Henri II de Bourbon-Condé

Henri II de Bourbon, né à Saint-Jean-d'Angély en 1588 et mort à Paris en 1646, IIIe prince de Condé, est un prince de sang français qui joua un rôle important durant la minorité de Louis XIII, où il s'opposa à la régente Marie de Médicis. Il fut gouverneur de Bourgogne, gouverneur du Berry (1612-1615), duc de Montmorency, duc d'Albret, duc d'Enghien et de Bellegarde, premier prince du sang, comte de Sancerre (1640-1646), pair de France, grand veneur et grand louvetier de France.

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Henri II de Bourbon-Condé
Portrait du prince de Condé, vers 1630.

Titres

Héritier présomptif du trône de France


(5 ans, 2 mois et 3 jours)

Prédécesseur Henri III de Navarre
Successeur Louis de France

Prince de Condé


(58 ans, 3 mois et 25 jours)

Prédécesseur Henri Ier de Bourbon-Condé
Successeur Louis II de Bourbon-Condé
Fonctions militaires
Commandement Vice-roi de Nouvelle-France
Gouverneur du Berry
Conflits Guerres de religion
Biographie
Titulature Premier prince du sang
Prince de Condé
Pair de France
Duc de Montmorency
Duc d'Albret
Duc d'Enghien
Duc de Bellegarde
Comte de Sancerre
Dynastie Maison de Condé
Distinctions Chevalier du Saint-Esprit
Autres fonctions Grand maître de France
(1643-1646)
Grand veneur de France
Grand louvetier de France
Naissance
Saint-Jean-d'Angély
Décès
Paris
Père Henri Ier de Bourbon-Condé
Mère Charlotte de La Trémoille
Conjoint Charlotte de Montmorency
Enfants Anne-Geneviève
Louis II de Condé
Armand de Bourbon-Conti

Biographie

Fils posthume du prince Henri Ier de Bourbon, prince de Condé, Henri II est né en prison à Saint-Jean-d'Angély le . Sa mère Charlotte de La Trémoille avait été accusée d'avoir fait empoisonner son mari : son brusque décès est mis sur le compte d'un empoisonnement, ce qui est aussi bien supposé par les médecins que par ses proches (dont son cousin Henri de Navarre futur Henri IV de France)[1]. Ces derniers soupçonnent Charlotte d'avoir fait empoisonner son mari après l'avoir trompé ; la mise à la question d'un serviteur de Condé apporta de nombreuses charges contre son épouse, notamment sur ses amabilités envers un page[2]. Le roi de Navarre est également suspecté par les calvinistes d'avoir fait tuer son rival[3]. Charlotte est arrêtée et jugée par le parlement de Paris, mais les poursuites sont interrompues à la nouvelle de sa grossesse[4], et elle est simplement emprisonnée à Saint-Jean-d'Angély sous la garde de Jean de Saint-Memme[Note 1],[5]. Lorsque son cousin Henri IV monte sur le trône de France quelques mois plus tard, le statut d'Henri n'est toujours pas défini. Il est en principe le premier prince du sang et l'héritier de la couronne, mais sa légitimité n'est pas reconnue par ses oncles. Il est mis en nourrice à Mazeray, non loin de la prison de sa mère, et son sort reste précaire pendant quelques années.

Henri IV concéda la conversion de son neveu à la religion catholique afin de faire accepter un édit permettant aux réformés d'accéder aux charges publiques[6]. Il lui donna pour précepteur (gouverneur) le marquis de Pisany[7] ; le parti protestant accepte alors de laisser partir le prince pour la Cour[8]. Sur présentation d'un placet signé par de nombreux Grands (Diane de France, Henri de Montmorency, le comte d'Auvergne, le duc de Bouillon...), Henri IV se résigna en juillet de la même année à libérer la princesse, le procès reprenant devant le Parlement à Paris[9]. L'acquittement fut prononcé le , et son abjuration de la religion réformée la même année[10]. Henri IV reconnaît l'enfant de Charlotte-Catherine comme le fils légitime d'Henri Ier de Bourbon, lui donnant ainsi le rang de premier prince du sang. Henri II est alors l'héritier présomptif du trône de France jusqu'à la naissance du futur Louis XIII en 1601.

