Athérosclérose
L'athérosclérose (du grec athêra signifiant « bouillie »[1] et scleros signifiant « dur ») est une maladie touchant les artères de gros et moyen calibre et caractérisée par l'apparition de plaques d'athérome.
Spécialité | Cardiologie |
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Symptôme | Athérome (en) |
CIM-10 | I70.9 |
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CIM-9 | 440 |
DiseasesDB | 1039 |
MedlinePlus | 000171 |
eMedicine | 1950759 |
MeSH | et D050197 D058226 et D050197 |
MeSH | C14.907.137.126.307 |
L'athérome correspond à un remaniement réversible[2] de l'intima des artères de gros et moyen calibre (aorte et ses branches, artères coronaires, artères cérébrales, artères des membres inférieurs) par accumulation segmentaire de lipides, glucides complexes, sang et produits sanguins, tissus adipeux, dépôts calcaires et autres minéraux. Il est entre autres responsable de la maladie coronarienne.
Les veines ne développent pas d'athérome car elles ne sont pas soumises à la même pression hémodynamique[3], sauf si elles sont déplacées chirurgicalement pour servir d'artères, comme lors d'un pontage aorto-coronarien.
Formation
L'artère normale est constituée de trois parties, l'intima (endothélium, couche monocellulaire tapissant la lumière du vaisseau et séparant le sang du reste de l'artère), la media (couche musculaire lisse) et l'adventice.
L'athérome débute par une « strie lipidique », simple dépôt de graisse, linéaire et sans conséquence pour le flux, située entre endothélium et média. Avec le temps, cette strie peut grossir, se charger en lipides, en fibrinogène, en plaquettes et autres cellules sanguines et en calcium pour constituer la « plaque d'athérome ». Celle-ci devient plus ou moins importante et peut diminuer suffisamment le calibre de l'artère pour diminuer son débit. Dans ce dépôt, le cholestérol ne représente qu'au maximum 10 % de la masse totale[4]. La partie dure, obstructive du dépôt est due à 70 % au calcium et au fibrinogène.
Il existe deux types de complications :
- la première, d'évolution longue, est due à sa croissance lente, gênant de plus en plus le passage du sang jusqu'à l'empêcher totalement par obstruction ;
- la seconde, rapide et responsable des complications aiguës, consiste en la rupture de l'endothélium : la brèche formée est alors obstruée par une agrégation des plaquettes sanguines et la formation d'un caillot sanguin qui peut rapidement totalement obstruer le vaisseau. Ce caillot peut également se détacher et obstruer plus en aval. La plaque peut également se détacher partiellement et obstruer également l'artère, ou plus rarement, libérer son contenu et faire une embolie de cholestérol.
Épidémiologie
L'athérome est la cause dominante de la majorité des affections cardio-vasculaires.
C'est un problème de santé publique majeur :
- première cause de mortalité dans les pays occidentalisés par insuffisance coronarienne, affections cérébrales ;
- première cause responsable des maladies et atteintes coronariennes ;
- cause majeure d'invalidité et de morbidité (insuffisance cardiaque, séquelles d'accidents vasculaires cérébraux (AVC), accidents ischémiques transitoires (AIT), artériopathie oblitérante des membres inférieurs, anévrismes aortiques, insuffisances rénales et infarctus mésentérique).
À noter que l'athérosclérose ne serait pas l'apanage de nos sociétés modernes : des lésions coronaires ont été retrouvées sur une momie égyptienne de la princesse Ahmose-Meryet-Amon[5]. On retrouve d'ailleurs des plaques d'athérome chez des gens qui ne sont pas morts d'un accident cardiovasculaire.
Anatomo-pathologie
Phénomène physiologique
L'artériosclérose débute dès la vie embryonnaire. Il s'agit d'un phénomène physiologique de vieillissement des artères, mais il est considérablement accéléré par les facteurs de risque cardio-vasculaire. Vers l'âge de 20 ans des lésions artérielles fines peuvent être observées.
Phénomène pathologique
Il débute par des infiltrations lipidiques au niveau de l'intima (stries lipidiques) entraînant un épaississement de cet intima. Puis, on assiste à une prolifération de cellules musculaires lisses et de tissu conjonctif, entraînant la formation d'une plaque instable inflammatoire.
