Programme ExoMars

Le programme ExoMars regroupe deux missions spatiales à destination de la planète Mars développées par l'Agence spatiale européenne (ESA) avec une participation importante de l'agence spatiale russe Roscosmos : l'orbiteur ExoMars Trace Gas Orbiter (TGO) et son atterrisseur Schiaparelli lancés le et l'astromobile Rosalind Franklin dont le lancement, initialement planifié pour , est actuellement prévu pour 2022[1],[2]. L'objectif scientifique du programme est l'étude de l'atmosphère de Mars en particulier la détermination de l'origine du méthane trouvé à l'état de trace ainsi que la recherche d'indices d'une vie passée ou présente sur la planète. Sur le plan technique, le programme doit permettre à l'agence spatiale de développer pour la première fois un atterrisseur et un rover martien et d'expérimenter les techniques d'aérofreinage et d'atterrissage.

ExoMars, concept du rover (2006).
Maquette de la Mission ExoMars à MAKS-2021.

Le programme a une genèse complexe du fait de son coût très important (1,2 milliard € en 2012) rapporté au budget scientifique de l'ESA et de la nécessité de disposer des connaissances techniques pointues (atterrissage sur Mars) maîtrisées jusque-là uniquement par la NASA. Au début des années 2000, l'ESA étudie dans le cadre du programme Aurora l'envoi à la surface de Mars d'un astromobile automatisé équipé d'instruments de mesures scientifiques avec pour objectif de déterminer si la planète abrite ou a abrité une vie biologique. En 2008, le projet a évolué et comprend un atterrisseur, un orbiteur et un rover. Fin 2009, le programme est refondu dans le cadre d'un partenariat mis en place avec la NASA qui prévoit la réalisation de quatre engins spatiaux : en 2016 devaient être lancés un orbiteur, ExoMars Trace Gas Orbiter (TGO), chargé de détecter l'origine du méthane et d'autres gaz présents dans l'atmosphère martienne et de servir de relais pour les communications ainsi qu'un atterrisseur Schiaparelli devant démontrer la capacité européenne à faire atterrir un engin sur Mars : un deuxième lancement en 2018 devait envoyer vers Mars l'astromobile européen d'ExoMars et un rover de la NASA, MAX-C. Dans ce scénario, la NASA fournissait les lanceurs, la majorité des instruments de TGO et le véhicule de rentrée et de descente embarquant les astromobiles. En 2011-2012, les difficultés financières de la NASA entraînent la réduction puis l'annulation de sa participation. L'ESA sollicite alors l'agence spatiale russe Roscosmos, qui devient officiellement en le nouveau partenaire du programme. Dans le nouveau scénario, Roscosmos fournit deux lanceurs Proton, une partie de l'instrumentation scientifique de l'orbiteur ExoMars TGO ainsi que le véhicule de rentrée et de descente utilisé par le rover européen qui sera lancé en 2022. En 2019, l'astromobile est baptisé Rosalind Franklin en l'honneur de la physico-chimiste à l'origine de la compréhension de la structure de l'ADN.

Historique

Au début des années 2000, un projet de rover martien européen ExoMars est mis à l'étude. Ce projet ambitieux est repoussé à plusieurs reprises car il nécessite à la fois des moyens financiers importants et la maîtrise des techniques d'atterrissage sur Mars. Il est inscrit en 2005 comme mission majeure (flagship mission) du programme Aurora et le conseil de l'ESA s'engage à lui consacrer 690 millions €. En 2008, le projet est refondu : il comprend désormais en plus du rover, un atterrisseur qui doit permettre de valider les techniques d'arrivée sur le sol martien et un orbiteur chargé notamment de relayer les communications entre le sol martien et la Terre. Les gouvernements des pays membres de l'ESA s'engagent sur un budget de 850 millions €. Celui-ci ne couvre toutefois pas les coûts qui sont estimés à 1 milliard €. En , la NASA et l'Agence spatiale européenne associent leurs projets respectifs d'exploration de la planète Mars dans le cadre de l'Initiative conjointe d'exploration de Mars : le rover américain MAX-C vient s'ajouter aux trois engins spatiaux précédents. Les robots doivent être lancés par des fusées Atlas fournies par la NASA en deux temps : 2016 pour l'orbiteur ExoMars Trace Gas Orbiter (TGO) et l'atterrisseur ExoMars EDM, 2018 pour le rover européen ExoMars et MAX-C. Par ailleurs, l'agence spatiale américaine fournit la majorité des instruments scientifiques de l'orbiteur[3].

