Cadence harmonique

En musique classique, une cadence est une formule mélodique et harmonique qui ponctue une phrase musicale, une section ou un morceau entier. Ce terme peut aussi désigner une partie improvisée dans un opéra ou un concerto.

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En jazz, le mot cadence a le sens de suite d'accords donnant un cadre et un accompagnement à un morceau de musique.

En harmonie tonale, une cadence est une progression harmonique destinée à marquer la fin d’une pièce ou, plus généralement, d’une phrase musicale, par son caractère conclusif ou suspensif :

Dans ce sens précis, les cadences sont comparables aux divers signes de ponctuation de la littérature. On peut dire également que les cadences constituent la respiration du discours musical.

Cadences harmoniques

Marcel Bitsch, dans son précis d'harmonie tonale[1], retient cinq types de cadences qui se caractérisent par leur structure harmonique, par leur usage et par l'effet qu'elles produisent. Toutes les cadences ont en commun de structurer et de ponctuer le discours musical. Ces cadences sont la cadence parfaite, la cadence imparfaite, la cadence rompue, la demi-cadence et la cadence plagale. D'autres types de cadences peuvent être ajoutées à cette classification. Ce sont des variantes, comme la cadence italienne, ou des cadences fortement connotées d'un compositeur comme la cadence Fauré.

La cadence parfaite

En harmonie tonale, la cadence parfaite est une cadence consistant en un enchaînement des degrés V et I, tous deux dans leur état fondamental (c’est-à-dire que la fondamentale de l’accord est à la partie basse dans les deux cas) et sur les temps forts. Pierre angulaire de la musique tonale, la cadence parfaite est habituellement comparée au point de la phrase à cause de son fort caractère conclusif.

  • C’est le type de cadence que l’on trouve généralement à la fin d’un morceau ou d’une section importante. Elle donne une impression de repos complet. Dans les fins de partie ou de morceau, la tonique est disposée à la partie supérieure.

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Cadence parfaite
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Cadence parfaite en do majeur
  • Dans un accord parfait, la sensible monte toujours à la tonique sauf dans le seul cas où on entend la tonique à la voix juste au-dessus (par exemple, dans <sol si ré> le <si> peut descendre au <sol> car on entend le <do> venant du <ré> juste au-dessus).
  • La cadence parfaite est habituellement précédée de l'accord de IVe degré ou son premier renversement, ou de IIe degré ou son premier renversement. Il peut aussi être précédé par un accord de VIe degré ou plus rarement de IIIe degré. Le Ier degré est possible, mais maladroit[2]. Parfois, l'accord de quarte et sixte de cadence vient s'intercaler entre le premier accord et l'accord de dominante. Il joue alors un rôle d'appogiature double. Ce type de cadence parfaite amplifiée est appelé cadence italienne ou cadence complète.
  • Le côté conclusif de la cadence parfaite doit être relativisé ; il n'est qu'à constater les six cadences parfaites enchaînées[3] du finale de la Ve symphonie de Beethoven[4], suivies de vingt neuf mesures de tonique.
  • En mineur (forme mélodique descendante), il peut arriver que la sensible de la cadence parfaite soit remplacée par une sous-tonique : on parle alors de cadence modale.

La cadence italienne

En harmonie tonale, la cadence italienne — ou cadence complète — est une variante de la cadence parfaite consistant en un enchaînement des degrés IV, V et I. La cadence italienne peut être considérée comme une cadence parfaite amplifiée.

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Cadence italienne
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Cadence italienne

La cadence imparfaite

En harmonie tonale, la cadence imparfaite est une cadence consistant en un enchaînement des degrés V et I, l'un des deux accords au moins, étant à l'état de renversement — le plus souvent, c'est le Ier degré qui est un accord de sixte.

  • La cadence imparfaite peut se rencontrer n’importe où. On la compare au point-virgule de la phrase. Elle donne une impression de repos plus passager et son caractère conclusif est moindre que celui de la cadence parfaite.
Deux cadences imparfaites en do majeur.

La cadence rompue

En harmonie tonale, la cadence rompue — à ne pas confondre avec la cadence évitée qui est modulante — est une cadence consistant en un enchaînement entre le Ve degré et un degré autre que le Ier, auquel on s'attend — en référence à la cadence parfaite ou à la cadence imparfaite.

