Du vent dans les branches de sassafras

Du vent dans les branches de sassafras est une pièce de René de Obaldia créée à Bruxelles en 1964.

Du vent dans les branches de sassafras

Signature de René de Obaldia

Auteur René de Obaldia[1]
Genre Comédie[1]
Nb. d'actes 2
Musique de scène Ralph Darbo[1]
Éditeur Grasset
Date de création en français [1]
Lieu de création en français Théâtre de Poche à Bruxelles[1]
Compagnie théâtrale Compagnie du Théâtre de Poche
Metteur en scène René Dupuy[1]
Rôle principal Michel Simon[1]

Cette comédie en actes, parodie d'un western américain des années 1950, est le chef-d'œuvre du dramaturge, romancier et académicien René de Obaldia. La première parisienne a lieu le dans une mise en scène de René Dupuy avec Michel Simon dans le rôle principal (voir ci-dessous « Premières représentations »).

En 1981, à la reprise de la pièce, ce sera Jean Marais qui l'interprètera, tandis qu’à celle de 2016 ce sera au tour de François Berléand.

Synopsis

Le rideau se lève sur une salle-à-manger à la décoration sobre. La scène se déroule au début du XIXe siècle, dans une demeure familiale, située au sein d'un ranch de l'État du Kentucky, au Sud-Est des États-Unis[2],[3].

Chez les Rockefeller, famille de colons britanniques sans-le-sou, la table est dressée[2],[3].

John Emery, patriarche de 70 ans à l'aspect échevelé et à la voix éraillée, se révèle comme un « dur à cuire »[2],[3]. C'est un vieux cow-boy au tempérament sanguin et à la verve directe et fleurie[2],[3]. Son épouse Caroline, une femme d'une cinquantaine d'années à la personnalité habituellement calme et apaisante, fait preuve d'un solide discernement[2],[3]. Le couple Rockefeller a produit deux enfants : une fille, Pamela, une magnifique jeune femme au caractère aguicheur ; et un fils, Tom, invétéré mâcheur de chewing-gum, le prototype même du jeune chenapan[2],[3].

Le personnage principal, le patriarche américain John Rockefeller, est complètement dépassé par les évènements : il doit simultanément faire face aux perpétuelles attaques d'Indiens « hauts en couleur », aux multiples imbroglios romantiques qui se jouent au sein de son foyer, à la brusque crise de démence de sa femme et enfin aux égarements alcoolisés du médecin local, le Docteur Butler, un homme particulièrement porté sur la boisson[4].

Personnages

Personnages principaux

Le comédien Michel Simon (1895-1975) - John Emery Rockfeller.
  • John Emery Rockefeller : incarné par Michel Simon[Note 1],[5]. C'est un homme de 70 ans, il se présente tel un « dur à cuir »[1],[6].
  • Caroline Rockefeller : incarnée par Françoise Seigner. Il s'agit de la femme de John Emery Rockefeller, elle est âgée d'environ 50 ans et possède des formes généreuses[1],[6].
  • Pamela : incarnée par Caroline Cellier. C'est la fille de John et Caroline. Elle est âgée de 17 ans et témoigne d'une « beauté provocante »[1],[6].
  • Tom : incarné par Bernard Murat[Note 2],[7]. Il s'agit du fils de John et Caroline. Son emploi est celui d'un « pâle voyou »[1],[6].

Personnages secondaires

  • William Buttler : incarné par Jacques Hilling. Il s'agit d'un homme particulièrement porté sur la boisson et est médecin de profession[1],[6].
  • Carlos : incarné par Michel Roux. C'est un homme d'une quarantaine d'années, plutôt bien mis de sa personne. Il est l'exact prototype d'un personnage issu d'un film de John Ford[1],[6].
  • Myriam : incarnée par la comédienne Rita Renoir. Elle est également connue sous le sobriquet de « Petite-Coup-Sûr ». L'emploi principal de ce personnage consiste en celui d'une prostituée « au grand cœur »[1],[6].
  • Œil-de-Perdrix : incarné par Francis Lemaire. C'est indien chef de guerre d'une tribu Apache. Il se présente tel un allié des visages pâles et est considéré comme un traître vis-à-vis de sa communauté[1],[6].
  • Œil-de-Lynx : C'est le chef des Comanches. Il manifeste une très grande méchanceté[1],[6].

Style et analyse de l'œuvre

Concernant l'un des passages-clés de cette comédie obaldienne, Monique Trédé, dans son étude de l'œuvre « La Paix », du grec Aristophane, établit un parallèle entre les deux pièces théâtrales :

« L'effet, mutatis mutandis, est proche de celui obtenu par Obaldia dans sa fantaisie inspirée « Du vent dans les branches de sassafras » quand, à un moment critique de l'action, il confie au personnage de « la putain au grand cœur » une longue tirade en alexandrins. Le public saisi par le caractère incongru de ce changement de ton, s'esclaffe ; il se délecte, de plus, en reconnaissant ici ou là une transposition du vocabulaire et des rythmes de la tragédie classique. »

 Monique Tredé, Modèle:2000, p. 131[8].

