Place des femmes dans la photographie

La place des femmes dans la photographie est importante depuis les débuts de son invention. Constance Fox Talbot, épouse de Henry Fox Talbot, l'un des acteurs clés du développement de la photographie dans les années 1830 et 1840, a elle-même expérimenté le processus dès 1839[1]. Richard Ovenden lui attribue une image floue d'un court verset du poète irlandais Thomas Moore, qui ferait d'elle la plus ancienne photographe connue[2].

Cystoseira granulata, algue brune de la famille des Sargassaceae, photogramme d'Anna Atkins, entre 1843 et 1853.

La botaniste Anna Atkins est également initiée à la photographie par Fox Talbot, qui lui transmet sa technique de « dessin photogénique » ainsi que son processus de calotype basé sur un appareil photo[3]. Après avoir appris le procédé cyanotype de l'inventeur John Herschel, elle est capable de produire des photogrammes cyanotypes d’algues séchées[4]. En 1843, elle publie Photographs of British Algae: Cyanotype Impressions, qui serait le premier livre intégrant des illustrations photographiques[5].

Un autre botaniste et photographe amateur passionné, John Dillwyn Llewelyn, a probablement été initié à la photographie par son épouse Emma Thomasina Talbot, une cousine de Fox Talbot[6]. Sa femme avait ainsi manifesté un intérêt précoce pour la photographie et réalisé toutes les impressions et illustrations de ses travaux botaniques[7].

Portrait d’Ida Hultgren par la photographe suédoise Hilda Sjölin, en 1863.

Premières professionnelles

En Suisse, Franziska Möllinger (1817-1880) commence à créer des daguerrotypes de paysages suisses vers 1842, dont elle publie des copies lithographiques en 1844. Elle a également réalisé ses premiers portraits à partir de 1843[8]. Près de vingt ans plus tard, la Suissesse Alwina Gossauer (1841-1926) devient l'une des premières femmes photographes professionnelles[9].

En France, Geneviève Élisabeth Disdéri est considérée comme l'une des premières professionnelles de la photographie. Avec son mari, André-Adolphe-Eugène Disdéri, réputé pour avoir breveté le procédé de la carte de visite, elle crée un studio de daguerrotype à Brest à la fin des années 1840[10]. Le couple divorce en 1847, elle continue alors de gérer l'entreprise seule[11]. En Allemagne, Bertha Wehnert-Beckmann et son mari ouvrent en 1843, un studio de photographie à Leipzig. Après la mort de ce dernier en 1847, elle choisit de poursuivre l'aventure seule[12]. En 1852, Emilie Bieber est à l'origine d'un studio de daguerrotype à Hambourg. Malgré un démarrage lent, les affaires perdurent jusqu'en 1885, date à laquelle elle transfère la propriété du lieu à son neveu[13]. Aux États-Unis, Sarah Louise Judd (1802-1886) aurait créé des daguerrotypes au Minnesota dès 1848[14].

Thora Hallager, l'une des toutes premières photographes danoises, a probablement exercé à Copenhague dès le début des années 1850. Cependant, elle est surtout reconnue pour le portrait de Hans Christian Andersen qu'elle réalise en 1869[15]. En Suède aussi, les femmes se sont lancées très tôt dans le domaine de la photographie. Brita Sofia Hesselius photographie le daguerréotype à Karlstad dès 1845, et Marie Kinnberg est l'une des toutes premières à utiliser cette nouvelle technique photographique à Göteborg de 1851 à 1952[16].

Hilda Sjölin devint photographe professionnelle à Malmö en 1860. Elle y ouvre son studio photographique l'année suivante, tandis que Sofia Ahlbom inclut également la photographie parmi les arts qu'elle pratique dans les années 1860[17]. En 1864, Bertha Valerius devient la photographe officielle de la cour royale à Stockholm, suivie plus tard par son étudiante Selma Jacobsson. Au cours des années 1860, il y avait au moins quinze femmes photographes confirmées en Suède, dont trois, Rosalie Sjöman, Caroline von Knorring et Bertha Valerius, appartenant à l'élite de leur profession. En 1888, Anna Hwass, devient la première membre féminine du conseil d'administration de la Photographic Society[16].

