Élisa Deroche

Élisa Deroche, connue sous le pseudonyme de baronne Raymonde de Laroche, est une aviatrice française née le à Paris (4e arr.)[1] et morte le au Crotoy. C'est la première femme au monde à avoir obtenu son brevet de pilote-aviateur le .

Pour les articles homonymes, voir Deroche.

Biographie

Élisa Léontine Deroche naît dans le quartier du Marais au numéro 61, rue de la Verrerie à Paris, de Charles-François Deroche portefeuilliste et de Christine Calydon Gaillard. Jeune femme, elle commence une carrière artistique.

Le , au théâtre Sarah Bernhardt, elle joue le rôle de Doña Sérafine dans la pièce La Sorcière de Victorien Sardou[2].

Le , au théâtre des Mathurins, elle joue le rôle de Maria dans la pièce Baptiste de Michel Carré [3].

Le , au théâtre Réjane, elle joue le rôle de Rigolboche dans la pièce La Savelli, une adaptation du roman de Gilbert-Augustin Thierry, avec une mise scène de Max Maurey[4].

C'est pendant cette période au théâtre qu'elle prendra le pseudonyme de « baronne Raymonde de Laroche », en mémoire de sa fille, Raymonde Marguerite Charlotte Thadome, décédée le à l'âge de sept mois et demi[5],[n 1]. Elle se consacre également à la peinture, à la sculpture et au sport automobile.

Élisa Deroche au poste d'un biplan Voisin.
Élisa Deroche, dite la baronne de Laroche, dans son appareil.

Très tôt, la jeune Élisa Deroche se passionne pour les sports. En 1892, à l'âge de dix ans, on lui offrit un poney ; elle se passionna pour l'équitation puis successivement le tennis, le rowing, le patinage, la bicyclette[6].

Vers 1902, elle conduira une motocyclette, sur un modèle des Frères Werner. C'est aussi en 1902 qu'elle obtiendra son permis de conduire[7].

Le , Raymonde de Laroche est présente à Bagatelle, lorsque Santos-Dumont réussit un premier vol. Le , elle est à Issy-les-Moulineaux, quand Henri Farman réalise une boucle d'un kilomètre[8].

Raymonde de Laroche va s'intéresser aux études et aux expériences de Blériot, d'Ernest Archdeacon, et des frères Voisin. Après avoir étudié divers appareils, elle choisira le biplan Voisin pour ses qualités de maniabilité, de stabilité et de facilité à piloter, et c'est en 1909 qu'elle rencontre Charles Voisin, fondateur avec son frère Gabriel de l'entreprise Voisin Frères[9].

Raymonde de Laroche ne peut plus rester qu'une simple spectatrice des pionniers de l'aviation ; elle confirme sa décision d'exécuter sa première envolée seule à bord.

Et c'est l'ingénieur aviateur Édouard Chateau[10] qui se chargera de sa formation au camp de Châlons à Mourmelon.

Le , elle fera son premier vol seule à bord d'un biplan Voisin sur une distance de 300 mètres. Le lendemain, elle réalise un vol de 6 kilomètres, toujours sous la vigilance de M. Château[11].

Le , elle prend livraison de son biplan Voisin et fait un vol de sept minutes, stoppée par la nuit, ce qui l'empêche de concourir pour le brevet de pilote[12].

Le , Raymonde de Laroche s'entraîne pour l'obtention de son brevet de pilote sur le terrain de Bouy. Elle prend son vol vers 15h par un vent faible, fait un premier tour de piste volant à quatre mètres de hauteur dans des conditions parfaites, lorsqu'au deuxième tour ayant pris un virage trop au large et n'ayant pu monter assez haut elle percute les peupliers qui bordent la route[13]. Ce même jour, Léon Delagrange se tue sur le terrain de La Croix-d'Hins en Gironde[13].

C'est pendant le meeting d'Héliopolis en Égypte du 6 au que l'Aéro-Club de France validera son brevet de pilote, qui lui sera délivré le , no 36 de l'Aéro-Club de France[14]. Elle est la première femme au monde à obtenir le brevet de pilote même si elle n'est pas la première femme à avoir piloté un aéroplane en solo. C'est Thérèse Peltier qui la devance en effectuant un vol en septembre 1908 sans avoir son brevet. Elle participe dès lors à de nombreux rassemblements aériens, tant en France qu’à l’étranger, comme Héliopolis, le Meeting de Tours du au , le meeting de Saint-Pétersbourg du au , devant le tsar Nicolas II ; Raymonde de Laroche fera un vol spectaculaire : à 100 mètres d'altitude, elle coupe le moteur de son biplan pour atterrir en vol plané[15]. Elle se produit aussi au meeting de Budapest du 5 au et à la Grande Semaine d'aviation de Rouen du 19 au .

Du 3 au , elle apparaît lors de la deuxième grande semaine d'aviation de la Champagne. Elle est grièvement blessée pendant un meeting à Reims, le , son avion s’étant écrasé ; elle sera transportée dans la clinique du docteur Roussel à Reims. Rétablie, elle quitte la clinique le pour rejoindre son domicile parisien[16],[n 2].