  • Ce degré peut être un autre accord de la tonalité — le VIe, très souvent — : la cadence rompue, dans ce cas, relance la phrase musicale, parfois pour un court instant avant de conclure par une cadence parfaite — voir dans l’exemple ci-dessous la différence d’effet entre la cadence parfaite à gauche, et la cadence rompue à droite.

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Cadence parfaite et cadence évitée
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Cadence parfaite et cadence rompue en la mineur
  • Ce degré peut être également un accord étranger à la tonalité : dans ce cas, l'effet de surprise est plus accusé, et cette cadence est alors en mesure d'introduire une modulation.
  • L’accord de dominante est généralement précédé d’un accord de IVe ou IIe degré, à l’état fondamental ou premier renversement, parfois d’un VIe degré, voire d’un Ier degré, quelquefois d’un IIIe degré[2].

Selon le ''Guide de la théorie de la musique'' de Claude Abromont et Eugène De Montalembert : « Pour certains auteurs ces deux termes sont synonymes. Mais pour d'autres, la différence se trouve dans le caractère modulant de la cadence évitée (…) ».

La demi-cadence

En harmonie tonale, la demi-cadence — ou cadence à la dominante — est une cadence consistant en un enchaînement produisant le Ve degré — à l'état fondamental, le plus souvent. On la compare à la virgule de la phrase.

  • La demi-cadence donne une impression de simple respiration, de suspension en l'attente d'autre chose, le repos sur la dominante étant par essence instable.
  • Le premier accord — celui produisant l'accord de dominante — est appelé accord préparatoire.
  • L’accord de dominante est généralement précédé d’un accord de IVe ou IIe degré, à l’état fondamental ou premier renversement, parfois d’un VIe degré, voire d’un Ier degré[2].

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Demi-cadence
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Demi-cadence en do majeur

La cadence fauréenne

La cadence fauréenne est une demi-cadence particulière. Beaucoup utilisée par le compositeur Gabriel Fauré, elle se distingue par l'emploi d'un accord de septième construit sur le IV (accord tout à fait acceptable en mineur avec la possibilité du mineur mélodique : 6e degré de la gamme haussé). Généralement rencontré au deuxième renversement (+6), il aboutit sur l'accord de dominante sur V.

Exemple fréquent : I(6) - IV(+6) - V

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Cadence fauréenne
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Cadence fauréenne en do mineur

La cadence plagale

En harmonie tonale, la cadence plagale est une cadence, consistant généralement en un enchaînement des degrés IV et I à l’état fondamental.

  • Si la cadence plagale est comme une cadence parfaite dont on aurait remplacé l'accord de Ve degré par l'accord de IVe degré, elle ne joue pas le même rôle. Son rôle est de renforcer le caractère final apporté par une cadence parfaite. On peut la comparer à un point final, car elle succède le plus souvent à l'ultime cadence parfaite d'un morceau.

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Cadence plagale
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Cadence plagale en do majeur
  • La cadence plagale peut être considérée comme un accord préparatoire produisant directement le Ier degré, sans passer par le Ve. On pourra donc remplacer le IVe degré de la cadence plagale par n'importe quel bon degré préparatoire autre que le Ier : IIe degré, VIe degré, sixte napolitaine, etc.
  • La cadence plagale succède fréquemment un VI à l’état fondamental ou un I à l’état fondamental ou sixte. Il est précédé couramment par une cadence parfaite ou rompue, ce qui accroît son caractère conclusif[2].

Emploi

Ce type de cadence se rencontre traditionnellement dans la musique religieuse et donne un caractère assez solennel à une conclusion, comme sur un Amen. On la trouve notamment chez Brahms, par exemple à la fin de la 1re symphonie, en majeur, et à la fin du 1er mouvement de la 4e symphonie, en mineur. Elle est une survivance de la musique modale.

Origine

Quatre des huit modes ecclésiastiques (modes grégoriens) sont nommés plagaux, par opposition aux modes authentes.

Pour deux de ces modes plagaux, la dominante est sur le IVe degré, et pour les deux autres sur le IIIe degré. La récitation se faisant sur la dominante, et la conclusion sur la finale (tonique), le plaint-chant utilise les cadences IV-I ou III-I.