Les artistes pionnières

La comédienne anglaise Ellen Terry à l'âge de seize ans par la photographe Julia Margaret Cameron, en 1864.

À la fin des années 1850, Lady Clementina Hawarden réalise ses débuts dans la photographie. Ses premiers clichés ont été réalisés sur le domaine Hawarden à Dundrum, en Irlande. En 1862, la famille déménage à Londres. Lady Clementina Hawarden convertit le premier étage de la maison de South Kensington en un studio. Elle se spécialise dans les portraits, en particulier ceux de ses deux filles aînées vêtues des costumes du jour. Son travail lui permet d'être distinguée par deux médailles d'argent aux expositions de la Photographic Society en 1863 et 1864[18].

Julia Margaret Cameron est encore plus largement reconnue pour son travail artistique pionnier. Bien que son intérêt pour la photographie ne commence qu'en 1863, elle est alors âgée de 48 ans, elle entreprend consciemment de faire en sorte que la photographie devienne une forme d'art acceptable[19]. La photographe réalise des centaines de portraits d'enfants et de célébrités. Bien que son engagement ait souvent été critiqué pour son manque de technique, il a ensuite formé la base du mouvement pictorialiste du début du XXe siècle[20].

Photographie de Rewi Manga Maniapoto, réalisée par Elizabeth Pulman en juin 1879.

Caroline Emily Nevill et ses deux sœurs ont exposé à la London Photographic Society en 1854, et ont ensuite présenté des vues architecturales du Kent avec des négatifs en papier ciré[21],[22]. En Italie, Virginia Oldoini s'intéresse à la photographie dès 1856, enregistrant les moments marquants de sa vie dans des centaines d'autoportraits, et portant régulièrement des costumes de théâtre[23],[24].

En France, les premières femmes photographes sont Madame Breton et Louise Laffon.

Travail d'atelier au XIXe siècle

Love finds the way, portrait de Mrs. Fiske, par la photographe Zaida Ben Yusuf, en 1896.

Les premiers studios de photographie documentés et exploités par des femmes ont été ouverts dans les années 1860.

Dans les années 1860 et 1870, les photographes Sarah Ann Harrison et Adelaide Conroy sont à l'origine des deux premiers studios indépendants de l'île de Malte[25],[26]. Vers 1866, Shima Ryū et son mari, Shima Kakoku, ouvrent un studio à Tokyo[27]. En Nouvelle-Zélande, Elizabeth Pulman a aidé son mari George à travailler dans son studio d'Auckland à partir de 1867. Après sa mort en 1871, elle continue à diriger l'entreprise[28].

Un certain nombre de femmes danoises ont rapidement ouvert leurs propres studios. Frederikke Federspiel (1839-1913), qui avait appris la photographie à Hambourg avec sa famille, ouvre un studio à Aalborg au milieu des années 1870[29]. Mary Steen inaugure son studio à Copenhague en 1884. Elle est devenue la première photographe de la Cour du Danemark, et a notamment réalisé les portraits de la princesse Alexandra de Danemark en 1888[30].

Benedicte Wrensted (1859-1949) ouvre un studio à Horsens dans les années 1880, avant d'émigrer aux États-Unis où elle se consacre à la photographie des peuples des Amérindiens dans l'Idaho[31]. Après avoir étudié la photographie à l’École polytechnique de Londres, Alice Hughes (1857-1939) ouvre son studio à Gower Street, à Londres dès 1891, devenant rapidement une des photographes de premier plan de la royauté et de la mode britannique[32]. Au plus fort de sa carrière, elle enchaîne jusqu'à 15 séances par jour[33].