Portrait par un peintre anonyme,
Musée Condé, Château de Chantilly

En 1595, le roi le prend officiellement sous sa tutelle. Le pape exigeant que Condé soit élevé dans la religion catholique, le petit prince est enlevé à son entourage protestant et emmené au château de Saint-Germain-en-Laye. Bien qu'héritier du trône, il y grandit dans l'indifférence. En fait, le roi Henri IV avait peu d'estime pour ses cousins Condé et ne portait que peu d'affection au jeune Henri[11].

Premier exil

En 1609, quelques mois donc avant d’être assassiné, Henri IV, âgé de 56 ans, tombe follement amoureux de Charlotte de Montmorency, qui n’a que 15 ans et est fiancée au marquis de Bassompierre. Espérant que le prince de Condé, réputé homosexuel, serait un mari complaisant, le vieux roi marie le prince à celle qu'il convoite.

Henri IV poursuit Charlotte avec tant d'assiduité qu'Henri de Condé s'enfuit avec celle-ci le à Bruxelles, à un moment où les tensions s'exacerbent entre la France et l'Espagne à la suite de l'affaire des duchés de Clèves et de Juliers et au rapprochement de la France et de la Savoie[12]. Craignant une invasion française, le gouvernement des Pays-Bas espagnols n'autorise le séjour que de son épouse. Henri de Condé doit donc poursuivre sa fuite jusqu'à Cologne. La situation dégénère à tel point qu'Henri IV prépare une expédition militaire qui doit traverser les Pays-Bas espagnols au prétexte d'intervenir dans les conflits de succession des principautés de Cleves et de Juliers. Cette initiative est interprétée comme une action pour libérer Charlotte, au risque d'un conflit avec l'Espagne, ce que certains historiens comparent ironiquement à la guerre de Troie[13]. Elle aurait incité Albert d'Autriche, gouverneur des Pays-Bas, à organiser un complot pour assassiner Henri IV[14].

Régence

Henri II de Bourbon-Condé revient en France après l'assassinat du roi par Ravaillac en 1610, sous la régence de Marie de Médicis, qui le nomme l'année suivante vice-roi de la Nouvelle-France. En 1612[réf. souhaitée], il reçoit de Louis XIII l'Hôtel de Gondy, dans l'actuel 6e arrondissement de Paris. Renommé Hôtel de Condé, celui-ci occupait un large triangle terminé par l'actuel Théâtre de l'Odéon.

Comme d'autres grands aristocrates, Henri de Condé jalousait le pouvoir de la régente et l'influence de ses favoris, dont l'Italien Concini, au détriment de celle des princes de sang.

En 1613, lorsque les largesses de la couronne se tarissent par manque d'argent, il franchit le pas et lance un violent manifeste contre le pouvoir. Se posant en protecteur des protestants, il s'oppose à l'alliance matrimoniale avec l'Espagne, qui prévoit le mariage du jeune Louis XIII avec l'infante Anne d'Autriche. Les premières prises d'armes des grands se concluent avec le traité négocié par Condé avec la régente à Sainte-Menehould le , par lequel de nouvelles pensions sont accordées par la couronne, l'alliance matrimoniale avec l'Espagne est suspendue et la convocation des états généraux est prévue.

Afin de le contrer, la régente limoge les ministres trop faibles et appelle le cardinal de Richelieu, tout en gardant Concini. Ayant reçu de la régente le gouvernement du Berry, Henri se réfugie dans ses terres. Il veut alors se faire oublier pour que les horreurs du gouvernement Concini le détruisent de l'intérieur. Mais la manœuvre est découverte, la régente le rappelle à la cour en lui promettant tant et plus.[pas clair] En 1614, il fait reconstruire l'église de Vallery, où la plupart des membres de la famille seront inhumés sous le maître autel.