Le IIIe degré n'étant pas considéré comme un bon degré en musique tonale, seul l'enchainement IV-I est qualifié de plagal aujourd'hui.

Improvisation ou composition

Dans le domaine de l'opéra ou de la musique concertante, une cadence (nommée parfois avec le mot italien « cadenza ») désigne une improvisation à un endroit précis de l'œuvre réalisée par le soliste virtuose, pendant que les autres instruments se taisent.

Ce type de cadence remonte à l'époque baroque au cours de laquelle une très large place était donnée à l'improvisation dans la formation des musiciens. On trouve, dès le début du XVIIe siècle, dans les premières sonates en duo, en trio, des cadences non écrites où le soliste imaginait la manière la plus esthétique de terminer une phrase musicale. Par la suite, les instrumentistes baroques ont développé la cadence qui passe de quelques notes ornementales à plusieurs mesures (parfois plusieurs dizaines de mesures) au point qu'ils ont fini par consigner certaines d'entre elles par écrit jusqu'à en faire disparaître le caractère improvisationnel (cf. les cadences des concertos de Bach ou de Haydn). Mozart a été l'un des premiers à écrire lui-même ses cadences, qui feront désormais partie intégrante de ses concertos, et ouvrant ainsi la voie aux compositeurs des XIXe et XXe siècle.

Dans le domaine de l'opéra, à partir de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, les compositeurs prennent l'habitude d'écrire entièrement les cadences dans les arias, ceci, afin de limiter les abus commis par les solistes, trop souvent soucieux de mettre en valeur leurs qualités techniques au détriment de l'œuvre musicale. Toutefois, la liberté accordée au soliste perdurera, puisque de nombreux concertistes, aujourd'hui encore, interprètent certains concertos romantiques en y intégrant leur propre cadence, une des plus célèbres étant la cadence de Fritz Kreisler du concerto pour violon de Beethoven.

Sur la partition, une telle cadence est très souvent située entre l'accord de quarte et sixte de cadence et celui de dominante précédant l'ultime reprise orchestrale — le tutti de l’orchestre, sur un accord de tonique.[réf. nécessaire]

En lieu et place de l'accord de quarte et sixte, on trouve parfois, notamment chez Mozart, l'accord de sixte augmentée, plus appellatif, plus dissonant que le précédent.

En musique baroque, par exemple dans un air, cette cadence est une courte phrase qui précède une cadence harmonique. Elle n'est pas indiquée, car elle est évidente. Dans les concertos, en musique classique, en revanche, la place de la cadence est précisée. les plus grands interprètes ont construit et écrit leur cadence. Elles sont généralement reprises par les interprètes actuels en concert, voire imposée pour les concours de recrutement de musiciens.

Suite d'accords

Dans son sens le plus large, enfin, une cadence désigne également une « succession d'accords » donnée — donc, en fait, une succession de cadences.

Par exemple, dans le Canon de Pachelbel, les trois quartes descendantes successivement (ré - la, si - fa#, sol - ré), suivies de la seconde ascendante (sol - la), formant une cellule dont la consécution avec le cinquième degré en fin (la, dominante) suivi du premier degré au début (, tonique), entraîne une cadence parfaite à chaque répétition.

Fichiers audio
Canon de Pachelbel : basse
Canon de Pachelbel : ensemble
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L'œuvre est entièrement concentrée dans ces deux mesures jouées 28 fois:

Scansion rythmique

Dans le domaine du rythme, la cadence renvoie à l'alternance des temps forts et des temps faibles. C'est ainsi qu'on parlera de la cadence de telle danse, de telle marche, etc.

Notes et références

  1. Bitsch M. (1988). Précis d'harmonie tonale, Éditions musicales Alphonse Leduc.
  2. http://michelbaron.phpnet.us/h-quinte.htm
  3. Si la cadence parfaite était définitivement conclusive, Beethoven n'aurait eu besoin que d'une seule.
  4. http://216.129.110.22/files/imglnks/usimg/1/1b/IMSLP26216-PMLP01586-Beethoven_-_Symphony_No5_in_C_minor_Op67__cello-part_a.pdf

Voir aussi

Articles connexes

Lien externe

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