Mais en 2011, la NASA subit à la fois à des restrictions budgétaires liées à la crise économique en cours et un énorme dépassement de son projet de télescope spatial James Webb. Pour faire face à ses problèmes de financement, l'agence spatiale américaine se dégage d'abord en partie du programme ExoMars avant d'abandonner complètement sa participation. L'ESA ne peut supporter seule le cout du programme et elle fait appel à l'agence spatiale russe Roscosmos qui vient de subir l'échec de sa sonde spatiale martienne Phobos-Grunt. En , l'ESA officialise son partenariat avec Roscosmos. Les termes de l'accord prévoient que l'agence spatiale russe fournit des fusées Proton pour les lancements de 2016 et 2018. Les instruments scientifiques russes remplacent les instruments américains à bord de l'orbiteur ExoMars TGO. Enfin, la Russie fournit le véhicule de rentrée et de descente qui doit amener le rover ExoMars sur le sol martien en 2018. Le rover américain MAX-C n'a pas d'équivalent dans ce nouveau scénario. Le financement du projet qui atteint environ 1,2 milliard € doit être bouclé en [3]. En , les équipes européennes et russes constatent qu'elles ne sont pas prêtes. Le lancement est alors repoussé à la fenêtre suivante, en [4]. Mais toujours pas prête à cette date-là, notamment sur la fiabilité du système de déploiement des parachutes, la mission doit être alors reportée[2] à la prochaine fenêtre de lancement qui aura lieu en 2022.

Objectifs

Objectifs scientifiques

Les objectifs scientifiques du programme sont[5] :

Objectifs technologiques

Les engins développés dans le cadre du programme ExoMars doivent permettre la mise en œuvre de techniques utilisées pour la première fois par l'Agence spatiale européenne[5] :

  • atterrissage d'une charge lourde sur le sol de Mars ;
  • mise en œuvre d'un robot mobile (rover) à la surface d'une autre planète ;
  • prélèvement d'une carotte du sol d'une autre planète à l'aide d'un engin de forage ;
  • acquisition, préparation, distribution et analyse d'un échantillon de sol d'une autre planète in situ.

Les engins spatiaux du programme ExoMars

Le programme ExoMars comprend trois engins spatiaux qui doivent être lancés vers la planète Mars dans le cadre de deux missions : ExoMars 2016 lancée en et ExoMars 2022 qui sera lancée en 2022.

Orbiteur ExoMars Trace Gas Orbiter

ExoMars Trace Gas Orbiter (TGO) est un orbiteur placé sous la responsabilité de l'ESA qui remplit d'une part une mission scientifique et d'autre part joue un rôle essentiel pour les autres missions du programme en servant de relais pour les télécommunications entre les engins déposés au sol et la Terre. Sa mission scientifique consiste à identifier l'origine du méthane et d'autres gaz rares présents dans l'atmosphère martienne. Les précédentes missions martiennes ont détecté que du méthane était présent dans l'atmosphère avec des concentrations variant dans le temps et selon le lieu. Le méthane est un gaz dont la durée de vie est brève à l'échelle géologique et sa présence nécessite une source active qui pourrait être biologique. Le satellite dispose d'une antenne parabolique grand gain de 2,2 mètres de diamètre orientable avec deux degrés de liberté pour retransmettre en bande X les données scientifiques vers la Terre. Le tube à ondes progressives utilisé a une puissance de 65 watts. Les échanges avec les engins situés sur le sol de Mars se font en bande UHF via une antenne hélice axiale. La charge utile embarquée, d'une masse évaluée à environ 135 kg est composée de plusieurs instruments scientifiques. L'orbiteur a été lancé le avec ExoMars EDM[6]. L'orbiteur est parfaitement mis en orbite autour de la planète Mars le [7].

Atterrisseur expérimental Schiaparelli

Schiaparelli est un atterrisseur expérimental de 577 kg (Phoenix : 670 kg, Viking 600 kg) développé par l'ESA qui doit se poser en 2016 sur la planète Mars. ExoMars EDM doit permettre de valider les techniques de rentrée atmosphérique et d'atterrissage qui seront mises en œuvre par de futures missions martiennes européennes. Il comporte un véhicule de rentrée chargé de protéger l'engin spatial de la chaleur générée par la rentrée atmosphérique, d'un parachute déployé alors que la vitesse de l'engin est tombée à Mach 2 et de moteurs-fusées à ergols liquides (hydrazine) chargées de déposer en douceur l'atterrisseur. Durant sa descente vers le sol martien, il retransmet les paramètres de vol pour permettre l'analyse de son fonctionnement. Sur le sol martien, sa durée de vie est limitée car l'énergie est fournie par des batteries qui ne sont pas rechargées. Il emporte une petite charge utile. Il est lancé avec TGO en 2016[8]. Le module EDM a été largué par l'orbiteur TGO le à 14 h 42 TU. Le , la télémétrie est perdue durant la séquence d’atterrissage automatique[7]. L'analyse révèle que le bouclier thermique a correctement réalisé sa fonction de freinage aérodynamique. Le parachute s'est ensuite correctement déployé, mais les dynamiques induites ont brièvement saturé la centrale inertielle avec pour effet une erreur d'estimation d'altitude de Schiaparelli par l'ordinateur de bord entrainant l'éjection prématurée du parachute et le fonctionnement des 3 × 3 rétrofusées pendant seulement quelques secondes à 3,7 km au-dessus du sol. En conséquence, Schiaparelli a effectué une chute libre de 3–4 kilomètres de hauteur dans l'atmosphère martienne, avant de venir percuter le sol à la vitesse substantielle de plus de 300 kilomètres par heure. Le , le parachute de 12 mètres de diamètre a pu être photographié étendu à la surface de la planète rouge. Le cliché provenait du satellite Mars Reconnaissance Orbiter de la NASA qui opère en orbite et avait été spécialement programmé. Un kilomètre plus au nord dans cette même région (de coordonnées 353,79 degrés de longitude est et 2,07 degrés de latitude sud), une tache noire de 15 × 40 mètres peut être vue. Il s'agit de la trace laissée par l'impact du module d'atterrissage, le sable, les poussières et débris de roches expulsés. Le carburant résiduel présent à bord de la sonde a également pu exploser[9],[10],[11].