Les États généraux, qui se déroulent d' à , ne donnent aucune satisfaction à la noblesse et laissent le champ libre à Marie de Médicis. Les « mariages espagnols » sont célébrés en 1615 : Louis XIII épouse l'infante Anne d'Autriche, tandis que le futur Philippe IV d'Espagne épouse la sœur du roi, la princesse Élisabeth de Bourbon. La colère des grands se ranime.

Condé obtient un nouveau traité avec la régente qui accepte, par la paix de Loudun du , son entrée dans le conseil de régence. Chef du Conseil, Condé s'oppose farouchement à la politique, mais surtout à la personne de Concini, et il se heurte aux autres membres du conseil. Il contracte la syphilis. Richelieu, alors en pleine ascension au service de Concini et de la reine-mère, se méfie de lui et le fait arrêter en plein conseil le . Condé est emprisonné de 1616 à 1619 à la Bastille puis au donjon de Vincennes, où il demande à être rejoint par son épouse Charlotte. Celle-ci accouche de deux enfants morts-nés, puis d'une fille vivante le , Anne Geneviève de Bourbon-Condé (la future duchesse de Longueville, une des chefs de la Fronde). Deux mois plus tard, les Condé sont remis en liberté par le roi grâce à l'intervention du Duc de Luynes.

Sous Louis XIII

Une fois libéré par Louis XIII en 1619, Condé se conduit en fidèle serviteur du roi, participant aux nombreuses campagnes de celui-ci. En 1622, il participe à la guerre contre les huguenots dans le sud du royaume, prend Nègrepelisse, met le siège devant Montpellier mais doit le lever au bout de six semaines, une épidémie s’étant déclarée dans son camp. Le , il quitte le Languedoc pour accomplir un vœu à Notre-Dame de Lorette. De son séjour de plus de quatre mois en Italie (-), il reste un récit dont on ne sait pas s'il est l'auteur (mais ce n'est pas exclu), le Voyage de Monsieur le prince de Condé en Italie depuis son partement du camp de Montpellier jusques à son retour en sa maison de Mouron (= Montrond), ensemble les remarques des choses les plus notables qu'il a veues en son dit voyage (publié à Bourges, J. Coppin, 1624).

Le prince de Condé obtint à la fin de 1627 un commandement contre les protestants du Languedoc, puis après l'entrée en guerre de la France contre l'Espagne, il est placé en 1638 à la tête de l'une des armées qui luttent contre l’Espagne sur la frontière pyrénéenne. Il échoue au siège de Fontarabie, puis prend Salses (1639) et Elne (1642) dans le Roussillon.

Chantilly

Tombe de Henri II de Bourbon-Condé dans l'église de Vallery.

En 1643, alors que leur fils « le Grand Condé » vient de remporter la bataille de Rocroi, son épouse Charlotte de Montmorency reçoit d'Anne d'Autriche le château de Chantilly, ancienne propriété de la maison de Montmorency confisquée en 1632 lors de l'exécution d'Henri de Montmorency (frère de Charlotte). Le château restera propriété des Condé jusqu'à leur extinction en 1830.

Le prince de Condé meurt en . Son Oraison funèbre est prononcée par Cosme Roger prêtre et moine feuillant. Elle fut imprimée à Bourges en 1653[15].

Armoiries

Le prince portait D'azur, à trois fleurs de lys d'or, au bâton de gueules péri en bande[16]

Ascendance et postérité

Henri II était l'unique fils de Henri Ier de Bourbon, prince de Condé (1552-1588) et de Charlotte (1568-1629), demoiselle d'honneur de Catherine de Médicis (1581 à 1585), fille de Louis III de La Trémoille (1521-1577), duc de Thouars.

