Ligue de défense noire africaine

La Ligue de défense noire africaine (LDNA), est une organisation française active publiquement depuis 2018.

L'organisation déclare avoir pour objectif de lutter contre le racisme antinoir et promouvoir le panafricanisme. Ses actions polémiques et déclarations la font sortir de l'anonymat. Plusieurs journalistes et personnalités politiques l'accusent d'antisémitisme, de complotisme, voire de racisme et de racialisme.

En , à la suite de plusieurs incidents et polémiques, le ministère de l'Intérieur, Gérald Darmanin, lance une procédure de dissolution.

Présentation

Historique

La Ligue de défense noire africaine est un mouvement créé en 2017 ou début 2018 dans le but de lutter pour les droits des Africains et de leurs descendants de par le monde[1]. Active sur les réseaux sociaux, l'organisation revendique près de 50 000 abonnés sur Instagram et plus de 300 000 sur Facebook en 2021.[2] Elle est officiellement enregistrée auprès de la préfecture de police de Paris, en tant qu'association loi de 1901, le . La LDNA déclare dans le même temps la localisation de son siège comme étant situé rue de Penthièvre à Paris[3].

À partir de 2018, le mouvement s'est fait connaître du grand public à la suite de plusieurs actions (notamment manifestations) médiatisées[4],[5]. Son chef de file, de son vrai nom Sylvain Afoua, qui a également été rappeur sous le nom de Gucci IG,[6] se fait appeler Egountchi Behanzin en hommage à Béhanzin, dernier roi d'Abomey connu pour sa résistance à la colonisation française[7] mais aussi pour sa pratique de l'esclavage[8] et du sacrifice humain[9].

Idéologie

La ligue se fixant comme but la défense des Africains et des descendants d'Africains de par le monde, elle suit ainsi une idéologie panafricaine[5],[1]. Cette position se couple également d'une lutte contre le racisme antinoir.

Buts déclarés

Lors de son enregistrement auprès de la préfecture de police de Paris la LDNA déclare comme activité : « surveiller les dérives indigénistes sur l'internet, promouvoir le devoir de mémoire, lutter universellement contre le racisme »[3].

Antisémitisme, complotisme, racialisme, racisme

Dès 2018, la LDNA est répertoriée par le site Conspiracy Watch pour divers propos antisémites et complotistes[10]. Valeurs actuelles et Causeur considèrent cette organisation comme racialiste et raciste, certains souhaitant sa dissolution pour ces motifs[11],[12],[13].

Condamnations

Le créateur de la Ligue, Sylvain Afoua, qui se fait appeler Egountchi Behanzin, a plusieurs fois été condamné par la justice. L'AFP indique qu'il a été condamné en 2014 à sept ans de prison pour viol de personne vulnérable. Il a aussi été, en 2019, condamné pour intimidation envers un élu public, pour ses menaces envers l'ancien maire de Levallois-Perret Patrick Balkany[1],[14],[15].

Actions médiatisées et polémiques

2018

En , un membre de la LDNA fait irruption dans l'agence du Crédit agricole de Montrouge (Hauts-de-Seine) pour demander le licenciement d'un employé qui se trouve être militant de Génération identitaire[16].

En novembre de la même année, un rassemblement est organisé par la Ligue à la mairie du 20e arrondissement de Paris à la suite de la mort par arrêt cardiaque d'une femme de ménage d'origine africaine[4]. Selon le mouvement, celle-ci avait subi des remarques sexistes et des pressions de son supérieur hiérarchique. La municipalité contredit ces accusations[source insuffisante].

2019

Accompagnés par d'autres membres d'organisations opposées au racisme antinoir (comme le Conseil représentatif des associations noires de France ou l'Union nationale des étudiants de France), des militants de la LDNA s'opposent le à une représentation de la pièce Les Suppliantes du tragédien grec Eschyle à la Sorbonne[17],[18]. Les militants dénoncent le recours au maquillage ou à l'usage de masques sombres pour symboliser la couleur de peau des Danaïdes, mise en scène qu'ils jugent empreinte de racisme et assimilable à la pratique du « blackface » américain[19]. La pièce sera finalement jouée le mois suivant sans heurts.