« Ô terreur inconnue.... Ô nature trompeuse... ...Ce ne sont que soupirs, plaintes, gémissements... »

 René de Obaldia, "Du vent dans les branches de sassafras", Acte I, scène 5.

Après la création de Génousie, en 1960[Note 3],[9], une pièce dramatique au style théâtral tourné vers le surréalisme et qui incarne le « nouveau théâtre », le futur académicien d'origine panaméenne s'oriente cinq années plus tard, avec la production de Du vent dans les branches de sassafras, vers un genre parodique et avant-gardiste. Cette nouvelle direction que prend l'auteur apparaît, pour certains critiques, comme un étroit rapprochement avec la comédie dite de « boulevard »[10],[11]. En outre, ce nouvel opus du dramaturge permet à l'acteur et comédien Michel Simon, qui endosse le personnage principal de la pièce, d'effectuer un remarquable « retour » sur la scène du spectacle[10],[5],[12]. De sucroît, cette nouvelle œuvre théâtrale qui connaît une bonne réception auprès du public[13],[12], conforte Obaldia dans son

« statut de dramaturge à succès qui ne sera, dès lors, plus jamais démenti. »

 Christophe P. Lagier, , p. 146[10].

Premières représentations

Le comédien François Berléand.

Reprise de la pièce en 1981

  • Après avoir incarné un patriarche (dans le Roi Lear en 1978) et celui d’un truand (dans Robert Macaire en 1971 à la TV), Jean Marais rêvait de jouer dans vrai western à l’américaine. Malheureusement ce genre cinématographique était passé de mode, même aux États-Unis. En revanche, lorsque Jacques Rosny, metteur en scène de théâtre, lui demanda de reprendre le rôle du vieux cow-boy Rockefeller dans la pièce Du vent dans les branches de Sassafras, Marais hésita. Dans un premier temps, il pensa qu’il lui serait impossible de se mesurer avec l’interprétation si brillante de Michel Simon pour le rôle qu’il avait créé en 1965, car on ne pouvait pas imaginer personnalités plus dissemblables que ces deux acteurs. Mais, sachant fort bien que le métier qu’il faisait était un métier à risque, Marais, plutôt que se défiler, considéra l’opportunité comme un défi et excité par le challenge, finit par accepter le rôle en prenant un gros risque, déclarant avec un brin de fausse modestie : « J’accepte comme une discipline, afin de continuer à faire des progrès. »
  • La première représentation eut lieu le , au théâtre de la Madeleine à Paris. La critique salua unanimement la performance de Marais, entouré notamment de Nadia Barentin (qui sera remplacée par Gisèle Touret lors de la tournée), Pierre Destailles et Francis Lemaire. L’auteur, René de Obaldia dira de lui : « Ce qui m’a le plus émerveillé, c’est le privilège qu’il a d’avoir conservé ce don de l’enfance en parallèle avec la maturité que la vie vous donne ; Il est devenu un patriarche, mais toujours avec cet élan, cette jeunesse d’esprit, de cœur qui lui sont propres. » Sans doute fut-ce là l’une de ses meilleures compositions d’acteur dans les années 1980. Chaque soir, le public lui fit une véritable ovation, pour cette interprétation de vieux cow-boy hirsute, sans peur et sans reproche, patriarche au sang chaud et aux propos musclés, à la voix cassée d'un vieux dur à cuire, dans une parodie de western pleine d’humour et de poésie avec des figures du genre, comme le médecin ivrogne ou la putain au grand cœur.
  • La pièce fut jouée plus de deux cents fois. Après le triomphe parisien, elle tourna en 1982 en province, mais pour peu de temps, car voilà que le mauvais sort fut au rendez-vous, à Bordeaux, le . Marais fut pris d’un malaise en scène dès le premier acte à cause d’une violente douleur à la jambe et malgré l’intervention d’un médecin, elle s’intensifia au second jusqu’à devenir insupportable et nécessita l’interruption de la pièce. Les médecins diagnostiquèrent une affection du nerf crural qui l’empêcha de bouger la jambe et le faisant atrocement mal. Aussi, il dut abandonner la tournée, restant sept semaines alité. Puis, portant un corset peu pratique, il reprit courageusement la pièce et tiendra son rôle jusqu’au bout.
  • La tournée se prolongea sur des mois, donna lieu à une version télévisée en 1983 (réalisation de Robert Valey).
  • Mise en scène en 1981 :

Reprise de la pièce en 2016

Notes et références

Notes

  1. À propos de son interprétation de John Emery Rockefeller dans Du vent dans les branches de sassafras, le comédien Michel Simon déclarait le dans le quotidien national Le Monde :
    « J'ai réussi trois fois à me libérer de l'esclavage d'un texte. »

     Michel Simon, , Le Monde[5].