Résidences

Notes et références

Notes

  1. Jean IV de la Roche, seigneur de Saint-Même et baron de La Rochebeaucourt.

Références

  1. Lettre d'Henri du 10 mars 1588, cité dans (Aumale 1889, Henri de Bourbon).
  2. Aumale 1889, Henri de Bourbon, p. 180.
  3. Aumale 1889, Henri de Bourbon, p. 182.
  4. Aumale 1889, Henri de Bourbon, p. 181.
  5. Aumale 1889, Henri II de Bourbon, p. 223.
  6. Aumale 1889, Henri II de Bourbon, p. 228-229.
  7. Aumale 1889, Henri II de Bourbon, p. 231.
  8. Aumale 1889, Henri II de Bourbon, p. 234.
  9. Aumale 1889, Henri II de Bourbon, p. 229-230.
  10. Aumale 1889, Henri II de Bourbon, p. 241.
  11. Jean-Pierre Babelon, Henri IV, Paris, Fayard, 1982, p. 647 (le roi n'hésite pas à laisser planer le doute sur la bâtardise de petit prince de Condé ; notamment à des fins politiques : obtenir le démariage avec la reine Marguerite). Sur l'antipathie du roi pour son cousin Soissons (Babelon, p. 406), et ses relations avec ses cousins (Babelon, p. 647, 710), la méfiance à l'égard du cardinal de Vendôme qui intrigue contre lui (Babelon, p. 505). Voir également les biographies sur Catherine de Bourbon dont le roi empêcha le mariage avec Soissons. Sur la rivalité avec Henri Ier de Condé, voir ↑ Arlette Jouanna (dir.), Histoire et dictionnaire des guerres de religion, 1559–1598, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1998, p. 814-816, 1011-1012.
  12. Alain Hugon, Au service du roi catholique : Honorables ambassadeurs et divins espions : représentation diplomatique et service secret dans les relations hispano-françaises de 1598 à 1635, Casa de Velázquez, , 700 p. (ISBN 978-84-95555-59-5, présentation en ligne)
  13. Jean-Christophe Petitfils, L'assassinat d'Henri IV : mystères d'un crime, Paris, Ed. Perrin, , 330 p. (ISBN 978-2-262-03914-1)
    Les sections du livre allant de la page 58 à la page 100 sont intitulées "L'enlèvement de la Belle Hélène" puis "La guerre de Troie aura-t-elle lieu?"
  14. Jean-Christian Petitfils, L'assassinat d'Henri IV : mystères d'un crime, Paris, Ed. Perrin, , 330 p. (ISBN 978-2-262-03914-1), pages 233 à 279
  15. Jean François, Bibliothèque générale des écrivains de l'ordre de Saint-Benoît, 1777, tome II, p. 512. Son nom y est orthographié Rougier
  16. Popoff 1996, p. 25.
  17. Notice explicative apposée sur le monument, consulté le 24 septembre 2011.

Annexes

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • Caroline Bitsch, Vie et carrière d'Henri II de Bourbon, prince de Condé (1588-1646) : exemple de comportement et d'idées politiques au début du XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, coll. « Bibliothèque d'histoire moderne et contemporaine » (no 27), , 541 p. (ISBN 978-2-7453-1620-2, présentation en ligne).
  • François Brizay, Touristes du Grand Siècle. Le voyage d'Italie au XVIIe siècle, Paris, Belin, 2006.
  • Henri d'Orléans duc d'Aumale, Histoire des princes de Condé pendant les XVIe et XVIIe siècles, Paris, Calmann Levy frères, .
  • Michel Popoff (préf. Hervé Pinoteau), Armorial de l'Ordre du Saint-Esprit : d'après l'œuvre du père Anselme et ses continuateurs, Paris, Le Léopard d'or, , 204 p. (ISBN 2-86377-140-X).
  • Henri, duc d' Aumale, Histoire des Princes de Condé durant les XIVe et XVIIe siècles, vol. 2, Paris, Calmann-Lévy, (lire en ligne)
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