Drapeau de la Wallonie

Le drapeau de la Région wallonne, ou drapeau wallon, est l'un des symboles officiels de la Wallonie. Il est familièrement appelé coq hardi ou « coq wallon ». Il est l'emblème de la Région wallonne et celui de la Communauté française de Belgique. Il est composé d'un coq hardi (dont la patte droite est levée et le bec est clos) rouge sur fond jaune. Il est également utilisé par le Mouvement wallon.

Drapeau de la Wallonie

Drapeau de la Wallonie
Utilisation
Caractéristiques
Proportions 2:3
Adoption 23 juillet 1998
Éléments Jaune au coq hardi rouge

Histoire

L’initiative du Mouvement wallon

L'idée de créer un drapeau wallon apparaît vers 1898 lors des premières contestations du drapeau belge par le Mouvement wallon qui souhaite que le français reste la langue dominante en Belgique et estime que le gouvernement central est trop tolérant à l’égard du Mouvement flamand[1]. Un militant wallon écrit en 1898 dans le journal L'Âme wallonne:

« Le drapeau que nous déployons aujourd’hui dans nos fêtes nationales n’est pas le drapeau de 1830. Ce drapeau est adopté en 1834 […]. Le vieux drapeau de 1830, celui qui flottait sur les rangs de Volontaires belges, lors des Journées de Septembre […] a ses trois couleurs à la hampe, le noir au-dessus, le rouge en dessous et le jaune au centre […]. Wallons, dans toutes les circonstances où nous aurons à déployer notre drapeau, déployons fièrement notre vieux drapeau de 1830. Ce sera une protestation significative contre les agissements flamingants »[2].

Siège de la société historique Le Vieux-Liège, rue Hors-Château.

En 1905, le Charles Comhaire, membre de la Ligue wallonne de Liège et fondateur de la société historique Le Vieux-Liège, publie une étude intitulée Le drapeau belge est mal construit qui permet d'ouvrir un débat sur la nécessité d'élaborer un drapeau propre à la Wallonie. Lors d'un congrès organisé à Liège le 2 octobre de la même année, Paul Gahide déclare étudier la « question de savoir s’il n’y aurait pas lieu de déterminer la forme et les couleurs d’un drapeau wallon qui flotterait à côté du drapeau national dans toutes nos fêtes et dans toutes nos manifestations »[3]. Cette idée ne soulève cependant pas beaucoup d'enthousiasme parmi les congressistes qui craignent de passer pour des séparatistes[4].

Le choix du coq hardi

Drapeau français, marqué du coq wallon.

En 1907, la question refait surface dans l’hebdomadaire liégeois francophile Le Réveil wallon. Un témoin y propose que les Wallons adoptent le drapeau français bleu-blanc-rouge, qui serait marqué en son centre par un coq[5]. Cette idée obtient un certain écho puisque plusieurs revues suivent cette idée. La Revue française dirigée par Raymond Colleye arbore un coq sur sa première page. En 1909, une nouvelle revue liégeoise se baptise Li Coq wallon. En 1910, la revue universitaire L'Étudiant libéral affiche un coq aux ailes déployées comme symbole. En 1911, l'inauguration d'un monument commémorant la bataille de Jemappes met à nouveau le coq à l'honneur en Wallonie puisqu’il est surmonté par un coq gaulois chantant, en hommage aux soldats français morts pour préserver les acquis de la Révolution face aux troupes coalisées du Saint-Empire germanique défendant l'Ancien Régime. Dans son discours prononcé lors de l'inauguration du monument, Jules Destrée déclare: « Chante coq gaulois, coq wallon ! Jette au loin ton cri d’éveil et d’espérance ! Dis ta fanfare allègre au travers des campagnes ! Donne aux trop endormis un sursaut de révolte ! Par l’amitié française et leur propre énergie, les Wallons d’aujourd’hui voudront vivre leur vie ! »[6].

Monument aux morts français de Jemappes, surmonté du coq gaulois.

Ce choix démontre un attachement particulier des militants du Mouvement wallon à la République française, dont le symbole officieux est le coq gaulois, aux idéaux de la Révolution, aux valeurs républicaines, à l'héritage des Lumières et à l'histoire de France.