Alice Boughton, l'une des premières femmes photographes à ouvrir un studio à New York, a étudié l'art et la photographie à la Pratt School of Art and Design. En 1890, elle ouvre un studio sur la 23e rue, et devient l'une des portraitistes les plus distinguées de la ville[34]. Zaida Ben-Yusuf, d'origine allemande et algérienne, émigre d'Angleterre aux États-Unis en 1895. Elle installe son studio de portraits sur la Fifth Avenue à New York en 1897, où elle photographie nombre de célébrités[35].

Histoire des femmes photographes en Amérique

Les années folles marquent l'émancipation des femmes dans le monde de la culture, et le nombre de femmes photographes augmente considérablement. La photographie permet alors au féminin de faire valoir sa créativité[36]. Des publications telles que American Amateur Photographer donnent aux photographes professionnelles ou amatrices, l'opportunité de mettre davantage en valeur leurs compétences, bien qu'elles restent encore en grande partie exclues des organisations de photographes[37],[38].

Miss N, portrait d'Evelyn Nesbit par la photographe Gertrude Käsebier, vers 1900.

Les pictorialistes

L’utilisation de la photographie comme forme artistique prend son essor à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, sous l’influence de l’Américain Alfred Stieglitz. Son potentiel artistique, appelé pictorialisme, est depuis largement reconnu[39].

Parmi les plus proches associés d'Alfred Stieglitz, figure les photographes Gertrude Käsebier (1852-1934) et Eva Watson-Schütze (1867-1935). Toutes deux se sont tournées vers la photographie après avoir étudié les beaux-arts. Leur association avec Alfred Stieglitz conduit en 1902 à la fondation du mouvement Photo-Secession[40],[41]. Leurs séries de portraits romantiques ont été présentés lors d'expositions influentes[42]. En outre, on se souvient de Gertrude Käsebier pour ses portraits d'Amérindiens[43].

Alice Boughton, assistante de Gertrude Käsebier, et la photographe Anne Brigman (1869–1950), spécialisée dans les nus de femmes figurent parmi les autres pictorialistes de renom[44]. Mary Devens (1857-1920) expérimente elle les techniques d'impression et devient membre du British Linked Ring qui précède le Photo-Secession, afin de promouvoir la photographie en tant qu'art[41]. La Canadienne d'origine allemande Minna Keene (1861-1943) est également l'une des premières femmes membre du British Linked Ring[45].

Two women under a tree (Deux femmes sous un arbre) par Alice Boughton, 1906.

Femmes photographes de Vienne

Dans le Vienne d'avant-guerre, probablement plus que dans toute autre ville européenne, les studios de photo gérés par des femmes, en particulier des femmes juives, sont nettement plus nombreux que ceux dirigés par des hommes. En tout, une quarantaine de femmes possèdent des studios dans la ville, mais la plus célèbre d'entre elles se nomme Dora Kallmus (1881-1963)[46].

Connue sous le nom de Madame d'Ora, elle est nommée membre de la Société photographique de Vienne en 1905. En 1907, elle inaugure son propre studio indépendant. Après avoir connu le succès auprès de l'aristocratie austro-hongroise, la photographe ouvre un second studio à Paris, en collaboration avec Arthur Benda. Elle domine ainsi l'univers de la photographie de mode dans les années 1930[47]. En plus de leur rôle photographique, les studios de Dora Kallmus sont devenus des lieux de rencontre à la mode pour l'élite intellectuelle[48].

Trude Fleischmann (1895–1990), devenue célèbre avec une série de nues de la danseuse Claire Bauroff, et Claire Beck Loos (1904-1942), tuée dans un camp de concentration nazi à Riga, ont également pris part à une carrière réussie à Vienne[49],[50].

Margaret Michaelis-Sachs (1902-1985) se lance également dans la photographie à Vienne, avant d'émigrer vers l’Australie. Elle est reconnue pour ses scènes du marché juif de Cracovie prises dans les années 1930[51].

Paysages et photographie de rue

Le Chef Iron Tail, Indien Sioux et membre du Wild West Show de Buffalo Bill. Photographié par Gertrude Kasebier, en 1898.