La Ligue manifeste en contre l'exposition sur le pharaon Toutânkhamon, à la grande halle de la Villette. Les responsables du mouvement reprochent à l'exposition de ne pas relayer la thèse de l'intellectuel sénégalais Cheikh Anta Diop d'après laquelle les pharaons étaient des Noirs. D'après les égyptologues contemporains, l'Égypte antique était métissée et Toutânkhamon avait la peau claire[20],[21].

Le , deux militants de la LDNA provoquent un esclandre avec le maire de Levallois-Perret Patrick Balkany, et une gardienne d'immeuble. Le , on apprend lors du procès pour « acte d'intimidation envers un élu public » que les deux condamnés sont le président et un membre de la LDNA. Sylvain Afoua, déjà condamné dans cette affaire pour avoir donné aux policiers un nom d'emprunt, est très défavorablement connu de la justice, notamment pour avoir été condamné en 2014 à sept ans de prison pour viol sur personne vulnérable. Les prévenus sont condamnés à six mois de prison et 3 000 euros d'amende et ils doivent indemniser l'édile d'un euro symbolique. L'autre condamné, qui était aussi poursuivi pour « menace de mort réitérée » contre une amie de Patrick Balkany, doit en plus indemniser cette dernière à hauteur de 1 000 euros pour son préjudice[22],[23],[24],[14],[25].

La LDNA manifeste le devant l'ambassade d'Afrique du Sud à Paris contre les violences xénophobes ayant éclaté en Afrique du Sud contre des immigrés africains, principalement nigérians[26]. Lors de cette manifestation, l’un des intervenants déclare : « Si vous voulez être xénophobe, d'accord. Commencez par tuer les Blancs, commencez par tuer les Chinois, commencez par tuer les Indiens. Ne tuez pas vos frères nous avons la même couleur »[27].

2020

En , dans le contexte des manifestations et des émeutes qui suivent la mort de George Floyd aux États-Unis, la LDNA organise un rassemblement illégal au cours duquel son leader affirme que les violences et le racisme contre les Noirs sont la norme en France[5],[28]. Selon lui, l'État français poursuit une politique colonialiste et esclavagiste, recourant à des méthodes totalitaires et terroristes pour parvenir à ses fins. Au cours de la manifestation, les militants s’en prennent également à la mémoire du ministre de Louis XIV Jean-Baptiste Colbert en raison de son implication dans la rédaction du Code noir au XVIIe siècle, l'injuriant et appelant à détruire la statue à son effigie devant l'Assemblée nationale[29]. À la suite de ces actions controversées[30], plusieurs députés de droite s'indignent des propos tenus et le Rassemblement national demande alors la dissolution du mouvement[1].

Le , la LDNA appelle sur Twitter à une cession du Palais Royal, du Louvre et du château de Versailles aux populations d'origine africaine en réparation du passé colonial de la France[5],[31]. À cette occasion, le mouvement menace également les statues de Napoléon et de Charles de Gaulle. Au début du mois de juillet, la Ligue inclut également le Vatican et l'Église catholique parmi les organisations qui devraient réparer certaines actions et positions passées puis être dissoutes[32].

Fin juin, Egountchi Behanzin et des militants participent à un rassemblement près de l'ambassade des États-Unis en France, pourtant interdit par la Préfecture de police de Paris[33].

En , la LDNA critique le parti politique catholique Civitas, reprochant à son président et aux adhérents des positions esclavagistes et colonialistes[32].

En , à la suite de la publication par Valeurs actuelles d'une fiction où Danièle Obono est représentée en esclave[34], la LDNA s'introduit illégalement dans les locaux de l'hebdomadaire[35],[36]. Le surlendemain de cette action, des membres du mouvement manifestent à nouveau devant la rédaction. À cette occasion, des menaces physiques ainsi que des propos considérés comme antisémites sont tenus : « Face à la communauté juive, vous claquez des fesses ! Vous faites comme ça, comme des enfants. Même vous les policiers. Parce que votre président, on le voit, quand il va au dîner du CRIF et qu’on lève sa main, comme une marionnette »[36],[37]. Valeurs actuelles déclare avoir porté plainte[38].

Le , Egountchi Behanzin est arrêté à Bamako alors qu'il tente de brûler un drapeau français devant l'ambassade de France et déclare que « la France opprime le peuple africain ». La LDNA soutient qu'il s'agissait d'un acte contre la « politique impérialiste au Mali ». Il est libéré le lendemain[39].

