René de Savoie

René de Savoie, dit le « Grand Bâtard de Savoie », né vers 1473 et mort le à Pavie, est un noble, comte de Villars (1497) et de Tende (1501). Il est le fils adultérin de Philippe II de Savoie, duc de Savoie (1438-1497) et de Libéra Portoneri. Il est le chef de lignée des Savoie-Villars (dite aussi Savoie-Tende), branche de la Maison de Savoie.

Biographie

Origine

René, fils naturel de Philippe II duc de Savoie (1438-1497)[1] et de Libéra Portoneri, semble né durant l'année 1473[2],[3]. Certains auteurs, comme le mémorialiste Louis de Rouvroy de Saint-Simon ou plus récemment l'historien Michel Germain[3], reprennent le généalogiste Samuel Guichenon[1], qui confond sa mère avec la seconde maîtresse du duc, Bonne de Romagne. Son père le légitime dans son testament en 1496[4]. René de Savoie devient de fait le quatrième prétendant au trône de duc de Savoie derrière ses demi-frères Philibert, Charles III et Philippe de Savoie-Nemours[4].

À l'occasion de sa légitimation, il reçoit en apanage la Bresse[5]. Sa légitimité est renouvelée par son demi-frère et cousin Philibert II le Beau en 1497[5], puis à nouveau en 1499, notamment à la suite d'une confirmation par l'Empereur Maximilien[4].

En 1500, il reçoit la lieutenance général de Savoie[5]. Samuel Guichenon souligne qu'il ne garde pas longtemps cette charge en raison du mariage de son demi-frère Philibert avec Marguerite d'Autriche[5].

Détail d'un tableau représentant Anne Lascaris de Tende (anonyme du XVIIIe siècle).

Second mari d'Anne Lascaris[6], héritière du comté de Tende, avec laquelle il se marie le , à Tende[7],[8]. Il est au moment de son mariage gouverneur de Nice. Le comte de Tende cédait à sa fille la plus grande partie de ses biens, le [7]. Le contrat de mariage précisait que René de Savoie devait prendre le nom et les armes des comtes de Tende.

Rupture avec le duc de Savoie

Philibert le Beau se remarie en 1501 avec Marguerite d'Autriche. Cette dernière le poursuit de sa haine[5] et fait casser par son père l'empereur Maximilien de Habsbourg la légitimation de René de Savoie en 1502[5]. Marguerite d'Autriche, qui a une influence grandissante sur son mari, fait un procès à René de Savoie et obtient en 1503 de son mari de supprimer l'acte de légitimation qu'il avait accordé[5].

Bonivard, dans sa Chronique de Genève, relate un épisode entre son père et le duc Philibert II :

_ le duc : "Que te semble de Montjouvent [nom d'un seigneur de la cour] ? Va-t-il pas étriller faveau comme les autres ?"

_ Bonivard : " Monseigneur, nul n'en est cause sinon vous. Vous laissez toute l'autorité, crédit et maniement qui vous appartient, à votre frère. Vous merveilly-vous si on le suit plutôt que vous ? Où est le miel, là tirent les mouches"

_ le duc : Ne te souci, non durabit !".

René de Savoie se réfugie alors en France auprès de sa demi-sœur, la comtesse d'Angoulême Louise de Savoie, mère de François Ier[5]. Un procès est engagé contre lui durant lequel on lui confisque l'ensemble de ses fiefs dans le duché[5]. Le comté de Villars passe notamment dans le douaire de Marguerite d'Autriche[5]. Il ne lui reste plus que le fief de Tende, du droit de sa femme. Son demi-frère Philibert meurt en 1504, sans descendance, et il est remplacé par son cadet, Charles, sous le nom de Charles II[5].

Il accuse alors Jacques de Bussy, seigneur d'Eyria, d'avoir fait empoisonner le duc Philibert II, au moyen de pommes de senteur empoisonnées, confectionnées à Lyon par un médecin piémontais. Ledit médecin fut torturé et -sans surprise- avoua[9].

À la mort de son beau-père, le comte Jean-Antoine, en 1509, Anne Lascaris et lui reçoivent les hommages le de leurs vassaux tendasques et de tous leurs fiefs de la rivière de Gênes et de Provence[10].

Au service de la France

René de Savoie rend hommage au roi de France Louis XII[5] le pour le comté de Tende[10]. Il obtient du roi les charges de gouverneur de Provence et grand sénéchal de Provence[5], le [11]. Il assiste, la même année, avec l'ensemble de la cour de France au baptême de son neveu à Amboise, le Dauphin François[5].

Le roi de France, qui souhaite conquérir le duché de Milan (voir Guerres d'Italie), l'envoie auprès de la Suisse comme ambassadeur[5]. Toutefois Louis XII meurt le . La tentative d'alliance se solde par la bataille de Marignan, à laquelle participe le comte de Tende[5].

En raison de sa participation à la cinquième guerre d'Italie, le nouveau roi, François Ier, son neveu, le nomme Grand maître de France (surintendant de la Maison du roi)[5], par lettres patentes du , charges qu’il conserve jusqu’à sa mort.