    .
  2. L'écrivain et journaliste Philippe Labro, a recueilli les propos de Bernard Murat au Théâtre Gramont. Celui-ci évoque sa rencontre avec Michel Simon, dont il a partagé l'affiche 700 fois, et la fascination que l'acteur et metteur-en-scène, alors tout jeune, a eu pour la présence et la mémoire de texte du comédien septuagénaire[7].
  3. Cette pièce, mise en scène par Jean Vilar au Théâtre national populaire lors de sa première et dont l'accueil de la part du public et des critiques fut globalement positif, reçut le Prix de la Critique Dramatique en 1960[9].
  4. Ultérieurement, dans les années 1960, l'acteur journaliste et réalisateur Claude Berri joua également dans la pièce de R. de Obaldia, au Théâtre Gramont[14].

Références

  1. de Obaldia 2008, p. 172.
  2. Dominique Burger, « Du vent dans les branches de sassafras : René de Obaldia », sur BNFA - Bibliothèque Numérique Francophone Accessible, (consulté le ).
  3. « Du vent dans les branches de sassafras : de René de Obaldia », sur Site officiel de la Bibliothèque Nationale de France - data.bnf.fr, 2007-2016 (consulté le ).
  4. « Du vent dans les branches de sassafras », sur Site officiel de France2, (consulté le ).
  5. (en) Collectif - Modern Language Association of America. Bibliography Committee for French VII (Contemporary Literature), French Institute in the United States, French VII Bibliography, vol. 4, t. 18, New-York, Associated University Presse, (lire en ligne), page 2686.
  6. « Du vent dans les branches de sassafras : Western de chambre - de René de Obaldia », sur Les archives du spectacle, (consulté le ).
  7. Philippe Labro, 7 500 signes : Chroniques, Gallimard, , 478 p. (lire en ligne), page 128.
  8. Monique Trédé, « Aristophane, critique littéraire. », dans Monique Trédé et al., Le théâtre grec antique : la comédie. Actes du 10e colloque de la Villa Kérylos à Beaulieu-sur-Mer les 1er & ., vol. 10, Paris, Académie des Inscriptions et Belles Lettres, coll. « Cahiers de la Villa Kérylos », (lire en ligne), page 131, Note 10.
  9. (en) Edward Forman, « The Dictionnary », dans Edward Forman, Historical Dictionary of French Theater, Scarecrow Press, , 336 p. (lire en ligne), page 185.
  10. Christophe P. Lagier, « Bibliographie de trois auteurs dramatiques », dans Christophe P. Lagier, Le théâtre de la parole-spectacle : Jacques Audiberti, René de Obaldia et Jean Tardieu, Summa Publications, Inc., , 157 p. (lire en ligne), page 146.
  11. Jérôme Garcin, Littérature vagabonde, Flammarion, , 349 p. (lire en ligne), page 77.
  12. Danielle Moreau, 80 ans et toujours fringants!, Michel Lafon, , 206 p. (lire en ligne), page 142.
  13. René de Obaldia et Bertrand Poirot-Delpech, Discours de réception de René de Obaldia à l'Académie Française et réponse de Bertrand Poirot-Delpech, Grasset, , 180 p. (lire en ligne), pages 20 et 21.
  14. Claude Berri, Autoportrait, Editions Léo Scheer, 365 p. (lire en ligne), page 30.
  15. Hélène Rochette, « Pièce de théâtre : Du vent dans les branches de sassafras », sur Site officiel du périodique Télérama, (consulté le ).

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Source primaire

Sources secondaires

  • Delphine Salkin, Jorge Lavelli, maître de stage : à propos de "La Ronde" d'Arthur Schnitzler, Editions Lansman, , 178 p. (lire en ligne), page 171.
  • René de Obaldia, Discours de réception de René de Obaldia à l'Académie Française et réponse de Bertrand Poirot-Delpech, Grasset, , 180 p. (lire en ligne), pages 20 et 21.
  • Christophe P. Lagier, « Bibliographie de trois auteurs dramatiques », dans Christophe P. Lagier, Le théâtre de la parole-spectacle : Jacques Audiberti, René de Obaldia et Jean Tardieu, Summa Publications, Inc., , 157 p. (lire en ligne), page 146.
  • Gilbert François, « Aristophane et le théâtre moderne. », L'antiquité classique, vol. Tome 40, no fascicule 1, , pages 68, 69 et note 83 (DOI 10.3406/antiq.1971.1612, lire en ligne).

Voir aussi

Liens externes

Articles connexes

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