La plaque d'athérome est constituée d'un noyau nécrotique (débris cellulaires, cristaux de cholestérol et de calcium), entouré d'une couche fibreuse (cellules musculaires lisses, cellules spumeuses, cristaux de cholestérol), avec destruction de la lame limitante élastique interne. Le cholestérol occupe 10 % seulement du volume total de la plaque. On ne peut donc pas dire que « le cholestérol bouche le vaisseau » à lui tout seul.
Les complications se manifestent par des troubles de la vasomotricité, une ulcération de la plaque d'athérome, une thrombose, une rupture de la plaque, un anévrisme ou encore une embolie.
L'évolution de l'installation de la plaque se fait en plusieurs stades :
- initiation : présence de macrophages spumeux (gorgés de cholestérol et triglycérides) dans l'intima de l'artère ;
- strie lipidique : présence de dépôts lipidiques extracellulaires (visibles même chez des bébés) ;
- plaque jeune ; constituée légèrement avant 40 ans ;
- plaque d'athérome fibro-lipidique ;
- plaque sténosante, calcifiée (rôle majeur du calcium). Constituée vers 60 ans ;
- plaque compliquée, évoluant en sténose avec de forts risques de se transformer en thrombus.
Remarque : le thrombus lui-même n'a rien à voir avec le cholestérol. Le cholestérol n'intervient pas dans l'agrégation plaquettaire ou dans le processus de coagulation. Seul un thrombus peut entraîner un accident cardiaque. En l'absence de thrombus, l'angiogenèse permet de créer des dérivations vasculaires, pour soulager le territoire recevant moins de sang de par le vaisseau partiellement obstrué.
Localisations préférentielles
- Atteinte des artères carotides (facteur de risque principal : hypertension artérielle).
- Atteinte des artères coronaires (facteur de risque principal : hypercholestérolémie).
- Artériopathie oblitérante des membres inférieurs (facteur de risque principal : tabac qui est un facteur de risque médicalement démontré au moins depuis 1906[6],[7]).
- Artères rénales pouvant entraîner une insuffisance rénale
- Atteinte des artères ciliaires postérieures, branches de l'artère ophtalmique. L’artériosclérose peut alors être responsable d'une neuropathie optique ischémique antérieure ou NOIA, elle en est d'ailleurs la principale cause.
Facteurs de risque
Facteurs de risque non modifiables
Le premier facteur de risque associé à l'athérosclérose est l'âge. Les lésions apparaissent dès la vie fœtale et sont finement visibles dès 20 ans.
Le sexe entre en ligne de compte, cette maladie atteint davantage la population masculine. Avant, on croyait que la présence accrue d'œstrogènes protégeait la femme jusqu'à la ménopause. Or, avec le traitement hormonal substitutif, on[Qui ?] a pu constater que les hormones augmentent le risque cardiaque. Il faut donc abandonner cette hypothèse que la femme serait protégée par ses hormones[8].
Le facteur héréditaire :
- l'hypercholestérolémie familiale hétérozygote atteint un sujet sur 500[réf. souhaitée].
- l'hypercholestérolémie familiale homozygote atteint un sujet sur 1 million[réf. souhaitée].
Facteurs de risque modifiables
Le tabagisme est la première cause associée au développement de complications liées à l'athérosclérose.
L'hypertension artérielle favorise fortement la formation des plaques d'athérome dans les artères carotides. C'est une grande cause d'accidents vasculaires cérébraux.
Le diabète ou la sédentarité avec les troubles métaboliques qui l'accompagnent : obésité, ou encore la consommation excessive de sel et d'alcool sont aussi des facteurs de risque.
Un taux important de lipoprotéines de basse densité (LDL, appelé « mauvais » cholestérol) favoriserait le développement de la maladie, si les LDL sont oxydés ou glycosylés.
Un faible taux de cholestérol lipoprotéines de haute densité (HDL) (< 0,4 g/l, « bon » cholestérol, facteur protecteur) est dangereux pour les artères. L'activité physique aérobie (sport d'endurance)[9] et la consommation d'aliments riches en acides gras oméga 3 (graines de lin broyées)[10] augmentent le taux de HDL.
Traitement
Préventif
Il s'agit en fait, soit d'empêcher la survenue de complication (rupture de plaque entraînant une occlusion aiguë du vaisseau), soit de freiner sa progression, voire d'essayer de diminuer sa taille.