Vers 1519-1520, René de Savoie fait construire une grande nef Sainte Marie de Bonaventure, surnommée "La Grande Maîtresse"[12], qui a servi de bateau amiral. Ce bâtiment part de Marseille le pour protéger les Hospitaliers contre une attaque des Turcs. Le bateau est de retour à Marseille le . Pendant cette expédition, l'amiral Christophe de Chanoy est tué à Beyrouth. En , elle fait partie de l'expédition commandée par René de Savoie, amiral, et Pedro de Navarre, lieutenant général, pour aider Gênes. Le bâtiment participe à la défense et à l'approvisionnement de Marseille, pendant le siège de la ville par le connétable de Bourbon, en 1524. René de Savoie loue La Grande Maîtresse 1 500 écus par mois à son neveu François Ier, entre le et le .

Lors de la bataille de Pavie, il est blessé et capturé[2]. Il semble être mort de la suite de ses blessures, le , avant que son fils n'ait pu payer de rançon[2]. Son corps est inhumé dans la chapelle Saint-Louis de l'église Sainte-Marie de Tende[13].

Après cette mort de René de Savoie, Louise de Savoie fait estimer le prix du navire La Grande Maîtresse. Il est acheté par François Ier à sa tante, la comtesse de Villars et de Tende, entre juillet et .

Le , Emmanuel-Philibert de Savoie (1528-1580), fils de Charles III et neveu de René, déclare par lettre patente que Claude de Savoie, comte de Tende, et ses descendants, pourront succéder aux États de Savoie, si la lignée directe vient à manquer.

Descendance

Le , il épouse Anne Lascaris, comtesse de Tende (1487-1554), fille de Jean-Antoine de Lascaris-Vintimille et d'Isabelle d'Anglure. Ils ont[14] :

Armes

René de Savoie porte Écartelé : aux 1 et 4, de gueules, à la croix d'argent (Savoie); aux 2 et 3, contre-écartelé, a) et d) de gueules, à l'aigle bicéphale éployée d'or, b) et c) de gueules, au chef d'or (Lascaris) ; et une cotice d'azur (la barre de la batardise) posée en bande brochant sur les quatre quartiers[15].

Voir aussi

Sources et bibliographie

  • Samuel Guichenon, Histoire généalogique de la Royale Maison de Savoie ou Histoire généalogique de la Royale Maison de Savoie justifiée par titres, fondations de monastères, manuscrits, anciens monuments, histoires, et autres preuves authentiques, chez Jean-Michel Briolo,
  • François-Alexandre de La Chenaye-Aubert, Dictionnaire de la noblesse, contenant les généalogies, l'histoire et la chronologie des familles nobles de France, t. VIII, Paris, Veuve Duchesne, (lire en ligne), p. 739-742
  • Henri de Panisse-Passis, Les comtes de Tende de la maison de Savoie, Librairie Firmin-Didot et Cie, , 386 p. (lire en ligne)

Article connexe

Liens externes

Notes et références

  1. Samuel Guichenon, p. 607 Livre I (lire en ligne).
  2. Encyclopédie Treccani.
  3. Michel Germain, Personnages illustres des Savoie : "de viris illustribus", Lyon, Autre Vue, , 619 p. (ISBN 978-2-915688-15-3), p. 520,.
  4. Luisa Clotilde Gentile, « Les bâtards princiers piémontais et savoyards », Revue du Nord, no 31, , p. 387-410 (lire en ligne) in Bousmar E., Marchandisse A., Masson Ch et Schnerb B. (dir.), La bâtardise et l'exercice du pouvoir en Europe du 13e au début du 16e siècle, Villeneuve d'Ascq, Revue du Nord, 2015 (Hors série, Collection Histoire, n°31).
  5. Samuel Guichenon, p. 239-240 Livre III (lire en ligne).
  6. La Chenaye-Aubert 1774, p. 739-742
  7. Comtes de Tende de la maison de Savoie, 1889, p. 6.
  8. Charles de Ribbe, La société provençale à la fin du Moyen Âge, d'après des documents inédits, Paris, Perrin, 1898, p. 451 ([lire en ligne]).
  9. Charles Buet, Les ducs de Savoie au XVeXVIe siècle[réf. incomplète].
  10. Comtes de Tende de la maison de Savoie, 1889, p. 15.
  11. Sous la direction d'Édouard Baratier, Georges Duby et Ernest Hildesheimer, Atlas historique. Provence, Comtat Venaissin, principauté d’Orange, comté de Nice, principauté de Monaco, Paris, Librairie Armand Colin, (notice BnF no FRBNF35450017)
  12. Max Guérout, Bernard Liou, La Grande Maîtresse, nef de François Ier : recherches et documents d'archives, Presses de l'Université Paris-Sorbonne, Paris, 2001 (ISBN 2-84050-184-8) (lire en ligne).
  13. Paolo Cozzo, « Stratégie dynastique chez les Savoie: une ambition royale, XVIe-XVIIIe siècle », dans Juliusz A. Chrościcki, Mark Hengerer, Gérard Sabatier, Les funérailles princières en Europe, XVIe-XVIIIe siècle : Volume I : Le grand théâtre de la mort, Les Editions de la MSH, , 412 p. (ISBN 978-2-73511-686-7, lire en ligne), p. 228-229 (Carte).
  14. Samuel Guichenon, p. 241 Tome troisième (lire en ligne).
  15. Comtes de Tende de la maison de Savoie, 1889, p. 42.
  • Portail de l’histoire militaire
  • Portail de la Renaissance
  • Portail de l'histoire de la Savoie
  • Portail du royaume de France
  • Portail de la Provence
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.