Le , Raymonde de Laroche est nommée officier d'Académie par Théodore Steeg, ministre de l'Instruction publique et des Beaux-arts[17].

Le au meeting de Dinard sur la plage de l’Écluse, Roland Garros fait un beau vol de dix minutes au-dessus de la mer avec Raymonde de Laroche comme passagère (voir La Revue aérienne du page 483).

Le à Corcelles-en-Beaujolais au lieu-dit La Lime, Charles Voisin est au volant de son automobile une Hispano-Suiza, en compagnie de La Baronne de Laroche, quand ils sont victimes d'un accident. Charles, son ami intime, est tué sur le coup, quand Raymonde de Laroche est projetée hors de la voiture et s'en tire avec quelques contusions (voir le journal L'Auto du , page 3).

Après une longue période de convalescence, à la suite de son accident du , et nostalgique de reprendre de l'altitude, fuyant toutes les remontrances qu'auraient pu lui faire ses amis et sa famille, Raymonde de Laroche s'entend avec le constructeur Sommer pour reprendre l'entraînement à Mourmelon, en [18].

Durant l'année 1913, elle va longuement s'entraîner à Buc chez Farman.

Le partie de Buc, Raymonde de Laroche va voler plus d'une heure à 100 mètres de hauteur, la nuit l'obligera à rentrer et elle se posera magistralement en un vol plané près des hangars (voir le journal L'Auto du page 3).

Du 12 au au meeting de La Ferté-Vidame, elle présentera des exhibitions le , notons la présence de l'aviateur Jacques Vial son futur second époux (information annoncée dans le journal L'Aéro du , page 4)

Du 10 au au meeting de Granville, elle s'est particulièrement distinguée par de magnifiques évolutions sur son hydro-plane-Henri-Farman-Gnome, en dépit d'un vent violent, elle s'est aventurée audacieusement en mer en direction des îles Chausey après avoir viré à sept ou huit kilomètres au large, elle est revenue amerrir superbement saluée par les acclamations (voir le journal L'Aéro du , page 2).

Le à Mourmelon au camp de Châlons, Raymonde de Laroche remporte la coupe Fémina de distance et de durée, sur un biplan H. Farman-Gnome, elle prend l'air à 7 h 05 min et elle tourne sur la piste de 10 kilomètres et couvre une distance de 323 kilomètres pendant 4 heures, mais par suite d'un mauvais fonctionnement du pointeur d'essence, elle termine son vol à regret à midi trois.

Notons que la coupe Fémina était précédemment tenue par Mme Pallier le ayant parcouru une distance de 290 kilomètres en 3 heures 40 minutes (voir le journal L'Aérophile de l'année 1913, page 543).

Au mois d', son appareil Henri Farman 60 HP N°69 a été réquisitionné. En , Reims est bombardé, son domicile au n°6 de la rue Coquebert est probablement détruit, elle demeure à Paris au n°5 rue des Belles-Feuilles.

Elle voulut prendre place dans une escadrille et rivaliser d'audace avec nos plus hardis pilotes, mais l'autorisation qu'elle sollicita avec tant d'insistance lui fut impitoyablement refusée (voir le journal Le Petit Journal du , page 1).

Le , Raymonde de Laroche reprend l'entraînement à Issy-les-Moulineaux, elle pilote un Caudron G3, et ses premiers essais d'après-guerre sont des plus encourageants (voir le journal L'Auto du , page 2).

Elle bat le record féminin d'altitude le , à Issy-les-Moulineaux. Elle pilote un Caudron G3, elle décolle à 8 heures 38 minutes en présence du commissaire de l'Aéro Club de France, le ciel était clair au départ mais se couvrait rapidement, à 10 heures 27 minutes 30 secondes, elle revient se poser, le barographe enregistreur indique 3 900 mètres d'altitude (voir le journal L'Auto du , page 1).

Selon les commentaires du journal l'Auto du , apprenant la performance de Raymonde de Laroche, l'Américaine Ruth Law a déclaré qu'en , elle aurait atteint l'altitude de 4 240 mètres, il semble étonnant que l'aviatrice américaine ait attendue près de deux ans pour revendiquer un record qui n'a jamais été homologué (voir le journal l'Auto du , page 1).

Nouveau record d'altitude le à Issy-les-Moulineaux, Raymonde de Laroche prend son vol à 19 heures 8 minutes et 45 secondes, avec une régularité remarquable, la courageuse aviatrice s'élève à plus de 4 000 mètres, mais par suite de la brume, elle fut obligée d'atterrir vers 21 h 15 min à la nuit tombante, à Gastins à 8 kilomètres de Nangis, l'atterrissage a été parfait, le barographe indiquait 4 800 mètres, sa performance bat le record que revendiquait Ruth Law (voir le journal l'Auto du , page 1).

Cet exploit marquera l'apogée de sa carrière. car elle meurt dès le au cours d'un vol d'entraînement, sur un prototype Caudron modèle G3, alors qu'elle n'était pas aux commandes : piloté par l'aviateur Barrault, l'aéronef s'écrase sur la plage du Crotoy.