Le , l'organisation écrit que Charles de Gaulle est « responsable de la mort de millions d’Africains », tout en ajoutant qu'elle ira « cracher sur sa tombe prochainement au nom des martyrs africains ». Le même mois, le député Les Républicains Julien Aubert écrit au ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin pour demander la dissolution de la LDNA[40],[41].

Procédure de dissolution

À la suite de l'invasion de la mairie de Val-de-Reuil par des membres de la Ligue de défense noire africaine, le samedi [42], le maire de la commune, Marc-Antoine Jamet est enfariné lors de la célébration de plusieurs mariages en mairie. L'évènement déclencheur de cette agression serait un ensemble de tensions communautaires, le dimanche précédent, dues à un différent entre deux enfants de la commune, l'un d'origine kurde, l'autre d'origine africaine.

Cette information est reprise par de nombreux médias dans les jours suivants[43] et déclenche une réaction de la part du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, qui annonce via le réseau Twitter, le 13 septembre 2021, avoir décidé de lancer la procédure engageant la dissolution de la LDNA[44]. Il qualifie dans ce tweet la LDNA de « structure raciste appelant à la haine et à la discrimination »[45].

Références

  1. N. Be., « Rassemblements contre le racisme : trois choses à savoir sur la Ligue de défense noire africaine », Le Parisien, (lire en ligne).
  2. « Gérald Darmanin qualifie la Ligue de défense noire africaine de « raciste » et engage une procédure de dissolution », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  3. Direction de l'information légale et administrative, Annonce n° 1261 : 75 - Paris, Paris, (lire en ligne)
  4. M. F. et BFMTV Paris, « Paris: mobilisation devant la mairie du 20e après la mort d'une employée », BFMTV, (lire en ligne).
  5. Justine Chevalier, « "Anti-négrophobe" et controversée, qu'est-ce que la Ligue de défense noire africaine ? », BFMTV, (lire en ligne).
  6. « Ligue de défense noire africaine (LDNA) », sur conspiracywatch.info, .
  7. « Qui est Egountchi Behanzin, l’homme qui est allé menacer “Valeurs actuelles”? », sur causeur.fr, (consulté le ).
  8. « Verna Béhanzin », sur yovoyovo.free.fr (consulté le )
  9. Véronique Campion-Vincent, « L'image du Dahomey dans la presse française (1890-1895) : les sacrifices humains », Cahiers d'Études africaines, vol. 7, no 25, , p. 27–58 (DOI 10.3406/cea.1967.3088, lire en ligne, consulté le )
  10. « Ligue de défense noire africaine (LDNA) », sur Conspiracy Watch | L'Observatoire du conspirationnisme, (consulté le ).
  11. Aurélien Marcq, « Le gouvernement doit dissoudre la Ligue de Défense Noire Africaine! », Causeur.fr, (lire en ligne).
  12. « La Ligue de défense noire africaine vomit la France, “un pays terroriste, colonialiste, esclavagiste”, en plein Paris », Valeurs Actuelles, (lire en ligne).
  13. Marine Carballet, « Les ultra-blacks de la LDNA, entre positionnement victimaire et attitude identitaire », Valeurs Actuelles. Le Club, (lire en ligne).
  14. Paul Sugy, « Qui est Sylvain Afoua, le sulfureux président de la Ligue de défense noire africaine ? » , sur Le Figaro,
  15. « Qu’est-ce que la Ligue de défense noire africaine, que Gérald Darmanin veut dissoudre ? », sur leparisien.fr, (consulté le ).
  16. « "Anti-négrophobe" et controversée, qu'est-ce que la Ligue de défense noire africaine? », sur BFMTV (consulté le ).
  17. Marie-Estelle Pech, « Les Suppliantes: Eschyle censuré par des «antiracistes» », Le Figaro, (lire en ligne).
  18. Baudoin Eschapasse, « Après la polémique, la revanche d'Eschyle à la Sorbonne », Le Point, (lire en ligne).
  19. Louis Nadau, « Pièce d'Eschyle bloquée pour "racisme": "Une pratique de terreur", s'alarme son metteur en scène », sur www.marianne.net, 2019-03-27utc15:49:32+0200 (consulté le )