Le 7 juillet 1912, des figures marquantes du Mouvement wallon se réunissent à Namur pour créer officiellement l'Assemblée wallonne et envisagent d'établir une séparation administrative par laquelle serait constituée un entité juridique autonome, la Wallonie, à l'intérieur de l'État belge. Cette nouvelle région wallonne serait dotée d'un pouvoir décisionnel propre, commun aux populations des provinces latines du pays. Les travaux débutent dans cette optique à Charleroi le 20 octobre 1912 notamment afin d'étudier les questions du drapeau, de la fête et de l'hymne de la Wallonie. Les travaux à cette fin sont menés en Commission de l'Intérieur, présidée par l'homme politique socialiste et avocat carolorégien Paul Pastur. Un rapport est réalisé par l'écrivain Richard Dupierreux, le 16 octobre 1913.

Avant de choisir un drapeau, il semblait nécessaire de sélectionner un symbole officiel. Trois possibilités sont évoquées successivement.

La première possibilité était de constituer un drapeau reprenant les blasons des quatre Provinces wallonnes de l'époque, auquel serait ajoutés ceux des villes de Nivelles et de Tournai. Cependant, Jules Destrée avait insisté pour que le drapeau officiel fut simple et facilement reconnaissable afin de devenir populaire[1].

La deuxième possibilité était de reprendre un emblème historique déjà existant. Deux symboles étaient envisagés mais n'ont pas été retenus. Il s'agissait du Perron de Liège, symbole de l'ancienne Principauté de Liège, et du lion, animal figurant déjà sur le drapeau du Mouvement flamand et les armoiries du Royaume de Belgique. Ces deux options ont été écartées car elles ne permettaient pas à l'ensemble des Wallons de s'y identifier puisque le Perron parlait surtout aux Liégeois et le lion rappelait excessivement la Flandre et la monarchie belge.

La troisième possibilité, retenue cette fois, était celle d'un nouveau symbole créé par les membres de l'Assemblée. Plusieurs animaux sont évoqués, dont le sanglier (symbole ardennais), l'écureuil (symbole traduisant la sympathie supposée des Wallons), le taureau (symbole liégeois de Li Tore), l'alouette (symbole chrétien) et l'étalon (suggéré par un agriculteur d'Ath). L'étoile a également été mentionnée, mais elle rappelait trop l'État indépendant du Congo.

Face à l'indécision des débatteurs, le coq est à nouveau évoqué. Outre son symbolisme français apprécié par les militants wallons, ses vertus en font un être valorisé dans la culture chrétienne et européenne. Les Grecs et les Romains l'associaient à Apollon (Phoebus) et à Athéna (Minerve). Les Celtes gaulois l'associaient au dieu Lug. Dans le christianisme, il est un animal positif révélateur, marque du reniement de Saint-Pierre dans le Nouveau Testament, qui permettrait de chasser les démons et disposerait d'un pouvoir de guérison. Le coq figure aussi souvent au sommet des clochers des églises situées sur dans l'ancienne Gaule, depuis le pape Léon IV, au neuvième siècle.

L'association entre les mots « gaulois » et « coq » (puisque « gallus » en latin traduit à la fois ces deux termes) séduit les congressistes, soucieux de raccrocher l'identité wallonne à la civilisation latine et singulièrement française. Le coq gaulois est depuis longtemps un symbole de la France, figurant souvent sur les monuments aux morts français de la première guerre mondiale, sur les anciennes pièces de monnaies françaises, ou encore sur les maillots des équipes sportives nationales françaises.

Richard Dupierreux précise dans son rapport de 1913 que « depuis 1789, le coq a été par intermittence, l’animal emblématique de la patrie française (...). L’adopter à notre tour serait peut-être prêter le flanc aux attaques de ceux qui nous suspectent d’idées qu’aucun de nous ne partage » (...) « le coq français est chantant, la tête droite et le bec ouvert ; adoptons le coq hardi dont la dextre est levée ; le dessin héraldique en est aussi nerveux et la nuance pourra satisfaire tout le monde ».

Le coq hardi, dont la patte droite est levée et le bec est fermé, permet donc à la fois de rappeler l'adhésion de la Wallonie à la culture française et de souligner sa particularité.

Le choix des couleurs jaune et rouge

Arrivée à Bruxelles des volontaires de Liège, menés par Charles Rogier, le 7 septembre 1830, sous les couleurs du drapeau historique de la ville de Liège.