Élisa Deroche repose au cimetière du Père-Lachaise, dans la 92e division.

Vie privée

Élisa Deroche a été mariée deux fois. Le , elle épouse Louis Léopold Thadome à la mairie du 4e arrondissement. Le couple ayant divorcé le , elle se remarie avec Jacques Vial le à Meudon[19]. Le couple divorce le .

Honneurs posthumes

Plaque du 61 rue de la Verrerie à Paris.
  • Une plaque est apposée sur sa maison natale, 61 rue de la Verrerie à Paris.
  • En hommage aux pionniers de l'aviation, la Poste française émet le un timbre à l'effigie d'Élisa Deroche, première aviatrice brevetée au monde.
  • Un collège[20] a été baptisé Élise Deroche le à Le Pian-sur-Garonne, en Gironde.
  • Une vingtaine de voies publiques (avenue, rue, etc.) sont baptisées en son honneur à travers le monde.
  • Une avenue porte son nom à Viry-Châtillon, la ville du premier aérodrome au monde : l'avenue Baronne-de-Laroche. C'est d'ailleurs dans cette avenue que se situe le vieux bâtiment de Port-Aviation, le premier aérodrome au monde.
  • Une rue porte également son nom sur le territoire de la commune d'Orly, dans le secteur de Cœur d'Orly, sur la plateforme de l'aéroport Paris-Orly.

Notes et références

Notes

  1. Pour certains[réf. nécessaire], ce serait à la suite d’un meeting à Saint-Pétersbourg que le tsar Nicolas II, impressionné par son courage, lui donne le titre de baronne.
  2. Elle pilote le biplan Voisin no 59 à la deuxième Grande Semaine d’aviation de la Champagne 1910. « Une aviatrice tombe », Le Petit Parisien, Paris, 5 janvier 1910 (ISSN 0999-2707).

Références

  1. Acte de naissance no 2247 (vue 2), registre des naissances du 4e arrondissement pour l'année 1882, État civil de la Ville de Paris.
  2. Paru dans le journal des Annales du Théâtre et de la Musique de l'année 1903, page 278.
  3. Paru dans le journal des Annales du Théâtre et de la Musique de l'année 1904, page 397.
  4. Paru dans le journal des Annales du Théâtre et de la Musique de l'année 1906, page 268.
  5. Selon l'acte de décès n°197 V4E8083 Paris 1er.
  6. Paru dans le journal L'Auto du 26 octobre 1909.
  7. Information confirmée dans une interview qu'elle accorda au journal L'Auto du 8 janvier 1914.
  8. Paru dans l'interview qu'elle accorda au journal L'Auto du 26 octobre 1909.
  9. Selon ses explications dans une interview qu'elle accorda au journal L'Auto du 26 octobre 1909.
  10. « Edouard Chateau, le ciel et la terre », sur Comment naquit l'aviation (consulté le )
  11. Voir L'Aérophile de novembre 1909, page 510.
  12. « L'Auto-vélo : automobilisme, cyclisme, athlétisme, yachting, aérostation, escrime, hippisme / dir. Henri Desgranges », sur Gallica, (consulté le ).
  13. « L'Auto-vélo : automobilisme, cyclisme, athlétisme, yachting, aérostation, escrime, hippisme / dir. Henri Desgranges », sur Gallica, (consulté le )
  14. (voir L'Aérophile, 1910, page 98) « Baronne de Laroche » sur aviatechno.free.fr.
  15. Voir La Vie au Grand Air Noël du 10 décembre 1910 et le journal L'Auto du 24 mai 1910.
  16. Paru dans le journal Gil Blas du 8 octobre 1910
  17. Paru dans le journal Excelsior du 3 juin 1911, page 3.
  18. Paru dans le journal L'Auto du 20 novembre 1912.
  19. Mentions marginales sur l'acte de naissance (cf. supra).
  20. « Page d'accueil du collège » (consulté le ).

Annexes

Bibliographie

  • Lucien Robineau (dir.) et Académie nationale de l'Air et de l'Espace (préf. Pierre Miquel, postface Charles Bigot), Les Français du Ciel : dictionnaire historique, Paris, Le Cherche midi, coll. « Ciels du monde », , 782 p. (ISBN 2-7491-0415-7, notice BnF no FRBNF39993744).
  • Académie nationale de l'Air et de l'Espace, Aviatrices : un siècle d'aviation féminine française, Levallois-Perret/Le Bourget, Altipresse, Musée de l'Air et de l'Espace, coll. « Nouvel envol », , 189 p. (ISBN 2-911218-21-3, notice BnF no FRBNF39289561).
  • (it) Enrico Grassani, Élisa Deroche alias Raymonde de Laroche : La presenza femminile negli anni pionieristici dell'aviazione, Milan, Editoriale Delfino, (ISBN 978-88-97323-46-4).
  • Sandrine Beau, La Cascadeuse des nuages, Bruxelles, Alice Jeunesse, 2019, 151 p. (ISBN 9782874263941) Adaptation très libre en roman jeunesse de la vie d’Élise Deroche.

Articles connexes

Liens externes

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