Eugénie Fougère

Eugénie Fougère, née le à Marseille et morte après 1934, est une artiste de vaudeville et de music-hall française. Elle est connue pour ses personnages de soubrette, synonyme de coquette, femme frivole connue pour ses tenues aguichantes, ses fringants mouvements et son comportement suggestif, et aussi pour son interprétation de cake-walk qui dans son propre style, reproduit les rythmes de cette danse née parmi les Noirs afro-américains[1]

Ne doit pas être confondu avec Eugénie Fougère (demi-mondaine).

Elle ne doit pas être confondue avec la demi-mondaine, Eugénie Fougère, bien qu'elles se connaissaient, fréquentaient les mêmes cercles et vécurent dans la même rue à Paris pendant un certain temps[2],[3],[4].

Carrière

Eugénie Fougère vers 1890 (affiche d'Alfred Choubrac)
Eugénie Fougère au Café des Ambassadeurs

Fougère fait sa première apparition sur scène à l'âge de 12 ans, en Avignon[5] et à 14 ans à Marseille[6]. À l'âge de 15 ans, elle commence sa carrière au Café des Ambassadeurs à Paris où elle passe le reste de sa vie. Elle devient célèbre comme chanteuse excentrique ou gommeuse[7] et comme danseuse des Folies Bergère et de L'Olympia[8].

Son premier succès est comme chanteuse épileptique, un genre « qui a créé un style de concupiscence sexuelle combinée avec le clownesque des contorsions corporelles, créant une femme grotesque. »[9]. Les chanteuses épileptiques comme Polaire et Fougère ont été l'une des plus grandes attractions de la nuit parisienne dans le dernier quart du 19e siècle, en raison de l'attraction commerciale de l'obscénité et de la provocation sexuelle.

Cake-walk

Tout comme Polaire et Mistinguett, Fougère est devenue connue pour sa technique de danse « racialement ambigüe » ; Elle a dansé le ragtime et le cake walk, populaires à l'époque, qui sont devenus une folie fin 1902[10]. L'ambigu cake-walk est devenu rapidement très populaire et Fougère est apparue sur la couverture de Paris qui Chante[11] , dansant sur la chanson  Oh ! ce cake-walk dont les paroles assimilent la danse afro-américaine, avec les singes et l'épilepsie[12]. André Levinson, théoricien de la danse,  disait qu'il est impossible pour les Européens de recréer les mouvements de la danse africaine, et c'est pourquoi le public est surpris par elle[13].

La « frénétique divette » a été une précurseuse dans l'art du music-hall, en introduisant des chansons et des danses de tous les pays, longtemps avant que ce ne se soit devenu à la mode dans les cafés-concerts, tout en portant les plus improbables toilettes, ornées de couleurs paradoxales. En décrivant une revue à La Cigale, près de Place Pigalle en 1920, où elle est apparue dans le costume d'un Noir américain, Rae Beth Gordon, professeur de littérature française, note que « au moins, dans cette fantaisie originale, dit elle, j'ai senti de nouveau mon ancien moi ». Le blackface par des chanteurs blancs suggère que les motivations pour adopter l'apparence d'une personne noire et les effets d'une telle mascarade va au-delà de son utilisation pour une simple représentation théâtrale. Fougère se sentait plus à l'aise dans un corps noir ou, au moins, dans un corps régi par des mouvements et des rythmes afro-américains que dans un corps blanc privé de la possibilité de s'exprimer sans retenue[14].

Aux États-Unis

L'audacieuse Fougère fait ses débuts aux États-Unis le 7 septembre 1891, au Koster and Bial's Music Hall à Broadway. Elle a tourné aux États-Unis pendant de nombreuses années, mais sa représentation est souvent trop forte pour le public. Elle a été sifflée sur scène à Kansas City, par exemple. « Les gens pensent que je suis - ah - comment vous dites " Naughtee" ? », a-t-elle commenté. « Ah, monsieur, ils ne comprennent pas, ils apprendront ... Ah, ces Américains, ils sont un peu lents, mais ils aiment tous la grande Fougère quand ils la connaissent ... Mais, oh ! tout essoufflée, c'est terrible »[15].

Ses performances choquaient souvent les Nord-Américains puritains et révélaient leur hypocrisie[réf. souhaitée]. En octobre 1907, alors qu'elle se produisait au Gaiety Theatre de Washington[16], elle a été amenée au commissariat de police où elle a dû payer une caution de 50 $ pour assurer sa « bonne conduite ». Malgré le fait que le sergent de police ait apprécié son spectacle au premier rang, en particulier sa « spécialité », il a néanmoins dit qu'il était choqué et l'a traînée au poste de police[17].