Les antiagrégants plaquettaires empêchent théoriquement l'agrégation des plaquettes sanguines en cas de lésion de l'endothélium au niveau d'une plaque d'athérome. Les antiagrégants ayant prouvé une efficacité en termes de diminution d'accidents dues à l'athérome sont essentiellement l'aspirine et le clopidogrel.
La lutte contre les facteurs de risque est essentielle et a largement prouvé son efficacité. Il peut s'agir de mesures, dites « hygiéno-diététiques », comme l'exercice physique, un amaigrissement des sujets en surpoids, l'arrêt du tabagisme…
Il peut consister en la prise de médicaments (antidiabétiques en cas de diabète, statines pour le cholestérol et en cas de prévention secondaire). En 2009, le marché des statines était de 33 milliards de dollars[11].
En 2008, la sécurité sociale française a remboursé 1 milliard d'euros en médicaments anti-cholestérol[12].
D'autres mesures sont plus controversées ou en attente de confirmation chez l'être humain :
- selon une étude israélienne chez la souris[13], le jus de grenade permettrait de réduire les risques d'apparition de l'athérosclérose ;
- une étude mettrait en avant une influence supposée des vitamines. Le Docteur Matthias Rath prétendrait avoir prouvé que l'état de santé de personnes atteintes d'artériosclérose pouvait être amélioré grâce à un apport accru en vitamine C, en association avec la vitamine E, la vitamine D, la proline, la lysine, l'acide folique, la biotine, le cuivre, le sulfate de chondroïtine, le N-acétylglycosamine et le pycnogénol[14],[15], mais ce n'est pas la thèse la plus communément admise par la communauté scientifique.
Traitement curatif
En cas d'obstruction ou de rétrécissement artériel important par de l'athérome, trois types de geste peuvent être proposés, le choix reposant sur l'artère atteinte et le terrain :
- un pontage chirurgical permet de dériver le sang en aval de la plaque d'athérome responsable des signes ;
- une angioplastie peut être faite : un ballonnet est introduit dans l'artère, gonflé au niveau de la plaque qui est écrasée contre la paroi artérielle, ce qui permet la levée de l'obstacle. Le risque principal est la récidive de la sténose, fortement diminuée par la mise en place d'un stent, petit ressort métallique, et par la mise sous antiagrégants plaquettaires ;
- l'ablation chirurgicale de la plaque peut être également proposée. Elle est faite essentiellement au niveau d'une sténose carotidienne.
Évaluation des traitements lors des essais médicamenteux
Le but principal est la diminution de la morbidité (nombre d'accidents) et de la mortalité cardio-vasculaire. Ce résultat est parfois difficile à mettre en évidence car nécessite un suivi régulier et prolongé (sur plusieurs années, voire plus) de nombreux patients.
À plus court terme, on peut tester l'efficacité du produit testé en mesurant le rapport entre l'épaisseur de l'intima et celle de la media sur une artère carotide[16] et essayer de prouver la stabilisation de ce rapport, voire sa diminution, ce qui témoignerait d'une régression de l'athérome. Cette méthode est assez simple puisqu'elle ne nécessite qu'une échographie Doppler vasculaire. Elle est largement utilisée mais la corrélation avec une diminution de la morbidité et de la mortalité cardio-vasculaire n'est pas démontrée[17],[18].
Divers
De l'athérome a été mis en évidence sur des momies égyptiennes datant de plus de 3 000 ans, sous forme de calcifications sur les axes artériels retrouvées par un examen au scanner[19].
Selon deux chercheurs américains (2017), le vieillissement est associé à un risque accru de maladies cardiovasculaires causé par la rupture des plaques de cholestérol enflammées dans les artères, et ceci pourrait être causé par des mutations génétiques qui induisent des cancers des globules blancs[20].
Notes et références
- Galien, 2, 272 (éd. C.G.Kühn).
- Andrew A Francis et Grant N Pierce, « An integrated approach for the mechanisms responsible for atherosclerotic plaque regression », Experimental & Clinical Cardiology, vol. 16, no 3, , p. 77–86 (ISSN 1205-6626, PMID 22065938, PMCID PMC3209544, lire en ligne)
- (en) Hongqi Zhang, Aijun Sun, Yanguo Shen et Jianguo Jia, « Artery interposed to vein did not develop atherosclerosis and underwent atrophic remodeling in cholesterol-fed rabbits », Atherosclerosis, vol. 177, no 1, , p. 37–41 (ISSN 0021-9150 et 1879-1484, PMID 15488863, DOI 10.1016/j.atherosclerosis.2004.06.019, lire en ligne)
- Publicité mensongères des marchands de margarines à phytosteroles, sur le site michel.delorgeril.info : fiabilité?