Dès la fin du XIXe siècle, Sarah Ladd (1860-1927) commence à photographier les paysages de l'Oregon. Ses images du fleuve Columbia qu'elle développe dans une chambre noire sur une péniche ont été exposées en 2008 au Portland Art Museum[52]. Evelyn Cameron (1868-1928), originaire de la Grande-Bretagne, est l'auteure d'une série complète d'images remarquablement nettes du Montana et de ses habitants à la fin du XIXe siècle. Redécouverts dans les années 1970, ces photographies ont été publiées sous la forme d'un ouvrage intitulé Photographing Montana 1894–1928: The Life and Work of Evelyn Cameron[53].

Dirigée par Gertrude Käsebier, la photographe Laura Gilpin (1891-1979) se consacre aux Amérindiens et aux paysages du Sud-Ouest des États-Unis[54]. Berenice Abbott (1898–1991) est surtout connue pour ses photographies en noir et blanc de New York, réalisées entre 1929 à 1938[55]. Une grande partie de son œuvre a été créée dans le cadre du Federal Art Project. En 1939, dans l'ouvrage Changing New York, elle dresse une chronique historique de nombreux bâtiments et quartiers de Manhattan, aujourd'hui détruits[56],[57].

Au Mexique, Lola Álvarez Bravo (1903–1993) réalise de nombreuses contributions artistiques et de nombreux portraits destinés à préserver la culture de son pays. Ses œuvres figurent dans les collections de musées internationaux, dont le Museum of Modern Art de New York[58].

Photojournalisme et travail documentaire

Portrait de Florence Thompson avec deux de ses enfants sur une photographie de Dorothea Lange appelée Migrant Mother, 1936.

La Canadienne Jessie Tarbox (1870-1942) est considérée comme la pionnière du photojournalisme américain. En 1889, elle photographie la prison d'État du Massachusetts pour le Boston Post. En 1902, elle intègre comme photojournaliste la rédaction de The Buffalo Inquirer et The Courier[59]. Harriet Chalmers Adams (1875-1937) est une exploratrice, dont les photographies de ses expéditions sont publiées dans le National Geographic. Elle est également correspondante du Harper's Magazine en Europe pendant la Première Guerre mondiale, seule femme journaliste autorisée à se rendre dans les tranchées[60].

Helen Johns Kirtland (1890-1979), une autre correspondante de guerre basée en France pendant la Première Guerre mondiale, travaille elle pour le magazine Leslie's Weekly[61]. Margaret Bourke-White (1906-1971) est la première étrangère à photographier l'industrie soviétique, ainsi que la première correspondante de guerre et première femme photographe à travailler pour le magazine Life[62].

Pendant la Grande Dépression, Dorothea Lange (1895-1965) est employée par l'administration de l'agence fédérale Resettlement Administration (RA) afin de photographier des familles d'agriculteurs déplacées et des travailleurs migrants. Distribuées gratuitement dans les journaux, ses images sont devenues des symboles iconiques de l'époque[63],[64]. La romancière Eudora Welty a également photographié des familles touchées par la Grande Dépression, en particulier dans les régions rurales du Mississippi, produisant un corpus remarquable[65].

Photo de Margaret Bourke-White, invitée de l'émission télévisée Person to Person, août 1955.

Au début des années 1930, Marvin Breckinridge Patterson (1905-2002) publie ses photographies de voyages au sein des publications Vogue, National Geographic, Look, Life, Town & Country et Harper's Bazaar[66]. Marion Carpenter (1920-2002) est la première photographe de presse nationale et la première femme à couvrir les actualités de la Maison-Blanche[67]. Edie Harper (1922-2010) est photographe du Corps of Engineers de l'Armée durant la Seconde Guerre mondiale, où elle a photographie différentes structures, telles que des barrages hydroélectriques et des échantillons de test de ciment. Des photographies de son travail de guerre ont été hautement saluées et montrées lors d'une exposition au Centre d'art contemporain de Cincinnati en 1961[68],[69].