Vol à l'étalage

En mai 1906, Fougère et son mari, l'acteur Albert Girault (également orthographié Girod), ont été condamnés pour vols à l'étalage d'une robe de nuit, de la lingerie et d'autres articles, après avoir quitté Lewis & Alleby's, magasin de textile basée à Londres[18],[19]. Elle se produisait au Oxford Music Hall pour un salaire substantiel et affirmait qu'elle avait oublié de payer. Les accusations ont été rejetées en appel. Elle avait la réputation de dépenser de l'argent rapidement[20].

En 1909, elle fait une apparition à Montréal qui a choqué et scandalisé le public à cause de sa performance et de « l'affichage excessif de lingerie »[20]. Un article de la Gazette de Montréal mentionnait le lendemain que « Mademoiselle Eugénie Fougère, l'actrice française de music-hall, qui a été annoncée comme vedette de Bennett cette semaine, a fait sa première et dernière apparition à ce théâtre hier après-midi. Elle était peut-être tout à fait acceptable dans les music-halls de Londres et de Paris, Elle n'avait certainement pas sa place dans un théâtre montréalais ». Le directeur du théâtre dit à Eugénie qu'elle ne serait plus autorisée à réapparaître[20].

Fin de carrière

Selon Gordon, elle est revenue sur scène en 1920 après une longue pause, aux Ambassadeurs, aux côtés de la danseuse et actrice française Polaire. Cependant, dans une interview avec Maurice Hamel en 1925, elle se plaignait de n'avoir plus d'engagements et de perdre sa fortune (des bijoux d'une valeur de 275 000 FF lui avaient été volés).

En 1934, elle donna une autre interview à Hamel dans un petit appartement à Paris où les murs étaient couverts de photographies, ayant créé son propre musée dans lequel elle se remémora sa riche carrière. Elle a dit qu'elle avait eu beaucoup de difficultés pour corriger le faux avis de sa mort en 1903 quand elle a été confondue avec son homonyme. En 1937, elle joue une vieille coquette dans le film Les Perles de la couronne de Sacha Guitry.

Héritage

Gordon note que la popularité d'artistes comme Eugénie Fougère « était comparable à celle d'Elvis Presley un peu plus d'un demi-siècle plus tard ». Elle a inspiré plusieurs danseurs, actrices et chanteurs célebre de son époque, qui ont incorporer le style de danse « nègre » et africaine qu'elle a utilisé dans ses spectacles. Elle a également été l'une des pionnières des artistes burlesques music-hall et de théâtre. Fougère a été représentée dans une peinture murale sur le toit du bar de l'Hôtel Knickerbocker à Times Square à New York, quand il a rouvert en 2015, pour commémorer l'époque où l'hôtel était l'endroit le plus « chaud » de la ville, au début des années 1900[21],[22].

Références

  1. (en) Gordon, Dances With Darwin, p. 236
  2. Un asssassinat à Aix-les-Bains, Le Figaro, 21 septembre 1903
  3. Anne-Marie Bossy, Les Grandes Affaires Criminelles de Savoie, pp. 81-104
  4. Les survivants du Caf’Conc’, Maurice Hamel, Lectures pour tous, aout 1934
  5. La Gommeuse excentrique Eugenie Fougere, Comœdia, 12 septembre 1925
  6. « Gil Blas », sur Gallica, (consulté le )
  7. (en) Gordon, Why the French Love Jerry Lewis, p. 76
  8. Les Chansons illustrées
  9. (en) Gordon, Rae Beth (2004). Fashion and the White Savage in the Parisian Music Hall, Fashion Theory, 8:3, pp. 267-299
  10. (en) Moore Whiting, Satie the Bohemian, p. 299
  11. Couverture de Paris qui Chante, le 18 octobre 1903
  12. (en)Gordon, Dances With Darwin, p. 177
  13. (en) Andre Levinson, Theatre: Essays on the Arts of the Theatre, 235–245 p.
  14. Gordon, Dances With Darwin, p. 239
  15. (en) Hissed Her of the Stage; Mme. Fougere’s Too French Gestures Displeased Her Audience, The Pandex of The Press, January 1908
  16. (en) Lost Washington: The Gayety Theater, Greater Washington, January 26, 2011
  17. Fougere "pinched", Variety, October 5, 1907
  18. « Sad Downfall of Famous Artiste », Gazette Times,
  19. The Fall of Fougere; Parisian Stage Favorite In A Jail In London. The Syracuse Herald, June 3, 1906
  20. « Act Too Naghty », Montreal Gazette,
  21. If This Wall Could Talk, New York Daily News, April 26, 2015
  22. Our History, The Knickerbocker Hotel website (accessed 22 September 2017)

Bibliographie

Liens externes

Images externes
Eugénie Fougère par Napoléon Sarony, Digital Collections, The New York Public Library, Astor, Lennox, and Tilden Foundation.
images d'Eugénie Fougère lire en ligne sur Gallica
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