Le choix des couleurs du drapeau wallon a fait lui aussi l'objet de débats. La majorité des membres de la Commission de l'Intérieur propose d'arborer les couleurs jaune et rouge (celles du pays de Liège) utilisées par les révolutionnaires liégeois en 1830. Le président de la Commission décline cette idée, préférant y ajouter la couleur blanche. Le rapport de la Commission suggère de flanquer le drapeau wallon des couleurs du drapeau belge, noir, jaune et rouge, pour former les contours de l'étendard. L'emblème wallon serait dès lors clairement séparé du drapeau et constituerait un blason à part entière. Dans La Lutte wallonne a également été évoquée la possibilité de créer un drapeau bleu et rouge, marqué en son centre par le Perron liégeois surmonté d'un coq remplaçant la croix initiale[4]. Cependant, ces hypothèses ne parviennent pas à réunir une majorité de soutien. Jules Destrée choisit de reporter le vote au 20 avril 1913.

Cette nouvelle réunion permet aux mécontents de représenter leurs options écartées précédemment. Les Liégeois proposent de reprendre les couleurs jaune et rouge de Liège et rappellent que la couleur blanche est celle des royalistes français.

Le Coq hardi peint par Pierre Paulus en 1913.

Deux options sont identifiées: soit un coq rouge sur fond or (pour satisfaire les Liégeois), soit un drapeau blanc, jaune et rouge, reléguant le coq à un symbole figurant sur un blason distinct. Certains évoquent la possibilité d'adopter un drapeau blanc frappé d'un coq rouge, mais cette hypothèse est rejetée car elle évoque excessivement le drapeau du Japon. Lors des votes, le drapeau or marqué d'un coq hardi rouge l'emporte.

En conséquence, Jules Destrée fait publier dans La Défense wallonne un décret indiquant notamment que la « Wallonie adopte pour drapeau le coq rouge sur fond jaune, cravaté aux couleurs nationales belges » et que les « armes seront le coq hardi de gueules sur or, avec le cri : Liberté et la devise : Wallon toujours »[7].

Paul Pastur est ensuite chargé de créer une illustration officielle de ce nouveau coq. Il demande au peintre Pierre Paulus de dessiner un coq à la hauteur des espérances de l'Assemblée. Le 3 juillet 1913, une commission d'artistes se réunit à l'initiative de l'Assemblée wallonne et adopte officiellement le coq hardi, tel que peint par Pierre Paulus en 1912 pour l'Assemblée wallonne[8].

Statut juridique

Le drapeau wallon est défini et reconnu comme emblème officiel de la Wallonie par le décret de la Région wallonne du 23 juillet 1998 déterminant le jour de fête et les emblèmes propres à la Région wallonne[9].

Par ailleurs, le décret de la Communauté française du 3 juillet 1991 déterminant le jour de fête et les emblèmes propres à la Communauté française de Belgique dispose que le « drapeau de la Communauté française est jaune au coq hardi rouge »[10]. Le drapeau de la Communauté, fixé en annexe du même décret, est similaire au drapeau wallon défini par le décret régional du 23 juillet 1998 précité.

Notes et références

  1. « Le coq, emblème de la Wallonie | Connaître la Wallonie », sur connaitrelawallonie.wallonie.be (consulté le )
  2. L'Âme wallonne, 17 septembre 1898.
  3. Congrès wallon de 1905. Compte rendu officiel, Liège, 1905, p. 285.
  4. « DRAPEAU WALLON », sur wallonie-en-ligne.net, Institut Destrée (consulté le )
  5. Le Réveil wallon, no 6, 19 décembre 1907.
  6. Cité dans Ph. CARLIER, Le coq, dans Image de la Wallonie dans le dessin de presse (1910–1961), sous dir. L. COURTOIS et J. PIROTTE, Louvain-la-Neuve, 1993, p. 91-93.
  7. La Défense wallonne, n°6, juin 1913, p. 267.
  8. Directives de la Commission des artistes, Musée de la Vie wallonne, Fds AW.
  9. « Extrait du Moniteur belge - Décret déterminant le jour de fête et les emblèmes propres à la Région wallonne »
  10. « Décret du 3 juillet 1991 déterminant le jour de fête et les emblèmes propres à la Communauté française de Belgique »

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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