- (en) Mummified princess had heart disease, sur le site boston.com
- Amouroux, Étude expérimentale, sur l'athérome tabagique. Th. Toulouse, 1906
- Abel Gy, Le tabagisme, étude expérimentale et clinique, 29 avril 1909, Faculté de médecine de Paris
- Non trouvée le 9 juin 2015, sur le site nsfa.asso.fr
- T. Spate-Douglas et R. E. Keyser, « Exercise intensity: its effect on the high-density lipoprotein profile », Archives of Physical Medicine and Rehabilitation, vol. 80, no 6, , p. 691–695 (ISSN 0003-9993, PMID 10378497, lire en ligne)
- (en-US) « What Are Flaxseed Supplements? », WebMD, retrieved 12 august 2013 (lire en ligne)
- Non trouvée le 9 juin 2015, sur le site pharmactua.com
- [PDF] Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2009, sur le site securite-sociale.fr
- (en) M. Aviram, N. Volkova, R. Coleman, M. Dreher, M. Kesava Reddy, D. Ferreira, M. Rosenblat « Pomegranate Phenolics from the Peels, Arils, and Flowers Are Antiatherogenic: Studies in Vivo in Atherosclerotic Apolipoprotein E-Deficient (E0) Mice and in Vitro in Cultured Macrophages and Lipoproteins » Journal of Agricultural and Food Chemistry 2008;56(3):1148-57. DOI:10.1021/jf071811q
- [PDF]Pourquoi les animaux n'ont pas d'attaque cardiaque...mais les hommes si! Partie 1
- [PDF]Pourquoi les animaux n'ont pas d'attaque cardiaque...mais les hommes si! Partie 2
- (en) Taylor AJ, Kent SM, Flaherty PJ, Coyle LC, Markwood TT, Vernalis MN, Arbiter: Arterial Biology for the Investigation of the Treatment Effects of Reducing Cholesterol: a randomized trial comparing the effects of atorvastatin and pravastatin on carotid intima medial thickness, Circulation, 2002;106:2055-2060
- (en) Costanzo P, Perrone-Filardi P, Vassallo E et al. Does Carotid Intima-Media Thickness Regression Predict Reduction of Cardiovascular Events?: A Meta-Analysis of 41 Randomized Trials, J Am Coll Cardiol, 2010:56;2006-2020
- (en) Lorenz MW, Polak JF, Kavousi M, Carotid intima-media thickness progression to predict cardiovascular events in the general population (the PROG-IMT collaborative project): a meta-analysis of individual participant data, Lancet, 2012;379:2053 - 2062
- (en) Allam AH, Thompson RC; Wann LS, Miyamoto MI, Thomas GS, « Computed tomographic assessment of atherosclerosis in ancient egyptian mummies » JAMA 2009;302:2091-2094
- Alan R. Tall & Ross L. Levine(2017), Cardiovascular disease : Commonality with cancer ; Nature doi:10.1038/nature21505 , mis en ligne le 22 Février 2017 (http://www.nature.com/nature/journal/vaop/ncurrent/full/nature21505.html résumé])
Voir aussi
Articles connexes
Lien externe
Bibliographie
- Hendrik B. Sager, Partha Dutta, James E. Dahlman, Maarten Hulsmans, Gabriel Courties, Yuan Sun, Timo Heidt, Claudio Vinegoni, Anna Borodovsky, Kevin Fitzgerald, Gregory R. Wojtkiewicz, Yoshiko Iwamoto, Benoit Tricot, Omar F. Khan, Kevin J. Kauffman, Yiping Xing, Taylor E. Shaw, Peter Libby, Robert Langer, Ralph Weissleder, Filip K. Swirski, Daniel G. Anderson & Matthias Nahrendorf (2016) RNAi targeting multiple cell adhesion molecules reduces immune cell recruitment and vascular inflammation after myocardial infarction Science Translational Medicine ; 08 juin 2016 : Vol. 8, Issue 342, pp. 342ra80 DOI: 10.1126/scitranslmed.aaf1435 (résumé)
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