Reconnue pour ses travaux de photojournalisme et de photographie documentaire, Mary Ellen Mark ( - ) œuvre également pour la publicité et le cinéma. La photographe se spécialiser dans la documentation du quotidien des communautés marginalisées[70]. Pour le projet Ward 81 datant de 1979, elle côtoie pendant six semaines les patientes du pavillon de sécurité pour femmes de l’Oregon State Hospital[71]. Ses images sont publiées dans les magazines Life, Rolling Stone, The New Yorker, New York Times et Vanity Fair[72]. De 1977 à 1998, elle intègre l'agence Magnum Photos[73]. Son travail a été récompensé de multiples fois. Elle est notamment la lauréate du Robert F. Kennedy Journalism Award, de trois bourses du National Endowment for the Arts, le prix 2014 Lifetime Achievement in Photography remis par la George Eastman House et le prix Outstanding Contribution Photography de la World Photography Organization[70].

Surréalisme

Un certain nombre de femmes ont utilisé la photographie comme un moyen d'exprimer leur intérêt pour le surréalisme. Dans les années 1920, l'artiste française Claude Cahun (1894-1954) met en scène des autoportraits[74]. La Croate Dora Maar (1907-1997) développe un intérêt pour le surréalisme en s'associant avec des artistes issus de ce mouvement tel le poète et écrivain français André Breton. Ses portraits vifs datant du début des années 1930 font ressortir les traits du visage à l'image d'un portrait dessiné[75]. L’Américaine Lee Miller (1907-1977) mêle à la photographie de mode le surréalisme et s'associe un temps à Pablo Picasso à Paris, avant de rentrer à New York. Elle est l'auteure de photographies de nus parmi les plus frappantes de l'époque[76].

Le surréalisme continue de susciter l'intérêt des femmes photographes durant la seconde moitié du XXe siècle. Henriette Grindat (1923-1986) est l'une des rares Suissesse à s'intéresser à la photographie artistique. Elle s'associe à André Breton, puis collabore avec Albert Camus pour lequel elle réalise des images de la Sorgue dans le sud de la France[77].

À partir de la fin des années 1940, la Tchèque Emila Medková (1928-1985) produit des œuvres surréalistes, dont principalement des images documentaires remarquables de l'environnement urbain dans les années d'oppression d'après-guerre[78]. Bien qu’elle ne soit pas strictement associée aux surréalistes, la célèbre photographe mexicaine Lola Álvarez Bravo (1907-1993) propose des éléments du surréalisme tout au long de sa carrière, notamment dans ses portraits de Frida Kahlo et de María Izquierdo[79]. Durant sa courte vie, Francesca Woodman (1958-1981), influencée par André Breton et Man Ray, explore la relation entre le corps et son environnement, apparaissant souvent en partie cachée dans ses gravures en noir et blanc[80].

Photographie américaine : l'art du portrait

Peter E. Palmquist étudie l'histoire des femmes photographes en Californie et dans l'Ouest américain de 1850 à 1950. Il constate alors qu'au XIXe siècle environ 10% de tous les photographes de la région était des femmes, alors qu'en 1910, elles étaient près de 20%[81]. Dès la fin du XIXe siècle, la plupart des femmes photographes sont mariées à un photographe et leurs travaux non dissociés de cette union. Au fur et à mesure que le processus se développe et se simplifie, l'émergence de photographes amateurs et amatrices, tout comme la multiplication des organisations de photographes se démocratise[81].

Marian Hooper Adams (1843–1885) fut l'une des toutes premières photographes portraitistes américaines à avoir photographié sa famille et ses amis, tout comme des hommes politiques contemporains[82].

Sarah Choate Sears (1858-1935) a attiré l'attention internationale en tant que photographe amateure après avoir commencé à réaliser de superbes portraits et des études de fleurs[83]. Elle est rapidement devenue membre du Linked Ring de Londres et du Photo-Secession de New York.

Originaire de Chicago, Elizabeth Buehrmann (vers 1886-1963) s'est spécialisée dans la prise de portraits de grands hommes d'affaires et de femmes influentes de la société au début du XXe siècle. En 1907, elle est devenue membre de Paris Photo-Club[84].