ExoMars 2022

Initialement nommée ExoMars 2018 puis ExoMars 2020, la mission ExoMars 2022 est planifiée pour être lancée en 2022[2] car la sonde n'était techniquement pas prête pour les précédentes fenêtres de lancement qui n'ont lieu que tous les 26 mois. Le site d'atterrissage, choisi en (à l'aide notamment des observations du spectromètre OMEGA, à bord de la sonde européenne Mars Express) sera Oxia Planum, près de l'équateur[12].

Module d'atterrissage

La Russie, à travers un partenariat avec Roscosmos, fournit le module de descente et d'atterrissage du rover ExoMars. Cette plateforme d'atterrissage, dont descendra le rover une fois qu'elle sera posée sur Mars, est baptisée Kazatchok (russe: Казачок), ce qui signifie « petit cosaque » et aussi une danse traditionnelle cosaque[13],[14].

Cette plateforme a quitté les installations de Lavotchkine le pour Turin (Italie) pour l'assemblage final et des tests chez Thales Alenia Space, le tout en collaboration avec l'Agence spatiale européenne[13],[14].

Rover ExoMars

Le rover ExoMars est un rover de 300 kg développé par l'ESA qui emporte une foreuse capable de ramener une carotte prélevée jusqu'à 2 mètres de profondeur, au maximum, et un laboratoire capable d'analyser l'échantillon et d'identifier des marqueurs biochimiques. Le rover embarque également des instruments pour identifier la présence d'eau ou de matériaux hydratés, des caméras et des spectromètres. Le véhicule de rentrée et de descente jusqu'au sol martien est fourni par Roscosmos. Le rover Exomars doit être lancé en 2020[15]. Le , l'ESA officialise son nom. Il s'appelle désormais Rosalind Franklin en l'honneur de cette physico-chimiste britannique qui a œuvré à la découverte de la structure de l'ADN[16].

Un quatrième engin, le rover MAX-C de la NASA, a été annulé à la suite de l'abandon de la participation de l'agence spatiale américaine en 2011. Il devait rechercher des indices de la vie, prélever des carottes dans le sous-sol martien et les stocker pour une future mission de retour d'échantillons sur Terre qui restait à définir.

Notes et références

  1. Communiqué de presse de l'Agence spatiale européenne, « C’est en 2022 qu’ExoMars décollera pour la planète rouge », sur www.esa.int, .
  2. Pierre Barthélémy, « Espace : la mission ExoMars repoussée de deux ans », Le Monde.fr, (lire en ligne).
  3. Paul De Brem, « L'Europe relève le défi avec Exomars », Ciel et Espace, no 510, .
  4. (en) esa, « Second ExoMars mission moves to next launch opportunity in 2020 », sur Agence spatiale européenne (consulté le ).
  5. (en) « The ExoMars programme 2016-2018 », sur ESA (consulté le ).
  6. (en) « ExoMars Trace Gas Orbiter (TGO) », sur ESA (consulté le ).
  7. ESA, « Le TGO d’ExoMars a atteint son orbite – la situation de l’EDM est en cours d’évaluation », European Space Agency, (lire en ligne, consulté le ).
  8. (en) « The ExoMars Entry, Descent and Landing Demonstrator Module (EDM) », sur ESA (consulté le ).
  9. (en) ESA, « Mars Reconnaissance Orbiter views Schiaparelli landing site », European Space Agency, (lire en ligne, consulté le ).
  10. ESA France, , « Euronews : demi succès pour la mission ExoMars ».
  11. (en-GB) « Schiaparelli landing investigation completed », sur Agence spatiale européenne, (consulté le ).
  12. « ExoMars 2020 : Sélection du site d'atterrissage Oxia Planum », sur CNRS, (consulté le ).
  13. (en-GB) ESA, « ExoMars landing platform arrives in Europe with a name », sur European Space Agency (consulté le ).
  14. (ru) « Новости. Посадочная платформа миссии «ЭкзоМарс-2020» доставлена в Турин », sur www.roscosmos.ru (consulté le ).
  15. (en) « ExoMars Rover », sur ESA (consulté le ).
  16. (en-GB) ESA, « ESA’s Mars rover has a name – Rosalind Franklin », sur European Space Agency (consulté le ).

Voir aussi

Vidéos

Articles connexes

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