842 Pleyel, 1837 Erard, Buchholtz 1825-1826 (Paul McNulty). Fryderyk Chopin Institute

Notes et références

  1. Voir sur larousse.fr.
  2. Macintyre, Ben (17 March 2007). "Chopin's true sound can be heard at last after discovery of his piano". The Times. London. Archived from the original
  3. Chopin's letters. By Chopin, Frédéric, 1810-1849; Voynich, E. L. (Ethel Lillian), 1864-1960; Opienski, Henryk, 1870-1942
  4. « INPI – Service de recherche marques », sur bases-marques.inpi.fr (consulté le )
  5. Le Figaro, « Les pianos d'exception cherchent un repreneur », le 15 novembre 2012, p. 15.
  6. Nathaniel Herzberg, « Pleyel quitte Alès sur une fausse note », Le Monde (ISSN 0395-2037) daté du 24 décembre 2006 [lire en ligne].
  7. Dévoilé aux Designers' Days 2008 à Paris et à l'ambassade de France à New York dans le cadre de la rétrospective « Beyond Style » consacrée à la designer en septembre 2008.
  8. « Note de fin pour la manufacture de pianos Pleyel », Le Monde, (lire en ligne).
  9. Voir article de l'AFP.
  10. Voir sur peugeot.com.
  11. Diapason, no 609, p. 132, « En voiture Pleyel ! », décembre 2012.
  12. « Lancement de Pleyel en Chine », sur http://www.pleyel.com (consulté le )
  13. Histoire d'Algam.
  14. Isabelle Moreau, « Les pianos renaissent... », Ouest France,
  15. Jean Delavaud, « Algam ressuscite les pianos... », Ouest France,
  16. (en) « I Międzynarodowy Konkurs Chopinowski na Instrumentach Historycznych », sur iccpi.eu (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • J. Rousseau, Histoire d'une résurrection : pianissime Pleyel, Classica - répertoire, , pp. 46-47
  • Pleyel, une histoire tournée vers l'avenir par Arnaud Marion aux Éditions de la Martinière ()
  • La Salle Pleyel, Lieu de Modernité par Arnaud Marion aux Éditions de la Martinière ()
  • La Salle Pleyel, hors-série Connaissance des Arts () par Arnaud Marion
  • Jean Jude, Pleyel 1757-1857. La passion d'un siècle, Imprimerie du Centre Loire, 2008, 346 p., relié, 30 x 20 cm (ISBN 978-2-9531198-0-0)
  • Jean-Jacques Trinques, Le piano Pleyel: d'un millénaire à l'autre, éditions L'Harmattan, 2003
  • René Beaupain, Chronologie des pianos de la maison Pleyel, éditions L'Harmattan, 2000

Articles connexes

Lien externe

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