En 1904, Caroline Gurrey (1875-1927) est saluée pour sa série sur les enfants métis de Hawaï[85].

Doris Ulmann (1884-1934) débute comme photographe pictorialiste amateure, avant d'accéder au statut de photographe professionnelle en 1918. Outre ses portraits d'intellectuels éminents, elle documente les montagnards du sud, en particulier les Appalaches[86].

Dans les années 1930, Consuelo Kanaga (1894-1978) photographie de nombreux artistes et écrivains de renom, et devient l'une des rares photographes à produire des portraits artistiques. Sa photographie d'une femme noire élancée et de ses enfants est incluse à l'exposition Family of Man d'Edward Steichen en 1955[87]. Ruth Harriet Louise (1903-1940) est une photographe active à Hollywood, où elle dirige le studio de portraitiste de la Metro-Goldwyn-Mayer de 1925 à 1930, photographiant de nombreuses stars, dont Greta Garbo et Joan Crawford[88],[89].

Femmes afro-américaines en photographie

Carrie Mae Weems, The Hampton Project, exposition au Williams College Museum of Art, 2000.

À mesure que la société américaine évolue, les photographes afro-américaines jouent un rôle crucial dans la préservation de représentations authentiques d'images de la culture afro-américaine. La participation des femmes afro-américaines à la photographie commence à être largement reconnue au milieu du XXe siècle et s'est progressivement développée, mettant l'accent sur les conditions sociales, économiques et politiques de la population afro-américaine. Carrie Mae Weems, Lorna Simpson et Coreen Simpson comptent parmi les photographes afro-américaines les plus distinguées[90].

La photographe Lorna Simpson en 2009.

Originaire de Portland, Carrie Mae Weems reçoit son premier appareil photo en 1973. Son intérêt initial pour les arts débute en 1965, lorsqu'elle s'initie au théâtre de rue et à la danse. Bien que considérée comme une photographe accomplie, le travail de Carrie Mae Weems comprend également du texte, des tissus, des compositions audio, des images numériques, des installations et de la vidéo[90]. Lors de son exploration de l'idée de pouvoir, la photographe utilise sa propre image comme sujet principal. À travers différents médiums, l'artiste se donne pour mission d'explorer les relations familiales, le genre, le racisme, le sexisme, la lutte des classes et les différents types de systèmes politiques[91],[92].

Sue Ross est la cofondatrice de Sistagraphy, un collectif de femmes photographes basées pour la plupart à Atlanta, en Géorgie. Sue Ross est également connue sous le nom de PhotoGriot, partageant les histoires de la communauté afro-américaine à travers un objectif photo[93]. La photographe capture des événements et des programmes culturels, ainsi que des portraits de dignitaires et de défenseurs des droits civils en visite à Atlanta, à l'image de Nelson Mandela[94].

Après des études en photographie à la School of Visual Arts de New York et à l'Université de Californie, Lorna Simpson se lance dans la photographie en réalisant des portraits d'inconnus dont elle admire le style. Par son travail, elle vise à défier les conceptions traditionnelles du genre, de l'identité, de la culture, de l'histoire et de la mémoire telles qu'elles sont perçues par la société. Sa combinaison de photographies à grande échelle et de textes significatifs permet de créer de fortes implications visuelles[95].

Se démarquant en tant que photojournaliste, Coreen Simpson commence sa carrière en tant qu'écrivaine. Son intérêt pour la documentation de terrain et les arts visuels naît d'un contact avec le magazine Essence, alors qu'elle souhaite rédiger un article sur un voyage d'affaires au Moyen-Orient. Grâce à son travail, Coreen Simpson réalise des récits visuels qui racontent de manière esthétique les histoires de divers groupes de personnes[96],[97].

Elizabeth Williams est une photographe afro-américaine. Elle rejoint le Corps d'armée des femmes en 1944, à l'âge de 20 ans, en tant qu'une des rares photographes afro-américaines de l'armée[98].