  20. Michaël Naulin, « Après une pièce à la Sorbonne, des «antiracistes» tentent d’interdire l’expo Toutankhamon », Le Figaro, (lire en ligne).
  21. Bouchra Ouatik, « Voici pourquoi des manifestants s’opposent à une exposition sur Toutankhamon », Radio Canada, (lire en ligne).
  22. Le Figaro avec AFP, « Deux militants de la Ligue de défense noire africaine condamnés pour avoir intimidé Patrick Balkany », sur Le Figaro.fr, (consulté le ).
  23. Le Figaro, « Le procès des deux agresseurs présumés de Patrick Balkany renvoyé au 14 octobre », sur Le Figaro.fr, (consulté le ).
  24. « Patrick Balkany. Deux militants de la Ligue de défense noire africaine condamnés pour avoir intimidé le maire », Ouest France, 25/11/2019 à 19h41.
  25. « Deux jeunes hommes condamnés pour avoir intimidé Patrick Balkany », sur LExpress.fr, (consulté le ).
  26. « «Commencez par tuer les Blancs»: la LDNA a-t-elle lancé un appel au crime racial en Afrique du Sud ? », sur RT en Français, .
  27. Vincent Geny, « Qu'est-ce que la Ligue de défense noire africaine que Gérald Darmanin veut dissoudre ? », sur www.marianne.net, 2021-09-13utc14:33:50+0200 (consulté le )
  28. « La France, un pays « assassin », « négrophobe », « esclavagiste » : la LDNA fait bondir à droite », sur RT France, .
  29. « Polémique. Colonisation, esclavage : ces statues qu'on déboulonne », sur estrepublicain.fr (consulté le ).
  30. Hamza Hizzir, « Violences policières : deux nouveaux rassemblements interdits ce samedi à Paris », sur LCI, (consulté le ).
  31. « Le Palais-Royal, le Louvre et le château de Versailles « doivent être rétrocédés » selon la LDNA », sur RT France, .
  32. « Black Lives Matter : la LDNA veut dissoudre l’Eglise catholique », sur Valeurs actuelles, (consulté le ).
  33. « Les images de l'arrestation, à Paris, cet après-midi du fondateur de la Ligue de Défense Noire Africaine Egountchi Behanzin pour organisation de manifestation illégale - Vidéo », sur Jean-Marc Morandini, (consulté le ).
  34. Louis-Valentin Lopez, « Danièle Obono dépeinte en esclave par "Valeurs actuelles" : la classe politique outrée », sur France Inter, (consulté le ).
  35. J.Cl., « Obono représentée en esclave : la Ligue de Défense noire africaine s’introduit chez Valeurs Actuelles », sur Le Parisien, (consulté le ).
  36. « Ligue de défense noire africaine (LDNA) », sur Conspiracy Watch, (consulté le ).
  37. i24News, « France: le chef de la Ligue de défense noire africaine tient des propos antisémites en s'adressant à des policiers », sur i24news.tv, .
  38. « Danièle Obono représentée en esclave dans Valeurs Actuelles : la polémique en cinq actes », sur Ouest-France, .
  39. « Le leader de la LDNA arrêté à Bamako après avoir tenté de brûler un drapeau français (VIDEO) », sur RT France, (consulté le ).
  40. « La Ligue de défense noire africaine promet d'aller “cracher” sur la tombe du “criminel raciste” de Gaulle », sur Valeurs actuelles, (consulté le ).
  41. « Vaucluse. Le député Julien Aubert demande la dissolution de la Ligue de défense noire africaine », sur Le Dauphiné libéré, (consulté le ).
  42. Paul Gratian, « À Val-de-Reuil, le maire enfariné, la mairie envahie par des militants et une élue bousculée », Ouest-France, (lire en ligne).
  43. Catherine Lecompte, « Au Val de Reuil, des agressions sur des élus en mairie suscitent l'indignation », France 3 Normandie, (lire en ligne).
  44. « Gérald Darmanin lance une procédure de dissolution de la Ligue de défense noire africaine, “structure raciste” », sur leparisien.fr, (consulté en ).
  45. L'Obs avec AFP, « Gérald Darmanin engage la dissolution de la Ligue de défense noire africaine », nouvelobs.com, (lire en ligne).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

  • Portail des associations
  • Portail de l’Afrique
  • Portail de la politique française
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.