Période contemporaine

La photographe Annie Leibovitz en 2015.

Les femmes photographes contemporaines continuent d'innover dans le domaine de la photographie. Annie Leibovitz immortalise des images saisissantes du célèbre et de l'inconnu, publiées notamment dans Vanity Fair, Vogue et Rolling Stone et représentant un vaste aperçu de la culture populaire américaine[99],[100].

Le travail de Cindy Sherman transforme la photographie immobile en art de la performance afin d'explorer les mythes traditionnels et culturels de la féminité. Son travail examine implicitement les questions d'identité et de stéréotype, de représentation et de réalité, la fonction des médias de masse et la nature du portrait[101],[102].

Les œuvres contemporaines des femmes photographes sont nombreuses. Les expositions photographiques réservées aux femmes sont controversées mais essentielles pour souligner le déséquilibre de la domination masculine sur le terrain tout au long de l'histoire de la photographie, et deviennent de plus en plus courantes[103],[104],[105],[106].

Récompenses historiques

En 1903, Emma Barton (1872-1938) est la première femme à recevoir la médaille de la Royal Photographic Society, pour une copie carbone intitulée The Awakening[107]. Le Prix Pulitzer de la photographie récompense des travaux exceptionnels dans le domaine de la photographie de presse depuis 1942. La première femme à recevoir ce prix est Virginia Schau (1915-1989), une photographe amateure qui photographie deux hommes en train d'être sauvés d'un camion en difficulté sur un pont à Redding en Californie[108].

En 2000, Marcia Reed, première photographe de photographies fixes à rejoindre la Guilde internationale des cinématographes, est également devenue la première femme à remporter le prix d'excellence de la Society of Operating Cameramen[109].

Articles connexes

Lectures complémentaires

  • C. J. Gover, The Positive Image: Women Photographers in Turn-Of-The-Century America (L'image positive : femmes photographes dans l'Amérique au tournant du siècle), SUNY Press, 1988, (ISBN 978-1-4384-0457-8)
  • Liz Héron, Val Williams, Illuminations: Women Writing on Photography from the 1850s to the Present (Illuminations : Femmes écrivant sur la photographie des années 1850 à nos jours), I.B.Tauris, 1996, (ISBN 978-1-86064-041-4)
  • Robert Hirsh, Seizing the Light: A Social History of Photography (Saisir la lumière : une histoire sociale de la photographie), McGraw-Hill, 2008, (ISBN 978-0-07-337921-0)
  • Olivia Lahs-Gonzales, Lucy Lippard, Defining eye: women photographers of the 20th century: selections from the Helen Kornblum collection. The Saint Louis Art Museum, 1997.
  • Beaumont Newhall, The History of Photography: from 1839 to the present (L'histoire de la photographie: de 1839 à nos jours), Musée d'art moderne, 1982, (ISBN 978-0-87070-381-2)[110]
  • Naomi Rosenblum, A History of Women Photographers (Une histoire de femmes photographes), Abbeville Press Publishers, 2010[111]
  • Constance Sullivan, Women Photographers (Femmes photographes), Abrams, 1990, (ISBN 978-0-8109-3950-9)[112]
  • Roger Taylor, Impressed by Light: British Photographs from Paper Negatives, 1840 – 1860 ; [this Publication Accompanies the Exhibition ... Held at the Metropolitan Museum of Art, New York, September 24 - December 30, 2007 ... and the Musée d'Orsay, Paris, May 26 - September 7, 2008]. Metropolitan Museum of Art, 2007, (ISBN 978-1-58839-225-1)[113]
  • Anne Tucker, The Woman's Eye (L'œil de la femme). Knopf, Random House, 1973. (ISBN 978-0-394-48678-9)
  • Val Williams, Femmes photographes: les autres observateurs de 1900 à nos jours, Virago Press, 1986.
  • Luce Lebart, Marie Robert, Une Histoire mondiale des femmes photographes, Paris, Textuel, 2020. (ISBN 978-2-84597-843-0)

Notes et références

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